La mort suspendue est le récit d'une aventure exceptionnelle.
Joe Simpson et Simon Yates font une ascension de très haut niveau dans les Andes péruviennes, une première d'une face ardue. Une réussite malgré les conditions difficiles : ils atteignent le sommet. Mais à la descente, c'est l'accident ; Joe se casse la jambe, et ce qui ne serait qu'un banal incident dans d'autres circonstances prend à six milles mètres d'altitude une toute autre allure. Les deux amis prennent instantanément conscience du drame qui se joue. Seul, Joe est condamné. Mais si Simon reste avec lui, ils risquent très probablement d'y rester tous les deux.
Quand on commence cette lecture, on sait que Joe s'en sortira, puisqu'il est l'auteur du livre. Mais tout au long du récit, on doit se pincer pour se dire qu'on ne rêve pas, que toutes les péripéties relatées sont bien réelles. Franchement, on croirait l'histoire sortie de l'imagination débordante d'un scénariste hollywoodien tant elle est incroyable.
Le livre est composé de deux parties distinctes. Dans la première, on suit l'ascension : un récit classique d'alpinisme, bien écrit et très détaillé. Les descriptions sont très intéressantes, car les Andes offrent des paysages uniques que l'on ne retrouve dans aucune autre montagne au monde. La seconde partie est le récit du retour au camp de base, après l'accident. Récit à deux voix croisées : celles de Joe et de Simon. La culpabilité de l'un, l'alternance de périodes d'euphorie et d'abattement pour l'autre.
Joe Simpson, en plus d'être un excellent alpiniste, montre un beau talent d'écrivain. Il réussit à puiser au plus profond de lui-même pour retrouver et nous faire partager toutes les émotions qui l'ont traversé pendant cette aventure. Les heures et les jours passant, on suit son affaiblissement physique et mental, c'est saisissant de réalisme.
Le caractère exceptionnel de cette aventure et la qualité du récit font de ce livre un des grands classiques de la littérature de montagne.
Les efforts surhumains de Joe pour redescendre au camp de base montrent à quel point l'instinct de survie peut être fort. Cela m'a fait penser au récit de
Saint-Exupéry dans
Terre des hommes, quand il raconte la lutte de Guillaumet pour avancer et ne pas se laisser mourir après son accident (dans les Andes également, autre point commun), et qu'il lui fait dire : "Ce que j'ai fait, je te le jure, jamais aucune bête ne l'aurait fait."