Double huis-clos dans l'intimité de salles de toilettes, deux couples jouent les faux semblants pendant l'agonie d'une vieille tante. Fidélité, mensonges à peine voilé, mépris, preuve d'amour, vol et alcoolisme... de bien sombres sujets abordés par gestes et non dits, monologue poignant et silence durant le passage du train au loin. Ce que l'on dit, ce que l'on transmet dans un mot, un soupir ou une boîte en fer blanc, une pièce autour des légendes et mythologies familiales au moment où le deuil frappe à la porte dans l'odeur de poires faisandées et de champs maltraités.
Les annexes entre notes de l'auteur sur la mise en scène, extraits de presse ou analyse critique pour une remise en contexte dans la carrière de l'auteur apportent une mise en lumière percutante.
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Cette tragi-comédie inédite de Claude Simon, qui reprend le scénario et les dialogues de L’Herbe, interroge la capacité de tous à être vivant.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Je pense à ce corps : jamais il n’aura connu, jamais elle, jamais un homme n’aura…… Exactement comme au jour de sa naissance ! C’est comme si tout ce qui dépassait de ses robes, les mains, la figure, avait jauni, vieilli, mais qu’en dessous elle était restée comme au premier jour : avec cette grosse tête disproportionnée qui fait qu’elle fait penser à un nouveau-né, vous savez : tout de suite, quand ils ont encore leur affreuse tête chauve et ridée de petits vieux, comme s’ils venaient au monde avec le visage qu’ils auront le jour de leur mort, hurlant, épouvantés, comme s’ils savaient déjà prophétiquement tout ce qui les attend… (Un temps.) Tout ce qui NOUS attend !… (Un temps.) Oui. La vallée de larmes… (Un temps.) Comme si Dieu nous envoyait sur terre avec le visage que nous aurons quand il nous rappellera à lui. Comme si quelque part il y avait ces interchangeables têtes ridées et qu’on les reprenne simplement chaque fois pour les remettre telles quelles sur un corps neuf sans même prendre la peine d’effacer les traces de tout ce qu’on a souffert.
Bon Dieu ! Ce qu'une femme peut devenir... Épouser une porcelaine de Saxe et se retrouver quarante ans plus tard avec une pièce jacassante peinturlurée de toutes les couleurs de l'arc-en-ciel...
Avec Marc Graciano, Maylis de Kerangal, Christine Montalbetti & Martin Rueff
Table ronde animée par Alastair Duncan
Projection du film d'Alain Fleischer
Claude Simon, prix Nobel de Littérature 1985, est plus que jamais présent dans la littérature d'aujourd'hui. Ses thèmes – la sensation, la nature, la mémoire, l'Histoire… – et sa manière profondément originale d'écrire « à base de vécu » rencontrent les préoccupations de nombreux écrivains contemporains.
L'Association des lecteurs de Claude Simon, en partenariat avec la Maison de la Poésie, fête ses vingt ans d'existence en invitant quatre d'entre eux, Marc Graciano, Maylis de Kerangal, Christine Montalbetti et Martin Rueff, à échanger autour de cette grande oeuvre. La table ronde sera suivie de la projection du film d'Alain Fleischer Claude Simon, l'inépuisable chaos du monde.
« Je ne connais pour ma part d'autres sentiers de la création que ceux ouverts pas à pas, c'est à dire mot après mot, par le cheminement même de l'écriture. »
Claude Simon, Orion aveugle
À lire – L'oeuvre de Claude Simon est publiée aux éditions de Minuit et dans la collection « La Pléiade », Gallimard. Claude Simon, l'inépuisable chaos du monde (colloques du centenaire), sous la direction de Dominique Viart, Presses Universitaires du Septentrion, 2024.
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