Merci aussi aux éditions le Verger qui, dans le cadre du partenariat avec Nota Bene, m'a permis de découvrir à titre gracieux l'ouvrage de
Bernard Nuss,
Là-Haut le Paradis.
Là-Haut le Paradis est un ouvrage original. Malheureusement, de prime abord, il semble assez difficile d'en parler parce que, pour bien l'apprécier, il faut absolument ne pas en dévoiler la fin. le problème, c'est que l'originalité du livre réside pour une bonne part dans cette fin gigogne.
L'intrigue en effet aurait plutôt des airs de déjà vu : un groupe d'amis, avec tout ce que l'expression recèle de rancoeurs, de frustrations, de coucheries dissimulées, de déceptions et de lassitudes, un groupe d'amis donc décide de fêter le Nouvel An dans un chalet de montagnes. Bien isolé, comme il se doit. L'auteur me pardonnera si je n'ai plus en tête le nom du personnage qui a suggéré pareille Saint-Sylvestre. Mais que le lecteur sache bien que le personnage en question n'est pas une "taupe" cachée qui ne songerait qu'à attirer ses compagnons dans un piège.
Le danger arrive de l'extérieur : deux espèces d'autochtones, débraillés, hirsutes, à complètement à côté de la plaque sur leurs skis de fortune. Ils demandent un abri pour la nuit et un peu de nourriture. Comme de juste, les deux hommes deviennent très vite beaucoup plus gourmands. Mais les vacanciers ne cèdent pas : n'ont-ils pas, déjà, l'avantage du nombre ? Tout bascule lorsque Madeleine, précédant son mari, médecin retenu dans la vallée par ses gardes, rejoint le groupe : les deux "affreux" la prennent en otage et là, ce n'est plus du tout le Paradis, mais l'Enfer qui s'ouvre ...
Bernard Nuss alterne les passages à la troisième personne d'un récit classique et les monologues intérieurs, dénués de toute ponctuation, des protagonistes. Au lecteur de se repérer dans tout ça, ce qui n'est pas toujours aisé, surtout dans les premières pages. Puis, comme on "marche" dans l'histoire, on s'habitue.
La seule chose qui me tracassait (et m'agaçait, soyons franc), c'étaient les "interventions" de l'Auteur supposé du récit, un personnage arrogant, falot, prétentieux, égocentrique, une vraie caricature que le véritable auteur,
Bernard Nuss, a pris grand plaisir à croquer - cela se sent. Pour moi, ça déstabilisait l'ensemble, je ne comprenais pas : à peine commençait-on à progresser dans l'intrigue principale que, vlan ! l'Auteur réapparaissait et imposait ses affligeants délires sado-masos.
La qualité de la technique utilisée, le fil déterminé de l'intrigue, tout cela me laissait pourtant à penser que ces "interventions" avaient un but. Mais lequel ? ...
On ne le découvre que dans les dernières pages et l'habileté de l'auteur (le vrai) est telle qu'on en est tout surpris parce qu'on ne l'a pas vu venir.
En résumé,
Là-Haut le Paradis est un bon roman (policier ou non, noir ou gore, à vous d'apprécier) qui, en dépit de quelques imperfections (le caractère peut-être un peu trop convenu de certains, les comportements stéréotypés des deux "affreux", la banalité prévisible des conflits qui, peu à peu, s'installent entre les "amis"), s'efforce, avec succès et non sans malice, de renouveler le thème, si souvent traité, de l'isolement d'un groupe humain en pleine montagne, en hiver. Un travail réel sur une idée qu'il n'était pas si facile de rendre cohérente, crédible surtout. Un travail dénué de tout nombrilisme, pour le seul plaisir de raconter une histoire, et de bien la raconter. Tout ce qui manque, trop souvent, de nos jours, à tant de livres qui ont pourtant droit à la première place, dans les gondoles des super-marchés et sur les tables des libraires. ;o)