« Mon premier jour sur Terre, je le connais bien et, même si personne ne veut me croire, je me souviens de tous les bruits, tous les sons. » Voici, « Vaki pour tout le monde, Hermanu je ne sais pas pourquoi et Moanam pour mon père. » «
le Roi absent » de
Moetai Brotherson est un récit où s'entrecroisent l'ancestral, les origines de la Polynésie française, les légendes enracinées dans une contemporanéité avérée. On ne quitte pas des yeux un seul instant Moanam, narrateur de «
le Roi absent » contant sa vie, l'idiosyncrasie des Iles sous le vent, des attols de l'archipel de Tuamotu etc. Ce récit de dualité vêtue est d'évasion, d'attachement pour cet enfant grandissant au fil des pages. Les croisements d'un astre à un autre, l'ancien temps, les rites, ce qui persiste et signe, résiste, est magnifique, porteur et source légendaire. On a l'impression d'un réel qui ne peut advenir sans les voix qui assignent. Echos fabuleux entre les pages qui sont d'essences, vagues annonciatrices pour Moanam. Ce jeune enfant est muet. Son père meurt, noyé, écumes intestines, filiation arrachée, main qui lâche l'enfant. Mais le Tout est combattif. Moanam est seul au monde. Il va aller en pension à Papeete, plus âgé à Paris. « Je m'étais préparé au choc, au décalage entre Papeete et Paris. En un sens j'avais déjà vécu cela entre Nuku Hiva et Papeete. » Paris et ses secrets, Paris, le froid et l'éloignement. Soutenu par son oncle et sa tante, constante familiale, l'entraide est de ferveur et d'altruisme. Surdoué, Moanam va jouer aux échecs. S'affronter aux autres, se frayer un chemin, vaincre la solitude, levier d'intelligence au monde. L'enfant est roi. « Toutes ces femmes me racontaient tant de choses d'un passé lointain, tout cela devait avoir un sens. J'étais revenu chez moi, il me semblait maintenant nécessaire que je prenne part à cette quête indirecte. » « Qui est
le roi absent ? Matato'i, Mako'i, Haumoana, Maurata, Manuragi. Ils me semblaient familiers et pourtant je ne pouvais pas les avoir connus. » On ressent cette plénitude venue des croyances, cette amplitude mythique. Cette histoire est à l'instar d'une île magnifiée. Des archipels qui s'étirent en l'Homme, tracés existentiels. L'origine même d'un bleu océan, des ancêtres qui sont de signatures et d'appels. le vent qui s'élève et Moanam à contrario, manichéen est de jour et de nuit. Vivant, profondément enraciné dans la Terre-Mère et bousculé par ce légendaire lui inculquant les lignes même de la vie. « Ma mère, le dernier tambour, mon père,
le roi absent, et moi ? Pauvre de moi ! Investi d'une quête qui me dépasse. » « Les oiseaux ne m'ont jamais parlé, à moi non plus. » «
le Roi absent » est régénérant. L'écriture est une ode de puissance, de grâce, arrimée dans un style qui dessine à la perfection les îles du bout du monde. L'écriture est un seuil, lumineuse et attirante. «
le Roi absent » est le monde entre les mains. Lisez, retenez les langages universels, vous serez ainsi du voyage, Moanam sera votre guide. Publié par les Editions Au vent des îles.