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EAN : 9782882503367
656 pages
Noir sur blanc (05/05/2014)
4.47/5   16 notes
Résumé :
Le Retour d'un Roi est l'histoire magistrale de la première guerre d'Afghanistan. Au printemps de 1839, les Britanniques ont envahi l'Afghanistan pour la première fois. En pénétrant dans le pays, les Britanniques n'ont rencontré que peu de résistance en face. Mais après deux ans d'occupation, le peuple afghan s'est montré plus farouche : lançant l'appel au djihad, il a précipité le pays dans une rébellion violente. La première guerre anglo-afghane s'est achevée sur ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Il y a 4 ans, je préparais le concours du Capes en histoire et la question au programme d'histoire contemporaine portait sur l'empire britannique. En étudiant un tel sujet, on ne peut pas passer à côté de la colonisation de l'Inde et d'un événement marquant de cette période : la révolte des cipayes de 1857.
Cette mutinerie des soldats indigènes engagés aux côtés des britanniques fut une des premières manifestations du rejet de l'occupant et un fait précurseur dans le développement du mouvement nationaliste indien . Trois raisons sont généralement invoquées pour expliquer la rébellion des soldats : l'envoi de certains d'entre eux outre-mer ( en contradiction avec le système de caste pour les Hindous), l'annexion d'une région dont d'autres étaient originaires et enfin l'utilisation d'un nouveau fusil obligeant les cipayes à retirer les cartouches avec leurs dents alors que celles-ci sont enduites de graisse animale.
Mais bien avant ces faits déclencheurs, le ver était déjà dans le fruit. le mécontentement grondait déjà au sein des rangs. En effet, nombre d'entre eux étaient des survivants de la première guerre anglo-afghane de 1839-1842 qui fut un véritable désastre tant en pertes humaines qu'en prestige pour l'empire. Dans les manuels de concours, cette guerre n'était que très brièvement évoquée comme si elle n'était qu'un événement annexe et secondaire.
Je suis stupéfaite, après ma lecture du récit époustouflant de William Dalrymple, de constater à quel point cette guerre était très loin d'être une petite opération sans importance mais un véritable revers pour la politique, la diplomatie et la grandeur de l'empire !

En 1809, le Shah Shuja qui règne sur ce qui n'est alors que le royaume de Kaboul ( et non encore l'Afghanistan tel qu'on le connaît) est chassé de son trône par Dost Muhammad Khan représentant de la famille rivale à celle régnante. le Shah s'abrite d'abord au royaume Sikh dont le roi le dépouille de ses biens avant de l'emprisonner. Shah Shuja parvient tout de même à s'enfuir et se réfugie sous la protection des britanniques alors bien installés en Inde. En Asie, la Russie et la Grande-Bretagne sont donc les deux puissances dominantes. L'influence des russes à la cour persane inquiète les britanniques, ils croient leurs possessions asiatiques menacées. Commence alors le Grand Jeu.
Le Shah de Kaboul est une aubaine pour les britanniques qui voient là le moyen de faire de l'Afghanistan un état-tampon qui les protégerait d'éventuelles attaques russes. Sous la pression de fausses rumeurs propageant l'idée que l'armée russe va marcher sur Kaboul, le gouverneur en poste de la compagnie des Indes, George Auckland, prend alors la décision d'aider Shah Shuja à retrouver son trône, le roi afghan devenant ainsi une marionnette aux mains de ses protecteurs. Mais Auckland ne sait pas encore dans quel bourbier il est allé se fourrer !

Dans le retour d'un roi, William Dalrymple fait de cette première guerre anglo-afghane une grande fresque historique absolument passionnante et richement documentée. Il inclut dans son récit des extraits de correspondances, de mémoires, de journaux, de chroniques, aussi bien britanniques qu'afghanes. En effet, William Dalrymple est historien. Pour écrire ce récit, il s'est rendu sur place et a trouvé au fin fond d'une librairie une série de sources afghanes oubliées de l'historiographie occidentale jusqu'alors essentiellement orientée du point de vue britannique. Ces nouvelles sources ont permis de mieux connaître la vision afghane du conflit, de mieux comprendre les motifs et enjeux de la rébellion. Lorsque les multiples versions d'un fait divergent, il les présente toutes en les critiquant et en proposant celle qui lui paraît être la plus pertinente. L'ouvrage est également agrémenté de cartes, plans, illustrations, de biographies et d'une longue et riche bibliographie. Il ne s'agit donc pas d'un roman mais bien d'un récit basé sur des faits vérifiés, aucun détail n'est fictionnel et pourtant le tout se lit comme un roman :

“The aim is to get something that, while strictly non-fiction, from what is strictly in the archives, reads like fiction.”
“You can't say 'It was a sunny day' unless something in the archives says that the sun was shining on that particular day.”

Le récit est donc constitué de nombreux extraits de ces archives plongeant le lecteur au coeur de l'événement. William Dalrymple rend ainsi la vie à tous ces protagonistes en nous faisant partager leurs pensées et sentiments les plus intimes ainsi que leur vision des faits auxquels ils assistent et participent.

Après avoir lu le retour d'un roi, il est difficile de ne pas voir en cette guerre entre britanniques et afghans un précédent de celle survenue récemment. Dans son dernier chapitre, William Dalrymple revient sur les similitudes et les différences entre ces deux conflits. Mais à travers l'histoire de ce pays, une constante se dégage : celle d'un peuple qui refuse obstinément et à raison une ingérence étrangère dans les affaires de son pays. Les caractéristiques extrêmes de son relief, de sa géographie, de ses populations sont un avantage indéniable pour ses dernières qui maîtrisent très bien le terrain. La méconnaissance des us et coutumes, de la vie des habitants et tout simplement du pays est un lourd handicap souvent déterminant. Ce qui a fait dire au major Broadfoot : « Nous échouons par ignorance. »

Par ignorance mais aussi par excès d'orgueil et d'incompétence. J'ai été sidérée de voir à quel point le pouvoir britannique a accumulé les erreurs stratégiques. Les officiers les plus compétents étaient écartés au profit d'autres totalement incapables et ignorants des questions afghanes. Ces mêmes officiers ont conduit l'armée britannique à la déroute la plus complète par leur obstination à ne pas écouter les conseils de leur entourage et notamment ceux de Shah Shuja qu'ils estimaient faible et inapte à gouverner. Pourtant le monarque s'est révélé bien plus perspicace que prévu.

Après avoir lu le retour d'un roi et effrayé par sa lecture et les analogies entre sa situation et celle de son prédécesseur, le président Hamid Karzai invita William Dalrymple à Kaboul :

"Karzai called me to Kabul during Ramadan last year to talk to him about his forbear, Shah Shuja"
"Karzai refuses to be the West's puppet as he's determined not to repeat the mistakes of his ancestor"

Le plus extraordinaire est de constater l'impact qu'a eu cette lecture sur le président. William Dalrymple a même été contacté par l'ambassadeur britannique en place à Kaboul pour l'informer du durcissement des relations. A la suite de sa lecture, le président Karzai était devenu plus intransigeant.

William Dalrymple nous apprend également que cette guerre est restée très vivace dans les mémoires afghanes. Tout afghan connaît le nom des principaux protagonistes là où les britanniques les ont jetés aux oubliettes. le chef spirituel des talibans, le mollah Omar, a d'ailleurs entériné sa prise de pouvoir par un geste identique à celui de Dost Mohammad Khan dans les mêmes conditions. Un autre aspect étonnant et qui conforte la ressemblance entre les deux situations est la configuration tribale de l'Afghanistan qui est sensiblement identique aux deux époques. D'ailleurs le mollah Omar est rattaché à la famille des Ghilzai, belle-famille de Dost Mohammad Khan tandis que le président Karzai est, lui, descendant du Shah Shuja. On comprend d'autant plus l'effet qu'a pu avoir l'histoire du Shah sur lui.

Le retour d'un roi est donc le résultat d'un travail de recherche et confrontation des archives remarquable et rigoureux . Ce récit historique magistral offre pour la première fois un regard inédit et complet sur la première guerre anglo-afghane qui régalera tous les amateurs de grandes fresques historiques ainsi que tous ceux qui s'interrogent sur l'Afghanistan.

Un immense merci à Babelio et aux éditions Noir sur Blanc pour cette fabuleuse lecture enrichissante !
Et bravo aux éditions Noir sur Blanc pour le travail d'édition remarquable. le livre est magnifique avec un papier de qualité et un encart central de très belles illustrations.


http://vimeo.com/98909818 intervention de William Dalrymple au festival Etonnants Voyageurs 2014

Lien : http://0z.fr/mU_Ec
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(Lu en anglais)
Le Retour d'un roi est le récit de l'invasion et de l'occupation de l'Afghanistan par la Grande-Bretagne de 1839 à 1842.

Vers la fin des années 1830, les britanniques se persuadent que les russes ont des vues sur l’Afghanistan, ce qui pourrait potentiellement avoir des répercussions négatives sur leurs activités en Inde et en Asie Centrale (cf. Le Grand Jeu entre la Russie et la Grande-Bretagne en Asie au XIXe siècle). Ils décident alors d’aider le roi Shah Shuja, en exil en Inde et sous leur protection, à reconquérir son trône en Afghanistan.

Si l’invasion est relativement facile, sur place les britanniques s’attirent vite l’hostilité des Afghans par leur comportement, notamment vis-à-vis des femmes, à cause d’un viol d’abord puis de la prostitution galopante.

Lorsque enfin les britanniques décideront de repartir, en abandonnant le roi Shah Shuja, 4500 soldats britanniques et indiens ainsi qu’environ 12000 de leurs aides de camp seront tués ou mourront de froid dans des conditions atroces.

L’expédition punitive britannique et indienne qui s’ensuivra sera d’une horreur innommable.

Pour la puissance britannique de l’époque victorienne, cette première grande défaite est l’une des pires de leur histoire coloniale du XIXe siècle ; pour les afghans c’est l'un des plus grands triomphes de leur histoire nationale.

Pour écrire ce livre, l’auteur a retrouvé des sources historiques afghanes et indiennes de ce conflit, qu’il a intégré aux versions historiques anglaises plus connues et fait un travail de reconstitution minutieux.

Un des grands attraits de cet ouvrage, est que les personnalités des individus impliqués de part et d’autre de cette première guerre anglo-afghane, ainsi que les différences culturelles, sont admirablement bien décrites.

Tout au long du récit, l’auteur fait des parallèles tout à fait intéressants avec les invasions successives de l’Afghanistan, en particulier par les américains et leurs alliés depuis 2001.

C’est un livre d’histoire, qui se lit comme un roman. Si pas un mot n’a été inventé par l’auteur, la limpidité et la fluidité de son style, sa capacité à donner forme et rendre vivants ces événements historiques d’une grande complexité, en font un auteur hors pair.

C’est aussi un récit de voyages et d’aventures où se côtoient explorateurs, archéologues, espions, poètes, marchants de tout - y compris d’esclaves - guerriers, militaires, vizirs et rois… dans les bazars, les marchés, les temples et palais, sans oublier les jardins et les montagnes d’Afghanistan.

Au moment où je termine ce livre, la presse annonce la mort de Mohammad Omar, connu sous le nom de mollah Omar, chef des talibans, originaire de la branche Gilzaï des Pachtounes, une des tribus citées dans le livre (qui s'allia à la tribu des Barakzais contre les Sadozais)
L’ancien président Hamid Karzai lui est un descendant de la tribu du roi Shah Shuja (Sadozai). Le président actuel Ashraf Ghani est issu de la tribu Pachtoune des Ghilzais (communauté Kutchi).

(NB: des sources disent que c'est Omar qui aurait commandité la destruction des bouddhas de Bâmiyân alors qu'en 1998 et 1999 il les fit protéger; ce seraient des tchétchènes d'Al-Qaïda venus d'Arabie Saoudite qui auraient convaincu les Talibans de faire exploser les statues en 2001).
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William Dalrymple, l'auteur, débute par une présentation des acteurs de son roman : ceux-ci font partie de deux clans afghans qui s'opposent et au sein même desquels les rivalités familiales sont bel et bien présentes et se manifestent de façon violente. L'auteur nous présente également les autres protagonistes, anglais (Sir Wade-persan né a Bengale-, Lord Auckland, les généraux Nott, Pollock, Sale, Elphinstone, les capitaines Mackenzie, Skinner, Sir Macnaghten, Burnes l'officier écossais, le major Pottinger, Henry Rawlinson).

Il va être difficile de résumer un tel livre qui regorge d'information et qui est très dense en terme d'informations, de dates, d'anecdotes, de descriptions.

En lisant l'histoire de ce pays, je dirais qu'il s'agit d'une joute où le chef de chaque clan va tantôt prendre le pouvoir, le perdre et où les anglais en sus de leur conquête du territoire auront manipulé, trahi, fait preuve de lâchetés et n'auront pas su écouter les conseils des autochtones ; ceci leur vaudra d'ailleurs de mettre en place de bien mauvaises stratégies de repli, de fuite ou de batailles qui entraînera des pertes humaines et financières considérables. Leur méconnaissance géographique (et climatologique) du pays ainsi que les divergences au sein de cette communauté anglophone allaient indubitablement concourir à un fiasco.
Des années plus tard, les mêmes erreurs ne se reproduisent-elles pas ?

1809, en Afghanistan, Shah Shuja règne. L'empire fondé par son grand-père révèle un pays dont les contours en font une nation qui en raison de sa topographie, de la diversité de ses composantes religieuses, linguistiques et tribales ne peuvent créer une unicité. D'ailleurs au sein d'une même lignée, les vendettas ne sont pas rares.
L'East India Company basée en Inde à Delhi décide de sceller une alliance avec Shah Shuja. L'ambassade qui part de Delhil est plutôt agréablement surprise par l'accueil que lui fait Shah Shuja et les anglais très étonnés de voir autant de beauté chez ces Afghans. Une guerre fratricide ayant entraîné l'éclatement de l'Afghanistan et sa ruine intellectuelle, Shah Suja a donc vraiment besoin de cette alliance avec les anglais. Malheureusement, Shah Mahmood, un des frères de Shah Shuja s'échappe et s'allie avec le clan des Barakzaï : c'est alors la déroute. Les anglais décident de fuir et Shah Suja demande l'aide des Sikhs à Lahore. Accueilli sans réserve, il se retrouve “prisonnier” de Ranjit Singh et doit accepter de donner le plus beau bijou du pays. Fort heureusement, les femmes du Shah arrivent à s'enfuir et c'est au terme de deux années, que Shah Shuja qui s'est empaté, a perdu et sa superbe et ses hommes, arrive à Ludhiana. Après l‘échec d'une première tentative d'expédition menée vers le Cachemire, il réussit enfin à récupérer Peshawar mais une attaque est lancée et il est contraint à l'exil à Ludhiana.
Pendant ce temps, la Russie s'étendu au sud et a l'est et a la main-mise sur l'AzerbaÏdjan et l'Arménie, alors perdus pour l'Iran.
A la fin des années 1820 la Russie qui a déjà investi le Daghestan est près de prendre Constantinople et Téhéran.
De 1826 à 1827 une guerre oppose les persans et les russes mais les anglais lâchent alors les persans, lesquels se disent qu'il vaut finalement mieux “s'allier” avec les russes plutôt que de devoir les affronter.
En 1833 Shah Shuja quitte Ludhiana pour récupérer le trône du Khorassan, suivi par 30000 hommes, mais la quatrième tentative du roi déchu n'aboutit pas en raison d'une attaque surprise qui lui est faite à Kandahar.

Pendant ce temps là, les pays voisins ou conquérants mettent en place leur pion ; Ivan Simonitch est nommé à Téhéran en 1833 et Rawlinson arrive avec sa mission militaire.

Hérat reste LA ville à prendre car c'est là que tout se joue : les persans souhaitent cette ville, tout comme les russes qui une fois les portes de l'Afghanistan enfoncée, pourront s'emparer rapidement de l'Inde ce qui terrifie les anglais. Dost Mohammad qui avait supplanté Shah Shuja et qui avait le soutien des anglais, se voit être lâché par eux : il fait donc alliance avec les russes et sous son impulsion, une guerre sainte est déclarée envers les Sikhs (Ranjit Singh occupe alors Peshawar). Avec cette opposition entre Ranjit Singh et Dost Mohammad, Wade encourage Auckland à ramener sur la scène politique Shah Shuja. Grâce à plusieurs manoeuvres et à la tête d'une troupe britanico-indienne, il reprend son trône et son fils Timour soutenu par l'armée du Bengale et de Bombay prend la deuxième ville du pays.
Cependant, les afghans, s'ils ne sont pas mécontents du retour de Shah Shuja, le sont lorsqu'ils voient que l'armée anglaise reste en place.

1839 : Ranjit Singh meurt. Dost Mohammad s'enfuit de sa prison, livre bataille mais échoue.
L'armée de l'Indus et Shah Shuja entrent enfin à Kaboul.

Au sud du Pendjab, les dirigeants sikhs se succèdent et la région demeure donc instable. Les garnisons anglaises sont prises, la famine menace et la résistance afghane se met en place. Les anglais envisagent un retrait vers l'hindoustan en faisant fit des intérêts de Shah Shuja. Seul Mac Naghten pense qu'abandonner Shah Shuja leur attirera les foudres de l'Angleterre.

Mohammad Akbar Khan fils de Dost Mohammad prend la suite de son père et un accord passé consiste en une possibilité pour Shah Shuja de partir avec les anglais ou de rester à Kaboul. Shah Shuja propose aux anglais de rester avec lui au Bala Hissar (la résidence) et de rester à l'abri pendant l'hiver. Cependant, ces derniers n'écoutent pas sa mise en garde et une vraie boucherie va avoir lieu dès lors que les anglais se seront éloignés dans les montagnes. La neige, le froid, la mort des chevaux, l'absence de nourriture auront raison de milliers de cipayes, d'anglais et d'afghans. Shah Shuja qui attend toujours l'aide des anglais et qui ne voit rien venir, finit par partir seul pour Jalalabad, laissant ses épouses au Bala Hissar et en ayant au préalable nommé son fils le prince Shahpur, gouverneur de la capitale.
Au cours de sa fuite, Shah Shuja est assassiné lors d'une embuscade.

Avril 1842, l'armée d'Akbar Khan entre en scène à Jalalabad mais les anglais ripostent et gagnent cette bataille.
En septembre, Fateh Jang, le fils de Shah Shuja arrive au Bala Hissar et le drapeau anglais est hissé. Les anglais sont horrifiés de découvrir une ville ravagée, des cipayes mutilés, infirmes, et des cadavres qui jonchent les rues ; un mois plus tard les troupes anglaises se préparent à quitter l'Afghanistan et ses habitants révulsés de voir que les anglais les “plantent” là, à la merci d'Akbar Khan.

C'est en 1847 qu'Akbar Khan est fait prisonnier (par son père, dit-on) et Dost Mohammad reprend le contrôle de bon nombre de villes, lesquelles délimitent l'Afghanistan actuel. Hérat sera la dernière ville conquise et les descendants de Dost Mohammad dirigeront le pays jusqu'en 1970.
Le Shah, lui, est toujours resté fidèle et loyal envers ses engagements même s'il ne fut pas un régent exempt de défauts et malgré les erreurs des anglais avec lesquels il collaborait, il est demeuré populaire.

1980 : les russes se retirent d'Afghanistan.
2001 : les troupes américaines et anglaises arrivent en Afghanistan.

Un grand merci à l'auteur pour son livre qui est une vraie mine de connaissance et pour toutes les jolies gravures, peintures qui se trouvent au milieu du livre.
Merci aux éditions Noir sur Blanc et à Babelio pour ce livre reçu dans le cadre d'une masse critique
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L'Afghanistan, situé au carrefour d'empires antagonistes, voie de passage entre l'Inde et le Moyen-Orient, partagé géographiquement par l'Hindu-Kush, kaléidoscope de clans et de tribus, a toujours été un pays difficile à gouverner. L'auteur relate un épisode particulièrement riche en rebondissements de l'histoire afghane : l'invasion anglaise de l'Afghanistan en 1839 qui se solda, trois ans plus tard par l'anéantissement de l'armée anglaise en fuite, en plein hiver, harcelée par les guerriers afghans. A la lecture de ce livre, on se dit que les russes (et les américains dans une certaine mesure) auraient bien été inspirés de consulter les témoignages historiques de l'époque avant de se lancer dans une invasion de ce pays historiquement incontrôlable comme s'en sont rendus compte les anglais à leurs dépens.
La période en question commence en 1803. Shah Shuja, héritier de l'empire Durrani fondé par son grand-père, dirige le pays jusqu'à sa défaite face aux Barakzaï, famille rivale à la bataille de Nimla en 1829. Il trouve asile auprès de la compagnie anglaise des Indes orientales, fer de la lance des colonisateurs anglais. Ces derniers alors maître de l'Inde, libérés de la menace française après Waterloo, surveillent du coin de l'oeil la Russie d'Alexandre II qui lorgne du côté de l'empire perse alors en déclin. L'équilibre précaire des forces en présence bascule lors de la découverte d'un espion russe en Afghanistan. Alors commence ce qu'on appelle le Grand Jeu, avec envoi d'espions et jeux d'influence auprès des monarques en place. En 1839, les Anglais se croyant menacer sur la frontière nord de leur Empire, décide de renverser l'émir en place, Dost Mohammad, soupçonné d'entretenir des liens avec l'ennemi, et de le remplacer par l'ancien roi Shah Shuja. Celui-ci regagne son trône grâce à l'armée anglaise et mais voit rapidement son pouvoir limité par les officiers anglais. La situation se dégrade rapidement entre les « firangis » considérés comme des occupants et les tribus afghanes en raison de mal entendu, de maladresses et d'incompétences, renforcés par des clivages culturels et religieux. Les tensions aboutissent à des explosions de violence bientôt incontrôlables.
Un livre dense et passionnant que l'on quitte à regret. Des extraits de chroniques afghanes et de témoignages anglais sont insérés dans le texte, donnant voix aux protagonistes de ce drame, parfois difficile à suivre en raison du nombre élevé des acteurs. En conclusion, l'auteur tire des parallèles entre le fiasco de l'occupation anglaise et la situation actuelle. Une belle leçon d'histoire sur l'aveuglement politique que les belligérants d'aujourd'hui pourraient méditer.
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Les événements décrit dans « le Retour d'un roi » pourraient être une fable tant les faits historiques rapportés sont caricaturaux.
Nous avons d'un côté l'arrogant et condescendant envahisseur britannique, de l'autre l'Afghanistan imprenable, fier et courageux.

Quand l'armée britannique abandonne le pays en 1842, seule une poignée de ses 16.000 hommes en sort vivant. Que s'est-il passé ?

Au début du XIXe siècle, Shah Shuja, souverrain du royaume de Kabûl est chassé de son trône par Dost Muhammad Khan, membre d'une famille rivale, il s'abrite alors au royaume sikh voisin où on n'hésite pas à le dépouiller de ses biens avant de l'emprisonner. Shah Shuja parvient toutefois à s'enfuir et se réfugie en Inde britannique.
À cette époque, la Grande-Bretagne voit son influence en Asie centrale menacée par le resserrement des relations entre la Russie et la cour de Perse. Commence alors le « Grand jeu » : c'est dans ce contexte géopolitique tendu que l'armée britannique entre en Afghanistan, espérant rétablir sur le trône le souverain déchu et mettre en place un gouvernement fantoche.
C'était sans compter un pays indomptable, avec ses intrigues de palais, sa géographie accidentée, ses tribus et ethnies disparates, sa culture raffinée et sa volonté farouche d'indépendance.

L'ouvrage ci-présent nous offre un parallèle saisissant entre notre époque et jadis. Force est de constater que les conflits passés n'ont pas servi de leçons aux envahisseurs d'aujourd'hui. La politique afghane nous rappelle une fois de plus qu'en asservissant un peuple et ses dirigeants, en les traitant avec mépris ou condescendance, le chien finit un jour ou l'autre par mordre la main du maître.

À l'évidence, les contextes géopolitiques, les prétextes invoqués pour passer à l'offensive, ainsi que les conséquences des guerres d'hier et d'aujourd'hui ne sont pas pareils. Si Britanniques de l'époque affichaient franchement leurs objectifs — défendre les intérêts de l'Empire et les marches de l'Inde.
L'Occident se drape aujourd'hui dans la morale et les grands principes pour justifier leur croisade : sauver les Afghans de la barbarie, contre eux-mêmes s'il le faut.
Cette de barbarie aujourd'hui imputées aux résistances musulmanes est à relativiser. Force est de constater que l'Occident range systématiquement ses belles valeurs au placard quand il s'agit de mettre en branle l'entreprise coloniale. le récit de la communauté hindoue de Kabûl qui avait survécu durant des siècles de domination musulmane et fut purement et simplement anéantie en quarante huit-heures par les dépravations et les exactions des Britanniques est sur ce point très éclairante : « les portes étaient enfoncées, les femmes violées, les biens pris de force et leurs propriétaires abattus comme des chiens. »

« le Retour d'un roi » est un pavé de 645 pages couronné de magnifiques illustrations dans l'encart central. Il est, en outre, le fruit d'un travail de documentation impressionnant, en témoigne la bibliographie fournie et les références précises.
Je remercie Babelio et les éditions Noir sur Blanc pour cette découverte !
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critiques presse (1)
Telerama
02 juillet 2014
Il y a de l'ogre chez Dal­rymple, une énergie qui le pousse à saisir l'ensemble des points de vue, à la recherche de sources inédites.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Au fur et à mesure de l'avancée des négociations, ce qui, à l'origine, devait être une opération sikhe au profit des intérêts britanniques se transforma lentement en une opération britannique pour servir les intérêts sikhs.

Ce n'est qu'à la fin du mois de juin, après transfert du lieu de discussion à Lahore - où Burnes et Masson vinrent de Peshawar pour gonfler la délégation anglaise -, que Ranjit confirma être prêt à se joindre à une armée principalement composée de Britanniques dans le but de mettre Shuja sur le trône.

"'Votre Altesse a conclu voici quelques temps [en 1834] un traité avec Shah Shuja ul-Mukh", dit Macnaghten. "Pensez-vous qu'il soit toujours dans votre intérêt de consacrer la validité de ce traité et vous conviendrait-il que le gouvernement britannique signe à son tour ledit traité ?"

-"Ce serait ajouter du sucre au lait", répondit Ranjit.
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En 1843, peu après son retour de la boucherie que fut la première guerre anglo-afghane, l’aumônier militaire de Jalalabad, le révérend G.R. Gleig, rédigea un mémoire sur la catastrophique expédition dont il fut l'un des rares rescapés.

Ce fut, explique-t--il, "une guerre lancée avec des objectifs à la pertinence douteuse, menée avec un curieux mélange de témérité et de timidité, conclue après bien des souffrances et des désastres, sans que le gouvernement qui l'avait dirigée ou l'important corps de troupes qui l'avait faite n'en fut auréolé de beaucoup de gloire. Pas un seul profit, politique ou militaire, n'a été retiré de ce conflit. Notre évacuation finale du pays ressembla à la retraite d'une armée vaincue."
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Plus je rentrais dans le détail, plus le premier engagement catastrophique de l’Occident en Afghanistan me semblait présenter de vraies similitudes avec les aventures néocoloniales d’aujourd’hui. Car la guerre de 1839 avait été lancée sur la foi d’informations tripatouillées à propos d’une menace virtuellement non existante : à partir du séjour d’un seul envoyé russe à Kaboul, l’histoire avait été gonflée, puis manipulée par un groupe de faucons ambitieux et idéologues dans le but de créer une peur – en l’occurrence, celle d’une invasion russe imaginaire. Comme l’écrivit de Téhéran en 1838 John MacNeill, le russophobe ambassadeur britannique : « Nous devrions déclarer que quiconque n’est pas avec nous est contre nous… Nous devons prendre le contrôle de l’Afghanistan 2. » Ainsi fut déclenché un conflit inutile, coûteux et parfaitement évitable.

Je m’aperçus petit à petit que les parallèles entre les deux invasions n’étaient pas simplement anecdotiques, mais substantiels. Les mêmes rivalités tribales et les mêmes batailles continuaient à se dérouler dans les mêmes endroits cent soixante-dix ans plus tard, sous couvert de nouveaux drapeaux, de nouvelles idéologies et de nouveaux marionnettistes politiques. Les mêmes villes abritaient des garnisons étrangères qui parlaient les mêmes langues et étaient attaquées à partir des mêmes cercles de collines ou des mêmes passes d’altitude.
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Mohan Lal nous donne une quatrième version, sans doute la plus crédible et incontestablement la plus émouvante.

Après que Charles Burnes eut été tué et que le feu eut ravagé toute la chambre, Sir Alexander Burnes fut contraint de venir sur le pas la porte qui donnait sur son jardin. Là, il implora la multitude de lui laisser la vie sauve, mais, recevant en réponse un torrent d'insultes, il abandonna tout espoir de salut. Sur ce, il dénoua la lavallière noire qu'il avait autour du cou et s'en banda les yeux, afin de ne pas voir d'où proviendrait le coup fatal. Après cela, il s'avança, et en une minute, il fut taillé en pièces par la foule en furie.

"Les lames affûtées de deux cents courageux Afghans réduisirent son corps en fragments d'os", raconte Maulana Kashiri
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le cortège qui quitta la cité offrait néanmoins un spectacle affligeant car, accompagnant les Britanniques d’une démarche lourde, venait tout un éventail de groupes dont les vies avaient été déracinées et ruinées par la désastreuse aventure d’Auckland : la noblesse afghane qui s’était rangée du côté des envahisseurs, et en particulier les Qizilbash, très anglophiles, qui n’avaient guère d’autre choix maintenant que de plier rapidement bagage et de suivre leurs alliés ; les longues files de cipayes estropiés et invalides qui avaient été abandonnés à leur sort par les officiers d’Elphinstone lors de la retraite de 1842, pour beaucoup amputés et rongés par la gangrène, devaient effectuer le trajet ballottés dans des litières ou des paniers accrochés à des chameaux ; les quelque cinq cents familles hindoues sans ressources, que le pillage et la destruction de leur quartier à Kaboul avaient laissées ruinées et sans foyer ; enfin, fermant la marche, les survivants de la dynastie Sadozaï ainsi que les harems des shahs Shuja, Zaman et Fatteh Jang, dont tous les espoirs de reconquête de leur royaume avaient été anéantis par l’incompétence et l’impopularité des occupants britanniques et qui, de nouveau, se préparaient à un avenir incertain dans un pays étranger.
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Videos de William Dalrymple (8) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de William Dalrymple
Les relations entre philosophie et histoire peuvent prendre deux formes distinctes. Dans le premier cas, la philosophie interroge le sens des événements historiques (on parle alors de philosophie de l'histoire). Dans le second, la philosophie interroge la discipline historique et non plus son objet, s'intéressant au type de connaissance que produisent les historiens, et à l'extension de la classe des activités de recherche qui relèvent de la catégorie «histoire». C'est sur ce second type de réflexion que porte cette conférence. Celle-ci reviendra sur une question aussi ancienne que la philosophie des sciences : lorsqu'on explique en histoire, quelle forme prend cette explication, quelle relation entre l'explication historique et les explications qu'on trouve dans d'autres disciplines?
Dans un premier temps, Denis Forest reviendra sur la figure de William Whewell qui définit au XIXe siècle la classe des sciences «palétiologiques» (ou historiques) et propose un examen critique des explications que l'on peut rencontrer dans une science de ce type, emblématique à ses yeux : la géologie. Dans un second temps, il présentera la conception moniste de Carl Hempel qui, au milieu du XXe siècle, nie toute spécificité à l'explication en histoire (au sens ordinaire de ce mot) au nom de l'unité de la science. Enfin, il s'intéressera à un échantillon contemporain de connaissance historique (le livre récent de William Dalrymple, Anarchie) pour caractériser les explications que produisent les historiens, en soutenant qu'elles ne consistent pas à invoquer des lois causales, contrairement à ce que proposaient Whewell et Hempel. Il tentera également de montrer comment s'articulent une valeur comme celle d'objectivité et la dimension perspectiviste de toute connaissance historique.
Par Denis Forest, professeur de philosophie et d'histoire des sciences à l'université Paris 1 et membre statutaire de l'Institut d'histoire et de philosophie des sciences et des techniques
En savoir plus sur le cycle Comment écrire l'histoire aujourd'hui ? : https://www.bnf.fr/fr/agenda/comment-ecrire-lhistoire-aujourdhui
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