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EAN : 9782361885700
320 pages
Exergue (15/09/2022)
4.4/5   55 notes
Résumé :
« Deux années se sont écoulées depuis l'extraordinaire coup de massue que le monde a reçu sur la tête. Ce fameux jour, l'irréversible et terrible processus s'est enclenché sur toute la surface du globe. Pendant un temps, la Terre a semblé continuer de tourner comme si de rien n'était, et puis, neuf mois plus tard, le dernier enfant naissait dans une banlieue du Caire, le tout dernier humain. À fleur de peau, l'humanité est impatiente d'entendre la véritable histoire... >Voir plus
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L'anthropocène en mode fantastique et onirique pour faire passer le message de façon lumineuse…

Tout d'abord la petite fille sur la couverture capte votre regard. Jolie enfant semblant surgir d'un tas de feuilles mortes, un beau portrait pensez-vous simplement avant d'ouvrir le livre. Ce regard pèsera sur vous de plus en plus intensément au fil de la lecture jusqu'à vous questionner, vous interpeller. Vous vous surprendrez à regarder cette enfant de plus en plus longuement, songeur, songeuse. du simple regard tendre d'une enfant inconnue, ce regard deviendra le regard de votre propre conscience, le regard de l'enfant qui sommeille en vous, cet enfant innocent qui regarde l'adulte que vous êtes désormais devenu constitué de tous vos actes, vos actions, vos sentiments, vos bons côtés, vos facettes inavouables, toutes vos fiertés et toutes vos hontes.

La véritable histoire de Gaya Sharpe est le premier roman d'Anne Steiger, journaliste de métier. Si ce roman est une histoire particulièrement émouvante sur la relation entre un père et sa fille, c'est avant tout une fable écologique teintée de réalisme magique qui replace la question de l'homme et de son impact sur la planète au centre du récit. L'anthropocène approchée selon un angle fantastique et symbolique, selon un angle très émouvant permet ainsi à l'auteure de faire passer des messages essentiels de manière douce. Et lumineuse. Très lumineuse.

Le récit est celui du père, Louis Sharpe, un père maladroit, drôle, un peu porté sur la bouteille, qui tente tant bien que mal d'élever seul son enfant, sa femme Lili étant morte en donnant naissance à leur fille Gaya, une naissance miraculeuse et curieuse, comme si la mort de la mère avait rendu la vie au nourrisson, déclaré en effet décédé quelques minutes durant juste après être sorti du ventre. Une mort pour une vie ?
Durant sa première année de vie, Gaya est considérée par le corps médical comme une enfant lourdement handicapée, ces minutes sans vie ayant considérablement détruit une partie de son cerveau. Mais à chaque anniversaire, cette enfant va non seulement aller de mieux en mieux physiquement mais développer de nouvelles capacités cognitives, intellectuelles et émotionnelles tout à fait étonnantes…à chaque anniversaire, pendant quelques minutes, Gaya meurt pour revenir à la vie se régénérant de façon époustouflante, pour ne pas dire miraculeuse. Au fil des anniversaires, nous découvrons une Gaya tour à tour pleureuse, curieuse, violente, épileptique, généreuse, d'une sagesse incroyable, chaque changement s'effectuant de manière abrupte, comme portée par une fulgurance exponentielle. Et surtout, s'affine à chaque fois son message, de plus en plus précis quant à l'action des hommes sur la nature et en société.

« J'avais compris et ressenti ce que Gaya me répétait inlassablement depuis un an : nous étions les agents, mais aussi les destinataires de chacun de nos actes ; ce que je faisais à un homme, à un animal, un animal ou une plante avait un impact sur moi, que ce soit négatif ou positif ; quelque part, j'étais le propriétaire des émotions que je suscitais chez autrui, car cela se répercutait toujours sur moi ; j'étais responsable de tout ce que je faisais aux autres et tout ce que je faisais aux autres avait un effet sur moi, cela me constituait ; au bout du compte, nous devenions la somme de tous les petits gestes que nous avions – ou pas – pour les autres ; nous devenions tous les êtres vivants que nous avions blessés et tous ceux à qui nous avions faut du bien ; nous ne possédions que ce que nous donnions ; nos donc étaient nos seules richesses ».

Gaya est un pont, une enceinte, une métaphore, un concept, un prétexte. Elle transmet son message, distribue l'amour, prépare les hommes à la catastrophe à venir, suite à leurs propres actions aux effets délétères. le fait que ce soit une petite fille à la voix cristalline et qui zézaie donne un impact plus fort et une portée plus grande au message délivré. Parfois agacés par tant de messages alarmistes, messages que nous n'entendons peut-être même plus tant les injonctions sont parfois contradictoires, Gaya haute comme trois pommes, souvent drôle, parfois énervante, fatigante, touchante, nous sensibilise et dit l'essentiel. Ce que nous devons à la Nature, à la faune et à la flore, les actions à mener à notre petite échelle, même si celles-ci semblent si vaines à l'aune du mal qui a été fait ; elle nous questionne sur ce qu'est la mort, ce qu'est une âme, la façon dont une âme décide de s'incarner puis de se réincarner…et surtout le rôle primordial de l'amour.

Il y a ainsi des messages forts liés à l'urgence écologique entremêlés à un questionnement existentiel sur le sens de la vie, sur la mort, sur la réincarnation (il y a vraiment des passages passionnants d'ailleurs sur la réincarnation). Peut-être, et c'est pour cette raison que ce ne fut pas un coup de coeur total, cet entrelacement m'a un peu perdue, du moins perturbée. Au-delà de trouver cette concomitance un peu trop riche, sans doute cet entrelacement subtil m'a-t-il poussée dans mes retranchements, piquée, provoquée, agacement que je mettais sur le compte d'un message trop sucré, trop naïf, trop manichéen, trop prévisible…alors que tout parle en réalité de notre responsabilité et de notre action, aujourd'hui et maintenant. Mais fort heureusement, ce récit est d'une telle douceur et d'une telle lumière que très vite l'agacement ou la gêne, ont cédé la place à l'émotion. J'ai compris en refermant ce livre, le coeur au bord des lèvres, combien ces messages sont importants à transmettre mais que sans émotion, ils atteignent rarement leur cible étant sans doute trop angoissants et moralisateurs.

« Si l'on considère le nombre de choses que nous avons dans cette maison et dont nous pourrions nous priver, nous sommes riches. Nous avons un toit solide à présent et un jardin pour nous nourrir, c'est suffisant. La sobriété est joyeuse, Papa. Elle est la clef. Il faut apprendre à marcher légèrement sur Terre, discerner le nécessaire du superflu, passer de la peur du manque à l'abondance de l'être. Je pourrai t'aider à faire le tri dans tes affaires, si tu veux ».

L'écriture est simple et sans fioriture, généreuse, parfois trop généreuse d'ailleurs, à l'image de l'intrépide et infatigable petite héroïne qui fait tout pour redonner de la lumière à ce monde.
Anne Steiger déploie son message en prenant des chemins détournés surnaturels qui nous semblent aller totalement de soi, nous les empruntons avec bonheur, malgré parfois leurs longueurs liés à cette volonté de bien expliquer.
C'est dans tous les cas une écriture positive qui arrive à nous rendre l'idée de la mort beaucoup moins angoissante, voire même magnifique…Un sentiment de paix, de liberté se dégage de ce récit et ça m'a fait du bien d'accepter ainsi ce livre qui sort pourtant totalement de mes lectures habituelles. Je remercie chaleureusement Magali (@ladybirdy) pour cette jolie découverte !
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La Véritable Histoire de Gaya Sharpe - Anne Steiger - Roman - Éditions Exergue - Lu en août 2023.

Tout d'abord je vais parler de la couverture, parce qu'elle n'est pas banale. D'habitude, je ne m'attarde pas trop sur une couverture, bien que cela ait une certaine importance pour moi, mais celle-ci a immédiatement attiré mon regard, je suis restée plongée dans le regard de cette petite fille sur la photo en noir et blanc, entourée de quelques feuilles mortes. le regard de cette petite qui représente Gaya est troublant, il y a dans ses yeux un mélange de douceur, d'espoir, de lumière mais aussi 'une infinie tristesse. Encore maintenant, dans ma bibliothèque, je suis attirée par ce regard chaque fois que je passe devant.

L'histoire de Gaya, racontée par son père, Louis Sharpe est bouleversante, c'est le mot juste.

Nous sommes plongés dans la vie de Gaya depuis sa naissance jusqu'à ses sept ans. Naissance compliquée, décès de Lili sa maman peu après.

Étranges passages de la vie à la mort et de la mort à la vie,
qui auront lieu pour Gaya à chaque anniversaire, passages qui auront chaque fois aussi d'étranges répercutions sur la petite fille.

Elle a le don de parler aux animaux, aux arbres, aux rivières... à tout ce qui vit sur terre, elle a le don d'apaiser les souffrances et de communiquer avec sa mère dans l'au-delà. Gaya n'est qu'Amour.
Elle a vécu plusieurs vie en sept ans et bien avant sa naissance aussi, sous plusieurs formes.

Gaya a une mission à accomplir sur terre, celle de faire comprendre aux hommes que la Terre n'en peut plus.
Malgré ce poids qui pèse sur ses épaules, Gaya reste en apparence une enfant comme les autres.

Certains moments dans l'histoire de Gaya sont tristes, très tristes, d'autres sont lumineux, plein de tendresse et d'amour.

Cette petite fille n'est qu'Amour et c'est le message qu'elle voudrait faire passer pour que l'humanité soit sauvée, quand je dis l'humanité, ce sont les hommes, car la flore et la faune seront préservées de la terrible destruction qui s'annonce et c'est ici que nous nous posons la question de savoir si nous sommes plus intelligents que les autres formes vivantes, si notre égo surdimensionné nous donne le droit de détruire ces cadeaux que la terre nous offre pour en faire profit ou pour le plaisir.

Et bien que cette histoire soit de la fiction, je me suis dit qu'il faudrait que je me remette en question sur le sens à donner à la Vie, à toutes les formes de vie. Gaya a réussi son pari avec moi !

La Véritable Histoire de Gaya Sharpe d'Anne Steiger est un livre émouvant, troublant qui laissera des traces en moi. Vibrant, magnifique, A LIRE !

Merci de tout coeur ladybirdy pour ta chronique qui a su me convaincre de lire La Véritable Histoire de Gaya Sharpe. Je n'ai aucun regret, j'ai été éblouie par l'amour immense présent entre la petite Gaya et son père Louis.

Et peut-être entendrez-vous un jour le chant magique de la petite Gaya résonner en vous et entrerez-vous alors dans un monde de Lumière.


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Quel honneur d'avoir lu La véritable histoire de Gaya Sharpe. Les mots me manquent, je tremble et frissonne encore tant cette histoire a réveillé en moi une montagne d'émotions. Surtout, ne passez pas à côté de ce livre, il est d'une rare beauté comme on en lit peu, ce genre de beauté qui vous cueille et vous transcende des jours durants, des jours plus tard. L'histoire de Gaya trouble, émeut, conscientise, chamboule littéralement.

Quand vous ouvrirez ce livre, vous vous apprêterez à partir en voyage avec Gaya, de sa naissance jusqu'à ses sept ans, sept années ce serait le temps qu'il faudrait pour connaître toutes ses vies et les secrets des plus lumineux aux plus sombres de la Terre.

Gaya émeut, petit bout d'enfant qui va vivre au détriment de sa mère Lili qui décèdera peu de temps après sa naissance laissant à Louis Sharpe toute la responsabilité de cet enfant étrange, au destin détonnant. C'est lui, Louis qui va nous raconter l'histoire après la catastrophe mondiale survenue il y a deux ans.

Gaya, petit être de lumière qui chante, qui danse, qui chérit chaque parcelle de nature. Gaya qui veut aller vivre avec sa maman au pays de la lumière. Gaya petite fille aux dons incroyables qui fera la pluie et le beau temps de son papa.

L'auteure nous relate avec une précision cinématographique chaque année de Gaya avec son père. On la voit évoluer, grandir et s'épanouir en communion avec la lumière, la nature, l'amour. Son père aura ici lui aussi un très grand rôle. On le voit batailler ferme pour suivre sa petite Gaya mais le fil conducteur sera toujours l'amour.

Je n'en dirai pas plus sur les événements qui pimentent cette histoire. Tout dans ce livre est cadeau. L'écriture, l'histoire m'ont enveloppée dans une chaleur rarement ressentie avec un livre.

Quand j'aurai peur, quand j'aurai froid, quand je douterai, quand je pleurerai, je penserai à Gaya pour qui le don de soi, l'amour, l'empathie étaient autant de qualités pour vivre heureux et rendre heureux.

Immense coup de coeur pour ce livre magnifique à se damner.

Article complet sur mon blog avec extraits et interview de l'auteure.

Lien : https://coccinelledeslivres...
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Au départ, je me suis dis mais non Sabine ce livre n'est pas ton genre et malgré tout quelque chose me poussait à accepter l'offre de l'autrice.
J'avais des appréhensions et pourtant dès les premières lignes, l'évidence était là, il fallait que je me laisse emporter.

Cette histoire commence dans la douleur… La maman ne va pas survivre à son accouchement, juste quelques instants lui sont accordés pour regarder son enfant avant de quitter ce monde sous l'oeil de son mari.
La petite-fille elle-même va avoir beaucoup de mal, elle va se battre mais ça c'est l'histoire de la naissance de Gaya que je souhaite vous laisser découvrir car elle est particulière et accompagnera ce récit.

Son père l'élève seul et fait tout pour cette enfant qui n'est pas comme les autres pour des raisons multiples, elle a une intelligence et une perception des choses inouï.

Gaya se plaît auprès des animaux, des insectes, des arbres, pas besoin de choses superficielles.
Elle a aussi un amour inconditionnel pour son papa et sa grand-mère et sans oublier sa fidèle amie.
C'est une enfant chargée d'amour et de bonté.

L'histoire de Gaya est particulière.
Vous parler d'elle est difficile tellement elle bouleverse, je ne m'attendais pas à cela je l'avoue, un véritable tsunami cette lecture, j'ai pleuré tellement elle a réveillé d'émotions en moi.

Je l'ai lu comme un conte sur la vie, me suis émerveillée des images qui en découlent au fur et à mesure des pages.

J'ai ouvert l'oeil sur les petites choses autour de moi et me suis attendrie grâce au message de Gaya véhiculé tout au long de la lecture.

Il faut retrouver les vraies valeurs, tel est le message de Gaïa, celui qu'elle m'a susurré à l'oreille.

Êtes-vous prêt à entendre le vôtre ?

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En me plongeant dans "la véritable histoire de Gaya Sharpe", je ne m'attendais pas à être submergée par autant de sentiments.

On a envie de pleurer, de sourire, d'espérer et de regarder le monde différemment...

Dans son premier roman aux touches fantastiques, la plume d'Anne Steiger se révèle très touchante et tellement réaliste qu'il est très difficile de garder le recul nécessaire pour ne pas se laisser emporter par les sentiments se dégageant de cette lecture. Et pourtant, le personnage de Gaya, une petite fille que nous suivons depuis sa naissance est si lumineux. Comme Gaya notre mère nature, cette enfant haute comme trois pommes inspire la vie et nous rappelle l'importance de sa préservation pour les générations à venir.

Outre les questions environnementales, cette histoire évoque aussi la question de la maternité et de la parentalité. En tant que jeune maman, je n'ai pas pu m'empêcher de revivre et de comparer les premières années de la vie de mon enfant avec ceux de Gaya ce qui m'a été parfois douloureux et rappelle à quel point le temps peut passer vite.

En refermant cet ouvrage, j'ai la certitude que je garderai longtemps en mémoire ce récit qui m'a chamboulée tout en étant à la fois lumineux. Je tiens à remercier Anne et Viviane pour avoir eu l'idée de faire découvrir "la véritable histoire de Gaya" à tous les lecteurs intéressés par cette chaîne livresque et permettre de leur rappeler en parlant des choses qui nous entourent que "Tous brillent encore. En les aimant, tu verras, ils seront magnifiques."
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Carmen agissait avec moi exactement comme le faisait ma mère, m'observant du matin au soir, annotant mentalement chacun de mes faits et gestes. Elle regardait mes habits froissés de façon suspicieuse, comme si, par contagion, leurs défauts risquaient de s'étendre aux siens. Comme je refusais qu'elle repasse mes chemises, elle exigeait de moi que j'apprenne à le faire seul, comme si ces plis sur mes habits étaient responsables des malheurs qui s'étaient abattus sur notre famille. Elle était peut-être un peu pénible, oui, mais pour moi qui partais dans tous les sens, son étonnante constance me rassurait. Carmen, la citadelle aux murailles abruptes. Carmen la travailleuse. Carmen la rigoureuse. Carmen pour qui chaque chose avait sa place. Carmen Bouzin, exactement la femme dont j'avais besoin. En quelques semaines, elle devint ma cariatide, ces statues soutenant un entablement sur leur tête, remplaçant une colonne, un pilier ou un pilastre. Encombrante, certes, mais sa présence me portait. Très vite, elle assura chez nous toutes les fonctions non rétribuées de gouvernante, intendante, grand-mère et maman. Elle nous a littéralement sauvés. A ses côtés, je pus à la fois me ressaisir et me laisser aller. J'appris à l'aimer comme une mère.
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Deux années se sont écoulées depuis l’extraordinaire coup de massue que le monde a reçu sur la tête. Ce fameux jour, le mercredi 20 juillet, cette fameuse heure, 21 heures 34, l'irréversible et terrible processus s'est enclenché sur toute la surface du globe. Pendant un temps, le monde a semble continuer de tourner comme si tout allait parfaitement bien, et puis, neuf mois plus tard, le dernier enfant naissait dans une banlieue du Caire, le tout dernier humain. A fleur de peau, l'humanité est impatiente d'entendre la véritable histoire de celle qu'elle considère comme l'unique responsable de cette extinction de masse : ma fille.
(Incipit)
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Par "lumière", Gaya voulait parler d'une sorte d'auréole que nous aurions tous. Un rayonnement. Une couronne. Une aura. Un halo. C'était des lumières autour de nous, des courants dont les couleurs se modifiaient selon nos efforts, nos émotions ou notre état de santé. Tel un squelette, Gaya pouvait les détecter à l'intérieur de chaque humain, animal, arbre ou plante. Lumineuses, mouvantes, les colorations indiquaient la vitalité, le froid, la chaleur, la contrariété...la maladie. Une ombre tournait autour du crâne de ma belle-mère et attaquait sa lumière.
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Il était étonnant de voir Gaya parler à cette nature – elle lui parlait, oui ; elle chantait pour elle ; elle dansait même ! Et la nature lui répondait ! J’avais le sentiment, oui, que les arbres et les fleurs l’honoraient à son tour par des prévenances et des marques d’affection. Durant le printemps et l’été de ses trois ans, notre petit clos devint absolument somptueux, comme jamais il ne l’avait été, même du vivant de Lili. L’herbe épaisse était verte fluorescente et les plantations nous offraient de somptueuses couleurs acidulées. C’était un jardin Technicolor, baigné dans un vert gelée-à-la-menthe, avec ici et là de grosses tâches de jaune acidulé, de rouge grenadine, de rose barbe-à-papa, de blanc glace-au-citron, de pourpre fondant-à-la-framboise. C’étaient des couleurs lumineuses, gourmandes et vives, comme des pâtes de fruits, comme des boules de gomme, comme un monde intemporel et enchanté, avec des zones d’air doucement aromatiques et des fruits juteux et plus brillants que des sucettes léchées. Jasmin, pinède, chlorophylle, cela sentait si bon et c’était si beau que ça en avait l’air faux. Notre petite butte toute bariolée, toute coloriée, rayonnait de bonheur et de santé. Je ne savais pas pourquoi, je ne savais pas comment, mais il ne faisait aucun doute que c’était Gaya qui faisait ça.
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Quelques jours plus tôt, alors que nous allions donner à manger aux canards sous un soleil de plomb, Gaya marchait devant moi sur le petit sentier qui descendait à l’étang. Elle repéra sur le chemin pierreux inondé d’un soleil brutal un escargot qu’elle attrapa délicatement entre deux doigts pour le mettre à l’abri dans l’herbe du fossé. En regardant à l’intérieur de la coquille, elle constata tristement qu’elle était vide. Nous reprîmes notre chemin, ses petites bottes de boue soulevant des nuages de poussière. Silencieuse depuis quelques minutes, elle se tourna soudain vers moi et, d’une voix curieusement sereine et grave à la fois, elle me dit :
« Tu sais, Papa, un zour, tu mourras. Mais ce qui est vraiment triste, tu verras, c’est que tu reviendras. »
Et pendant que mes jambes allaient et venaient mécaniquement, en une cadence beaucoup plus lente que les petits pas sautillants de mon enfant, je compris que Gaya parlait de la mort comme personne d’autre. Elle n’en parlait pas comme d’une chose inquiétante qui la fascinerait, l’interrogerait ou l’inquiéterait, non. Elle en parlait comme quelque chose de familier et de rassurant, quelque chose qu’elle connaissait. Ma fille connaît la mort, me disais-je ce jour-là sans trop comprendre.
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