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EAN : 9782848051161
138 pages
Sabine Wespieser (23/08/2012)
3.47/5   114 notes
Résumé :
« Karl Marx et mon père avaient un point commun : ils ne travaillèrent jamais pour gagner leur vie. "Les vrais révolutionnaires ne travaillent pas", affirmait mon père. Cet état de fait lui paraissait logique : on ne pouvait œuvrer à l’abolition du salariat et être salarié – c’était incompatible. » Y. M.
Après la mort de son père, Yassaman Montazami se réfugie dans l’écriture pour tenter de garder vive la mémoire de ce personnage hors norme. La drôlerie et la... >Voir plus
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sur 114 notes
L'auteure raconte l'histoire de son père, Behrouz. Enfant prématuré et entouré des soins constants et dévorants de sa mère, le jeune Behrouz vit le jour à Téhéran dans les années 1940, au sein de la bourgeoisie iranienne. le garçon ne manqua jamais de rien, mais il montra très tôt un intérêt marqué pour Karl Marx dont il fit le sujet d'une thèse qu'il n'acheva jamais. Inscrit à la Sorbonne dans les années 1960, Behrouz fut toute sa vie un étudiant avide de connaissances, un intellectuel curieux et engagé. Il ne travailla jamais et la propriété ne l'intéressait pas. « Il était parfaitement dénué du désir de dépasser les limites étriquées de son enveloppe charnelle et de l'étendre au monde matériel. » (p. 26) Mais contrairement à ses amis ou à son entourage, il ne connut pas les douleurs de l'exil et les terreurs de la révolution islamique qui bouleversa l'Iran.

Yassaman Montazami aimait son père avec ferveur, voire avec adoration. Il la traitait avec respect, comme une adulte et l'enfant entra très tôt dans le monde intellectuel de son père. Pour elle, il est un héros généreux et drôle. « Être libre de son temps lui laissait également toute latitude de donner le sien. Car mon père était d'un dévouement incommensurable. » (p. 56) Mais, les années passants, l'enfant devenue femme porte sur cet homme un regard qui, s'il reste tendre, est moins complaisant. Elle parle également de sa mère Zâhra et de sa grand-mère Rosa. Ce livre du père est un troublant récit des origines et un bel hommage à la famille. Hélas, je suis très peu sensible à l'autofiction. En outre, la plume de Yassaman Montazami, bien qu'honnête et maîtrisée, manque cruellement d'identité à mes yeux. le témoignage est bouleversant, mais la voix qui le porte n'a pas d'accent.

Toutefois, j'ai apprécié ce livre pour ce qu'il montre de l'Iran. La révolution islamique en littérature, je l'ai découverte avec Marjane Satrapi et son roman graphique, Persepolis. L'auteure racontait son histoire et celle de ses proches en plein coeur du bouleversement qui marqua le pays. Dans son texte, Yassaman Montazami insiste bien sur la honte, voire sur la douleur paradoxale que ressentait son père de ne pas avoir souffert du changement de régime. Même en prenant fait et cause contre la dictature islamique, Behrouz n'a pas été un martyr de la révolution islamique et c'est peut-être la pire souffrance qu'il pouvait endurer, lui qui ne vivait que pour ses idées.

Voici donc une lecture en demi-teinte qui ne m'a pas vraiment émue, mais dont j'ai apprécié les réflexions. Et même si Yassaman Montazami n'a pas su me toucher en parlant de son père, elle a su me rappeler – bien que je ne puisse jamais l'oublier – à quel point j'aime le mien. D'un hommage au père à un autre, finalement, le meilleur des jours est toujours celui où je vois et j'entends mon papa.
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Behrouz, héro de ce livre , est né avec une minuscule espérance de vie. Pourtant, un jour , son pronostic vital ne fut plus engagé et ses parents lui donnèrent son prénom , signifiant, le meilleur des jours.
C'est donc l'histoire de son père que l'auteure nous raconte, ce père si joyeux, si volubile, si décalé. Ce père communiste qui quitta Téhéran pour venir faire ses études en France .
Ce père qui laissa derrière lui ses amis mener le combat perdu d'avance de la liberté contre les barbus enturbannés.
Ce père, épicurien , idéaliste,épris de liberté, drôle" à faire de chaque jour un premier Avril", couvé par ses parents mais peu aimé par sa femme.
le livre transpire l'émotion , les mots sont simples mais bien agencés, la lecture est facile mais envoutante.
Il ne s'agit pas trop de l'histoire du renversement du Shah même s'il est question.
Ce livre est un livre d'amour , une longue lettre écrite à un père qui fut , et est encore, aimé.
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"Lorsque cette thèse sera publiée, disait-il,la vérité éclatera comme une bombe.Tout s'expliquera."
Il, c'est le père de Yassaman Montazami, un marxiste d'origine iranienne plus que convaincu, éternel étudiant, dont la thèse-fleuve, oeuvre d'une vie, veut "révéler aux hommes la cause des inégalités".
C'est dans ce premier roman, intitulé le meilleur des jours (traduction de Behrouz en iranien, prénom du père de l'auteur) que Yassaman Montazami, alors en psychanalyse, rend hommage à son père décédé d'un cancer tout en dénouant les fils du passé de ce personnage "hors norme", intellectuel,idéaliste,original,dévoué,venu en France pour ses études,y restant avec femme et enfants toujours pour cause d'études. Elle effectue, par là même, une mise à distance qui lui permet de comprendre que les théories fumeuses dans lesquelles l'a élevée ce rentier marxiste euphorique et fils de bourgeois hyper-protégé par sa maman l'ont tenu éloigné de corps de la véritable révolution iranienne.
Avec beaucoup d'humour, Yassaman Montazami sait rendre vie à sa grand-mère Rosa (haute en couleurs, mère miracle qui sauve son prématuré envers et contre tout, mère abusive qui le gave comme une oie,mère tyrannique qui le maintien sous sa coupe, femme de tête qui écrit des best-sellers culinaires) et à son père capable d'accueillir chez lui des exilés politiques de tout bord comme l'amie monarchiste de sa mère Shadi Khanoum ou son ami d'enfance "pilonné" par le régime islamiste mais un père éternel adolescent farceur aux blagues parfois douteuses.
C'est un pan de l'histoire iranienne qui se déroule sous nos yeux aussi.
Dommage que la fin vire au pathos avec cancer du pancréas,disputes et douleurs.
Mais un père n'est pas un mythe, il est un simple mortel,c'est peut-être ce que Yassaman Montazami, avec une plume alerte et prometteuse, arrive enfin à accepter.
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Le premier roman de Yassaman Montazami est dédié à son père, Behrouz (« le meilleur des jours » en persan), décédé en 2006. Elle nous raconte sa vie entre Paris et Téhéran et le dépeint comme un idéaliste, ardent défenseur des idées de Marx, toujours prêt à faire une bonne blague à ses amis – comme par exemple s'éclipser d'un dîner pour se raser la moustache et revenir s'installer parmi les convives comme si de rien n'était. Ce court roman évoque des personnages hauts en couleur, comme les réfugiés communistes qu'hébergea le père de Yassaman. L'auteur utilise des images poétiques qui saisissent parfaitement les personnes et leur singularité. Un très beau portrait, plein d'affection pour un homme au destin exceptionnel.
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Le meilleur des jours (qui est la signification française du nom du père, Behrouz) est un charmant petit livre autobiographique dans lequel l'auteur rend hommage à son père, intellectuel iranien partagé entre sa vie à Paris (avec sa femme) et sa vie en Iran (avec sa mère), marxiste engagé ayant vécu à sa manière la Révolution iranienne. Court, bien écrit, agréable à lire, résumant toute une vie en 138 pages, il m'a permis de découvrir un jeune auteur au regard incisif et plein d'un humour à la fois léger et grave.
Belle découverte ma fois, et j'aurai plaisir à lire son prochain livre.
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Citations et extraits (24) Voir plus Ajouter une citation
PROLOGUE

Aux premiers jours de l’été 2006, mon père quitta Téhéran pour Paris afin de faire renouveler son titre de résident en France, qui arrivait à expiration. Comme je m’étais étonnée qu’il entreprenne pareille démarche, dont l’utilité m’échappait, étant donné qu’il était retourné vivre en Iran six ans plus tôt, il m’avait répondu que ce document lui épargnerait pendant les dix années de sa validité les tracasseries administratives d’une demande de visa chaque fois qu’il voudrait nous rendre visite, à mon frère et à moi. Il se projetait dans l’avenir. Il ignorait qu’il n’en avait plus.

La veille de sa venue, alors allongée sur le divan de mon psychanalyste, je laissai tout à coup échapper une phrase incongrue, qui me surprit moi-même, comme si une autre personne l’avait prononcée : « Quelqu’un va mourir. » Un temps s’écoula, durant lequel je me demandai qui pourrait bien être appelé à disparaître, quand soudain je m’entendis articuler : « Cette personne, c’est mon père. » La séance touchant à son terme, ce fut sur ces derniers mots que je quittai mon psychanalyste. En raison des vacances, nous ne devions plus nous revoir avant plusieurs semaines.

Le lendemain, quelques heures après qu’il avait poussé la porte de chez elle, ma mère me téléphonait : « Behrouz va mal », me dit-elle. Il souffrait de douleurs abdominales atroces. Le médecin venait de lui prescrire des calmants, mais il fallait selon lui procéder à des examens plus approfondis. « Viens vite ! » ajouta ma mère.

Au moment d’appuyer sur la sonnette, je fus convaincue qu’un seul coup d’œil me suffirait à savoir si mon père allait vivre ou mourir : comme les devins de l’Antiquité dans les entrailles fumantes d’animaux ­sacrifiés, je lirais cet augure sur ses traits.

Ma mère m’ouvrit et me fit entrer sans prononcer un mot. Je la suivis jusque dans la chambre où mon père était allongé. En le voyant, je sus qu’il était condamné. La douleur avait à ce point remodelé son ­visage que j’eus du mal à le reconnaître. Je lui adressai malgré tout un bonjour désinvolte, d’une voix haut perchée, dont la légèreté feinte me fit honte. Il se redressa dans son lit et me sourit. Je m’approchai et nous nous serrâmes dans les bras l’un de l’autre. Puis, d’instinct, je déposai un baiser sur son front, comme si je lui disais déjà adieu.

Deux mois plus tard, ses cendres reposaient dans le fond d’une urne funéraire, au columbarium du Père-Lachaise.

« Mon père est mort » : tels furent mes premiers mots lorsque je retrouvai mon psychanalyste.
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Jusque très tard, les goûts littéraires de mon père présidèrent au choix de mes lectures. La plupart des livres qu'il me recommandait, il les avait lus à l'adolescence, certains dans leur traduction en persan, d'autres directement en français, langue dans laquelle il avait été éduqué comme nombre d'enfants de la bourgeoisie téhéranaise. Outre qu'ils m'ouvraient autant de fenêtres sur le monde, tous étaient empreints à mes yeux du plaisir intense qu'il disait avoir éprouvé à les dévorer. Je cherchais dans leurs pages les traces du jeune garçon qu'il avait été.
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L’hospitalité n’était pas la moindre manifestation de la générosité de mon père. Aussi, avant comme après la Révolution islamique, notre appartement resta-t-il longtemps un point de passage pour des dizaines d’exilés politiques.
Si certains avaient quitté l’Iran légalement, la grande majorité d’entre eux avaient enduré la rudesse et bravé les dangers d’un voyage clandestin à dos de mulet à travers les montagnes du Kurdistan et de la Turquie. Une fois requinqués par la cuisine de ma mère et les rasades de vodka que leur servait mon père, ils se mettaient à nous narrer toutes les péripéties de leur terrible odyssée.
J’adorais les écouter. Il m’arrivait de veiller auprès d’eux jusqu’au milieu de la nuit […]
À force d’entendre toutes ces histoires, il m’était apparu qu’un vrai Iranien était nécessairement un fugitif. Aussi m’arrivait-il quelquefois de regretter que nous nous soyons installés en France avant la révolution.
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Alors, dans la foulée des noces de mes parents, Bibi se maria aussi. Elle prit le premier venu dans la masse de ses prétendants, un doux géant qui portait le nom d'un grand empereur de Perse, Darius. Elle se jeta dans le mariage comme on se lancerait dans le vide par une fenêtre. Sa chute dura le temps d'une vie. Ce fut une lente entreprise tout à la fois d'oubli et de détestation de soi, à peine distraite par la naissance de deux enfants à la constitution fragile, dont les fièvres et les maladies occupèrent opportunément ses insomnies.
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Zâhra [qui] présentait cette singularité de n'être pas concernée par le sentiment amoureux, comme si la nature l'en avait préservée. A l'instar de ces êtres auxquels il manque certains chromosomes, l'hérédité l'avait privée des gênes de l'attachement. Aussi les hommes ne l'intéressaient-ils pas plus que les insectes volants dont elle eût suivi du regard les circonvolutions aériennes, avant que de les chasser d'un revers de la main, agacée qu'ils tournoient autour d'elle. Son coeur était une mer étale, que la houle d'aucune passion ne troublerait jamais. (p.26)
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Video de Yassaman Montazami (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Yassaman Montazami
Yassaman Montazami - Le meilleur des jours .Yassaman Montazami vous présente son ouvrage "Le meilleur des jours" aux éditions Sabine Wespieser. Rentrée littéraire automne 2012.http://www.mollat.com/livres/yassaman-montazami-meilleur-des-jours-roman-9782848051161.htmlNotes de Musique : Ricardo Villalobos - Max Loderbauer - 05 - Reemergence
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