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Bernard Cucchi (Traducteur)
EAN : 9782264047953
416 pages
10-18 (17/09/2009)
3.77/5   13 notes
Résumé :
Un an et demi après l'"affaire Raskolnikov", Porphiri Pétrovitch, le juge d'instruction qui a mené l'enquête du double meurtre de Crime et Châtiment, plonge à nouveau dans une affaire criminelle où le mystère semble insoluble.
Durant l'hiver 1866, la découverte, sous la neige du parc Pétrovski, d'un homme pendu aux pieds duquel gît un nain au crâne ouvert, dissimulé dans une valise, provoque la perplexité de la police de Saint-Pétersbourg.
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
R.N. Morris est né à Manchester en 1960. Quand il publie en 2007 « A gentle axe », ouvrage de 410 pages, traduit en français et publié en 2009 dans la collection 10/18 sous le titre de « L'âme détournée », il n'en est pas à son premier ouvrage.

L'histoire ? Durant l'hiver 1866, deux cadavres gelés sont découverts à Saint-Pétersbourg, dans le parc Petrovski : Borya, un paysan, pendu à la branche d'un arbre, et Goriantchikov, un nain gisant aux pieds du pendu, le crâne fendu d'un coup de hache, dissimulé dans une valise recouverte par la neige. S'agit-il d'un suicide dicté par le remords ou d'une mise en scène macabre ? Certains points sont troublants : Borya ne porte pas les signes habituels de la pendaison (yeux injectés de sang, bleus liés à la strangulation) et, s'il avait trucidé le nain, comment expliquer que son manteau ne porte pas de taches de sang sur le devant, et pourquoi cette trace de hache située juste sous le noeud qui retient la corde du pendu ? Porfiri Pétrovich, magistrat instructeur, commence son investigation, laquelle va progressivement mettre en lumière les côtés les plus noirs de la Russie du 19ème siècle.

L'auteur ne s'en cache pas : son livre est directement inspiré par « Crime et Châtiment » de Fédor Dostoïevski ; les événements décrits dans « L'âme détournée » se déroulent 18 mois après l'affaire Raskolnikov, affaire dans laquelle Porfiri Pétrovich avait joué un rôle crucial. A la dernière page du livre, R.N. Morris demande pardon à Dostoïevski pour cet emprunt, emprunt qu'il justifie par l'hommage qu'il rend ainsi à un « homme d'une grande humanité et d'un humour inattendu, un Chrétien ayant toujours eu foi en l'homme et dans la vie ». le lecteur pourra identifier la force de cet hommage aux détails suivants : d'abord, par l'emprunt de la personnalité de Porfiri Pétrovich, diable d'homme obstiné, doté d'une grande faculté d' observation, extrêmement vigilant, placide, perspicace, redoutable, doté de cils blonds et d'yeux gris métalliques, amenant les individus à se confesser à lui sans qu'il ait à faire usage de la force ou de la menace ; ensuite, tous ces personnages très typés (une jeune prostituée, un photographe, un prince Russe, un acteur qui disparait sans laisser de traces, un éditeur spécialisé dans la publication d'ouvrages philosophiques et érotiques) qui personnifient de grandes idées ou de grands principes intellectuels, des êtres difficiles à percer avec exactitude, contradictoires, ballotés par la vie, un rien torturés et se jouant de l'image qu'ils véhiculent, tels des espions devisant dans un salon bien fréquenté, fascinants, complexes mais fragiles ; puis, l'épisode du monastère Optina Pustyn, qui rappelle le soutien que le Père Ambroise prodigua à Dostoïevski alors que l'écrivain venait de perdre son plus jeune fils, Lyosha, mort d'une crise d'épilepsie à l'âge de 3 ans. R.N. Morris a selon toute évidence été marqué par le destin de Dostoïevski : alors que Fédor lisait à haute voix, au cours d'une réunion d'intellectuels libéraux, une lettre du critique Belinsky adressée à Gogol, un espion participant à cette réunion rapporta les faits au gouvernement, ce qui valut la peine de mort à Dostoïevski, peine heureusement commuée en déportation dans un bagne Sibérien. Dostoïevski y découvrit la vraie nature humaine, faite de fragilité et de noirceur. Concernant Porfiri Pétrovich, s'il y a emprunt, ceci ne prête pas à conséquence, et comme le disait R.N. Morris à un journaliste : « You might call it a victimless crime. The idea of raiding a classic for characters, themes and structure isn't new and isn't improper. My goal is not to be Dostoyevskian, but to be Dostoyevsky-like ». Mais l'auteur confesse avoir été également influencé par Sherlock Holmes et par Colombo. Chez le premier, il puisa la matière et les ressorts de toute enquête policière de qualité ; le lecteur pourra en juger par le suspense qui le tiendra jusqu'à la dernière page de « L'âme détournée ». Quant au second, R.N. Morris confesse ce qui suit : « I had Lieutenant Colombo in mind when I came to re-create my own Porfiry ». Et il est vrai que sous l'oeil affuté de notre ‘Colombo-bis', nous découvrons la réalité des hommes dans leurs moindres détails, y compris physiques : au 19ème siècle, on vous observait de la tête aux pieds et on trouvait une profonde signification au fait que vous ayez de petites mains ou de grandes oreilles, l'anatomie étant considérée comme un marqueur indiscutable de la destinée humaine.

R.N. Morris nous livre dans « L'âme détournée » un entrelacs de vices et de noirceurs, une fiction d'un autre siècle, une histoire horrible et macabre, bien ficelée, pas trop compliquée, sans fausses notes, sans caricatures (les fonctionnaires en prennent toutefois pour leur grade) , avec un rien de psychologie et force détails, un roman efficace, riche et fascinant qui, par certains côtés vous rappellera peut-être les écrits de Charles Dickens. Je mets cinq étoiles, et je recommande à tout lecteur sachant « apprécier un bon meurtre ».
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Polar se situant en Russie dans les années 1860, l'hiver pour ajouter du froid et de la froideur aux relations entre services ; enquête menée par le juge d'instruction Porphiri Petrovich suppléé parfois par la police quand cela se révèle obligatoire et imposé.
us et coutumes, moeurs russes sont abordés dans ce roman et dans un pays où il ne fait pas bon avoir un avis.

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Il faut être audacieux pour se servir du héros de Dostoïevski ! Mais ce premier roman est une réussite.
La Russie du XIXe siècle est bien décrite. Les personnages sont intéressant. On se promène volontiers dans ce St Petersbourg sous la neige.
L'intrigue est également bien ficelée.
Bref, c'est un régal et j'attends la suite avec impatience !
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Ce polar historique m'a transportée du début jusqu'à la fin. Notre auteur a été audacieux en utilisant un personnage illustre d'un roman non moins illustre : Crime et Châtiment. Nous retrouvons ici toute l'atmosphère de la Russie de la fin du 19ième, son système judiciaire, ses intrigues et surtout ses personnages torturés et si singuliers. Mais l'âme détournée ce n'est pas uniquement une question de forme c'est aussi du fond et, je dois dire que l'intrigue est adroitement menée jusqu'à la dernière page. J'ai donc adoré cette rencontre et me jette, d'ores et déjà, sur le second tome des aventures de notre cher Porphiri Pétrovitch.
Merci à R.N . Morris pour ce fabuleux voyage dans le temps.
Lien : http://www.athena1-lire.blog..
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Page 15 [...] Zoïa s’arrêta pour ramasser une misérable brindille. Pas le moindre bout de bois ne lui échapperait. Elle sentit le haut de son corps ployer sous le poids de son fardeau et rassembla ses forces pour résister à la tyrannie de l’attraction terrestre, appuyant le poing fermé contre sa colonne vertébrale douloureuse. […] C’est alors qu’elle le vit, devant elle, les épaules voûtées, la tête de travers. Il semblait l’attendre. Un gros homme, de grande taille, solidement bâti, avec une barbe broussailleuse très bien assortie à la corpulence du personnage. Il portait un vieux manteau de l’armée. Ses oreilles disparaissaient sous les rabats d’une casquette en peau de mouton. Il avait le visage bouffi du buveur de vodka et de petits yeux malins. Ses pieds étaient enfoncés dans des bottes enduites de goudron – les orteils flottant librement à quelques centimètres au-dessus du manteau de neige, tel un danseur dont la pirouette aurait été de façon comique interrompue par le gel. Le tronc du bouleau auquel il était accroché se pliait comme un arc. Soudain, le vent mugit. L’arbre frémit et il s’évanouit sous une rafale de neige tandis que le pendu tournoyait sur lui-même. Par terre, près de ses pieds, Zoïa remarqua un objet brun, à moitié enfoui dans la neige. Elle se signa avec deux doigts et hésita. La neige tombait plus fort et des bourrasques lui giflaient le visage. Le pendu l’effrayait, mais d’instinct elle pressentait qu’elle trouverait quelque chose d’autrement plus important que du bois de chauffage. […]
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Page 139 […] Ils remontèrent la rue Gorokhovaïa, vers le nord. La flèche de l’Amirauté étincelait devant eux, fine lame d’or perçant le ciel brillant comme en souvenir d’un crime inévitable perpétré au cœur de la cité. Le grand quartier alentour fumait et miroitait. D’immenses immeubles d’appartements occupaient les deux côtés de la rue, offrant d’innombrables rangées de fenêtres dont la taille diminuait à mesure que le regard portait au loin. Porphiri était conscient de toutes ces vies vécues derrière ces carreaux inexpressifs. A certains, cette vision faisait l’effet d’une toile de fond sur la scène d’un théâtre. Mais, à ses yeux, les façades uniformes de la ville rappelaient plutôt un rideau de pierre impénétrable. Si tragédies il y avait, c’était de l’autre côté du rideau principalement qu’elles se jouaient et non devant.
Virginski grimaça un sourire amusé en se regardant marcher gaillardement dans la neige fraiche avec ses nouvelles bottes.
- Que se passe-t-il ? demanda Porphiri.
- Oh, rien ! Sauf que vous m’avez acheté en échange d’une paire de souliers. C’est le misérable tarif auquel j’ai vendu mon âme. Non pas que j’en aie une, d’ailleurs.
- Vous ne croyez pas en l’existence de l’âme ?
- Ce n’est pas ce que j’ai dit. J’ai dit que, moi, je n’en avais pas. […]
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Porphiri. Nous sommes en Russie. Nous ne sommes pas gouvernés par la logique mais par l'autoritarisme. Vous le savez aussi bien que moi.
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