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EAN : 9782226438447
400 pages
Albin Michel (30/01/2019)
3.2/5   76 notes
Résumé :
XXIIe siècle. À cause des bouleversements climatiques, beaucoup de zones côtières ont été englouties. Au large de pays plongés dans le chaos ou en voie de désertification, de nombreuses villes flottantes ont vu le jour. Régies par des actionnaires, elles abritent des millions de réfugiés.
Au nord de l’Islande, sur Qaanaaq, l'une de ces immenses plate-formes, arrive un jour par bateau une mystérieuse voyageuse accompagnée d'un ours polaire et suivie, en mer, p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (34) Voir plus Ajouter une critique
3,2

sur 76 notes
« Ce qui se disait : elle était venue à Qaanaq dans une embarcation que tirait une orque harnachée à la manière d'un cheval. Dans ces récits qui, dans les jours et les semaines qui suivirent son arrivée, se firent de plus en riches d'incroyables détails, l'ours blanc cheminait à son côté sur le pont du bateau éclaboussé de sang. Le visage de la femme était tendu, furieux. Elle portait une armure de combat constituée d'épaisses feuilles de plastique et de récupération. (...) Les doigts de la femme se déplaçaient, nerveux, agiles, le long de la hampe de sa lance sculptée dans une défense de morse. Venue à Qanaaq pour accomplir un effroyable crime, elle brûlait de passer à l'acte. »

Ce sont les premières phrases. Percutantes, cinématographiques, énigmatiques avec ce souffle épique qui emporte illico. Tout le scénario tourne autour d'une vengeance familiale. La distribution est soignée autour Masaaraq, la mystérieuse guerrière de l'incipit, qui ne réapparait qu'à mi-livre, très habilement alors que plane son aura.

Ce qui est incroyablement réussi ( surtout pour moi qui ne suis pas une lectrice experte de SF ), c'est son worldbuilding d'une grande inventivité. Tu es plongé dans un monde post – apocalyptique qui reprend les codes du cyber-punk qui se dévoile petit à petit jusqu'à immersion totale : Qanaaq, une cité flottante privée, contrôlée par de riches actionnaires, où s'est réfugiée une humanité migrante suite à la dévastation du monde par des catastrophes écologiques. Tout est plausible, intelligent et cohérent tant tout semble possible, pas de cyborgs ou de délires futuristes, oui le monde actuel en pleine décadence pourrait donner ça. Ce roman pousse à la réflexion sur notre monde contemporain avec beaucoup d'intelligence et de lucidité, ça en fait un roman politique fort.

Du coup l'auteur aborde un nombre fou de thèmes très contemporains qui font forcément écho, peut-être trop, certains auraient mérité plus de profondeur, mais qu'importe, on y croit : changement climatique, sort des migrants, lutte des classes, machinations politiques des méga-riches capitalistes pour conserver et accroître leur domination, homosexualité , révolte, violences ...

Il y a de superbes idées comme cette maladie des failles, proche du sida car sexuellement transmissible, qui transmet à son porteur les souvenirs de la personne qui l'a contaminée, eux-mêmes enrichis des souvenirs du contaminateur précédent en une chaîne vertigineuse. Comme le personnage de Maasaraq l'orcamancienne, issue d'une tribu qui a subi un génocide après avoir été utilisée pour des expériences médicales qui a nanolié ses membres à des animaux, ce qui en fait des êtres plus complètement humains mais hybrides. Comme ce podcast «  La ville sans plan »qui ponctue le roman avec ses allures prophétiques très poétiques.

Le point faible est sans doute les facilités scénaristiques pour rassembler les personnages principaux dans une même quête, adversaires ou alliés. L'auteur abuse de raccourcis et « hasards » un peu trop nombreux pour être réalistes. Il a également tendance à vouloir rendre la lecture plus complexe qu'elle ne devrait : il faut être très concentré pour ne pas se perdre dans les relations entre les personnages dans Qanaaq alors qu'au final, elles se révèlent très simples.
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Voilà ce qui peut arriver lorsque l'on se ballade sur une plateforme en pleine mer, parfois on se noie...

Premier roman adulte de Sam J. Miller qui officiait auparavant dans la littérature jeunesse, le fameux Yonug Adult. Et cela se ressent fortement à la lecture.
Les thématiques avaient pourtant tout pour me plaire, le changement climatique et la loi d'airain du libéralisme : l'exploitation de son prochain. Mais le traitement reste très superficiel, trop.

La cité de l'orque, c'est un riche, une idéaliste, un musclé et un jeune aux dents longues qui écoutent la radio sur île artificielle. Sur ce, arrive une légende, ... et une maladie.
Après quelques lignes accrocheuses qui nous raconte la légende et nous mettent en haleine, le reste est très long à démarrer et on commence seulement à comprendre les enjeux à la moitié du livre. Et le mythe fait vite pschitt : le personnage dont tout le monde a entendu parler, que tous cherchent est juste en train de s'entrainer à la salle de sport ! Pour le mystère, on repassera.

Le défaut principal, et unique, de ce roman, c'est la jeunesse de son auteur. Il veut trop en faire, trop dire, trop démonter. Sam J. Miller à des idées à foison, une vision politique de la société, mais cela reste un brin trop naïf. J'avais l'impression qu'il avait fait une check list de tout ce qu'il devait parler dans son bouquin :
Les logements vacants : une honte alors que tant de monde vit dans des conditions insalubres;
Le réchauffement climatique, les réfugiés, les communautarisme : c'est vendeur ;
Les internés : cela montre l'oppression de la norme, de la société;
Les coursiers à vélo : ben j'aime le vélo, donc j'en parle;
Le fossé entre pauvres et riches : c'est pas bien;
Les minorités sexuelles : trop hype;
Les ninja warriors et autres yamakasi : ils ont la classe !
Les relations homme animal : qui peut ne pas s'attendrir devant un ours blanc ?

Et donc un casting qui plaira aux opprimés, il y a de la couleur, des pauvres et comme tout bon livre qui parait actuellement, des personnages genrés. Soq est celui qui m'a donné le plus de mal, il a l'identité dans l'entre deux, donc ce sera "ils". de quoi me sortir de la lecture à chaque fois, j'avais plus l'impression d'être en face d'un schizophrène. Malgré cela, c'est le personnage que je trouve le plus réussi du livre, grâce à son ambiguïté.
Les autres personnages manquent de profondeur, et chacun, à tour de rôle, aura quelques pages, avant de passer au suivant. Leur évolution frise parfois le ridicule, comme cette chef de gang qui fait sa pleureuse devant tous les tueurs de son clan parce qu'elle vient de retrouver fiston.

Pour les scènes d'actions, ce n'est pas tellement mieux, c'est rocambolesque, et lorsque je vois des personnages tailler la bavette tranquillement alors qu'ils sont en plein assaut, j'ai l'impression de regarder un mauvais nanar : Attention les méchants, si vous pouviez attendre quelques minutes avant de nous mettre sur la gueule, nous organisons une petite réunion de famille, si vous pouvez avoir l'obligeance de respecter la seule chose qui compte dans ce bas monde.
Comme l'auteur respecte le cahier des charges du thriller, nous avons aussi le droit à quelques scènes de sexe. Moi, les scènes de cul inutile, ça me bassine grave. Ici, petite nouveauté, pas de maman et papa font un câlin, mais papa et papa font un câlin. Résultat, les scènes de cul homo me font autant chier que celles des hétéros. Mais bon, on pourra toujours mettre en avant le gay friendly.

Ce qui m'a manqué, c'est un vrai traitement des sujets, une noirceur dans l'ambiance. Les événements sont bien trop souvent téléphonés, cela manque de bagout pour construire un récit un peu plus pertinent. En forçant le trait, j'avais l'impression de me retrouver chez Disney, avec des méchants grotesques qui ne sont là que pour faire triompher le Bien. Oh qu'ils sont méchants les méchants, heureusement qu'il y a les gentils. Et la famille !
Pour un livre qui tente de casser les conventions et représentations sociales, sexuelles, j'ai trouvé ce retour au source familiale très marrant.

Au final dommage, car nous avons un roman politique sur la possibilité d'un lendemain autre qui aurait pu être intéressant. Je trouve que l'auteur a juste effleurer son univers et ses thématiques. Soit l'univers vous transportera, et vous ferez preuve de largesse devant les défauts de jeunesse, soit l'univers vous semblera un brin superficiel, et vous resterait comme moi aux portes de la cité. La cité de l'orque reste à écrire.

Lu dans le cadre d'un service de presse
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22e siècle. le monde tel que nous l'avons connu n'est plu, et le peu qui reste continue doucement de sombrer. Sur tous les continents, le réchauffement climatique, la montée des eaux et la disparition de la plupart des espèces animales et végétales ont provoqué des crises sans précédent et totalement rebattu les cartes. Alors que les pays plongent un à un dans le chaos et que leur population cherchent désespéramment un endroit sûr pour vivre, de nouvelles cités bâties sur les eaux voient le jour. Qaanaaq est l'une de ces villes flottantes, quelque part à l'est du Groenland et au nord de l'Islande. Conçue comme une sorte de projet expérimental financé par de riches actionnaires, la ville est divisée en huit Bras, autant de quartiers dans lesquels les expatriés de tous les continents s'entassent (les plus riches dans le Bras Un, les plus pauvres dans le Bras Huit). C'est sur cette île/cité que se déroule le roman de Sam J. Miller à côté duquel je suis complètement passée (et j'en suis la première navrée), au point de ne pas le terminer. Il est toujours délicat d'écrire une chronique sur un roman qu'on a abandonné en cours de route (chose qui m'arrive de manière rarissime), aussi me contenterais-je de vous exposer brièvement les éléments qui m'ont vraiment rebutée (sachant que je me suis arrêtée aux alentours de la deux centième page, soit pile la moitié). le contexte dans lequel se déroule le récit, ainsi que toutes les thématiques qu'il ne manque pas de soulever, étaient pourtant prometteurs. Les conséquences du réchauffement climatique, la stratification de la société en différentes classes, la réaction des états à la crise écologique qui s'annonce… : autant d'éléments que j'attendais avec impatience de voir développés ici. le problème c'est que, en dépit d'un cadre intriguant, je n'ai pas réussi à accrocher ni au style de l'auteur, ni à la construction narrative, ni à l'intrigue, ni aux personnages, ce qui aura finalement au raison de ma patience.

L'auteur opte pour une alternance de points de vue qui nous permet de suivre quatre personnages différents. Les quatre sont des jeunes un peu désoeuvrés, chacun gravitant dans un milieu très différent : Fill vit dans le quartier le plus huppé et voit sa vie chamboulée par l'annonce de sa contamination à un virus mortel ; Ankit travaille pour l'administration d'un des Bras et se retrouve elle aussi confrontée à des malades du virus ; Kaev fraye avec la pègre et s'est spécialisé dans les combats de boxe d'un genre un peu spécial ; Soq gravite dans les mêmes cercles et ressasse de noirs desseins. Premier problème : on peine pendant longtemps à comprendre où veut en venir l'intrigue, ni même parfois s'il y a une intrigue tout court. L'enquête menée par Ankit est intéressante, mais le parcours des trois garçons ne suscite très vite qu'ennui et perplexité. de même, on peine à comprendre la fascination mêlée de répulsion des habitants pour cette mystérieuse étrangère avec son orque et son ours à propos desquels l'auteur ne nous donne quasiment aucune information. Difficile dans ces conditions de se passionner pour la question... Les récits des quatre protagonistes sont de plus entrecoupés d'extraits d'un podcast à destination des nouveaux arrivants et se proposant de leur décrire la ville et ses coutumes. Or, le procédé est un peu maladroit : c'est presque comme si l'auteur n'avait pas su comment intégrer directement tous ces éléments dans la narration, et avait donc choisi la facilité en les en extrayant tout simplement. Pour ce qui est du style, je n'ai pas spécialement été gênée par la plume de l'auteur, en revanche j'ai eu beaucoup de mal à suivre les chapitres sur Soq qui, ne se considérant ni masculin, ni féminin, préfère qu'on parle de lui au pluriel. La chose est peut-être moins gênante en anglais, mais en français cela devient vite agaçant, surtout qu'on a l'impression qu'il s'agit davantage d'une volonté de l'auteur de s'inscrire dans l'air du temps en invoquant un personnage trans-genre que d'une véritable nécessité pour l'intrigue.

Si le roman avait des atouts pour séduire, je n'ai malheureusement pas été sensible ni à la plume, ni à l'univers, ni aux personnages de Sam J. Miller. Si vous voulez avoir l'avis plus complet de lecteurs qui sont venus à bout du roman (et qui, globalement, sont assez enthousiastes), je vous conseille de consulter les liens ci-dessous.
Lien : https://lebibliocosme.fr/201..
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N'en déplaise à certains, il y a deux genres littéraires à l'influence majeure si on veut comprendre le monde. le roman noir qui donne une photographie de nos sociétés et de leurs dérives, la SF pour extrapoler notre futur depuis cette photo.

La cité de l'orque est un thriller dystopique qui nous plonge dans un 22ème siècle où les États tels que nous les connaissons n'existent plus. Les dérèglements climatiques ont brouillé les cartes et les hommes ont terminé de semer le chaos. Loin des zones côtières submergées et des déserts intérieurs, d'immenses villes flottantes ont été construites. Qaanaaq est l'une d'elle, au large du Groenland.

Voilà bien le genre de roman qui avait tout pour m'emballer : un univers proche, post-apocalyptique. Des thématiques qui résonnent directement à nos oreilles actuelles.

Verdict : j'ai été aussi transporté que je l'espérais. La 4ème de couverture parle d'une ambiance à la Blade Runner, c'est vrai qu'on retrouve des similitudes dans l'esthétisme, je vois ça comme un vrai hommage. Et j'ai retrouvé dans ce livre ce que j'apprécie tant chez mes auteurs préférés du genre. Lanceur d'alerte comme un Paolo Bacigalupi, humaniste comme un Robert-Charles Wilson.

Sam J. Miller se définit comme un activiste et un agitateur professionnel, en dehors d'être écrivain. Cela se ressent dans son texte, même si sa manière de faire est subtile et intelligente, sans être donneuse de leçons.

Il pose un contexte et une atmosphère qui mettent en perspective les dysfonctionnements actuels par le biais de la fiction dystopique. Et ça fonctionne.

La cité de l'orque est un roman aussi divertissant que poussant à la réflexion. Sans oublier ce qui, pour moi, est essentiel dans un récit, l'aspect humain.

Qaanaaq est une cité du froid. Imaginez une plateforme pétrolière démesurée, aux contours fixes, surpeuplée. L'auteur américain dit pourtant s'être inspiré de New York, ce qu'on comprend aisément. Les conditions de vie sont difficiles, la pauvreté y est endémique, et l'écart entre les riches et les indigents y est une transposition extrême de ce qu'on connaît déjà. Ce sont les propriétaires de logements qui règnent en maître. La ville est gérée par des logiciels, quand les riches ne s'occupent que d'encaisser.

Le roman parle de nous, maintenant, en nous projetant dans un futur hypothétique mais parfaitement crédible. Il parle de notre manière de ne pas regarder les problèmes en face, de ne pas comprendre que ce qui se déroule ici et maintenant aura de terrible répercutions.

L'histoire est foisonnante d'idées qui mettent en belle évidence le lien inextricable entre les comportements et les répercutions (les changements climatiques accentuent la lutte des classes et poussent encore davantage au chaos, etc.).

Les riches thématiques sont à examiner avec une vision globale : environnemental, social, politique, économique, philosophique… Quand Miller parle de réfugiés, la problématique de son siècle prochain n'est que le reflet exacerbé du notre.

Aucun doute, le personnage principal est la ville flottante. le roman est choral et met en scènes plusieurs personnages dont les destins sont liés. Une intéressante manière de montrer l'interconnexion entre les personnes. Avec des protagonistes aux contours bien dessinés, aux caractères marqués, aux failles visibles. Sans parler du lien fort avec les animaux (une des nombreuses belles idées du livre).

En parlant de failles, voilà sans doute l'idée la plus audacieuse du roman. « Les failles » y sont une maladie sexuellement transmissible, aux symptômes et aux répercutions étonnants. Bien plus qu'une maladie…

La cité de l'orque est un roman foisonnant mais construit avec brio, sans risque de perdre le fil. Une vision réaliste et pessimiste de notre futur autant qu'un formidable divertissement, alliant rythme et surprises, réflexions inspirées et une vraie fraîcheur apportée par la jeunesse d'un auteur extrêmement prometteur. Une belle réussite pour un premier roman adulte. Sam J. Miller est à suivre de près.

A noter que le roman vient d'être sélectionné pour le prestigieux prix Nebula. Cette récompense incontournable de l'Imaginaire, attribuée par l'association des auteurs de science-fiction américains, couronne depuis 1966 les meilleurs oeuvres d'Imaginaire. Son premier lauréat fût Dune, de Franck Herbert.
Lien : https://gruznamur.com/2019/0..
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La Terre, la notre, celle fragile et trop exploitée, dans un très proche avenir.

Les dérèglements climatiques, imposés à notre monde physique en une cohorte sans fin de phénomènes devenus incontrôlables, ont conduit à une montée des eaux au-delà de la plus pessimiste des prévisions.

S'en suit un brassage migratoire des populations à la recherche des zones de survie qui restent ou qu'il faut créer.

Seules les hautes terres de jadis subsistent hors des eaux, y survit dans le luxe la frange migratoire aisée d'une humanité à la dérive. Elle a su aménager dans le luxe son nouveau présent.
L'alternative de survie du reste de l'humanité est la surface de l'eau elle-même. S'y construisent peu à peu des plates-formes flottantes, privées et immenses. Quaanaaq est de celles-ci, non loin du Groenland. Blade Runner le film, de part sa vision de la ville: tentaculaire, froide et obscure, brumeuse et inhumaine, n'est pas loin (on y vend à l'identique des bols de nouilles chaudes dans des échoppes miséreuses).
Le parc immobilier locatif privé y est source de gains énormes. Une caste, celle des Propriétaires, se greffe sur cette manne financière. Elle gère la pénurie via une politique d'appartements vides, impose des loyers prohibitifs accessibles aux seuls plus riches migrants, laisse les autres à la rue, à la mendicité, à la violence mafieuse ... et à la mort dans le froid glacial.

Les Grimpeurs, un groupuscule d'acrobates urbains, usent de leur agilité à l'escalade, tels des Yamakasi. Ils hantent à mains nues les vieux containers maritimes, rouillés et empilés au hasard dans les quartiers miséreux; les façades vertigineuses des buildings des quartiers luxueux et les hauteurs de la Tour du Placard (lieu d'isolement forcé des décastés que la cité génère immanquablement).

Quaanaaq n'a plus de pouvoir politique central conduit par des humains, la gestion en est déléguée à une entité informatique sans âme, à une nuée de logiciels, de bots,d'instruments virtuels ... etc. L'idée originelle était de rejeter les opportunistes politiques véreux .... si ce n'est que les algorithmes sont manipulables et que les malwares (et autres nuisances) peuvent prendre l'aspect de la légalité .

Les Failles: maladie létale à court terme, sexuellement transmissible. La victime est contaminée par un porteur qui lui-même le fut par un autre...etc. Les signes cliniques: le patient voit sa personnalité et ses souvenirs squattés par celles et ceux qui l'infectent. Il y a superposition des passés, des modes de pensée, des réflexions ..etc. Poly-schizophrénique, la victime meurt au coeur d'une position psychique intenable. le SIDA, autre thème d'actualité pris en compte, n'est pas loin.

Les "nano-liés": membres d'une tribu presque disparue, fruit d'expérimentations médicales, se "nanolient" à des animaux. Chaque individu, à l'occasion d'une cérémonie rituelle, entre en symbiose presque totale avec l'animal de son choix: orque, singe, ours polaire, oiseau ... etc

Et c'est avec eux que je reviens au prologue de l'ouvrage:
" Ce qui se disait : elle était venue à Qaanaaq dans une embarcation que tirait une orque harnachée à la manière d'un cheval. Dans ces récits qui, dans les jours et les semaines qui suivirent son arrivée, se firent de plus en plus riches d'incroyables détails, l'ours blanc cheminait à son côté sur le pont du bateau éclaboussé de sang ...[ ] ... Qu'elles que soient ses intentions envers Qaanaaq, l'expression de son visage ne permettait pas de deviner si ses desseins étaient funestes, ou magnifiques, ou les deux."

Une vengeance familiale se prépare. La suite appartient au récit...

Ce que j'en pense:

Quaanaaq est la star incontestable du roman. C'est une des brillantes trouvailles de l'auteur, à l'égal de celle des Failles et des Nanoliés. Chapeau à l'auteur au lu de cet aspect-là. Il y a tout du long de l'ouvrage un bourgeonnement inattendu de belles perles inventives. Elles foisonnent; mais seulement entrevues et trop ponctuellement exploitées, elles se noient hélas dans la masse. J'ai, en cours de lecture, apporté une attention égale à chacune d'entre-elles, certaines se révélèrent être des détails, d'autres des éléments primordiaux. Difficile de faire le tri des informations reçues. le background est foisonnant, complexe et cohérent, trop complexe ou trop tard emmené à sa pleine et entière compréhension.
Et c'est dommage tant le monde décrit est alléchant au coeur d'une lecture où je me suis un peu perdu.

Les évènements s'accélèrent à mi-parcours, imbriquent les unes dans les autres les pièces du puzzle humain qu'est le destin étonnant, et prenant, des "nanoliés" au sein de ce monde apocalyptique.

L'auteur se pose en activiste social réfléchi, impliqué dans l'écologie, les problèmes migratoires, le quart-monde ... et maints domaines tatoués dans l'actualité immédiate. Il nous sert une réflexion vertigineuse sur ce qui nous attend si, toujours debout sur les freins, nous ne réagissons pas MAINTENANT.

PS:Lecture bouclée, je me pose une question étrange: j'ai désormais toutes les clés du récit en tête, le relire s'imposerait presque de manière à apprécier pleinement tous les détails dont il foisonne, les ayant désormais hiérarchisés dans leurs importances respectives. Et en ce sens, au fil du temps, de son lectorat: "La cité de l'orque" risque de devenir culte.

A noter qu'une nouvelle gratuite, issue du même monde, est accessible en version numérique sur le Net via le site de l'éditeur.

Merci à Albin Michel Imaginaire, Babelio et Masse critique.

Ps: une mention spéciale à l'illustration de couverture que je trouve particulièrement belle et en parfaite adéquation avec le récit.
Lien : https://laconvergenceparalle..
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Nous n’aurions pas dû être de ce monde. Nous étions la preuve vivante que des crimes horribles avaient été commis par quelqu’un qui, habilement, avait su réveiller les passions meurtrières d’une bande d’intégristes armés jusqu’aux dents. Nous étions une abomination, leur racontait-il, une insulte à la loi divine, qui dit que l’humanité doit avoir le pas sur les animaux. Ces crétins, bien sûr, ne furent que trop heureux de gober ça, trop heureux de faire porter le chapeau à un groupe d’individus qui avaient le malheur d’être différents et qui ne voulaient qu’une chose : qu’on leur fiche la paix. Des siècles plus tôt, ç’avait été les immigrés, les Noirs. Il y avait toujours des boucs émissaires. C’était sur ces fondations que ce pays s’était construit, Je t’ai tout pris, et maintenant, je t’explique que c’est de la faute de ton voisin, car il n’a pas la même tête que toi.
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L'argent est un esprit. La plus ancienne des intelligences artificielles. Ses directives premières sont simples, sa programmation témoigne d'une créativité inépuisable. Les humains lui obéissent sans réfléchir, avec un empressement jovial. L'argent, tel un virus, se soucie peu de tuer son hôte. Il se fraiera un chemin vers l'hôte suivant, dont il prendra le contrôle.
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Tu viens d'arriver ici. Tu es submergé, effaré. N'aie pas peur.
Ferme les yeux. Je suis là.
Pince-toi bien le nez. L'odeur d'ici n'est pas celle de ta ville. Tends l'oreille, en revanche : toutes les villes produisent ce chaos sonore. Avec un peu de patience, tu finiras même par entendre ta langue.
Il n'y a pas de plan ici. Tu n'as pas besoin de plan. Tu n'as pas besoin de mode d'emploi. Seulement de récits. Raison de ma présence.
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Plus personne ne voulait investir dans le marché new-yorkais. Les banques se défilaient. Les investisseurs étrangers se volatilisaient. Soudain, le placement capitaliste le plus sûr était fragilisé. (pp.194-195)
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Ce qui se disait : elle était venue à Qaanaaq dans une embarcation que tirait une orque harnachée à la manière d’un cheval. Dans ces récits qui, dans les jours et les semaines qui suivirent son arrivée, se firent de plus en plus riches d’incroyables détails, l’ours blanc cheminait à son côté sur le pont du bateau éclaboussé de sang.
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