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EAN : 9782757831397
944 pages
Points (09/01/2014)
4.05/5   33 notes
Résumé :
« Il était voué, subtilement et irrévocablement condamné au monde d’ombres dont il sentait constamment la proximité… » Harcelé par le fisc, l’ancienne gloire de la philosophie Peter Mickelsson se réfugie dans un hameau perdu de Pennsylvanie. Là, dans une vieille bâtisse prétendument hantée, il entame l’écriture de son grand œuvre. Mais des silhouettes rôdent dans la campagne alentour, une voiture le file, son nouveau foyer est cambriolé… Ces étranges événements sont... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
D'abord écrivain adulé et respecté par ses pairs, John Gardner commet à leurs yeux l'irréparable en publiant un essai dans lequel il expose sa conception de l'art d'écrire et de la littérature et se permet de critiquer ouvertement ses coreligionnaires qui ne le lui pardonneront pas.
Incompris, l'écrivain se renferme sur lui-même, se réfugie dans l'alcool. Il divorce, se remet en couple avec une jeune femme qui pourrait être sa fille. Malgré les bonnes ventes de ses premiers ouvrages, John Gardner est sans cesse sans le sou et se retrouve dans le collimateur de l'IRS. Hanté par la mort de son petit-frère dont il se croit responsable, il parvient néanmoins à vaincre un cancer et à poursuivre ses activités littéraires. Il se jette à corps perdu dans un dernier roman qu'il veut être le symbole et la démonstration de sa propre vision de la littérature. Il s'y implique jusqu'à faire de son personnage principal son alter ego.
« Mickelsson, c'est moi, dira Gardner. Mais je ne crois pas être aussi fou. »
A sa sortie, La Symphonie des spectres passera inaperçu. Son auteur trouve la mort peu après dans un accident de moto.


Peter Mickelsson est un professeur de philosophie réputé qui a connu le succès et la reconnaissance grâce à de nombreux ouvrages qu'il a publiés. Son divorce lui fait tout perdre : son foyer, sa renommée, ses amis et collègues, sa prestigieuse université.
Il parvient néanmoins à trouver un poste dans une petite faculté. Bien qu'il n'y soit pas contraint, Mickelsson reverse la quasi intégralité de son salaire à son ex épouse qui continue à mener grand train. le peu d'argent qui lui reste part dans l'alcool. Les ennuis financiers commencent et Mickelsson survit grâce à ses chèques en bois et la confiance des commerçants locaux. Lassé du taudis qui lui sert d'appartement, il va même jusqu'à acheter une maison à retaper, une très belle maison à l'écart dans les montagnes. Mais des bruits circulent au sujet de cette maison. Dans le pays, on la prétend hantée.
Mickelsson entre alors dans une danse avec ses fantômes. Sa belle vie passée revient le hanter, les souvenirs d'enfance, de ses parents, ses obsessions : l'alcool, les femmes, l'IRS le tourmentent, il cherche désespérément à trouver un sens à sa nouvelle existence dans de nombreuses réflexions philosophiques sur lesquelles plane l'ombre de Martin Luther et Nietzsche. Peu à peu, grâce à ses nouvelles relations et ses échanges avec les étudiants, il se remet en question. Pensant être un homme exemplaire à l'éthique irréprochable, ses principes et convictions s'ébranlent et s'effritent.

La Symphonie des spectres est un roman monumental que je n'hésite pas là à qualifier de chef d'oeuvre. C'est un roman extrêmement riche et complexe. Riche par la pluralité de thèmes qu'il aborde. le contexte est celui des élections présidentielles opposant Carter à Reagan. John Gardner retranscrit l'atmosphère de ce moment particulier évoquant les attentes et les craintes de la population ainsi que les grands enjeux politiques, économiques et sociaux. On retrouvera alors la grande question de l'énergie nucléaire à travers le fils de Mickelsson, militant écologique, et également des déchets toxiques à travers le problème des décharges sauvages. Sur le plan social, c'est le sujet de l'avortement qui est mis sur la table ainsi que les problèmes de cohabitation entre les différentes communauté. J'ai appris ainsi pas mal de choses notamment sur les Mormons. A l'université, les marxistes font entendre leur voix et demandent à ériger la sociologie en science indépendante d'autres disciplines. La querelle entre les départements de sociologie et de philosophie fait rage.
C'est aussi la description de la vie dans une petite ville de montagne avec la mentalité de ses habitants, leur comportement vis-à-vis de l'étranger, leurs superstitions, les légendes et croyances. Ainsi vous croiserez des sorciers, des ovnis, le bras armé d'une secte et des serpents à sonnette.
Roman fantastique, sociologique, La Symphonie des spectres est aussi un thriller. le précédent propriétaire de la maison de Peter est mort dans d'étranges circonstances. Mickelsson apprend qu'il menait une enquête et va vouloir en savoir un peu plus. Mais quand la curiosité pointe son nez, les cadavres s'amoncellent.

Et à travers ce contexte fourmillant, Peter Mickelsson dont le comportement suscite de plus en plus d'interrogations. Qu'en est-il de ses fantômes dans sa maison ? Sont-ils dus à ses hallucinations liées à la consommation excessive d'alcool ? Ou bien à un don de préscience ? Ou Mickelsson ne serait-il pas tout simplement fou ?
John Gardner, s'identifiant partiellement à son personnage, nous invite à une véritable dissection psychologique. Dans les remerciements, il mentionne Joyce Carol Oates dont on connaît le talent et la profondeur psychologique qu'elle donne à ses personnages. John Gardner ne procède pas autrement et va encore plus loin. Il pousse son personnage au-delà des frontières qu'il s'est fixées à lui-même, celles de la moralité. le résultat est bluffant et digne d'un roman de Dostoievski ( et je n'exagère absolument pas !)
Quant au style, j'ai souvent pensé à Philip Roth. John Gardner est un tantinet aussi bavard mais quelle plume ! Quelle précision !
Bourré de références littéraires et philosophiques, la lecture de la Symphonie des spectres n'est pas facile, parfois déroutante en particulier lors de longues digressions dont on ne semble pas voir le bout. Les profanes en philosophie comme moi risquent de s'y perdre notamment lorsque l'auteur nous invite à assister aux cours du professeur Mickelsson et aux débats qu'il engage avec ses étudiants. Mais quel régal lorsqu'on a la force de tenir et de poursuivre son chemin ! Quel choc de voir ce personnage s'embourber dans ses problèmes, d'assister ainsi, impuissant, à sa propre autodestruction.
Le lecteur est prisonnier du cerveau torturé de Mickelsson, on s'y perd complètement et on ne sait plus que croire. le personnage nous laisse perplexe tant il semble s'obstiner dans le malheur alors que les solutions sont à portée de main. Mickelsson nous entraîne avec lui, malgré nous, dans cette danse macabre.

Je ne peux donc que vous conseiller la lecture de ce roman magistral à l'atmosphère si troublante et dont on ressort complètement envoûté.

« Mickelsson s'enterrait volontairement dans les dettes et le chaos financier. Cela entrait dans sa colère contre l'ensemble du monde, contre die Welt, dans le sens particulier à Heidegger : la société, les valeurs et les exigences traditionnelles. Que cela lui plût ou non, il se sentait pareil à Gulliver chez les Lilliputiens. Il avait daigné se comporter comme monsieur Tout-le-monde, achetant ce que la télévision lui disait d'acheter, donnant à sa femme ce que sa position d'épouse de professeur exigeait, et le résultat était qu'il se retrouvait pareil à un géant ligoté par des ficelles. Plutôt que de couper ces liens un à un, avec une patience de fourmi, il préférait mourir sur place et pourrir sur la colline à laquelle il était attaché, en espérant que sa douce puanteur chasserait les Lilliputiens de leur île. »

Lien : http://cherrylivres.blogspot..
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Après une déchéance matérielle et sociale (divorce douloureux et ruineux, départ de ses enfants, difficulté récurrente à boucler ses fins de mois), une incapacité de retrouver l'élan intellectuel qui l'avait propulsé sur le devant de la scène philosophique avec un essai devenu référence des années plus tôt (se contentant de cours dans une université de seconde zone), Peter Mickelsson veut changer de vie dans un sursaut rédempteur.
Patatras, son choix l'amène dans une grande maison mystérieuse située dans une petite bourgade au fin fond des montagnes. Atmosphère troublante d'une amérique profonde traversée pas des croyances (son nouveau lieu de vie -Susquehanna - serait l'endroit où Joseph Smith - fondateur de l'église mormonne - aurait eu la révélation de Jean Baptiste) heurtant les principes philosophiques de Peter.
Pour être franc, la lecture est parfois difficile: bourrée de références philosophiques dans des discussions réelles avec ses étudiants, collègues ou imaginaires avec d'autres, une grande dose d'abnégation est parfois nécessaire. Par contre malgré cela, le plaisir d'être au bout du chemin (comme Peter) est indéniable.
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Un livre culte est souvent un secret bien gardé. Celui-ci, je l'ai découvert en furetant ici sur Babelio et je me rallie aux initiés. Tout à la fois, roman de campus et roman rural, roman philosophique, psychologique, politique, fantastique, satirique, à suspense et j'en passe, La symphonie des spectres est une entreprise littéraire hallucinante.

Difficile de résumer l'intrigue en quelques mots. Pendant plus de 900 pages, on suit de très près, grâce à une narration à la troisième personne focalisée, Peter Mickelsson, un professeur de philosophie de cinquante ans, un intellectuel, ce qui ne l'empêche pas d'avoir quelques idées rétrogrades. Il s'est exilé depuis peu dans une université de seconde zone dans l'état de New York, à la frontière de la Pennsylvanie où il fait l'acquisition d'une vieille maison soi-disant hantée, malgré ses finances catastrophiques. En gros, il se trouve à un tournant de sa vie et il galère.

Il faut parfois s'accrocher. Pour ma part, je manquais notamment de connaissances sur les pensées des philosophes allemands, Martin Luther et Nietzsche en tête. Il faut aussi être attentif. Chaque nouvel élément peut prendre la forme d'un morceau du puzzle à assembler. Et des personnages et des thèmes il y en a beaucoup, des mormons au nucléaire, en passant par le nazisme. Mais le plaisir de lecture ne m'a jamais quittée, cramponnée que j'étais à notre antihéros. Comme le souligne l'auteur dans ses remerciements, « J'ai fait tout ce que je pouvais pour lui, mais ce type est dingue ».
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Rarement un livre m'a plongé à ce point dans des sentiments si contraires. Pour commencer j'ai mis très longtemps avant de m'immerger complètement dans l'histoire, et quand j'ai pris ma vitesse de croisière (après un bon quart du livre!) j'ai pu goûter pleinement toutes les facettes du personnage malgré des moments de doutes quant à ma compréhension!
Oui, j'ai cru bien souvent ne rien comprendre, obligée de revenir en arrière afin de repartir sur des bases solides...c'est que les fantômes qui rôdent dans ce roman finissent aussi pas nous mettre la tête à l'envers! Peter Mickelsson est, de plus, un personnage si multiple et qui passe si rapidement d'un état à un autre qu'il m'a souvent laissée désemparée.
Cependant plus j'ai avancé dans ce récit, plus j'ai été happée par l'atmosphère mystérieuse et folle qui s'en dégageait. Et si de nombreux personnages font la part belle à l'histoire, le lieu, la montagne, ses habitants et ses mystères m'ont paru être des "adversaires" à la mesure de l'originalité -folie?- de Peter.
Je viens de refermer le livre. Comme c'est le rôle des fantômes que l'ont y croise, je pense que je suis envoûtée pour quelque temps par ce magnifique roman. Philosophie, politique, poésie, intrigue, cette somme littéraire mérite bien une relecture.
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Ce livre avait été fortement conseillé dans la librairie où je l'ai trouvé... Moi qui adore les romans américains je me suis donc empressée de l'acheter pour le lire...

Malheureusement je ne le recommanderais pas. Des pages et des pages et des pages pour parler d'un professeur enfermé dans sa solitude avec une vie plutôt insignifiante... Dommage car ce livre me semblait prometteur.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Non, ce qu’il ressentait, et avec la force d’une sensation physique ou d’une secousse, c’était plutôt, lui sembla-t-il, cette vieille question à la fois embarrassante et chérie des philosophes : la fugacité du temps. Les jours, les mois, les années, si vivants qu’ils fussent, sombraient dans le néant. Les verts étés sans fin de son enfance dans le Wisconsin, puis ses années d’études à la fois joyeuses et anxieuses (il se souvenait des caractères et même de la texture du papier du Kant qui l’absorbait dans son coin de la bibliothèque), puis vingt ans d’enseignement – mais surtout, en plus affreux, cette longue plage de temps passé avec Ellen… Tout ce temps ensoleillé et lourd d’événements se ratatinait, pour ne laisser que quelques cailloux à l’arête coupante, quelques images figées dont toute émotion a été vidée, ou qui ne contiennent plus que le spectre, exsangue et à face d’enfant, de l’émotion…
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Certains prétendent que poser la bonne question est la réponse.
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