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EAN : 9782714480958
144 pages
Belfond (10/01/2019)
3.56/5   17 notes
Résumé :
En décembre 1792, Francisco Jose de Goya y Lucientes, peintre du roi, se réveille aux Mallos, un village perdu dans l'Aragon. Il n'y a là-bas que la gardienne Rosario, sa chatte Loca et, la nuit, des morts. Des morts tyranniques, qui n'aspirent qu'à une chose : danser jusqu'au bout de la nuit, à en faire crever les vivants.
Qui est cette vieille sorcière et comment Goya s'est-il retrouvé dans cette étrange demeure ? Il se souvient s'être couché chez un ami, à... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Francisco José de Goya y Lucientes est sans doute trop “monstrueux” (au sens de monstre sacré) à mes yeux pour incarner le personnage de l'artiste dans ce Songe et mimer les hallucinations auxquelles le soumet l'auteure. Un Songe donc un peu frustrant qui ne m'a pas emballée et dont je ne suis pas sûre que le but, faire apparaître un épisode pathologique de la vie du peintre comme source d'une oeuvre charnière dans sa production artistique, puisse être atteint. Lors d'un voyage en Andalousie, en décembre 1792, le peintre du roi âgé de quarante-six ans est frappé d'un mal mystérieux qui le cloue plusieurs mois loin de chez lui et à l'issue duquel il devient irrémédiablement sourd. Si l'origine des symptômes documentés par sa correspondance est encore controversée aujourd'hui, le point sur lequel tout le monde s'accorde est que cette crise andalouse marque pour lui une rupture avec sa période antérieure. Rétabli et de retour à Madrid Goya se lance, entre 1793 et 1798, dans la réalisation d'une suite exceptionnelle de quatre-vingts planches à l'eau-forte, hors de toutes conventions artistiques, préfacées par lui et éditées en 1799 sous le titre “Los Caprichos”. La portée esthétique, sociale, morale et philosophique de ce recueil est retentissante en Europe et place Goya aux avant-postes de la modernité. Si sa veine satirique et son extraordinaire liberté d'exécution frappent les contemporains (et l'Inquisition au passage) sa force visionnaire parvient intacte aujourd'hui. Un roman pouvait à juste titre s'emparer de ce moment singulier de la maladie de l'artiste (1792/1793) et plonger au coeur d'une création majeure pour en restituer la frénétique vitalité dans une mise en forme anticipative convaincante. Ce n'est pas trop le cas. L'intérêt biographique et documentaire mis de côté aucune structure narrative forte n'émerge de cette succession de petits chapitres très descriptifs qui accordent une attention excessive aux symptômes, fièvre, douleurs et bouffées délirantes chargées de faire apparaître les images du passé ou les personnages et créatures qui hantent le présent suspendu de Goya, lui donnant la clé de l'univers fantasmagorique des Caprices. Des moyens qui m'ont laissée sceptique. Ni le peintre et ses rêves, ni aucun autre personnage ne sont parvenus à me captiver, à mon grand regret, car les Caprices figurent en bonne place dans mon panthéon artistique personnel.
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Naufrage

Le peintre Goya, atteint de saturnisme, est en proie à des délires, des visions au cours de rêves et de retours au passé. Aurore Guitry dépeint cette époque de la vie du peintre d' une plume magistralement réaliste et empreinte d'une grande poésie. Fantômes des morts, souvenirs de la vie à la cour du roi d'Espagne, le lecteur est emporté dans un récit qui n'est pas sans rappeler les tableaux du maître.
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Il existe des livres qui vous tombent dans les mains comme par magie, des livres dont vous n'auriez sans doute jamais croisé le chemin dans les dédales de votre librairie fétiche et qui vous projette dans des sphères inattendues. C'est là toute la force et la richesse de l'opération Masse Critique dont je remercie, une fois encore, les instigateurs qui m'ont permis de m'embarquer dans un songe épouvantable et merveilleux signé Aurore Guitry, et de découvrir la voracité et le génie des Caprices de Goya, accompagnant les sombres heures de la vie de l'artiste.

Fils d'un maître doreur espagnol, Francisco José de Goya y Lucientes fraichement sorti de son apprentissage de peintre, connait une ascension sociale spectaculaire puisqu'attaché aux services de la Cour du Roi d'Espagne pour lequel il deviendra portraitiste officiel. Une charge qui comme tout celle d'importance l'obsédera et le poussera dans une grande détresse en 1792 lorsque, atteint de saturnisme - dont certains l'imputent à la forte teneur des peintures en plomb, il se trouvera dans l'incapacité d'honorer ses commandes.

C'est à cette période douloureuse et fantasque que le roman d'Aurore Guitry s'attèle avec plus ou moins de liberté et une écriture d'une grande finesse. A ce moment crucial où tout bascule, ou le rêve et la raison se juxtaposent pour accoucher d'un délire d'une étonnante clairvoyance sur la société notamment.
Elle nous emporte avec frénésie dans un songe démoniaque, sur les terres arides des Mallos, un village décimé par la sécheresse et la maladie, un petit univers étouffant où Goya sera recueilli par Rosario, une femme intrigante toujours suivie de sa chatte Lucia, dévorant ses victuailles à même la chair et couvant son sanctuaire de damnés comme une mère attentionnée. Une terre où il ne fait pas bon sortir la nuit au risque d'être terrassé par la fièvre du Carnaval intempestif auquel se livre les morts sans relâche, en se riant des pauvres âmes perdues, encore revêtues d'un costume de chair dont ils ont auront tôt fait de s'occuper.

Le récit est court et efficace, le lecteur se prête facilement au jeu et se délecte à s'enfoncer avec horreur dans cette fresque complètement folle.
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Etonnant petit livre que celui-ci, qui mêle l'oeuvre et la biographie de Goya ! Or, lorsqu'on connaît les séries de gravures de l'artiste, véritables charges contre la société de son temps, on peut s'attendre à croiser de terrifiantes créatures...

En 1793, alors qu'il est parvenu à entrer dans les faveurs de la famille royale, qu'il est devenu le peintre officiel de la cour, Goya tombe gravement malade. Sans doute le saturnisme, qui lui inflige de terribles épisodes de fièvre allant jusqu'au délire. Au plus fort de ces crises, Goya se voit soigné par une sorcière entretenant des relations avec les morts, confronté à des moines à tête de bourrique ou de dindon, à des médecins aussi sots que des ânes ou à de nobles femmes cédant à leurs plus bas instincts...

Dans ses rares moments de lucidité, Goya souffre de ne plus pouvoir peindre. Terriblement affaibli, il tient à peine debout, tandis que, dehors, les échos du carnaval semblent rejouer l'infernale comédie du songe de sa raison.

Lorsque, après plusieurs mois, il vaincra la maladie - qui le laissera néanmoins sourd - Goya reprendra ses pinceaux, peignant le jour les tableaux qui lui sont commandés par les notables, restituant la nuit les scènes infernales que lui inspirent la folie et l'hypocrisie des hommes.

Ce texte surprenant fonctionne par sa brièveté, comme l'une des fulgurantes visions du peintre. Il donne envie de voir ou de revoir ces étonnantes gravures, d'une incroyable modernité, qui dénonçaient avec une force inégalable les moeurs de leur temps. Pour ma part, j'ai eu la chance de les admirer l'été dernier au musée Goya de Saragosse, qui possède une magnifique collection, visible dans des conditions exceptionnelles, la foule ne se précipitant pour les voir...

Comme, dans l'immédiat, il vous sera sans doute plus facile de vous procurer ce livre que de vous rendre à Saragosse, voici donc une lecture parfaite pour entrer dans l'univers de l'artiste... en attendant de vous prévoir toutefois un petit week-end en Aragon !
Lien : https://delphine-olympe.blog..
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La chambre, le lit tanguent, il est sur un bateau puis se retrouve dans un asile d'aliénés d'où il part et se retrouve dans une petite chambre, un lit crasseux, à Mallos, village quasi fantôme de l'Aragon. Comment est-il arrivé, il ne saurait le dire. Une femme s'occupe de lui. Son nom ? Rosario, la gardienne des Mallos, enfin c'est ainsi qu'elle se présente. Rosario soigne ses blessures, assez vilaines au demeurant, avec des onguents, une potion des plus amères, le lait de la main rouge, lui fait manger de la viande crue. Ses rêves, plutôt des cauchemars, sont peuplés de monstres et autres créatures qui dansent une sarabande effrénée, où réalité et hallucinations se mélangent au gré des visions.
Sortant de son coma, il se retrouve chez son ami, se sert de ses hallucinations pour peindre autre chose que les portraits de cour, quelque chose qui lui tient de plus en plus à coeur. Ainsi serait la genèse des Caprices. Des scènes que Aurore Guitry a parfaitement décrites.
La journée, il satisfait aux commandes de notables et la nuit, il retranscrit ses hallucinations, dénonçant la folie, le Mal, l'hypocrisie, la bassesse.
"Tous les grands veulent leur portrait. le jour, il croque leur visage. La nuit, il dessine les Mallos : Rosario, les moines, la Bruja et son cortège de fous qui bourdonnent autour de lui.".
Je suis entrée facilement dans les délires de Goya. Son arrivée chez Rosario après son départ de l'asile d'aliénés est très réaliste. Après c'est un vrai mélange d'onirisme, de souvenirs mixés à l'aune du délire. Ce livre est d'une grande fluidité, facile à lire, prenant, court, très dense. Il me fait penser de loin, à la série « Contes et légendes » que je lisais adolescente.
Je n'avais de Goya que le souvenir des portraits sur commandes et j'ai découvert, par le biais de cette lecture, un nouveau côté du talent du peintre que j'apprécie beaucoup plus. le gâcheur de Rosario exorcise ses démons avec les Caprices, satires des meurs espagnoles. La dualité existe ; au jour, les bourgeois et la cour, à la nuit ses rêveries fantastiques et grotesques.
Un livre court, dense. J'ai aimé entrer dans les fulgurances de Goya et découvrir un autre versant de l'art de l'artiste. Aurore Guitry, une auteure à lire.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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critiques presse (1)
LeMonde
13 janvier 2019
Un roman audacieux, où Aurore Guitry forge des images admirablement suggestives.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Au Troisième pas, une douleur au flanc lui scie les jambes et il tombe. Le choc l'étourdit. Il voit des taches noires manger la pièce. Avant qu'elles n'aient tout englouti, il se tourne vers la porte et remarque une petite ombre sur le sur le seuil de sa chambre. Elle a la forme d'un tigre avec des yeux desaxés, des yeux de méduse.
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Il ouvre les yeux, les referme aussitôt, ébloui par la lumière. Les insectes qui tourbillonnent derrière ses paupières font un bruit d'essaim. Ses draps collent et puent : mélange d'urine séchée, de sueur et de sang. Il a souillé son couchage, peut-être la paillasse, et réfléchit au moyen de le cacher. Personne ne doit savoir. Le peintre du roi ne pisse pas dans le lit de ses amis. Il veut rouler sur le côté mais une crampe, au flanc, lui révèle qu'un mal le tient, plus sérieux que l'ivresse. Il imagine un jaloux prévenir le roi de son absence, sa femme incapable de la lui justifier. On lui retirerait son titre, sa pension, et sa famille s'enfoncerait dans la misère. Il doit peindre. Ses paupières se soulèvent dans un grognement. Il y a d'abord une tache claire qui enduit tout, la sensation qu'une araignée cherche à s'extraire de ses yeux, et la vue revient. Trois poutres barrent le plafond. Une fente oblongue apparaît sur celle du milieu. Elle se creuse et s'élargit jusqu'à ressembler à celle de la chambre de son enfance, à Fuendetodos. Il la regarde et pense au ciel troué de ses peintures. À sa droite, un mur blanc et carré. Celui d'en face est percé d'une fenêtre qui projette un hublot lumineux sur le parquet. Tout lui paraît familier mais il ne reconnaît rien.
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Dehors, le vent se lève. Il ferme les yeux en souriant. Dans le noir, il pense à son père qu'on a enterré sans lui et son ventre se serre. Il perçoit du mouvement dans la chambre. Des losanges scintillent au plafond comme des signaux envoyés par des miroirs. À Cadix, les vagues se liguent ainsi avec le soleil pour entrer dans les maisons. Tout se brouille, il ne sait plus où il est, la chambre vacille. Il tâte sa poitrine, sa tête, cherche une douleur qui le rendrait vivant et perçoit un craquement en provenance du couloir. On vient.
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Il tâte les draps humides et chauds, sent l'odeur de pourriture et se souvient. Il est chez la vieille aux dents rouges et aux yeux cachés. Elle lui a servi des morceaux de viande crue au dîner. Il s'en est plaint. La boisson était aigre mais il a consenti à la prendre pour guérir. Le gibier, en revanche, doit être cuit, grillé ou mijoté. Si la nourriture n'est pas civilisée, elle rend sauvage. Il suffisait d'allumer un feu, après tout. Les lèvres de la gardienne ont tremblé. Elle l'a rabroué, lui a dit que la chair était tendre. Elle n'avait pas besoin d'être rôtie pour être mangée. C'était ça ou la faim. Et comme la nuit tombait, il devait se décider puis dormir. Surtout bien dormir, sinon...
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La cour est prête à l'entendre. Dorénavant, il peindra aussi pour lui. La rumeur de sa guérison se répand dans Madrid et les commandes affluent. Tous les grands veulent leur portraits. Le jour, il croque leur visage. La nuit, il dessine les Mallos : Rosario, les moines, la Bruja et son cortège de fous qui bourdonnent autour de lui. Il les voit remplir les ombres sur les murs de son atelier. Ils lui réclament une fête qui durera toujours. Et Goya, qui se languit de ses délires, travaille à la leur offrir.
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