Spécialiste du genre, Frantini reste là dans le domaine du thriller numérique. Mais il délaisse son personnage phare, Ylian Estevez, au profit d'un adolescent des banlieues, Samir.
Orphelin de mère, Samir vit dans l'ombre des personnalités fortes de la famille, son père, maçon très respectueux, et son frère, jeune rebelle à honnêteté friable. Solitaire, timide, et peu porté sur les études, Samir étouffe dans un quotidien terne sans perspectives.
Mais un jour, tout change lorsque son frère Rachid lui confie un ordinateur portable volé qu'il ne peut déverrouiller. Un lien étrange se noue entre l'adolescent et la machine, un lien qui apportera drames et lumières pour changer toute sa vie.
Tout en conservant son univers de prédilection, Frantini s'essaye à un ton nouveau, moins technique, plus profond. On s'attache à se personnage de Samir qui renvoie face à face les grandes idéologies sur les jeunes français issus de l'immigration.
Frantini s'invite à sa manière dans un sujet de société, avec comme toujours, une trame narrative énergique et une réflexion en toile de fond.
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— Tu as beaucoup de clients ? demanda monsieur Martinot.
— Non, et puis les applis ne se vendent pas cher, c’est pour les téléphones portables.
— Tu en as un ? Dans ce cas, il faut me donner le numéro pour l’inscrire sur le CV.
— Je n’en ai pas, mon père dit que ça ne sert qu’à dépenser de l’argent inutilement.
— Mais, répondit le tuteur, comment fais-tu des programmes pour téléphone sans en avoir un toi-même ?
— Ce n’est pas nécessaire, il y a un émulateur sur l’ordi, je peux simuler tout ce que fait un utilisateur de téléphone.
— Et il n’y a jamais eu de problème ? De bugs ?
— Non, jamais, dit Samir, je programme proprement.
— Ce n’est pas ce que je voulais dire, je pensais qu’il risquait d’y avoir des différences entre l’émulateur et le vrai téléphone.
— Il y en a peu, et quand il y a un risque, je m’arrange pour l’éviter, puisque j’ai pas de téléphone. Mais à l’école, il y en a un ou deux qui ont déjà utilisé mes programmes, j’en ai entendu parler.
— Ils t’ont félicité, j’espère !
— Ils ne savent pas que c’est moi, Internet, c’est anonyme.
Un rictus marqua le visage de Monsieur Martinot. Il haussa les épaules et continua à taper le CV.
— Il n’empêche, maugréa-t-il, qu’il parait étonnant d’accepter de gagner de l’argent avec les téléphones sans en avoir un soi-même.
— L’argent va sur le compte de mon père, et Leïla, ma sœur, compte les sous qui sont à moi. Elle m’a dit que quand j’en aurais assez, si je le veux, je m’achèterai un téléphone avec un abonnement. Mais moi, pour l’instant, je n’en ai pas besoin, j’ai l’émulateur, et personne à appeler.