Les règles dans notre discipline sont là, non pas pour nous accabler mais pour nous guider, nous aider.
Et l’instructeur qui les connait, qui a su les intégrer en lui-même, les enseigne, non pas en les imposant de façon autoritaire mais en les laissant « émaner » de lui-même. Telle l’eau de la rivière « accueillant » la pirogue. Il doit être lui-même l’expression la plus fidèle des règles qu’il transmet. À chaque coup de sa rame, il oriente, stabilise, fait glisser l’embarcation.
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L’enseignant doit avoir réalisé pertinemment, sa véritable nature. Ce n’est plus untel ou unetelle qui enseigne. C’est cet anonyme nous, ce précieux trésor impersonnel que nous sommes, sans mérite, sans affaires, sans nom, sans visage, à qui nous devons ouvrir nos portes afin qu’il puisse déployer les ailes de son savoir, plonger dans le corps subtil de son élève et l’imprégner tout entier.
Non pour s’imposer à lui comme son maître, mais pour éveiller en lui le même Moi qui à son tour le guidera. Et ainsi pendant de longues années, jusqu’au jour où le disciple aura pu s’identifier au vrai Moi de son maître, vibrer dans la même intensité et ainsi ne plus dépendre de lui. Et enfin l’aimer sans calcul, sans motif, sans le moindre intérêt. Parce que son amour et celui de son ami de bien ne font qu’un seul et même sentiment.
Cette écoute du Chi, chère aux moines taoïstes qu’on appelle les « spécialistes du Chi », non seulement nous permettra de découvrir les arcanes de notre anatomie mais de voir le Souffle vital agir dans nos organes, dans nos os, nos cellules nerveuses, comme un sage et patient guérisseur. C’est le courant énergétique interne qui déliera les multiples nœuds de notre corps-esprit.
Une fois saisie cette présence à soi, une nouvelle tâche commence : celle de se centrer progressivement sur ce Moi. Faire en sorte que chaque moment de notre vie quotidienne devienne une occasion de pratiquer notre présence interne.
Nous constaterons alors que nos actes de chaque jour sont vraiment transcendants.
Qu’ils jaillissent de notre intimité vraie, qu’ils proviennent de la femme vraie sans qualités, sans nom et sans visage, de l’homme vrai sans affaires ni qualités, tous deux libre du temps et de l’espace, libres de la mort et de la vie.
L'art du combat avec son ombre
Présentation du livre "L'art du combat avec son ombres" de Gregorio Manzur, maître de Tai-Chi et de Chigong. Par Marc de Smedt.