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EAN : 9782841004959
641 pages
Bartillat (08/03/2012)
4.79/5   7 notes
Résumé :
En un tableau saisissant, Jacob Burckhardt (1818-1897) décrit dans La Civilisation de la Renaissance en Italie la plus grande révolution culturelle de l'Occident moderne. Son essai - répondant à La Renaissance de Michelet - compte parmi les chefs d'oeuvre historiques du XIXe siècle. Burckhardt a profondément influencé notre manière de percevoir la Renaissance en insistant sur l'émergence de nouvelles formes politiques autour de la Cité et sur l'affirmation de l'indi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
"Semblable à la flamme qui suit le feu partout où il remue, partout l'esprit suit sa forme nouvelle."
(Dante, La Divine Comédie, le Purgatoire, Chant XXV)

Comment aborder un simple billet après avoir absorbé près de 700 pages flamboyantes de Jacob Burckhardt sur la Renaissance italienne ?
Si le sujet vous intéresse, vous devez tout simplement lire le livre : rien que pour découvrir quelle mauvaise farce ont joué Léon X avec le cardinal Bibbiena au secrétaire papal, quels prénoms étaient en vogue à la Renaissance, quelle nation était un synonyme de saleté pour les Italiens, quelle forme métrique convenait le mieux pour chanter les maladies vénériennes, à quoi ressemblaient les bibliothèques privées de l'époque, ou quelles choses répugnantes dissimulaient les nobles Italiennes dans leurs armoires.

J'avais bien apprécié "L'Automne du Moyen Âge" de J. Huizinga, et sachant que le concept de cette mosaïque raffinée, censée saisir la mentalité de toute une époque, était emprunté au livre de Burckhardt, j'étais très curieuse de découvrir son modèle.
L'ouvrage date de 1860, et même si les historiens modernes peuvent lui reprocher un manque d'objectivité, ce pavé reste une mine d'or pour les passionnés, et un livre-clé pour les futures recherches sur la Renaissance.
Basé uniquement sur des sources, le livre n'est pas seulement un merveilleux cabinet de curiosités qui essaie de relier le contexte social et politique à la spiritualité, l'art et la littérature. C'est aussi une agréable et amusante lecture, profonde par l'approche humaine de l'auteur et par un certain détachement accompagné par-ci, par-là d'une remarque personnelle sur la nature humaine qui fait sourire le lecteur.

J'ai presque l'impression que la fresque de Huizinga sur le Moyen Âge déclinant a été écrite comme une contrepartie de ce riche portrait de la Renaissance peint par Burckhardt, car ce dernier est persuadé que sans le contexte italien qui a formulé l'individualisme intellectuel et créatif, l'avènement de l'"uomo universale" n'aurait pas été possible.
L'être humain s'ouvre enfin à la compréhension de lui-même, à la réflexion critique et à l'ironie, en "déchirant le voile médiéval, tissu de foi et de préjugés, d'ignorance et d'illusion". Même si on sait que la frontière entre les deux époques est loin d'être aussi nette que l'auteur la présente, on peut facilement comprendre sa fascination pour l'Italie effervescente qui s'éveille à une nouvelle forme de pensée "moderne".
On redécouvre la culture antique sans pourtant la reproduire machinalement (sauf quelques divertissantes exceptions rhétoriques, poétiques et épistolaires) et on est ébloui par de grands esprits qui sortent de l'anonymat. Un véritable système de "stars" est né : la popularité de certains artistes "couronnés" frôle l'adoration, mais reflète aussi l'esprit de compétitivité générale, que ce soit dans l'art, les sciences ou les explorations maritimes.
Il ne faut pas oublier les facteurs politiques et militaires : la création des cités-états représente selon Burckhardt la fin de "l'immaturité infantile" du passé médiéval, propice tout au plus aux massacres désordonnés. Il voit des changements bénéfiques dans la nouvelle sorte de politique pragmatique et rationnelle, ce qui ne l'empêche pas de nous livrer avec délectation quelques anecdotes sur des alliances et rivalités, conspirations et trahisons. Mais aussi sur la toute nouvelle passion pour les statistiques, ou - pêle-mêle - pour les armes à feu.
Autre spécificité de la Renaissance italienne est le changement d'attitude envers la religion. L'individu avec sa foi personnelle devient sceptique envers les dogmes, ce qui lui permet de libérer son esprit et prendre des distances par rapport aux immuables autorités, sans pourtant dénigrer la foi comme telle. Vous découvrirez dans le pape Léon X un passionné de livres à l'humour ravageur, en Alexandre VI le reflet des prophéties de Savonarole, mais aussi des hommes saints, prédicateurs et anachorètes. Les noms illustres défilent, de Dante, en passant par Pétrarque, Pic, Machiavel ou Le Pogge jusqu'au très sarcastique Cellini et tant d'autres.

Après avoir préparé son esquisse générale, Burckhardt se lance avec la même charmante volubilité dans les détails : mode, hygiène, cosmographie, astronomie et alchimie, fêtes et spectacles, médecine, sujets de conversation à la mode... ou encore les brigands et les meurtriers, et finalement aussi les croyances et superstitions, augures, magie et sortilèges qui n'ont rien a envier ni à l'antiquité ni au "ténébreux" Moyen Âge.
Le "Zeitgeist" d'une époque somptueuse, mais marquée en même temps par de grandes tensions sociales et une crise religieuse est parfaitement saisi.
Je me sens malheureusement bien moins douée pour évoquer dans ce billet toute la richesse de l'ouvrage. Il ne me reste qu'à le recommander chaudement. 5/5
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critiques presse (1)
Un tableau magistral qui, dans son genre, demeure indépassé par sa manière d’éclairer l’interdépendance entre les disciplines – peinture, sculpture, architecture – et de souligner la singularité de chacune d’elles, tout en montrant le rapport intime et fécond qui existait entre le pouvoir politique et religieux et la création artistique.
Lire la critique sur le site : LeSpectacleduMonde
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
En effet, ce n’étaient pas seulement des condamnés qui s’étaient expatriés ; des milliers d’individus avaient abandonné volontairement le sol natal, parce que la situation politique ou économique était devenue intolérable. Les Florentins qui avaient émigré à Ferrare, les Lucquois qui étaient allés s’établir à Venise, etc., formaient des colonies entières.
Le cosmopolitisme qui se développe chez les exilés les plus heureusement doués est un des degrés les plus élevés de l'individualisme. Comme nous l’avons dit plus haut, Dante trouve une nouvelle patrie dans la langue et dans la culture intellectuelle de l’Italie ; il va même plus loin quand il dit : "Ma patrie est le monde en général !" — Et quand on voulut lui permettre, à des conditions humiliantes, de revenir à Florence, il répondit : "Ne puis-je pas contempler partout la lumière du soleil et des astres ? Ne puis-je pas méditer partout sur les plus grandes vérités, sans pour cela paraître devant le peuple et devant la ville comme un homme obscur et même couvert d’ignominie ? Je ne manquerai même pas de pain !" C’est avec un noble orgueil que les artistes se vantent d’être libres de toute entrave locale. "Il n’y a que celui qui a tout appris, dit Ghiberti, qui ne soit un étranger nulle part ; même sans fortune, même sans amis, il est citoyen de toutes les villes ; il peut affronter et dédaigner toutes les vicissitudes du sort." Un humaniste réfugié à l‘étranger dit de même : "Il fait bon vivre partout où un homme instruit établit sa demeure."
("L'état italien et l'individu")
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Le pape Nicolas V, le Pogge, Giannozzo Mannetti, Niccolo Niccoli et d’autres savants célèbres étaient eux-mêmes des calligraphes distingués et n’admettaient que les belles copies. Le reste du travail, même à défaut de vignettes, était extrêmement élégant, comme on le voit particulièrement par les catalogues de la Bibliothèque Laurentienne avec leurs gracieux entrelacs. Quand on copiait pour de grands seigneurs, on n’employait jamais que le parchemin ; à la Bibliothèque Vaticane et dans celle d’Urbin, les reliures étaient uniformément en velours cramoisi avec ferrements d’argent. Étant donné le respect qu’on professait pour le contenu des livres et qu’on voulait montrer aux yeux par le soin matériel qu’on apportait à leur confection, il est facile de comprendre que l’apparition de livres imprimés n’ait pas eu de succès d’abord. Les émissaires du cardinal Bessarion rirent en voyant chez Constantin Lascaris le premier livre imprimé, et se moquèrent de cette invention "qui était née chez les barbares, dans une ville d’Allemagne" ; Frédéric d’Urbin "aurait rougi" de posséder un livre imprimé.
Quant aux malheureux copistes - je ne parle pas de ceux qui gagnaient leur vie à ce métier, mais de ceux qui, pour avoir un livre, étaient obligés de le copier - ils saluèrent avec enthousiasme l’invention allemande, malgré les dissertations et les poèmes qu’on fit en leur honneur, malgré les voix qui les encourageaient à continuer leurs nobles travaux.
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À la rigueur, on pourrait passer ce pontificat sous silence dans un livre qui traite des formes de la culture italienne, car les Borgia sont aussi peu Italiens que la maison régnante de Naples. Alexandre s’adresse en espagnol à son fils César, même quand il lui parle en public ; lors de la réception qu’on lui fit à Ferrare, Lucrèce portait le costume espagnol, et ce furent des bouffons espagnols qui la saluèrent de leurs chants ; les serviteurs de confiance de la maison sont tous Espagnols ; de même les soldats les plus décriés de l’armée que conduisait César dans la guerre de 1500 ; son bourreau, don Micheletto, ainsi que son empoisonneur en titre, Sébastien Pinson, semblent avoir été des Espagnols. Entre autres exploits, César abat un jour, dans une cour fermée comme une arène, six taureaux indomptés, suivant toutes les règles de l’art cher aux Espagnols. Quant à la corruption, que cette famille a portée à son apogée, elle l’avait trouvée déjà très-développée à Rome.

("L'état au point de vue du mécanisme")
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Les fêtes
Si nous rattachons l'étude des fêtes à celle de la vie sociale, ce n'est pas par caprice d'auteur. L'art et la magnificence que l'Italie de la Renaissance déploie dans les fêtes qu'elle donne, n'ont pu se produire que grâce à la vie en commun de toutes les classes, qui d'ailleurs forme aussi la base de la société italienne.
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