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EAN : 9782262068363
380 pages
Perrin (17/08/2017)
4.43/5   30 notes
Résumé :
Pourquoi de Gaulle refusa-t-il, en 1964, de présider les commémorations du vingtième anniversaire du débarquement allié en Normandie ? Parce qu'il se souvenait que, sans sa volonté farouche de faire échec aux plans de Roosevelt, la France ruinée de 1944 n'aurait pas été traitée autrement que l'Allemagne vaincue, privée d'une fraction de son territoire et placée sous administration militaire américaine. Pis, c'est sur une partie des élites de Vichy que, durant tout l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
De même qu'il y a des moments importants dans la vie d'un homme, il est des livres qui comptent---et comptent beaucoup--- dans son existence et sa compréhension des "choses de la vie" . Pour moi, "L'ami américain" est de ceux-là, après "Le temps de Franco" de Michel del Castillo qui m'avait obligé à une révision déchirante de mes idées sur la guerre d'Espagne (1936-1939 ), idées plutôt manichéennes où le fascisme constituait le camp du mal (qu'il continue à incarner à mes yeux) et la République le camp du bien, vision idéaliste dont je suis passablement revenu .
De même, "L'ami américain", livre historique de première grandeur ,remarquablement documenté, lève le voile sur certains épisodes de notre histoire qui méritent, même après soixante ans, d'être remis en lumière . N'oublions pas que le passé est garant de l'avenir et que "lespeuples qui oublient leur histoire sont condamnés à la revivre" (George Santayana ).
Au début de l'été 1944, j'avais dix ans(et demi) et quand j'allais, avec tous les gamins du coin, applaudir, le long de la route de Dinan à Saint Brieuc, les convois de GI filant vers l'Ouest à la conquête de Brest et leur "chiner" chewing gum, bonbons et cigarettes(oui !),je n'imaginais bien sûr pas du tout les dessous de la politique américaine de FDR,saprofonde antipathie pour De Gaulle et pour la France (ni son"amitié" pour Pétain) et je suis resté,des années durant,dans l'illusion de la grandeur et du désinteressement de la"plus grande démocratie du monde" . En somme, j'aicru à la LIBERATION , comme l'immense majorité des Français, alors que, dans l'esprit du président américain, il ne s'agissait que d'une occupation pour gagner cette guerre qui lui avait été imposée par le Japon. La lecture du livre est à cet égard édifiante et j'ai réalisé à quel point Charles de Gaulle a incarné,depuis le début (1940) jusqu'à sa mort (1970), l'esprit de résistance et d'indépendance qui a tant indisposé nos amisd'outre-Manche et d'outre-Atlantique .
Le livre est composé d'une introduction : "l'amitié du fort au faible", d'un prologue:"Roulant du haut de l'Histoire ..." puis de douze chapitres dont je ne résiste pas au plaisir de vous énumérer les titres ( une façon peu subtile de vous mettre l'eau à la bouche ) :
-Ch 1:"Notre "cher vieil ami"[si vous en doutiez, il s'agit de Pétain, non de de Gaulle]
-Ch 2 :Vichy, avec ou sans Pétain[ "Ce n'est pas à Hitler que Roosevelt fait la guerre, c'est à moi" ironisait De Gaulle ]
-Ch 3: D'une occupation l'autre? [la vilénie del'AMGOT ]
-Ch 4: La bataille de Paris [ Hitler n'était pas le seul à se battre sur deux fronts ]
-Ch 5: Les arrière-cuisines de Jean Monnet [ Les cuisines du prétendu"père de l'Europe" n'étaient pas d'une absolue propreté ]
-Ch 6:Des fellagha à l'OAS, tout est bon contre De Gaulle [Féru d'Histoire et ancien d'Algérie, j'ai appris là des choses ...que beaucoupdenosconcitoens ignorent encore ]
-Ch 7:L'impossible ménage à trois [ "Les histoires d'amour finissent mal en général", surtout à trois ]
-Ch 8: le casus belli atomique [ L'indépendance est un grand défaut aux yeux des USA ... quand elle n'est pas américaine ]
-Ch 9: René, Antoine,Jean, François, Georges et les autres [Lutter contre des adversaires,oui,mais être désavoué ou trahi par les siens...ou prétendus tels ]
-Ch 10:Le grand réglement de compte de l'an 1968 [ Avec, là encore, quelques révélations étonnantes ]
-Ch 11: La symphonie inachevée [ Ou requiem pour unrêve d'indépendance ]
-Ch 12: Pompidou,l'héritier qu'on n'attendait pas [ Pompidouet Sarkozy me font penser aux deux héros de Chester Himes: Cercueil et Fossoyeur ,par rapport au "gaullisme" dont ils se prétendaient l'incarnation ]
Epilogue : Oublier deGaulle.
Pour nous,lecteurs de 2017, cet épilogue constitue le plus important du livre, si on a déja bien lu ce qui précède . Les successeurs du général, de Pompidou à Hollande en passant par Giscard et Mitterrand ont détricoté le travail d'indépendance,Chirac restant un peu à part, surtout en s'abstenant ! Mais le pire a été Sarkozy,fossoyeur d'une "France aux mains libres"qui prenait comme un compliment d'être surnommé"l'américain" .
A lire donc,et à méditer
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Voilà pour moi le document historique le plus renversant de ces dernières années.
Eric Branca nous raconte une guerre, inconnue du grand public, menée sans relâche par les USA contre la France depuis 80 ans. Pas de morts dans cet affrontement d'influence mais des coups fourrés, des manipulations, de la corruption côté américain, de la faiblesse, de la naïveté et de la bêtise côté français. Tout ce que la France et les USA ont compté d'hommes politiques ont joué un rôle dans cette guerre mais qui pourrait toutefois se résumer à De Gaulle vs USA.

Dès 1940 les ennuis commencent avec un Roosevelt pétainiste à un degré insoupçonné et pris d'une haine irrationnelle pour ce De Gaulle bien seul et arrogant. La vision US de l'après-guerre est sidérante, pour faire simple France et Allemagne ces abominables nations guerrières doivent être dépecées et mises sous la douce botte américaine. La légende de GI venus libérer la France de la Fayette est battue en brèche, les Américains sont venus conquérir un marché pour leurs produits et un glacis contre les soviétiques. Mais ce maudit De Gaulle va les prendre de vitesse et redresser le pays. Qu'à cela ne tienne les agents américains vont tenter de diluer la France dans maintes organisations européennes financées à coup de dollars. A ce titre on peut se demander pourquoi un traitre à son pays comme J. Monnet est au Panthéon plutôt qu'à Monfaucon. Hors de Gaulle, ses proches et les communistes, tous les politiques français ont été largement corrompus par la CIA pour s'opposer aux volontés d'indépendance de la France. Les Mitterrand, Deferre, Lecanuet, Giscard, Sarkozy etc... ont largement profité des prébendes de la CIA ce qui explique leur comportement de larbins pendant des décennies. Chirac aura un peu relevé la tête pour la guerre en Irak mais le mal était fait, la France ne pèse plus grand-chose, la guerre est perdue.

Devant un ouvrage aussi dérangeant le lecteur s'interroge sur la fiabilité de la thèse de l'auteur, dans le cas présent E. Branca site largement des sources qui semblent sûres et accessibles. D'autre part bien des éléments cités dans le livre sont parus en leur temps dans les médias, c'est leur synthèse et leur mise en perspective qui renforce la thèse.

Le citoyen français ne peut qu'être écoeuré, hormis le géant De Gaulle dont la figure ressort encore plus grande, la bassesse du personnel politique français est affligeante, on sait que seule leur réélection les intéresse mais leur manque de courage est criant.
La France d'aujourd'hui est un pays exsangue, si un nouveau De Gaulle surgissait il serait en peine de faire les réformes espérées par le Général faute de moyens, il ne trouverait qu'un pays endetté qui peine à maintenir un système social à bout et qui ne peut investir dans l'avenir. Un pays pris dans un système européen purement économique et financier qui est largement ouvert aux intérêts américains comme le voulait Monnet et ceux qui le manoeuvraient.
Les crises du pays font aussi regretter que les réformes sociales imaginées par De Gaulle entre capitalisme et communisme aient été torpillées, y compris par son camp, pour se résumer aujourd'hui à la participation.

Ouvrage important qui éclaire sur des décennies d'errements de la politique française et qui explique en bonne partie pourquoi la France n'est plus qu'un pays de deuxième ordre.
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Une fois tous les deux ou trois ans - maximum ! - je croise le chemin d'un livre consacré à l'histoire récente d'une qualité exceptionnelle. Eh bien, pour cette année, j'ai trouvé !

L'essai d'Eric Branca est vraiment un livre remarquable, absolument bourré d'informations étonnantes dont je n'avais pas connaissance. Pourtant, je possède une bonne maîtrise générale des relations entre les Etats-Unis et la France durant la période 1940/1970, mais là... chapeau. Quel travail d'historien formidable ! Il suffit de parcourir les quelques 70 pages de notes, de bibliographie et d'index qui clôturent le livre pour s'en convaincre.

Les 150 premières pages, consacrées à la seconde guerre mondiale, restituent avec précision les relations plus que tendues entre Roosevelt et De Gaulle. de manière incompréhensible, le grand président américain haïssait littéralement De Gaulle, ce que confirment les mémoires de guerre respectives de Winston Churchill et de Charles de Gaulle, dont je parle par ailleurs sur ce site.

Il aura fallu à tout l'entourage de Roosevelt une persévérance incroyable, jusqu'à sa mort, juste avant la fin de la guerre, pour le persuader des qualités du leader de la France libre.

Le deuxième tiers de l'essai livre des informations surprenantes (ahurissantes devrais-je dire !) sur la manière dont l'administration américaine a aidé, supporté l'O.A.S. durant la guerre d'Algérie, au risque de "casser" la mécanique de désengagement progressif programmée par De Gaulle.

On (re)découvre aussi dans ces pages la doctrine américaine - non déclarée ! - d'après-guerre, consistant à jouer sur les divisions des grands pays européens pour empêcher la formation d'une "vraie" Europe.

Les Etats-Unis utiliseront tous les moyens pour "soudoyer" certaines figures politiques françaises majeures de l'après-guerre (Pinay, Jean Monet, entre autres) afin qu'ils poussent à la promotion d'une France atlantiste, dépendante financièrement, politiquement et militairement des Etats-Unis.

Au cours du troisième tiers, Eric Branca raconte notamment - une vraie révélation ! - comment un rapprochement entre Nixon et De Gaulle s'est effectué avec le temps, nourri par un immense respect mutuel.

On découvre aussi l'admiration sans borne que portait Henry Kissinger (8 ans à la tête des affaires étrangères des Etats-Unis et prix Nobel de la paix, mort récemment à l'âge de 100 ans) à Charles de Gaulle, qu'il considérait comme la plus grande intelligence politique analytique du XX° siècle !

Le seul point sur lequel on peut émettre quelques réserves, dans cet ouvrage exceptionnel, c'est lorsque Branca parle de "l'après De Gaulle", avec une analyse anti atlantiste très extrême de la politique française extérieure de ces cinquante dernières années.

A ses yeux, aucun président français, de Giscard d'Estaing jusqu'à Hollande, ne mérite le moindre éloge dans leur manière de mener le pays sur la scène internationale.

Les deux dernières années qui viennent de s'écouler montrent à quel point, l'illusion d'une France totalement indépendante, à distance des deux grandes puissances russes et américaines, est non seulement une illusion, mais une erreur fondamentale. le monde a bien évolué depuis la mort du Général...

Un livre référence indispensable, dans ma bibliothèque historique idéale.
Lien : https://www.letournepage.com..
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L'ami américain
Eric Branca
Pour la majorité des Français, la Libération est incarnée par des airs de jazz, par des Américains qui mâchent du chewing-gum en distribuant cigarettes, Coca cola et chocolat à une foule en liesse… Il faut réviser nos idées. Cette légende dorée va s'écrouler après avoir lu « l'ami américain » qui traite d'une guerre méconnue, sans morts, que mènent sans relâche les USA et la France.
De drôles d'amis, en effet, ces Américains ! le Général de Gaulle semble être le seul à défendre les valeurs de notre pays et notre indépendance.
Je suis également stupéfaite d'apprendre toutes les adversités, les manipulations, les intrigues, les trahisons, les coups fourrés auxquels le Général de Gaulle a dû faire face. le rôle de Jean Monnet est tout simplement incroyable aussi.
L'épilogue est également très instructif car il nous permet de mesurer comment a été détricoté tout ce qui a été construit par le Général de Gaulle depuis Pompidou en passant par Giscard, Mitterrand, Hollande, Chirac ou Sarkozy qui tient le pompon en se gaussant d'être appelé « l'Américain » (l'auteur n'a pas balayé la période Macron, mais ce dernier est dans la lignée de ses prédécesseurs en matière de déconstruction !)
Nous sortons de cette lecture, complètement démoralisés par tous ces fossoyeurs de notre indépendance et de notre liberté !
Cet ouvrage est exceptionnel. Il est passionnant, bien documenté notamment grâce aux archives américaines déclassifiées. le style est vif, l'écriture fluide et il est très instructif.



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Mon père avait coutume de dire que tout le monde devrait avoir le droit de voter à la présidentielle américaine compte-tenu de l'impact de cette élection sur l'ensemble du monde. Ce que ne semble pas contredire cet essai très documenté, qui nous expose un plan géo-stratégique de plusieurs décennies visant à établir la domination économique des États-Unis sur une Europe décimée par deux guerres destructrices. Face à ce rouleau compresseur quasi impérialiste, se dressait un rempart : le Général de Gaulle, toujours animé par la volonté de préserver la souveraineté de la France.
Si la thèse d'Eric Branca s'appuie sur de nombreuses sources et archives déclassifiées, on peut toutefois relever un manque de nuances ici et là, donnant le sentiment d'un argumentaire essentiellement à charge. Car au final, l'opinion dominante reste celle d'un souverainiste gaulliste, ce qui n'enlève rien à la qualité de ce travail remarquable évidemment, mais devrait selon moi conduire à relativiser certaines conclusions légèrement hâtives et passionnées (comme par exemple sur l'impact de la construction européenne).
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critiques presse (1)
LeFigaro
20 octobre 2017
Le récit des rapports conflictuels qu'entretinrent le Général et les Américains entre 1940 et 1969.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Contrairement à Roosevelt qui entendait profiter de l'effacement momentané de la France pour empêcher sa renaissance en tant que grande puissance et assimilait toute tentative de sa part pour retrouver son rang à une offense envers les Etats-Unis, Nixon et Kissinger comprennent qu'une France libre dans ses mouvements est le meilleur allié possible de Etats-Unis en Europe...Bref, ils assignent enfin au mot "amitié"---pour autant que celui-ci ait un sens dans l'ordre de la politique internationale--- une acception compatible avec le sens commun . Celles de relations d'où la sujétion est absente .
Ainsi donnent-ils raison à de Gaulle, qui, le janvier 1963, déclarait à Alain Peyrefitte :" Les Américains ont toujours la tentation de s'appuyer sur ce qui est mou plutôt que de s 'appuyer sur ce qui est ferme . Dans tous les pays sous-développés, ils ont la tentation de s'apppuyer sur les planches pourries qui leur sont favorables---et d'autant plus favorables que ce sont eux qui les ont pourries---, plutôt que de s'appuyer sur des régimes durs, issus d'une véritable volonté populaire ; car ces régimes-là, ils les craignent . Pendant la guerre, ils s'appuyaient sur Pétain, ou sur Darlan, ou sur Giraud, contre de Gaulle qui incarnait la volonté de la nation . [... Les Américains ne pourront jamais s'empêcher de favoriser au maximum la carrière d'un Jean Monnet, car ils reconnaissent en lui leur homme , et de s'opposer à de Gaulle, car ils sentent en lui un homme qui leur résiste . Pourtant, ils devraient comprendre que le meilleur allié des Etats-Unis, ce n'est pas celui qui s'aplatit devant eux, c'est celui qui sait leur dire non ."

page 280, chapitre 11, la symphonie inachevée .
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Témoin lui aussi de ces journées tragiques qui décidèrent de son envol définitif pour Londres, de Gaulle résumera : " A partir du jour où le gouvernement avait quitté Paris, l'exercice du pouvoir n'était plus qu'une sorte d'agonie, déroulée le long des routes dans la dislocation des services et des consciences...Pour ressaisir les rênes,il eût fallu s'arracher au tourbillon, passer en Afrique, tout reprendre à partir de là . Monsieur Paul Reynaud le voyait . Mais cela impliquait des mesures extrêmes : changer le haut commandement, renvoyer le Maréchal et la moitié des ministres, briser avec certaines influences, se résigner à l'occupation totale de la métropole, bref, dans une situation sans précédent, sortir à tous risques du cadre et du processus ordinaires .M. Paul Reynaud ne crut pas devoir prendre sur lui des décisions aussi exorbitantes de la normale et du calcul [...] En définitive, cet anéantissement de l'Etat était au fond du drame national . A la lueur de la foudre, le régime apparaissait, dans son affreuse infirmité, sans nulle mesure, et sans nul rapport avec la défense, l'honneur, l'indépendance de la France ."
Quand, en septembre 1944, de Gaulle,devenu président du gouvernement provisoire d'une République qu'il avait dû, disait-il, "ramasser dans la boue" recevra la visite de l'ancien président Albert Lebrun, resté désespérément inerte à l'heure du plus grand danger, il ne prendra même pas la peine de lui en faire le reproche, tant il savait l'homme inadéquat à l'action . Mais il écrira dans ses MEMOIRES DE GUERRE : "Au fond, comme chef de l'Etat,deux choses lui avaient manqué: qu'il fût un chef, qu'il y eût un Etat ."
De ce collapsus intégral, l'historien américain William Langer, qui, pendant la guerre, fit partie de la branche Recherche et analyse del'OSS (devenu en 1947 la CIA ), tirera la même conclusion :" L'histoire moderne n'a enregistré que peu d'évènements aussi catastrophiques que la défaite de la République française en juin 1940 . Depuis la campagne éclair de Napoléon contre la Prusse en 1806, aucune grande puissance militaire n'avait été frappée aussi brutalement et aussi inexorablement par le destin ."
Aux yeux de de Gaulle comme à ceux des Américains, la France a bel et bien "roulé du haut de l'Histoire, jusqu'au fond de l'abîme .", la différence est que le premier va mettre toute son énergie à lui faire remonter la pente, tandis que les seconds n'en verront pas, c'est le moins qu'on puisse dire, la nécessité .
in Prologue, pages 28 et 29
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Ce projet porte un nom : l'AMGOT, pour « Allied Military Government of Occupied Territories ». Vous avez bien lu : « territoires occupés ». Ce qui signifie que, dans l'esprit de Roosevelt, il n'y a pas lieu de traiter la France autrement que comme l'Allemagne ou l'Italie quand celles-ci, vaincues, verront arriver l'armée américaine sur leur sol.
Dès Juillet 1942, celle-ci s'est dotée de deux centres de formation à l'administration civile, l'un à New York, au sein de l'université Columbia, l'autre à Charlottesville, en Virginie. Et, à partir de juillet 1943, les Siciliens ont été les premiers à expérimenter le système quand l'AMGOT s'est installé à Palerme, avant d'étendre ses pouvoirs à la péninsule italienne à mesure de l'avancée vers le nord des troupes américaines. Ce « gouvernement militaire allié » doté de six « départements » (lois, police, finances, santé, ravitaillement, « gérance de la propriété privée ») ne s'est pas contenté d'administrer le quotidien : il a démis les maires en exercice et les a remplacés par de nouveaux, chargés de relayer ses instructions. La mafia ayant notoirement aidé l'armée américaine à débarquer en Sicile, on imagine le profil des nouveaux édiles municipaux.
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C'est aussi qu'en cette année 1950 les Européens, plan Marshall oblige, n'ont pas grand-chose à refuser à leurs bienfaiteurs d'outre-Atlantique. Dussent-ils, pour les satisfaire, s'autodessaisir de leur identité culturelle.
Ce dernier aspect a constitué, au même titre que le renvoi des ministres communistes du gouvernement Félix Gouin (5 mai 1947), le prologue du plan Marshall, avec les contreparties exorbitantes exigées de la France pour obtenir l'effacement d'une partie de ses dettes d'avant-guerre, un prêt de 650 millions de dollars et l'aide d'urgence de 300 millions qu'elle réclamait dans le cadre des accords Blum-Byrnes de mai 1946. Signés par Léon Blum, mais négociés par Jean Monnet, ces accords ont notamment imposé à la France de projeter sur les écrans une majorité de films américains. A savoir 4 productions françaises pour 9 américaines importées sans droits de douane ! On comprend que ces « screen quotas » aient rendu furieuses les professions du cinéma, jetant un grand nombre d'artistes dans les bras de ce même parti communiste que les États-Unis prétendaient combattre.
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Antoine Pinay passé à l'arrière-plan des écrans radar américains, c'est peu dire que la Maison-Blanche a l'embarras du choix pour lui trouver un successeur selon son cœur : François Mitterand, Georges Pompidou, ou même Alain Poher quand, en 1969, celui-ci fait jeu égal dans les sondages avec l'ancien Premier ministre du général de Gaulle...
Mais, en cette seconde moitié des années 1960, la priorité du Département d'Etat n'est plus seulement de favoriser l'accession au pouvoir d'un président français plus accommodant. Elle est d'influer directement sur la formation de nos élites politiques en les acculturant au modèle américain afin de leur faire partager, le plus naturellement du monde, sa hiérarchie de valeurs et, par voie de conséquence, ses priorités stratégiques mondiales. Ce travail à long terme qui, un demi-siècle plus tard, a encore pris de l'ampleur via notamment des fondations comme les Young Leaders, un homme l'a initié depuis l'ambassade américaine : William A. Weingarten.
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