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EAN : 9782896942282
Alto (01/08/2015)
3.62/5   20 notes
Résumé :
Professeure de littérature dans un collège de Montréal, Irène retourne enseigner après un long congé de maladie. Le désir de faire voir à ses étudiants le pouvoir de résistance qu’exerce la poésie est toujours là. Et ni un contexte politique assez sombre, ni Théa, sa perfide alliée, ni même la mort n’arrivent à l’éteindre. C’est qu’à l’horizon le printemps rougit, et bientôt l’engagement d’Irène dans la révolte grandissante la forcera à renoncer à son travail. Mais... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Chère lectrice, Cher lecteur,
Je voulais lire le parfum de la tubéreuse d'Élise Turcotte publié en 2015 par Alto depuis un petit bout de temps. Pourquoi? Je savais que ce livre avait comme personnage principal une professeure de littérature au collégial et qu'il pourrait y avoir des points communs entre cette dernière et moi. Tout d'abord, que raconte ce récit?

Irène, professeure de littérature, perd la vie et se retrouve du jour au lendemain à enseigner à des étudiants fantomatiques dans un bunker orangé. Elle a pu quitter le monde des vivants en apportant qu'un seul livre Dialogues en paradis (Gallimard, 1991), de l'auteure chinoise Can Xue. Ce recueil de nouvelles lui avait été offert par son amoureux et pour elle, il représente une façon de plonger dans la connaissance et la reconnaissance dans cet enfer…

J'ai été amoureuse moi aussi. Ce n'est pas la mort qui m'a enlevé tout ce que j'ai eu, c'est la vie. Il me reste Can Xue, cette auteure au nom de plume inespéré : dernière trace de neige. C'est par elle que je sens le monde tournoyer et redevenir rêve. On a cru me priver de nourriture en ne me donnant droit qu'à un seul livre. Mais mon emprisonnement ici me permet d'en approfondir la connaissance. Une reconnaissance, devrais-je dire. On ne peut pas m'empêcher de me transformer. (p.9).

En parallèle à cette vie dans l'au-delà, le lecteur a accès à l'histoire d'Irène de son vivant en tant que professeure dans un collège de Montréal. Irène la passionnée, Irène qui à sa façon devient un modèle de désobéissance civile car elle refuse de suivre le modèle établi et les critères institués par l'administration du collège. Elle sera victime de délation de la part d'une amie… Cette partie se déroule au printemps érable, un moment qui a marqué le Québec. Comme le mentionne la narratrice à propos de son amie délatrice :

Je dis seulement que j'avais compris sa vision, même si je ne pouvais pas l'endosser : nous étions à l'usine, il fallait pointer, enseigner ce qu'on nous disait d'enseigner, recevoir notre paye et c'est tout. Elle avait raison sur un point : être soi-même était devenu périlleux. (p. 96).

Entre ces deux mondes, il y a le parfum magique de la tubéreuse, un parfum qu'avait adopté Irène avant de mourir.

J'ai reçu ce parfum en cadeau le jour de mon dernier anniversaire. Il m'a permis de revivre l'amour. Une odeur insistante, quoique douce, trop présente mais indescriptible à la fois, qui nous avait conduits, mon amant et moi, dans une nuit de délires. Mon corps, son corps. (p. 13)
[…] il a cherché et trouvé un parfum de tubéreuse. Pas n'importe lequel. Un parfum rare, à la fois violent et doux, quelque chose d'impossible à comprendre. (p. 89)
Ce parfum fait également partie du recueil de Can Xue.

J'ouvre le livre de Can Xue à l'endroit où il est question de la tubéreuse et je caresse le mot avec mes doigts. Parfois une seule image suffit à me transformer. (p. 11)

Un enseignement différent

De son vivant, Irène a été un modèle de désobéissance en rompant avec la norme. Elle tente d'inculquer à ses élèves que ces derniers soient morts ou vivants un éveil, une envie de voir autrement, un désir de sentir différemment le parfum de l'art poétique. Au bout de la route, l'important n'est-il pas de rester soi-même? La littérature peut-elle assurer un certain salut? Les livres peuvent-ils enseigner un modèle de désobéissance civile? Voici ce qu'Irène mentionne dans la mort :

Mes élèves viennent d'entrer.
J'ai envie de leur raconter. Que Can Xue écrit pour se venger, pour exhaler des bouffées de miasmes. Cela irait à l'encontre de tout ce qu'ils ont appris. La littérature concevable et guérisseuse. Je choisis plutôt, pour l'instant, de leur parler de la couleur rouge et des ginkgos.
-«La poésie te charme, écrit Can Xue en exergue du premier dialogue. Elle te charme, afin que tu crées des miracles». Que veut-elle dire? (p. 30)

Déterminée à communiquer sa passion du pouvoir des mots, Irène ne cesse de croire que la littérature peut dévoiler un modèle de résistance… La résistance à travers la pensée de Can Xue, de Marie Shelley et bien d'autres… Comme elle le fait remarquer :

Le soir venu, pour mon plaisir, j'entretiens la pensée que même dans la mort, je suis désobéissante. (p. 81)
Donc, j'ai beaucoup apprécié cette lecture… Comme professeure, je ne vous cacherai pas que j'ai eu à transiger avec un questionnement par rapport aux valeurs institutionnelles d'un certain modèle scolaire et les miennes qui sont intimement rattachées à la littérature…

Pour lire cette histoire, il faut accepter que cette dernière nous échappe, nous entraîne ailleurs dans une vision onirique de notre existence… Il faut se permettre de rêver à nouveau avec Irène afin que la magie de l'enseignement opère une fois de plus…Et enfin, grâce à Élise Turcotte, nous pouvons croire encore à la beauté de l'enseignement de la littérature dans ce siècle qui tend à la discréditer.

https://madamelit.me/2016/11/15/madame-lit-le-parfum-de-la-tubereuse-delise-turcotte/?iframe=true&theme_preview=true
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C'est sur la foi de la quatrième de couverture que j'ai sorti ce roman pour honorer Montréal, mais en réalité il n'est pas du tout fait mention de la ville dans ce roman qui, d'emblée, m'a assez fortement désarçonnée. Il ne fait que 115 pages mais il m'a bien fallu cinq chapitres pour comprendre que nous ne sommes pas dans la réalité ordinaire et que les chapitres alternent entre les souvenirs de cette réalité et le lieu où se trouvent Irène et ses élèves, un bunker parmi d'autres, où les gens sont surveillés en permanence et où tous les souvenirs personnels semblent arrachés. C'est difficile de révéler ce lieu sans tout déflorer, mais je peux au moins vous dire qu'Irène, lorsqu'elle était prof dans un collège, a fait de la résistance civile lors du « printemps érable » et qu'elle a payé cher le prix de sa liberté. Que ce soit dans son ancien monde ou dans le nouveau, Irène s'est toujours nourrie de poésie et de littérature pour échapper aux idées et aux modèles prescrits. Dans son nouvel univers, il ne lui reste qu'un recueil de poèmes de Can Xue, Dialogues en paradis (livre qui existe vraiment, écrit par une poétesse chinoise sous Mao), mais il lui suffit pour continuer à enseigner l'esprit de subversion et recréer les images des souvenirs.

J'ai donc été désarçonnée par mes difficultés à me repérer dans le traitement du temps mais aussi par l'écriture synesthésique d'Elise Turcotte que je jugeais peu adaptée à l'univers presque post-apocalyptique qu'elle mettait en place. Mais il me faut avouer (je ne sais pourquoi) que j'ai un peu lâché prise dans la deuxième moitié du roman et que l'histoire de la résistance d'Irène, attachée au parfum de la tubéreuse qu'elle avait alors adopté, m'a davantage parlé. Et de toute façon, je ne peux qu'adhérer à sa vision de la poésie…
Lien : http://desmotsetdesnotes.wor..
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Ne vous faites pas avoir! La quatrième de couverture ne vous a pas du tout préparé à ce que vous vous apprêtez à vivre : une chute vertigineuse depuis la réalité vers un sous-monde onirique et surréaliste!

Parachutée sans parachute dans ce purgatoire littéraire telle une Alice tombée dans le terrier du lapin blanc, j'ai tout de suite été subjuguée! Deux histoires évoluent en parallèle, l'une étant une version allégorique et poétique de l'autre. On a l'impression d'explorer le subconscient de l'auteure! le sens de certains passages semble parfois obscur, mais c'est ce qui les rend si fascinants.
 
Ce roman très particulier est une véritable expérience synesthésique; ses mots dégagent un parfum de subversion et de mystère! le lire, c'est comme faire un rêve éveillé! 
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critiques presse (1)
LaPresse
02 septembre 2015
Élise Turcotte joue plus que jamais à l'alchimiste. Elle crée la vie à partir de la mort dans un univers luxuriant qui n'a rien de réaliste.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Mes élèves viennent d’entrer.
J’ai envie de leur raconter. Que Can Xue écrit pour se venger, pour exhaler des bouffées de miasmes. Cela irait à l’encontre de tout ce qu’ils ont appris. La littérature concevable et guérisseuse. Je choisis plutôt, pour l’instant, de leur parler de la couleur rouge et des ginkgos.
-«La poésie te charme, écrit Can Xue en exergue du premier dialogue. Elle te charme, afin que tu crées des miracles». Que veut-elle dire? (p. 30)
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Les récits de détention contiennent tous un art poétique, dressé en leur centre comme une table de fête dans une maison de correction. La poésie s'y manifeste; ici, des candélabres noirs n'éclairant que la nuit, là, un chemin de boue pour la fuite, un lac de paroles enfouies dans l'enfance, un désespoir chanté par les loups, une rosace, un arbre immense dans le désert, un jardin de miniatures, un coeur brodé sur de la soie. Peu importe l'image, pourvu que la réalité se soulève comme une pierre laissant apparaître un bestiaire grouillant.
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J'ouvre le premier flacon. Orange et bergamote maquillent un court instant la petite salle moisie. Le deuxième parfum demande plus d'attention, c'est la mandragore, un poème au paysage surréel dessiné lorsque j'étais vivante. Le troisième est une soirée paisible après la mousson. C'est celui que je portais quand je suis morte.
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J’ai été amoureuse moi aussi. Ce n’est pas la mort qui m’a enlevé tout ce que j’ai eu, c’est la vie. Il me reste Can Xue, cette auteure au nom de plume inespéré : dernière trace de neige. C’est par elle que je sens le monde tournoyer et redevenir rêve. On a cru me priver de nourriture en ne me donnant droit qu’à un seul livre. Mais mon emprisonnement ici me permet d’en approfondir la connaissance. Une reconnaissance, devrais-je dire. On ne peut pas m’empêcher de me transformer. (p.9).
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- La force des mots, dit-il, c'est la force des rêves.
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Vidéo de Élise Turcotte
Hotel Éternité (suite poétique), dit par Élise Turcotte
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