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David Lisnard (Autre)
EAN : 9791037021595
250 pages
Hermann (23/11/2022)
3.88/5   4 notes
Résumé :
Chacun d’entre nous le constate dans sa vie privée, professionnelle ou dans l’espace public, une tendance à la bureaucratisation de nos vies est en cours. Elle se matérialise par une inflation de règles et de normes contraignantes, de protocoles à respecter, de mesures et de procédures à suivre. Même dans nos démocraties occidentales, réputées respectueuses des libertés individuelles, les administrations ont subtilisé, au nom de l’intérêt général, le pouvoir aux res... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
PERCUTANT et ARGUMENTE

En 10 chapitres bien structurés, Frédéric Masquelier analyse le phénomène de la bureaucratie.
Pour commencer, un bref rappel historique relate les différentes formes d'administration : en Égypte, les scribes archivent les écrits (scribouillards), Rome possède une administration puissante pour collecter l'impôt, la monarchie absolue est centralisée, François 1er avec l'ordonnance de Villers-Cotterêts instaure le français pour tous les documents administratifs y compris l'état civil, Richelieu, Colbert, Napoléon (inflation de fonctionnaires obéissants), la révolution française " le pouvoir politique change mais l'administration reste" ...etc.
La révolution industrielle offre la prospérité, la santé, l'instruction. On a foi en la raison et en la croyance dans le progrès.

Tout va bien (Les 30 glorieuses sont une période faste) jusqu'à la bascule !

La bascule arrive avec le 1er choc pétrolier en 1973. Depuis 1974, les comptes publics sont en déficit. La dérive de la bureaucratie a des effets néfastes comme
- le découragement des forces vives (fuite des chercheurs, baisse des effectifs à l'hôpital, dans la police et l'enseignement),
- la fabrique des gilets jaunes (l'état contraint toujours plus)
- trop de privilégiés déconnectés de la vie réelle

Pourtant, la bureaucratie est utile et permet la continuité de l'état : souvenons-nous de la Belgique qui est restée 290 jours sans gouvernement. Max Weber (1864-1920) économiste et sociologue allemand, explique que la bureaucratie (prusse) est intègre et disciplinée contrairement au politique qui est associé à l'abus et l'usurpation.

L'auteur Frédéric Masquelier qui a été récompensé de la Marianne d'Or de la République en octobre 2022 pour sa politique de lutte contre la bureaucratie, décrit à merveille les dérives de la bureaucratie. J'ai eu tendance à souligner de nombreuses idées tant elles sont bien expliquées (voir les citations).

L'administration garantit l'État de droit, le politique assure la démocratie.
Mais il y a dérive quand
- la bureaucratie accélère la centralisation du pouvoir "tout se décide en haut" cf période Covid ou les collectivités locales ont été ignorées. (L'État ayant le budget ...(Taxe d'habitation).
- le cloisonnement des bureaux, le cloisonnement des informations et le jargon ne simplifient pas la compréhension et l'efficacité.

À cela, il faut ajouter l'immobilisme et l'irresponsabilité (l'administration n'est pas responsable : "le roi ne peut mal faire"). Chacun se souvient du refus persistant de François Mitterrand de reconnaitre la responsabilité du gouvernement français dans la collaboration, ce que corrigea avec dignité Jacques Chirac en 1995.

Mais ce n'est pas tout : Il y a la dérive financière.
Le phénomène du 1000 feuilles : à chaque élection, il se crée une nouvelle administration avec un directeur "ami" sans pour autant supprimer l'ancienne. C'est grave et on peut reprocher aux élus de ne pas s'intéresser aux débats budgétaires. Chaque année, 90% des dépenses sont reconduites mécaniquement !

À cette liste à la Prévert, il faut ajouter les Normes, Procédures, Certifications avec l'émergence des experts et cabinet-conseils privés choisis et non pas issus des concours (voir citation page 164).
L'automatisation informatique termine de déshumaniser les rapports que le citoyen est en mesure d'attendre de l'administration.

Le constat est sévère et très souvent appuyé par des exemples concrets vécus par le maire de Saint-Raphaël.
Devant le monumental problème, il est temps que le politique (qui est élu) se reprenne en main, oublie un peu sa "carrière" pour se consacrer aux difficultés de notre vie citoyenne actuelle et future !

La conclusion de Frédéric Masquelier :
C'est pourquoi j'ai écrit ce livre : pour encourager chacune et chacun à ne pas se résigner devant les pesanteurs d'un État malade qui peine à se réformer.
Ce sont bien nos libertés qui sont en jeu.

Merci à Babelio et les Editions Hermann pour cette belle lecture édifiante !

Essai à lire sans modération !
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Frédéric Masquelier, maire de Saint-Raphaël avertit contre la dérive actuelle de l'administration : la bureaucratie ; laquelle tend à imposer son dictat. Nous avons affaire à une prise de pouvoir de l'administration, un dépassement de fonction pris par la bureau (cratie) du latin Kratos, pouvoir.

Or, cela est une dénaturation de l'administration puisque cette dernière non élue démocratiquement n'a pas pour fonction de définir l'intérêt général mais d'appliquer les orientations voulues par le pouvoir politique ; qui lui, est issu d'un processus démocratique.

C'est ce dépassement de fonction qui est décrit dans l'ouvrage au travers d'exemples concrets des vicissitudes de l'édile d'une ville.

Notons néanmoins, que l'auteur n'est pas opposé à la raison d'être de l'administration, elle est nécessaire dans un état de droit et sert à faire respecter la loi. D'ailleurs elle constitua un élément majeur depuis l'Egypte ancienne en passant par la Rome antique dans l'édification d'Etats forts capable de soutenir une civilisation, au travers d'une hiérarchie solide et d'une neutralité imposée aux scribes, aux fonctionnaires.

Historiquement, la dénaturation fut permise d'une part, par l'émancipation de l'administration du pouvoir politique, et d'autre part, par le changement de conception du fonctionnaire désormais recruté selon ses compétences, son expertise par le biais de concours, lequel n'étant plus seulement un serviteur zélé du pouvoir politique.

Or, le pouvoir politique a abandonné une partie de ses prérogatives et l'administration est venu combler presque naturellement ce vide avec ses propres mécanismes et fonctionnement. Normalisation, égalitarisme et création endémique de normes.

Dès lors, il est urgent que le politique reprenne avec courage ses prérogatives qui lui sont dévolues constitutionnellement et applique de ce fait une politique humanisante.
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Écrit par un homme au coeur même du système bureaucratique (le maire de St Raphaël), cet essai présente ce que peut être les limites d'un monde bureaucratique. Les français ont l'habitude de râler contre l'administration, l'auteur décide de réfléchir sur son origine, son pourquoi, ses dérives et pourquoi pas quelques solutions. Très agréable à lire avec ces multiples exemples, sourcé tant historiquement que politiquement, je lui reproche tout de même d'être orienté politiquement, et partial sur certains exemples. Mais c'est un essai, c'est le principe.

J'en ressors toujours convaincue que les règles, les normes et l'administratif à sa raison d'être, mais certaine comme l'auteur que certaines de ces règles devraient un peu plus se frotter au monde du réel, au lieu de ne servir plus qu'à entretenir le monde administratif…
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Les cabinets de conseil.
Il est pertinent de se demander pourquoi l'État qui dispose avec les hauts fonctionnaires des serviteurs de grandes qualités, une partie de l'élite de la nation, n'est pas capable de faire sa propre analyse ?

Tout est sur la table, la Cour des comptes possède une expertise qui vaut bien celle des meilleurs auditeurs, Bercy avec l'inspection générale des finances connait tous les arcanes de l'État, l'armée est experte en logistique, le réseau d'ambassades, de consulats et les services de renseignements sont réputés... cette compétence se déclinant sous différentes formes, dans tous les corps.
Des études et des rapports…etc... complètent le champ de l'expertise de l'État.

Quelle est la plus-value de ces cabinets de conseil ?
Par qui sont-ils pilotés ?
Quelle est leur véritable dépendance ?
page 164
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Domaine des autorisations d'urbanisme
... une opération simple (comme construire sa maison) peut devenir très complexe si tout le monde veut y ajouter son grain de sel et peser à son niveau de compétence. En effet, celui qui souhaite obtenir un permis de construire doit le soumettre à la vérification par un service communal de sa compatibilité aux normes prises dans le cadre d'un plan local d'urbanisme (PLU) qui doit être conforme au schéma de cohérence territorial (SCOT) lui-même conforme au schéma régional de développement durable du territoire (SRADDET), lequel aura intégré les données du schéma régional de cohérence écologique (SRCE), sans oublier les normes réglementaires et légales du code de l'urbanisme prévoyant l'interdiction de l'artificialisation des sols .../... et la DDTM ou la DREAL...
page 111
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Bref, personne n'a franchement intérêt à réduire les effectifs de la fonction publique ou le train de vie de l'État et des collectivités locales.

Les politiques ont rarement le courage de mener les réformes nécessaires ; les administrations sont rarement favorables à un changement de régime qui les mettrait à la diète ;
les électeurs sont rarement satisfaits des plans d'austérité.
page 144
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La bureaucratie et l'argent.
La situation est connue : la France est très endettée, trop, en dépit du niveau d'imposition parmi les plus élevés au monde.
Elle ne peut donc plus dépenser sans compter, et cela génère des tensions à tous les niveaux. .../...
À la fin du 3eme trimestre 2021, la dette publique s'établissait à plus de 2 800 milliards d'euros - soit 116,3 % du PIB.
.../...
Le poids de l'administration est une des causes majeures de l'endettement de l'État.
page 127
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Si on parle aujourd'hui de bureaucratie, c'est parce que les bureaux, qui en sont les acteurs, sont sortis de leur rôle de simples exécutants pour exercer directement un pouvoir propre.
.../...
Au final, le constat est clair : souvent c'est l'administration qui décide à la place des politiques, et ce, sans être responsable du bien-fondé ni des conséquences de leurs actions.
Page 17
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