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EAN : 9782366240023
32 pages
Cambourakis (05/06/2013)
4.36/5   35 notes
Résumé :
« Cher lecteur solitaire, fatigué, sensible, je t’invite à glisser cette lettre dans l’encoche du livre que tu trouveras en librairie le 23 octobre 2013. Tu sais pourquoi. »
László Krasznahorkai

Conçu sous la forme d’une lettre au destinataire non identifié, ce texte au ton étrangement prophétique - un homme, Korin, entre dans un buffet de gare et délivre par bribes un message énigmatique, dont la solennité contraste avec l’environnement miteu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
fin...comme fin du monde, fin du monde tel que nous le connaissons, fin de tout, fin du bien et du mal, telles sont les tristes prophéties qu'adresse cet homme, venu d'on ne sait où alors qu'il rentre dans un bar sans rien commander à boire. Non, il parle, regarde un autre homme fumer, retenir très longuement la fumée dans sa bouche avant d'en recracher la fumée, comme si lui aussi avait déjà compris que tout était fini et qu'il tentait, à travers ce geste, d'en retarder au maximum l'échéance. Un texte qui se présente sous la forme d'une carte postale que l'on ouvrirait mais que l'on aurait immédiatement envie de refermer après en avoir lu le contenu, tant celui-ci s'avère extrêmement dur. Les phrases sont extrêmement longues, avec de rares signes de ponctuation, comme si l'auteur lui-même voulait dire le plus vite possible, enfin écrire, ces terribles présages qu'il annonce ici, en finir au plus vite.

C'est un ouvrage que l'on m'avait offert il y a quelques années et dont je remettais sans cesse à plus tard la lecture comme si moi aussi, je pressentais que, malgré la beauté de l'ouvrage et son originalité qu'un message affreux se révélait être enfoui en-dessous, ce qui s'est bel et bien avéré être le cas mais il n'empêche que c'est une lecture que je ne peux que vous recommander, même si elle ne paraît pas facile d'accès au premier abord. Un ouvrage court mais très puissant par la force des mots et parfois, il n'est guère besoin d'en dire plus ! Aussi, je pense que je relirai très certainement ce dernier un jour mais en attendant, je vais me replonger très certainement dans une lecture beaucoup...beaucoup plus légère !
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Un homme arrive dans le bar d'une gare routière. Il veut boire un verre. Mais il n'y a pas de barman, seulement un homme qui joue en fumant à créer des volutes de fumée. L'homme s'adresse à lui et lui explique que c'est fini, les médiocres ont gagné. C'est pessimiste au possible et à la fois très beau.

C'est court. Cela bouscule, mais c'est avant tout très bien écrit.

Décidément, Krasznahorkai n'est pas facile d'accès. Ce bref opuscule ne le dément pas. Mais j'ai vraiment aimé la manière de décrire cette déchirure de l'homme.
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Dans un décor pitorresque et assez minable, (un bar aux allure de hangar, incandescent, sous un plafond de néons), au beau milieu d'une nuit de mois de mars, vers la fin du XXième siècle, Korim, un homme qui semble avoir erré depuis des jours, professe a un autre homme accoudé au comptoir une vision du monde a venir. D'aprés Korim, d'autres ont gagné. Ces autres, ils méprisent et veulent faire disparaitre la noblesse, la grandeur et l'excellence. Et alors dans le monde a venir il n'y aura plus ni bien ni mal.

Ce long discour dont je tairais le dénouement et les évènements qui le ponctuent, s'articule sur la Dualité. La dualité du bien et du mal, la dualité de l'ombre-poésie et la raison-lumière et par la même, la dualité esprit/matière. les aiatolas de la raison pur ou du matérialisme intégral, du "(ce qui est) est ce qui est vrai" ont détruit la dualité inhérente à l'ordre du monde mis en place dans les temps anciens. Et pour ce faire, ils n'ont pas décrété ce qui est bien ou mal, mais ils ont assimiler le bien au mal, et alors il n'y aura plus ni bien ni mal. Ils ont asssimilé la matière à l'esprit, et alors on ne distingue plus la poésie de la raison, et alors, on ne distingue plus l'ombre de la lumière.

Le récit poétique et métaphysique de Kraznahorkai, présenté par lui même comme une préface à Guerre et Guerre qui sortira en Octobre 2013 est d'un pessimisme déconcertant. le discours prophétique de Korim aussi instructeur que décourageant est professé parmis le sordide et le minable et lui confère alors un grand desespoir.

Merci à Joëlle Dufeuilly la traductrice qui nous rend accessible cette littérature d'une façon qui, bien que je ne sois pas conscient des enjeux de la traduction (qui plus est du hongrois), m'emporte totalement.
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La venue d'Isaïe de László Krasznahorkai est l'un de ces grands textes dont la fécondité ne se mesure pas au nombre de pages, à l'instar du Centre perdu de Zissimos Lorentzatos et d'Agonie d'agapè de William Gaddis, tous deux évoqués sur ce blog, mais aussi, bien sûr, de l'un des textes de l'auteur lui-même, intitulé Thésée universel.
Troublante coïncidence, le propos des trois auteurs est sensiblement identique, puisqu'il s'agit de dénoncer une époque ayant perdu tout repère, s'étant effondrée sur elle-même, ou ayant, en somme, perdu son centre, l'horizon eschatologique que postule le thème central de l'apocalyptisme (et l'un de ses corollaires, la dérision, l'inversion, la parodie) étant évident, surtout chez Gaddis et l'écrivain hongrois.
Lien : http://www.juanasensio.com/a..
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Je vous ai déjà dit tout le bien que je pense du roman "Guerre et guerre" de l'écrivain hongrois László Krasznahorkai. Ce que je vous avais caché jusqu'à présent, c'est qu'à la fin de ce récit, l'auteur invite le "lecteur solitaire, fatigué et sensible" à prolonger son plaisir en découvrant, en complément, "La venue d'Isaïe"...

Après une première recherche infructueuse en librairie, j'ai laissé cette recommandation se nicher dans un recoin de mon esprit, jusqu'à ce que la lecture récente d'un autre titre de l'auteur suscite une furieuse envie de renouer avec l'intense émotion qu'avait provoquée en moi celle de "Guerre et guerre".

J'ai donc fait l'acquisition de ce très court texte, qui se présente comme une lettre dans son enveloppe qu'aurait postée László Krasznahorkai à un destinataire non identifié...



On y retrouve Korim, le héros de "Guerre et guerre", dans un bar miteux, enfumé et quasiment désert. Seuls s'y trouvent un couple de clochards hideux et d'une saleté repoussante, ainsi qu'un homme que son mutisme dote d'un caractère mystérieux voire un peu inquiétant, auquel Korim s'adresse comme si le sort du monde dépendait de lui.

Pendant que les vagabonds se livrent à de répugnants ébats, il lui transmet les conclusions d'un désespérant constat : l'aboutissement d'une entreprise menée par l'homme, avec le concours indirect de Dieu, pour corrompre le monde. de mystérieux ils ont ainsi tout détérioré, tout perverti, à l'issue d'un combat qu'ils ont mené sans réelle opposition, ni violence tangible, ayant annihilé toute possibilité pour la partie adverse de le mener. Pour cela, plutôt que de détruire ou de bannir tout ce qui pouvait leur résister, ils l'ont absorbé, l'ont dissous dans la vulgarité du monde sur lequel ils régnaient. Ils se sont ainsi approprié le bien et la grandeur, ont porté ces valeurs comme une bannière, pour anéantir toute résistance. Ce faisant, ils en ont fait les objets les plus abjects qui soient.
Dorénavant, tout leur appartient : le ciel comme les rêves, l'immortalité comme le silence...

Korim exprime son incompréhension face à cette situation : il ne comprend pas le pourquoi de la disparition de cette noblesse, comme il ignore où elle est partie. D'ailleurs, son apparition comme son éradication représentent selon lui l'une des plus grandes énigmes de l'Histoire de l'humanité. Et comme celui de "Guerre et guerre", dont il est une sorte de prologue, le texte de "La venue d'Isaïe" reste muet quant à l'identité de ces énigmatiques ils, qui sont en effet davantage une représentation allégorique de la persistante omniprésence du mal que de véritables individus.

Sa brièveté peut laisser un goût de "trop peu", mais cette lettre singulière est l'occasion de vérifier si le style logorrhéique et digressif de László Krasznahorkai vous convient avant d'entamer l'excellentissime "Guerre et guerre"...

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Un tournant historique ! lança Korim alors que les quatre mots dans sa tête, telles des corneilles tournoyant dans le ciel assombri, se laissaient lentement absorber par l'horizon qui se dérobait au loin.

Un tournant historique à l'échelle mondiale, dit-il, et simultanémént à cette grave sentence, et comme pour l'étayer, s'opéra un changement au niveau de son articulation, un changement somme toute normal et tout à fait prévisible, dû aux attaques et aux effets incontrôlables de l'alcool sur lui, une rupture se produisit quelque part entre son cerveau, sa gorge et sa langue, qui provoqua une impitoyable distorsion lexicale. Car si jusqu'ici les mots se brisaient sous forme de blocs de syllabes indépendants, un mouvement contraire de sable homogène s'enclencha, provoquant un embouteillage de syllabes, et la force qui jusqu'ici assurait un semblant d'ordre et de discipline s'évanouit soudain et ne resta qu'une amère nécessité, celle d'exprimer jusqu'au bout, après trois jours d'infortune passés à chercher à contacter les autorités célestes, ce qu'il avait à dire, ce que devait absolument savoir l'émissaire, enfin localisé, de ce pouvoir céleste, le lui dire comme il pouvait, c'est-à-dire en empilant les syllabes les unes sur les autres, comme lors d'un accident ferroviaire lorsque la locomotive percute les wagons à l'arrêt, avec l'espoir que son auditeur et secrétaire - céleste et terrestre -, chargé de transcrire ses propos, pourrait deviner que "trnstorque" signifiait "tournant historique", et reconnaître derrière "échlmndial" "échelle mondiale".

Jaiv...Ivnir kin ouza tndt, déclara Korim dans son tout nouveau style oratoire.

Ce qui signifiiait que le divin éclairage de la désillusion totale lui avait désillé les yeux, et qu'il "avait vu l'avenir qui nous attendait", un avenir qui l'avait, pour condenser sa pensée en un seul mot, dit-il en élevant la voix, horrifié.
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"[...] quant à l'émerveillement, à l'émotion, à la permanence des choses, plus personne ne les partageait car ils n'existaient plus, et la souffrance était telle qu'on pouvait se prendre à imaginer qu'ils n'avaient jamais existé."
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Lune, vallée, rosée, mort.
Dans la nuit du troisième jour du mois de mars de l'an 1992 de notre ère, précisément entre quatre heures et quatre heures quinze du matin, un peu moins de huit ans avant la célébration du bimillénaire de l'ère chrétienne - et donc, à certains égards, des temps nouveaux - mais dans une ambiance qui, elle, n'avait rien de festif, György Korim freina à la hauteur de l'entrée du buffet NON-STOP de la gare routière, coupa son moteur, s'extirpa de la voiture, puis, persuadé d'avoir enfin trouvé, après trois jours de divagation éthylique, l'endroit où il obtiendrait, avec ces quatre mots en tête, ce qu'il cherchait, poussa sans hésiter la porte d'entrée, se dirigea d'un pas vacillant vers le seul homme accoudé au comptoir, et, au lieu de s'écrouler sur-le-champ, compte tenu de son état, lui dit, au prix d'un terrible effort et en détachant chaque syllabe :

Mon cher Ange, cela fait longtemps que je te cherche.
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Ce qui signifiait que le divin éclairage de la désillusion totale lui avait dessillé les yeux, et qu'il "avait vu l'avenir qui nous attendait", un avenir qui l'avait, pour condenser sa pensée en un seul mot, dit-il en élevant la voix, horrifié.
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"Même si la partie adverse était invisible, voire inexistante, le combat qui vit leur victoire fut long, dit-il et au cours de ce long combat ils comprirent que pour remporter une victoire inconditionnelle il ne fallait ni détruire ni bannir tout ce qui leur était opposé, ne pas détruire ni bannir, pour employer un terme archaïque, le bien et la grandeur, mais se les approprier, et ainsi les dénaturer [...]."
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Vidéo de Laszlo Krasznahorkai
Lundi 8 août 2022, dans le cadre du banquet du livre d'été « Demain la veille » qui s'est déroulé du 5 au 12 août 2022, Yannick Haenel tenait la conférence : L'amour, la littérature et la solitude.
Il sera question de cette attention extrême au langage qui engage notre existence. C'est-à-dire des moyens de retrouver, à travers l'expérience poétique de la solitude, une acuité, une justesse, un nouvel amour du langage. Écrire, lire, penser relèvent de cette endurance et de cette précision. C'est ce qui nous reste à une époque où le langage et la vérité des nuances qui l'anime sont sacrifiés. Écrire et publier à l'époque de ce sacrifice planétaire organisé pour amoindrir les corps parlants redevient un acte politique. Je parlerai de Giorgio Agamben, de Georges bataille, de László Krasznahorkai, de Lascaux et de Rothko. Je parlerai de poésie et d'économie, de dépense, de prodigalité, et de la gratuité qui vient.
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