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EAN : 9782742784783
302 pages
Actes Sud (15/10/2009)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
" Un abysme de science " ! Le jésuite Kircher était bien le digne - et le dernier - héritier des esprits universels de la Renaissance, Léonard, Pic de la Mirandole. Mathématicien, linguiste, archéologue, naturaliste, historien des religions, ingénieur, géologue... comme, avant lui, Erasme, comme Mersenne, son contemporain, ou, plus tard, Voltaire et Goethe, il entretint avec tout l'univers une correspondance qui fit de ce phénix du Vatican le centre du monde savant.... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique

A travers cet opus raffiné et élégant, monographie copieuse et très documentée, somme encyclopédique d'un abord à peine austère pour le profane, magnifiquement illuminée par l'abondance et la grâce d'éblouissantes et didactiques planches baroques, l'universitaire et musicologue anglais Joscelyn Godwin nous convie à une rencontre peu banale : celle d'une personnalité extraordinaire, paradoxale et énigmatique, incarnation d'une érudition rare et encyclopédique, exceptionnel esprit polymathe, distingué, en son temps, comme l'homme le plus cultivé de son époque, le maître des 100 savoirs et le temple accompli de la connaissance universelle : le jésuite d'origine allemande Athanasius Kircher (1602-1680).
Godwin délaisse la biographie conventionnelle pour une hagiographie centrée sur l'oeuvre savante. le propos descriptif, linéaire et puissamment charpenté ne s'égare jamais dans l'analyse. L'auteur s'efforce de comprendre et de rendre intelligible les questions, desseins et préoccupations qui organisent l'entreprise intellectuelle du jésuite. Il dessine les contours d'un esprit complexe engagé dans un siècle redoutablement réfractaire aux progrès de la pensée. En chercheur scrupuleux et sans complaisance, il expose les certitudes et convictions de Kircher, ses contradictions et ses échecs. Il s'applique avec persévérance et empathie à construire et consolider un projet de réhabilitation où se métissent des éclairages inédits. Son livre est à la mesure du sujet : une étude érudite qui interroge Kircher sur les fondements, la nature, l'objet et le sens de sa propre érudition. le portrait que dresse Godwin éveille les interrogations les plus vives. Pourquoi vouloir tout savoir ? Quelle est la source de cette curiosité immodérée ? Qualifier le savoir de Kircher revient à donner dans le registre de la démesure : boulimique, avide, fou, inextinguible, etc., mesurer son étendue, c'est plonger dans le néologisme abyssal - l' "abysme de science" de Godwin.
Controversé et injustement dénigré par la critique moderne, peu encline à la mansuétude, il est ignoré par un large pan de l'exégèse et de la recherche française. Aux yeux des esprits lettrés, Kircher fait piètre figure : anachronisme, imposteur, impasse, erreur, fourvoiement de la pensée. de bien sévères jugements en regard de l'immensité du savoir qu'il mit au service de ses contemporains, et de l'acuité de ses intuitions, prémisses de bien des découvertes.
Fidèle à sa vocation, Kircher ne voulut qu'une chose : glorifier la transcendance et mettre en lumière les merveilles de la création quand d'autres n'auront de cesse de l'interpréter. Son érudition est au service de sa foi; une érudition qui n'a d'égale que la «grandeur» des bourdes dont il fut parfois l'auteur. Godwin tempère lui aussi «l'apparente omniscience» d'un Kircher qui n'admettra ni doute ni scepticisme cartésien. A sa suite, l'écrivain Jean-Marie Blas de Roblès magnifie les errements de sa pensée : "Une admirable obstination dans l'erreur." et poursuit avec une ironie acide :" Kircher se trompe de façon quasi systématique. Il compile maladroitement, cautionne des inepties en toute crédulité". (extraits critiques, éditions Zulma). Peu importe, le jésuite se déclare habité par "le désir sincère d'apporter la lumière à ceux qui marchent dans les ténèbres" et par une véritable mystique de la connaissance. En 1669, au frontispice de l'Ars magna sciendi', (Le Grand Art de la Connaissance) il se représente en "médiateur entre le Ciel et la Terre", promoteur d'une théocratie bienveillante et sûre d'elle; au bas de la gravure, se déploie une «sentence», belle et explicite profession de foi :"Rien n'est plus beau que de connaître le tout." Kircher est un apôtre fervent et convaincu, bien installé au coeur du pouvoir catholique. Il ne compromettra jamais les fondements dogmatiques du christianisme.
L'impression d'un savoir sans limites fascina ce siècle au moment même où la condamnation de Galilée (1633) eut des répercussions effroyables au sein de la communauté des philosophes et des scientifiques. Mais déjà, loin de Rome, des Isaac Newton, René Descartes, Thomas Hobbes, Baruch Spinoza, Christian Huygens, John Locke, et bien d'autres sont à l'oeuvre. Fraîchement arrivé à Rome et encore jeune homme, Kircher se tînt en retrait et préféra adopter la réserve de son ordre.
L'action d'éclat la plus connue et l'épisode le plus malheureux des déboires futurs du savant Kircher fut sa tentative de déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens. Un exercice de taille pour ce polyglotte émérite qui s'avéra un échec retentissant. Il fut pourtant, et pour longtemps, proclamé Père de L'égyptologie. L'intention du jésuite reste louable parce que révélatrice d'une grande ouverture d'esprit. Témoignant d'un profond respect pour les civilisations et peuples disparus, il est persuadé que ces symboles sacrés sont une source de savoir, de sagesse et de vérité.
Pour Godwin, Kircher est l'héritier légitime de la pensée De La Renaissance, de sa tradition encyclopédique et de son intérêt pour l'herméneutique. Ultime et illustre représentant de cet humanisme finissant, Kircher ne mérite pas d'être réduit au stéréotype du savant isolé, à l'écart des courants qui préludent à l'émergence de la philosophie des Lumières.
N'en déplaise à ses détracteurs, il a sa place dans le développement de la pensée du 17è siècle, malgré ses échecs et son esprit borné, on ne peut remettre en doute son honnêteté et négliger l'importance de ses découvertes. Science et religion sont au coeur de cette monographie, les tensions croissantes dans leurs relations constituent la toile de fond de cette monographie. La fortune critique du savant
Athanasius Kircher en est sans doute la désolante et superbe illustration. Rendons grâce à Joscelyn Godwin d'avoir été l'instigateur de cette (re)découverte.

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A travers cet opus raffiné et élégant, monographie copieuse et très documentée, somme encyclopédique d'un abord à peine austère pour le profane magnifiquement illuminée par l'abondance et la grâce d'éblouissantes et didactiques planches baroques, l'universitaire et musicologue anglais Joscelyn Godwin nous convie à une rencontre peu banale : celle d'une personnalité extraordinaire, paradoxale et énigmatique, incarnation d'une érudition rare et encyclopédique, exceptionnel esprit polymathe, distingué, en son temps, comme l'homme le plus cultivé de son époque, le maître des 100 savoirs et le temple accompli de la connaissance universelle : le jésuite d'origine allemande Athanasius Kircher (1602-1680).
Godwin délaisse la biographie conventionnelle pour une hagiographie centrée sur l'oeuvre savante. le propos descriptif, linéaire et puissamment charpenté ne s'égare jamais dans l'analyse. L'auteur s'efforce de comprendre et de rendre intelligible les questions, desseins et préoccupations qui organisent l'entreprise intellectuelle du jésuite. Il dessine les contours d'un esprit complexe engagé dans un siècle redoutablement réfractaire aux progrès de la pensée. En chercheur scrupuleux et sans complaisance, il expose les certitudes et convictions de Kircher, ses contradictions et ses échecs. Il s'applique avec persévérance et empathie à construire et consolider un projet de réhabilitation où se métissent des éclairages inédits. Son livre est à la mesure du sujet : une étude érudite qui interroge Kircher sur les fondements, la nature, l'objet et le sens de sa propre érudition. le portrait que dresse Godwin éveille les interrogations les plus vives. Pourquoi vouloir tout savoir ? Quelle est la source de cette curiosité immodérée ? Qualifier le savoir de Kircher revient à donner dans le registre de la démesure : boulimique, avide, fou, inextinguible, etc., mesurer son étendue, c'est plonger dans le néologisme abyssal - l' "abysme de science" de Godwin.
Controversé et injustement dénigré par la critique moderne, peu encline à la mansuétude, il est ignoré par un large pan de l'exégèse et de la recherche française. Aux yeux des esprits lettrés, Kircher fait piètre figure : anachronisme, imposteur, impasse, erreur, fourvoiement de la pensée. de bien sévères jugements en regard de l'immensité du savoir qu'il mit au service de ses contemporains, et de l'acuité de ses intuitions, prémisses de bien des découvertes.
Fidèle à sa vocation, Kircher ne voulut qu'une chose : glorifier la transcendance et mettre en lumière les merveilles de la création quand d'autres n'auront de cesse de l'interpréter. Son érudition est au service de sa foi; une érudition qui n'a d'égale que la «grandeur» des bourdes dont il fut parfois l'auteur. Godwin tempère lui aussi «l'apparente omniscience» d'un Kircher qui n'admettra ni doute ni scepticisme cartésien. A sa suite, l'écrivain Jean-Marie Blas de Roblès magnifie les errements de sa pensée : "Une admirable obstination dans l'erreur." et poursuit avec une ironie acide :" Kircher se trompe de façon quasi systématique. Il compile maladroitement, cautionne des inepties en toute crédulité". (extraits critiques, éditions Zulma). Peu importe, le jésuite se déclare habité par "le désir sincère d'apporter la lumière à ceux qui marchent dans les ténèbres" et par une véritable mystique de la connaissance. En 1669, au frontispice de l'Ars magna sciendi', (Le Grand Art de la Connaissance) il se représente en "médiateur entre le Ciel et la Terre", promoteur d'une théocratie bienveillante et sûre d'elle; au bas de la gravure, se déploie une «sentence», belle et explicite profession de foi :"Rien n'est plus beau que de connaître le tout." Kircher est un apôtre fervent et convaincu, bien installé au coeur du pouvoir catholique. Il ne compromettra jamais les fondements dogmatiques du christianisme.
L'impression d'un savoir sans limites fascina ce siècle au moment même où la condamnation de Galilée (1633) eut des répercussions effroyables au sein de la communauté des philosophes et des scientifiques. Mais déjà, loin de Rome, des Isaac Newton, René Descartes, Thomas Hobbes, Baruch Spinoza, Christian Huygens, John Locke, et bien d'autres sont à l'oeuvre. Fraîchement arrivé à Rome et encore jeune homme, Kircher se tînt en retrait et préféra adopter la réserve de son ordre.
L'action d'éclat la plus connue et l'épisode le plus malheureux des déboires futurs du savant Kircher fut sa tentative de déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens. Un exercice de taille pour ce polyglotte émérite qui s'avéra un échec retentissant. Il fut pourtant, et pour longtemps, proclamé Père de L'égyptologie. L'intention du jésuite reste louable parce que révélatrice d'une grande ouverture d'esprit. Témoignant d'un profond respect pour les civilisations et peuples disparus, il est persuadé que ces symboles sacrés sont une source de savoir, de sagesse et de vérité.
Pour Godwin, Kircher est l'héritier légitime de la pensée De La Renaissance, de sa tradition encyclopédique et de son intérêt pour l'herméneutique. Ultime et illustre représentant de cet humanisme finissant, Kircher ne mérite pas d'être réduit au stéréotype du savant isolé, à l'écart des courants qui préludent à l'émergence de la philosophie des Lumières.
N'en déplaise à ses détracteurs, il a sa place dans le développement de la pensée du 17è siècle, malgré ses échecs et son esprit borné, on ne peut remettre en doute son honnêteté et négliger l'importance de ses découvertes. Science et religion sont au coeur de cette monographie, les tensions croissantes dans leurs relations constituent la toile de fond de cette monographie. La fortune critique du savant
Athanasius Kircher en est sans doute la désolante et superbe illustration. Rendons grâce à Joscelyn Godwin d'avoir été l'instigateur de cette (re)découverte.
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http://www.bm-poitiers.fr/userfiles/file/PDF%20MMA/CDCMMA/theatre.pdf
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