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Le cycle d'Alamänder (nouvelle édition) tome 1 sur 3
EAN : 9782253103257
704 pages
Le Livre de Poche (09/11/2022)
4.14/5   65 notes
Résumé :
Dites adieu à la Fantasy que vous connaissez !

Aujourd hui, vous partez pour Alamänder.

Allez donc saluer Anquidiath, le demi-dieu enfoui sous la montagne, chatouiller les monstrueux poulpes de guerre, flâner parmi les épis du champ de blé carnivore !

Jonas Alamänder, mage et détective, vient de perdre sa maison confisquée par le royaume voisin. Accompagné d'Edrick, l'un des soldats chargés de lui apprendre la nouvelle, e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (35) Voir plus Ajouter une critique
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Vous vous souvenez ? C'était y'a quelques années de ça. Les découpages de livres en France, c'est la foire à la saucisse, alors du coup il y avait eu cette trilogie découpée en cinq volumes ; c'est alors qu'une jeune maison d'éditions passablement ambitieuse décidait de lui rendre le nombre de volumes qui lui était dû avec des illustrations attirant fortement l'attention des chalands. Dont moi.
Comment décrire ce qui m'a attiré tout de suite ? Disons que le côté lovecraftien mais tourné en dérision m'avait fait penser à une espèce de mix entre des Chroniques du bout du monde pour adultes et les Annales du Disque-monde. Les échos eus sur le Web donnaient la même impression, tout en précisant que le bouquin mettait un point d'honneur au worldbuilding : non seulement pour son originalité, mais aussi pour sa richesse et sa cohérence, ce qui avouons-le n'est pas franchement le premier truc auquel vont s'atteler en priorité des oeuvres de light fantasy.
Les faits sont pourtant là : La porte des abysses commence la trilogie d'Alamänder avec un énorme potentiel, aussi bien divertissant que prolongeant les limites de son genre. Il s'agit d'un livre intelligent ayant compris que l'humour n'excuse pas n'importe quelle idiotie dans la narration sans le mépriser pour autant, et jouant ainsi avec un équilibre idiot / sérieux sans que jamais les qualités d'un domaine n'aillent l'emporter sur l'autre. Avant même les premières pages, je savais que cet ouvrage constituerait non seulement une lecture agréable entre deux ouvrages plus ardus, mais aussi un de mes coups de coeur de l'année. Car au-delà d'un excellent roman de light fantasy, nous possédons là un excellent roman de fantasy, et ce qui pourrait bien se révéler un excellent roman tout court si les prochains tomes continuent sur la lancée.

Intrigues, personnages

Alamänder est un monde à l'unique continent éponyme, dont on ne sait pas exactement la forme, mais juste qu'en son centre se situe son unique lac. Les alentours sont uniques aussi, à leur manière : plantes qui vous bouffent, démons du troisième cercle en partant de la gauche invoqués par maladresse souvent encore pires que les vrais (eux, ils vous laissent en vie), rois bureaucrates, guerriers xéols, cuisine locale…
C'est donc dans ce contexte pas très glorieux que deux histoires se nouent peu à peu : celle de Jonas, mage détective qui découvre un beau jour que sa maison vient de se faire annexer par le royaume de Kung-Bohr, et va devoir accepter une enquête juteuse pour la garder, et celle de Maek, apprenti assassin malheureusement très doué. Car Alamänder regorge de dangers ; et quand quelques systèmes de magie s'en mêlent, ça n'arrange pas toujours les choses…

Intérêt comique / satirique

Le roman alterne ainsi moments avec gros dramas et passages beaucoup plus délires ; des scènes humoristiques et des intrigues d'une forte complexité cohabitent : Alexis Flamand le déclare lui-même, son but n'est pas de faire de la fantasy à usage purement humoristique. Mais ce premier tome lui donnant une place malgré tout TRÈS importante, on va juste pour celui-ci le comparer un peu aux autres ouvrages de la light fantasy (et par là on entendra aussi bien fantasy humoristique que contenant simplement une part généreuse d'humour, les frontières étant poreuses).
Alors disons-le d'office, il va y avoir encore moins de lignes sans comparaisons avec Pratchett dans cette chronique que de culture sur NRJ12. Je sais, dire que light fantasy = Pratchett, c'est dire que high fantasy = Tolkien, mais il s'agit du seul auteur de ce genre mondialement connu et reconnu comme maître incontesté. Une référence universelle qui nous permet de nous apercevoir ainsi des lacunes de cette oeuvre, mais surtout ses points communs, ses points de distanciations et enfin ses qualités supplémentaires et les éléments qu'elle pousse plus loin.
Et l'humour se fait par moments aussi présent que dans un Disque-monde ; on y retrouve les mêmes personnages allant du flegmatique au grotesque et multiples parallèles avec notre monde, avec une dose d'absurde élevée dans un royaume qui marche sur la tête. Cependant, Alexis Flamand s'en dissocie en mettant moins d'emphase sur les calembours ou pas de narrateur omniprésent toujours occupé à digresser ou parsemer son texte de sous-entendus : on se trouve donc en présence d'un texte s'éloignant du style anglais, plus simple et terre-à-terre, moins abstrait et nonsensique, et donc plus accessible à nombre de lecteurs notamment français.
En fait, on a une nette impression de découvrir ce qu'auraient pu être les premiers tomes du Disque-monde s'ils avaient été réellement maîtrisés : l'univers possède un net parfum Rincevent des débuts, riant non pas forcément d'un aspect précis de notre réalité, mais davantage de la fantasy dans son ensemble, avec ses multiples tropes usés jusqu'à la corde. La cour d'un roi possède forcément des tas de complots ? On les numérote et on grossit le nombre jusqu'à le rendre démentiel. le roi risque souvent sa vie ? Qu'à cela ne tienne, désormais il sera blasé tellement ça lui arrive. (Il emploie en outre des calculs cyniques qui ne dépareilleraient pas chez un Havelock Vétérini — on retrouve d'ailleurs l'idée de réglementer le crime plutôt que le faire disparaître.) le royaume est régi comme une bureaucratie ; si cela sert bien sûr à se moquer d'elle, c'est bien la fantasy telle que nous la connaissons qui est la première cible du roman.
Tout comme La Huitième Couleur et le Huitième Sortilège, La porte des abysses recherche une critique de ce genre en poussant ses curseurs jusqu'à ce qu'ils n'aient plus aucun sens : une démarche de démythification dans un premier temps où l'imagerie du med-fan traditionnel se fait passer à la moulinette, puis une recodification où l'auteur présente la fantasy telle que lui la verrait, que ça passe par un dépaysement plus grand ou davantage de réalisme (quand ça l'arrange) ; une démarche à ne pas confondre avec celle traversant actuellement le cinéma héroïque actuel (le MCU / Star Wars VIII) consistant à procéder à une démythification puis une remythification, le processus étant identique mais retournant finalement au même stade qu'au départ. le degré de délire est inférieur dans le sens où avant de partir dans tous les sens, Flamand est conscient que l'histoire doit passer avant : il n'y a pas donc ces micro-aventures décousues qui conduisent lentement vers enfin une résolution de l'intrigue s'étant développée entretemps, mais celle-ci se situe au centre des préoccupations ; de même, les grimoires de l'Université Invisible ne se transformeront pas cette fois en crème à l'ananas : plutôt que marquer volontairement les scènes par un aspect absurde à tout prix, l'auteur préfère établir d'emblée des règles claires, même si elles paraissent aller à l'encontre du bon sens, dès le départ, contrairement à une saga telle que le Disque-monde qui les construira tout au long de son développement, quitte à parfois se contredire.

Intérêt dépaysant

Reste à voir comment voir ce qu'apporte cette recodification : et en l'occurence, La porte des abysses constitue un alliage à la fois syncrétique et innovant des différents mouvements de la fantasy autant alternative que des canons habituels. Si elle reprend pour base le très traditionnel med-fan, elle y mêle une dose importante du mouvement weird initié par Lovecraft tout en y ajoutant des tropes habituellement réservés à l'arcanepunk et la science-fantasy, empruntant ainsi aux codes de la SF, le tout sur fond d'intrigue policière, thème plutôt peu exploité en fantasy comparé au nombre d'ouvrages sur la fantasy à crapules (en-dehors du récent et singulier Titanshade, et bien sûr des Annales sur le Guet et Samuel Vimaire).
Pour les non-initiés au jargon des sous-genres de l'Imaginaire, le weird c'est donc le fameux machin à la croisée de tous les registres (SF / fantasy / fantastique / horreur) qui se caractérise par sa forte présence d'éléments incongrus pas frocément tirés d'une civilisation précise, avec une esthétique fréquemment organique et une imagerie à la lisière de l'extraterrestre. Si on ne peut pas dire que la trilogie d'Alamänder en soit, puisqu'elle est aisément classifiable en fantasy, il n'en est pas moins que ce courant initié par Lovecraft et ses petits copains déteint fortement sur l'esthétique : l'univers de Flamand passé le cap de l'humour reste singulier du fait qu'il est pesant, lourd, baroque, friand de décors gigantesques et écrasants. Les créatures bizarres y pullulent, pas toujours bienveillantes mais d'autres fois amusantes tant elles se font ridicules, les sculptures grouillent partout dans les salles ; il est fait mention de nombreuses coutumes et créatures millénaires et étranges, créant ainsi une zone floue pour le lecteur : on ne sait plus si on est dans un démesuré volontairement grand-guignolesque ou si l'auteur ne recherche pas derrière les apparences à nous faire ressentir un véritable vertige.
Vous devinez aisément que l'amateur d'exotisme et de gigantisme en moi s'est tout de suite montré comblé ; un univers qui se démarque autant possède une véritable démarche recherchant à s'émanciper des mondes ordinaires souvent refourgués. de plus, j'avais enfant été fortement marqué par le tournant lovecraftien pas si parodique qui se dégageait de la fin du Huitième Sortilège ; d'un coup les enjeux montaient en flèche, et on comprenait que l'héroïsme avait beau ne pas exister (du moins tel qu'on aime se le figurer), l'humour ne faisait pas tout et il y avait un monde à sauver. La porte des abysses tente ce mélange de mystère et d'organique, débarrassé de l'horreur malgré un sens aigu de l'humour noir, porteuse d'une véritable richesse visuelle et colorée.
On porte également un intérêt aux détails ethniques, qu'il s'agisse des différentes langues, dont on nous décrit l'esthétique, des formules de politesse de tel lieu, ect. Tout est original et dans le souci du détail, y compris le crime, avec tout cet arc narratif s'intéressant à la genèse des T'Sanks, bourrée de passages inattendus malgré certains éléments très classiques. L'auteur élabore même une philosophie du crime pour expliquer comment les assassins perçoivent le monde et pourquoi : si ça, c'est pas pousser les potards à fond !

Intérêt spéculatif

Le worldbuilding semble déjà atypique, le magicbuilding l'est encore plus. Comme on l'a déjà dit, habituellement le but de la LF est avant tout de faire rire ; le surnaturel apparaît donc le plus souvent comme le moyen le plus simple d'envoyer la logique dans le trou noir Fortnite. Là encore, Pratchett avait tenté malgré tout quelques ébauches : la magie des mages à travers Sourcellerie, envisageant la réalité comme un tissu métaphysique qui peut être foré jusqu'à un certain point, celle des sorcières à travers tout le sous-cycle de Lancre se basant sur la psychologie des personnes, farfelue mais assez cohérente dans sa gestion des énergies (se mêler à l'esprit d'une chouette est plus simple qu'en prendre l'apparence, faire croire aux gens qu'ils sont des crapauds plus économe que les changer en), ou encore la gestion du temps dans (l'indigeste) Procrastination.
Néanmoins, les différentes formes de magie sont très rarement au centre du récit, et elles laissent beaucoup de bride pour se lancer au moment voulu dans du délire pur et dur. Ici, l'idée est de se rapprocher le plus possible de la science, en créant un système à la fois riche, complexe, cohérent ET détaillé. Indépendamment de l'humour, on découvre donc dans cet ouvrage des systèmes de magie qui resteraient tout aussi plausibles dans un ouvrage beaucoup plus sombre (ce qu'il s'avère être par moments).
Le premier est celui de la magie YArkhanie ; à l'image du très prochainement dans la langue de Pascal Praud Foundryside, celle-ci s'inspire des programmes informatiques. Contrairement à celle de ce dernier, elle ne combine pas des runes déclenchant des sortilèges, mais des sortilèges en eux-même guidés par une mystérieuse force vitale ; y voir la même idée géniale mais en moins bien serait pourtant réducteur. En effet, toute la question réside alors de comment combiner les sortilèges ensemble afin d'obtenir le résultat voulu. Exemple, déclencher une tornade de feu n'est pas un sortilège, mais un ensemble de ceux-ci : il en faut un pour paramétrer la chaleur, un autre la vitesse, un autre la direction… On n'est plus au niveau du codage, mais à celui du logiciel.
Le second est appelé la magie organique : moins précise, elle accumule les différents flux de réalité pour les encoder à la manière des liaisons entre les protéines. Car on a beau se trouver dans un med-fan, les magiciens connaissent malgré tout l'existence des particules ; après tout, pourquoi n'auraient-ils pas pu inventer un sortilège pour explorer l'infiniment petit ?
À ce moment, forcément la question se pose : dans quelles cases étriquées pourrions-nous ranger le livre ? Arcanepunk ? Non, le roman, en dehors de quelques trouvailles technologiques, possède une civilisation davantage apparentée à un med-fan cauchemardesque. Science-fantasy ? Non plus. Les éléments magiques sont traités comme une science, il est vrai ; et ils mettent en scène différentes propriétés scientifiques. Mais c'est le but de tout système de magie, s'il est exposé, de la rationaliser de manière à ce qu'on ait l'impression qu'on a affaire à un monde possédant des règles différentes des nôtres mais tout aussi crédibles, de sorte que nous pourrions appeler finalement magie toute forme de science purement inexistante et inconcevable dans notre univers à nous ; et les propriétés scientifiques telles que la biologie ou la physique ne sont exploitées que par le biais de cette science inventée. Ce sont bien les répercussions de la magie, et non de la science ou de la combinaison des deux, que nous découvrons ici.
Et hard-fantasy ? Eh bien je reste circonspect sur ce terme, car les ouvrages de fantasy voulant se faire aussi hard que la branche de SF du même nom ne le sont bien souvent que sur un point pour rester normaux sur les autres (prenez le Seigneur des Anneaux : son évolution linguistique est particulièrement crédible, son système de magie lui ne reste qu'esquissé). Ceci dit, certaines scènes sont empreintes d'un sense of wonder saisissant : les propriétés du dieu de la Mort, le Bout du Monde, les plaines de champignons géants…
En plus de l'humour, de l'enquête, du très grand intérêt du livre dans son genre et du sens du spectacle, Alexis Flamand met de temps en temps la bouffonnerie entre parenthèses pour s'interroger sur des sujets plus lourds… ou la remplace tout bonnement par une grosse dose d'humour trash bon enfant. Ainsi les T'sanks expérimentent-ils les différentes maladies, capacités magiques, pharmaceutiques, bactériologiques ou encore psychologiques sur le corps humain avec un manque d'éthique à faire pâlir de jalousie l'unité 731. Mais ça fait avancer la science, la médecine en tête de file, donc les dirigeants s'en accommodent ; qu'est-ce qui nous dit que certains d'entre eux bien réels ne seraient pas capables de compromis comme ceux-là ? Bref, La porte des abysses a tout compris de son héritage science-fictif, avec ce que contient tout grand livre de hard-SF : une interrogation non seulement sur les causes physiques, mais aussi les effets sociétaux.

Oui, mais…

Quelques défauts très minimes cela dit : pour un ouvrage aussi riche visuellement, le manque d'illustrations se fait sentir ; et pour l'édition sur liseuse, il faut attendre la toute fin du livre, alors qu'on s'est déjà imaginé les créatures autrement. de même, certains passages étant un peu appuyés par moments, on perd de la finesse du gag ; mais bon, ça se porte remarquablement bien comparé à une bonne frange de la light fantasy française braquée sur le sexe, la religion et cette noble science (d'où le fait qu'il ne faille l'invoquer que de façon évènementielle) qu'est la scatologie.

Conclusion

La porte des abysses augure un nouveau monument de la light fantasy par son humour soigné et absurde sans perdre le lecteur ; mais par-delà l'aspect comique, Alexis Flamand nous offre un univers baroque et psychédélique, tantôt merveilleux tantôt terrifiant, au service d'une intrigue et d'une fiction spéculative soignées. Un véritable plaisir de lecture et sans doute le meilleur roman de fantasy chroniqué cette année, vous allez me faire le plaisir de vous le procurer tout de suite. Après, je dis ça, c'est pour votre culture…
Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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Premier tome d'un cycle achevé, "La Porte des Abysses" d'Alexis Flamand constitue l'entrée vers le Monde fascinant d'Alamänder. Et quelle entrée, Nom d'un Moufre !

Oubliez ce que vous connaissez sur la fantasy « classique », oubliez la fantasy qui suit une ligne de facilité, avec des intrigues convenues et des créatures déjà vues-revues et oubliez cette soupe « Tolkienienne » que vous n'arrivez plus à digérer depuis des mois ou des années… Alors oui, je pense que vous essayez probablement de vous soigner en vous injectant du Jaworski ou du Péru, mais au fond de votre âme de lecteur, vous savez que ce sont les exceptions qui confirment la règle.

Pour ma part, j'ai vraiment pris "La Porte" (des Abysses) dans la gueule ! Et à ma grande stupéfaction, j'ai apprécié. de nature peu masochiste pourtant, j'ai essayé de comprendre pourquoi j'ai dévoré ce livre de 540 pages en seulement 3 jours. Il me semble avoir trouvé des débuts de réponses…

La première réponse sonne comme une évidence, j'étais alité à l'hôpital avec ce livre sous le coude, donc j'avais pour ainsi dire… le temps de lire, afin de m'occuper l'esprit pendant qu'on me soignait le corps.

La seconde réponse m'a sauté aux yeux dès les premières pages.

Je lisais quelques choses d'unique en son genre, que je n'avais encore jamais lu. le souci du détail m'a heurté sans cesse, de la description de la faune et la flore incroyables aux fascinants royaumes, de la richesse du monde au système de magie original, des personnages charismatiques aux retournements de situations intelligents et improbables, sont autant d'éléments marquants. Unique, parce que oui, je n'avais encore jamais lu un livre qui se rapprochait de près ou de loin du Monde d'Alamänder.

Tout commence avec Jonas, mage détective spécialisé dans les crimes liés à la magie qui embarque dans une aventure pour sauver sa maison et ses terres qui seront bientôt ravagées par le nouvel occupant qui n'est autre que le Royaume voisin, Kung Borr. Il décide donc de se rendre à la Capitale Ker Fresnel pour convaincre le roi Ernst XXX de préserver son bien et de lui rétrocéder. A ce stade, j'étais perplexe et circonspect. Mais où donc Alexis Flamand voulait-il m'emmener ?

Le reste m'a littéralement scotché, j'étais bouche bée, l'imagination dont l'auteur fait preuve est assez stupéfiante. A plusieurs reprises, je me suis demandé comment un « être humain » pouvait avoir une imagination aussi débordante, la poser sur le papier et arriver à accoucher d'un ensemble aussi cohérent. le talent probablement.

Comment oublier le périple de Maek ? L'école "T'Sanks" ? Les carnocéréales ou les Macrovores ? Les Skorjs et les moufres ? La magestueuse Ker Fresnel ? Mon cerveau était constamment en ébullition, face à tant de stimulis, d'images, de lieux… que j'en suis venu à me demander si mon cerveau n'était pas limité vu que j'en avais quasiment le tournis et qu'il a frisé l'erreur 404.

D'une simple enquête banale au premier abord, l'auteur nous transporte, grâce à une écriture et un style efficace, assez simple mais pas simpliste, dans un univers cohérent et très travaillé. On sent rapidement qu'Alexis Flamand maitrise son histoire. J'imagine l'auteur avec une multitude de feuilles A4 parsemée de lignes droites, de courbes et de triple loots piqués à rebondissement qui relient habillement un point A et B, comme avait pu le faire dans un autre genre littéraire Universal War One.

Les personnages sont d'une manière générale hauts en couleurs, certains plus charismatiques que d'autres, mais tous sont intéressants et bien écrits. Mention spéciale à l'énigmatique roi Ernst XXX, génie, stupide ou simple mégalo, j'hésite toujours… Et comment ne pas citer l'indispensable compagnon de Jonas, le démon Reztel, qu'on adore détester mais finalement tellement attachant. J'ai d'ailleurs regretté qu'il soit moins présent durant la seconde partie.

Et puis, il y a la Magie, ou plutôt le système de Magie, d'une cohérence et d'une originalité absolues.
Sans trop en dévoiller, la magie YArkhanie s'appuie sur la « programmation informatique » alors que la magie organique est plus… heu, « organique » ? Je crois avoir lu que l'auteur a de très bonnes notions de biologie et qu'il s'est inspiré de … la synthèse des protéines par les ribosomes, oui, rien que ça. Quand je vous dit qu'Alexis Flamand à une imagination folle et débordante… l'organique a ma préférence car beaucoup plus poétique que la première. Lorsque Jonas en use, les descriptions sont très détaillées et explicites. C'est complexe, mais très visuelle, et je crois avoir compris comment cela fonctionne… mais à bien y réfléchir, j'ai comme un doute.

Et enfin, l'humour, un flôt d'humour…. tonitruant, décapant et pour ma part, ça a fait mouche à chaque fois. Je me suis réellement fendu la poire la tête piquée vers ce très bel objet livre des éditions LEHA (et quelle belle illustration de Marc Simonetti, comme toujours).

Alors oui, l'humour en tant que tel ne fait pas une grande histoire, mais il est très bien dosé et ça ne constitue pas le coeur du livre. Ce sont simplement de petites touches qui titillent les zygomatiques régulièrement, et pour ma part, ça m'a fait un bien fou.
Et qu'on se comprenne bien, ce n'est pas une oeuvre humoristique, ou « parodique » à la Pratchett, mais bien de la vraie bonne fantasy qui « contient » de l'humour… nuance importante.

En bref, je pense que vous l'aurez compris, « La porte des Abysses » est un immense coup de coeur, un roman de Fantasy absolument unique et à l'humour irrésistible ! Un univers complexe et très bien travaillé, un mélange enquête et fantasy habilement mené. Non d'un Skarj de combat, je suis vraiment devenu « Alamändovore » ! Alors, M. Alexis Flamand, simplement, Merci.
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Tout d'abord merci à Babelio et un énorme merci aux éditions Leha pour cette réédition. Je suis ravie d'avoir pu gagner ce premier tome à Masse Critique, moi qui avait malheureusement des vues sur l'édition de l'Homme Sans Nom. S'il vous plait ne nous faites pas faux bond pour le troisième et dernier tome.

Par où commencer... Il y a beaucoup à dire.
D'abord l'auteur a vraiment beaucoup d'imagination, il a inventé ici un univers hors du commun avec toute une foule de détails, de royaumes, de coutumes, de personnages et bestiaires... Dans certaines descriptions il est même parfois difficile à suivre. Qu'à cela ne tienne, à nous de nous imaginer ce qu'il veut nous mettre devant les yeux. Et puis il a aussi énormément d'humour et d'autodérision. Il n'a pas l'air d'avoir pris la grosse tête et c'est très agréable. On passe vraiment un bon moment car c'est distrayant, de bons mots, des situations sorties dont ne sait où... Très fort cet Alexis Flamand !
Les personnages sont assez incroyables. Notamment Ernst très retors, dont il arrive à pousser certains traits de caractère jusqu'au risible presque mais tout en restant très crédible. Une belle brochette pour le reste, venant d'horizons différents, avec des caractères différents, très attachants, tous avec leurs défauts et leurs qualités. le personnage principal a un certain charisme sans jamais être agaçant, bien entouré, en chef d'orchestre pour l'humour, l'action, la réflexion, et tous les différents éléments d'Alamänder.
Le début commence lentement si je puis dire. On a beaucoup d'informations avec aussi l'en-tête des chapitres qui nous permettent d'appréhender certains points sans le rajouter dans le récit pour ne pas l'alourdir. Les personnages sont mis en place avec le contexte. Jon est assez passif. On ne s'ennuie pas mais on se demande où tout ça va nous mener, on ne voit pas trop la direction va prendre l'auteur. On a peur à l'enchainement d'actions sans liens. Jusqu'à la première révélation ! Et là bim bam boum on voit le récit des 100 premières pages autrement. Et puis ça n'arrête plus. On est surpris, il y a des rebondissements, ce qu'on croyait simple ne l'est plus, l'histoire ne va jamais là où on s'y attend, il y a de l'action, de la description et de l'humour à tour de bras sans jamais nous lasser. J'adore ! J'adore ! J'adore !
La fin nous laisse complètement ébahis. Et avec l'envie de se jeter sur le deuxième tome puisque ça s'arrête en plein action, sur des révélations. On a encore beaucoup à apprendre, il y a encore des sujets un peu flou. Notamment sur Maek. On sent que l'auteur en a encore beaucoup sous la pédale. Et j'ai hâte de découvrir la suite.

Alors encore merci pour cette lecture !
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J'ai acquis ce livre aux Imaginales, suite à une conférence dans laquelle intervenait Alexis Flamand, sur le thème de l'humour dans la littérature de l'imaginaire. C'est un premier tome d'une trilogie éditée par Leha, reprenant l'intégrale des 5 différents tomes déjà parus précédemment aux éditions de L'Homme Sans Nom. Les deux autres tomes sont déjà édités, on peut donc enchaîner si on veut dès qu'un livre est terminé sans avoir à attendre des années, c'est toujours un bon point. L'illustration de couverture est très belle comme sur les autres livres de cet éditeur, elle représente la cité de Ker Fresnel.

L'amorce du roman sort déjà largement du cadre habituel d'un livre de fantasy : un mage enquêteur du royaume de Mehnzota, Jonas Alamander, se voit dans l'obligation de quitter sa maison suite à l'ordre de destruction de celle-ci par le royaume voisin de Kung-Bohr, qui vient d'acquérir la parcelle sur laquelle elle se trouve, mais notre bon mage souhaite porter réclamation pour faire annuler la procédure… Il se retrouve donc embarqué dans un voyage qui va le conduire dans la capitale du royaume de Kung-Bohr, Ker Fresnel, en compagnie de son animal démon de compagnie nommé Retzel. Après un voyage mouvementé à dos de créatures que n'aurait pas reniées Lovecraft, Alamander se trouve dans la capitale pour enquêter sur un assassinat des plus étranges, assassinat dont les visées remontent jusqu'au plus haut de l'état et sur l'origine même de la cité. Voilà pour l'amorce.

En parallèle de cette histoire, on suit tous les 2 ou 3 chapitres la création d'une guilde / école d'assassins implacables, les Tsangs, par un jeune fils de paysans du nom de Maek. On se demande d'abord le lien, puis vite on comprend que les 2 histoires seront liées à plus ou moins longue échéance, bien que se déroulant géographiquement pas du tout au même endroit et que la fondation de l'école a lieu 1.000 ans avant les aventures d'Alamander.

Ce qui marque immédiatement en lisant ce livre, c'est son ton général décalé, son second (voire troisième ou quatrième, et plus si affinité…) ton avec lequel chaque chapitre, scène, personnage est abordé ou traité. Tout est sujet à un délire ou à une mise en scène qui serait absurde dans n'importe quelle autre oeuvre, mais l'auteur arrive à faire tenir l'ensemble dans une cohérence, au point que l'on se prend à imaginer qu'une telle construction puisse exister. Un des thèmes les plus moqués dans le livre est la bureaucratie, autant du point de vue de sa complexité ou de son inertie, mais cela ne semble pas choquer grand monde dans ce monde. Ce mélange de fantasy et d'humour a souvent du mal à prendre, j'avoue ne pas être un fan de Pratchett malgré de nombreux essais infructueux, mais dans ce roman l'humour se fait autant de manière délibérément débile que subtile, en faisant appel à la culture du lecteur, et j'adore cela ! Les références sont à dénicher à chaque morceau de page, et j'imagine en avoir loupé pas mal, mais celles que j'ai trouvé après réflexion (lire certain nom à voix haute peut aider aussi) m'ont donné l'impression que l'auteur et moi pouvions avoir une certain connivence. On voit très souvent des références à la science (Bohr, Fresnel pour les plus évidentes dans les noms) au travers d'éléments de botanique, de géologie. Pour le scientifique et agronome de formation que je suis, j'ai apprécié de nombreux développements sur les massifs de champignons ou les étages géologiques de Ker Fresnel.

Au niveau des personnages, Alexis Flamand a créé une belle galerie de héros, ou plus d'anti-héros, et de personnages secondaires très fouillés. Alamander est très crédible dans le rôle d'enquêteur casanier-timide-crédule-efficace, mais néanmoins dépassé la plupart du temps par les enjeux et les événements, il devient vite très attachant et on sent que l'auteur a mis beaucoup de lui dans ce personnage. Son alliée féminime Rachel est sur le registre de la femme aguicheuse, compétente mais toujours très énigmatique. le soldat Edrick qui accompagne Alamander partout (au grade très fluctuant dans le livre selon ses réussites et échecs) est aussi sympathique, mais un peu plus lisse. Quant au souverain, Ernst XXX, on l'imagine bien en PDG de grosse boite du cac40 pour son côté calculateur froid et à la limite de la méprise de ses sujets, pour rester poli ! Enfin, les 2 personnages aussi énigmatiques que mauvais du livre (les deux membres de l'école T'Sank) brillent par leur logique toute inhumaine et leur art de donner la mort.

L'écologie du monde d'Alamander est assez originale, avec des grosses créatures poulpiques, des épis de céréales aussi appétissants que dangereux, ses formations fongiques, sa géologie tourmentée par les dieux… On découvre tout cela au fur et à mesure, mais c'est très dépaysant et toujours présenté avec un humour certain.

La magie dans Alamander est très particulière, et en fait double. La magie Menzothienne d'abord : toute manifestation magique va se faire via des formes et lignes que l'on va tisser pour faire apparaître les choses, modifier leur propriétés, de manière presque biologique… Chaque intervention magique étant ensuite visible pour qui a la bonne vision. La magie YArkhanie, celle d'un autre royaume rival de Kung-Bohr, ressemble plus à des suites d'instructions logiques, plus informatique, mais peut-être plus puissante et implacable que celle de Menzotha. Les mages sont des personnes puissantes et craintes au point d'être exclues de certains royaumes. le système de magie Menzothienne m'a fait penser à celui du roman Des Sorciers et des Hommes de Thomas Geha.

Ce premier tome de la trilogie d'Alamander est un roman qui a de nombreux atouts pour lui, mais il peut être difficile à cataloguer. Pour moi il s'adresse avant tout aux lecteurs qui ont pas mal de bouteille, car il en faut pour ne pas louper trop de références et jeux de mots débiles/subtils/à tiroir (selon le cas). On peut aussi le lire sans grande culture livresque (ou même générale), je pense que cela sera un bon divertissement. Il est très rafraîchissant du fait de ses personnages mais aussi des situations qu'il met en oeuvre, plus que par la trame générale que l'on voit venir dans les grandes lignes. Une véritable réussite dans la fantasy humoristique, genre difficile (peut-on rire de tout ? de quelle manière ? et avec qui ?). Je lirai la suite avec grand plaisir !
Lien : https://aupaysdescavetrolls...
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Vous entrez ici dans une épopée d'une richesse incroyable. L'auteur apporte de la dynamique à son récit en alternant 2 récits en parallèle :
- La quête de Jon, qui le mène notamment à Ker Fresnel. Il rencontrera des personnages aussi atypiques qu'attachants.
- le périple partiellement solitaire de Maek, lié à une école d'assassins.
Personnellement j'ai préféré la partie consacrée à Jon, même si suivre Maek présente tout autant d'intérêt.

Tout d'abord, ce que j'ai aimé. Les personnages centraux sont finalement peu nombreux, cela permet de mieux suivre leurs péripéties.
Cet innovant récit de fantasy se révèle donc plein d'humour, de romance et de rebondissements. Mais j'ai également énormément apprécié l'aspect imagé de cette histoire. En effet, des détails qui peuvent sembler anodins au premier abord sont en réalité d'ingénieuses métaphores de notre vie quotidienne. Je citerai le champ de blé vivant qui, selon les circonstances, forge Maek au combat ou le nourrit.

Une petite réserve toutefois. Les descriptions sont relativement fréquentes. Il est vrai qu'elles facilitent l'immersion du lecteur dans cette aventure, cependant elles peuvent parfois se révéler longues.

L'univers qui nous est proposé est si riche que l'on craint tout d'abord de s'y perdre. Mais pas d'inquiétude, on retrouve très vite nos repères ! Même si la taille du livre est relativement conséquente (536 pages tout de même !), mieux vaut ne pas étaler sa lecture sur une trop longue période. Cela permet de bien s'imprégner de l'histoire et de ne pas se perdre dans ce monde foisonnant et farfelu ! Clairement, on adhère ou pas au style de l'auteur ! Pour ma part, je lirai la suite avec plaisir !
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Cette étrange victoire culturelle avait eu pour conséquence un adoucissement du langage d'origine, qui entraîna à son tour un comportement moins belliqueux. [...] Jon appréciait beaucoup cette partie de l'histoire de son pays où les mots étaient venus à bout des épées.
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– Gouverner, c’est mentir, Jon. Mettez-vous ça dans le crâne. Vous connaissez la différence entre un roi et un démocrate ? Le roi manipule ses sujets en leur faisant croire qu’il a été choisi par des instances supérieures. Le démocrate fait le contraire : il affirme que c’est le peuple qui représente l’autorité sacrée. Qu’on soit désigné par le haut ou par le bas, le résultat est le même : le pouvoir ca à celui qui est le mieux capable d’utiliser son prochain. Je dois cependant reconnaître que vous m’avez surpris. Cette bravade sur ce que vous auriez découvert avait-elle un autre but que celui de me provoquer ?
– En fait, euh…non.
– Pa se motif caché en dehors d’une pulsion de votre ego, donc ?
– Vous êtes incroyable, s’enflamma Jon. Vous parvenez encore à retourner la situation en me faisant passer pour un imbécile !
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La recherche du pouvoir est à l'opposé de celle de la sagesse. Quel que soit le domaine dans lequel nous excellons, notre ego enfle et se distend jusqu'à affecter les lois de gravité sociale. Les autres humains deviennent alors de simples satellites de nos intérêts, leur valeur assujettie à ce qu'ils peuvent nous apporter.
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(Au cours d'une autopsie)
- Messieurs, au risque de me répéter, je dois vous quitter. Je n'ai que trop tardé.
- Vous ne restez pas pour l'examen de la seconde partie du cadavre ? demanda Jon, étonné.
- Sans façon. Ce serait de la gourmandise.

p. 269
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Gouverner, c'est mentir, Jon. Mettez-vous ça dans le crâne. Vous connaissez la différence entre un roi et un démocrate ? Le roi manipule ses sujets en leur faisant croire qu'il a été choisi par des instances supérieures. Le démocrate fait le contraire : il affirme que c'est le peuple qui représente l'autorité sacrée. Qu'on soit désigné par le haut ou le bas, le résultat est le même : le pouvoir va à celui qui est le mieux capable d'utiliser son prochain.
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