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Martine Schildge (Illustrateur)
EAN : 9782266070836
95 pages
Pocket (11/03/1998)
3.76/5   19 notes
Résumé :
1962. La famille de Simon déménage. Elle quitte le nord de Paris pour s’installer à une vingtaine de kilomètres, à Champigny-sur-Marne. Tout le monde est déjà parti mais il reste à faire bouger Mémé. La grand-mère tout juste arrivée d’Algérie refuse catégoriquement de monter dans une voiture, un bus ou un métro. Elle veut marcher, un point c’est tout. Simon, son petit-fils, se voit chargé de l’accompagner à travers la capitale et la proche banlieue. En chemin, Mémé ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (21) Voir plus Ajouter une critique
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« C'est la vie moderne, Mémé ! »

Un petit garçon, pas plus d'une dizaine d'années, accompagne sa grand-mère dans une longue marche à travers tout Paris. Il doivent se rendre à Champigny pour rejoindre leur famille, mais elle ne veut pas prendre le métro. Elle dit qu'ils ont tout leur temps. Elle veut marcher. D'abord rue Truffaut, puis La Fourche, Place de Clichy, La Chapelle, Stalingrad… Ils voient des gens, de tous types et de tous âges, de toutes classes sociales et occupés à diverses activités - certains sont garçons de café, ou vendeurs, ou mercier.ère.s, d'autres lisent en terrasse, habitent dans des péniches, etc. Ils passent et regardent. Et chacune de ces petites scénettes, de ces petites vignettes, est un prétexte à débat entre la Mémé, la grand-mère Étoile qui vient d'Algérie et son petit-fils, qui a adopté les coutumes et la mentalité française. Ce merveilleux duo cristallise la confrontation des « Deux Mondes » : elle vient d'un pays de l'autre côté de la mer, où la place est encore aux aînés, où le métro n'existe pas, mais où Dieu par contre existe pour tout le monde indubitablement. Lui est jeune, et ne connaît qu'une société occidentale contemporaine, où les choses vont vite et elles sont comme elles sont. Cette mémé Étoile, elle ne comprend pas ; elle ne fait rien comme il faut, elle est agaçante. Mais, paradoxalement, c'est parfois elle qui pose un regard d'enfant sur le monde, comme quand elle s'indigne que l'on puisse laisser un homme à la rue. Lui, déjà cynique, lui répond que les choses sont comme ça, et même qu'il boit ! Les rôles sont inversés.
Elle, elle croit encore un peu trop à l'illusion référentielle, elle se lève au cinéma pour bénir Moïse comme les enfants qui ne comprennent pas les subterfuges, mais aussi comme les vieux qui sont dépassés par la technologie (qu'est-ce qu'elle connaît au cinéma?). C'est bien connu, à partir d'un certain âge, les vieilles personnes deviennent de grands enfants… Elle est anachronique, Étoile, un vestige du passé qui ne parvient pas à s'adapter à cette société nouvelle : elle critique la minijupe d'une jeune fille, elle dit que c'est vulgaire. Chez elle, les femmes ne s'habillent pas comme ça. Elle est têtue, elle n'écoute pas ce que lui dit son petit-fils. Ses valeurs lui sont dictées par Dieu, et le plus important, c'est la famille. Elle ne peut pas comprendre une société laïque occidentale dans une capitale de plusieurs millions d'habitants.
Elle incarne néanmoins (mais pas toujours, l'auteur moque aussi beaucoup ses travers) une forme de sagesse. On peut ainsi penser au personnage de Jean de Lery par exemple, qui rapporte un dialogue qu'il avait eu avec un vieux sage local dans son livre L'histoire d'un Voyage fait en la Terre du Brésil. Ce dernier s'effraie de la folie des colons européens, qui veulent tout conquérir, tout posséder, qui ne pensent qu'à thésauriser. Que faites-vous de tout cet argent ? demande-t-il. Eux ne lèguent que la terre à leurs petits enfants, et cette terre-là peut tout leur donner et tout leur prodiguer. C'est un même dispositif : un personnage non européen, vieux et donc sage, critique des codes, des valeurs, des pratiques que nous ne questionnons pas, ou peu. Son appartenance à une autre culture lui donne un regard neuf, son âge, un droit de parole.
Mémé questionne l'absurdité et parfois, l'inhumanité de nos pratiques : laisser un homme seul à la rue, c'est mal, mettre de l'eau en bouteille et la vendre, cela semble erroné en effet, mais nous n'interrogeons pas ces choses qui font partie intégrante de nos vies, nous autres occidentaux.
La religion est une question centrale qui revient à plusieurs reprises : d'abord, où est Dieu ? Mémé est incapable d'apporter une réponse satisfaisante au petit garçon qui lui demande pourquoi le cousin Moïse ce n'est pas aussi Moïse le prophète. Puis ensuite, elle blâme les catholiques pour la guerre d'Algérie, parce qu'ils les ont forcé à fuir. C'est un beau passage, quand elle parle de la double mort métaphorique des ancêtres : la première, la vraie, et l'autre parce qu'ils ne peuvent plus venir se recueillir sur leurs tombes, comme ils le faisaient toujours avant…
Toutefois, elle-même est incapable de remettre en question les valeurs et les coutumes qui lui ont été inculquées : c'est là toute l'ambiguïté du personnage. Elle accepte ainsi entièrement la domination patriarcale qu'elle a connue, et remercie son père de lui avoir choisi un mari sans lui demander son avis, arguant qu'il a fait pour elle le meilleur choix. Elle dit que les femmes qui fument et boivent du vin (les françaises) sont l'engeance du Diable. Chez elle, les femmes n'avaient pas le droit d'aller à l'école ou d'étudier ; mais cela lui semble normal, naturel.

Cette nouvelle très théâtrale raconte donc ce choc des cultures et des générations, au travers de personnages que l'on pourrait qualifier de diamétralement opposés, et d'une épopée parisienne pleine de rebondissements. Cependant, l'auteur parvient à éviter les manichéismes : les deux personnages sont clichés, mais tout à fait vraisemblables ( puisqu'il s'agit de lui même et de sa grand-mère, comme il l'écrit dans sa postface) et ni l'un ni l'autre ne dit toujours entièrement le vrai ou le faux. Chacun saisit des parts de (sa) vérité dans sa Weltanschauung - sa vision du monde. Il est peut-être à déplorer qu'ils ne se soient pas plus écoutés.
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Le voyage de Mémé est un merveilleux récit qui raconte une journée, qu' une grand-mère algérienne juive, fraîchement arrivée en France, passe avec son petit-fils, Simon, à la découverte de la ville de Paris, durant leur trajet de Paris à Champigny, le jour de leur déménagement. Mémé refusant d'utiliser tous moyens de transport qu'il est possible de prendre pour rejoindre leur nouveau logement à Champigny, c'est-à-dire ni train, ni métro ni bus ni voiture ni taxi, son petit-fils Simon est obligé de faire le trajet à pied avec elle.

Cette oeuvre est un récit du choc. En effet, le voyage de Mémé raconte le dépaysement de la grand-mère et le choc de culture qu'elle vit en passant de l'Algérie à la France. Durant ce long trajet, il va y avoir entre la grand-mère et le petit-fils une longue discussion très drôle et amusante, car parsemée de situations cocasses, comme Mémé qui dit « piment » au lieu de « poivron » et qui refuse catégoriquement de remédier à cela. Mais cette conversation traite, tout de même, de sujets importants de société, comme le capitalisme avec le passage sur le fait que l'eau s'achète et se vend et le passage sur le clochard que tout le monde ignore ainsi que le sujet de la religion.

Cette histoire raconte aussi le choc de génération qui a lieu entre elle et son petit-fils ainsi que l'inversion de hiérarchie qui s'effectue entre les deux. En effet, dans le récit même si c'est la grand-mère la plus âgée, c'est le petit-fils qui assure le rôle de l'adulte car c'est lui qui se charge de la guider en terre inconnue, qui corrige ses fautes de vocabulaire en français et qui s'occupe de répondre à ses questions par la fameuse formule magique des parents « C'est comme ça ». Et la grand-mère endosse le rôle de l'enfant en posant plein de questions, en voulant s'arrêter dans tous les magasins qui lui paraissent intéressants et qui s'étonne pour tout ce qui lui ne fait pas partie de sa notion de « normal ».

On pourrait penser que la discussion qui a lieu entre Simon et sa grand-mère est un dialogue de sourd, on se rend finalement compte que les personnages évoluent, notamment la grand-mère qui, au début, ne voulait prendre aucun transport mais qui finit par prendre le métro ainsi que le bus. Ainsi, dans cette oeuvre nous découvrons la France, et plus précisément la ville de Paris, à travers les yeux d'une grand-mère algérienne avec la simplicité de la vieillesse, et son petit-fils à peine âgé d'une douzaine d'années avec la simplicité de la jeunesse.


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Mémé est presque un totem. Pas interdit, mais "sacré". Peut-être comme toutes les grands-mères. La relation avec son petit-fils, Simon, est une relation complexe, comme beaucoup d'autres. En effet, nos ancêtres ont leur caractère sacré et nous le transmettent au fil du temps comme par le lait maternel. La proximité de nos ancêtres nous a en quelque sorte rendus plus sages et plus expérimentés dans la vie. C'est une relation, donc, de proximité, de confiance et de soutien mutuel. L'auteur prend le lecteur par la main pour un voyage urbain, mais qui n'est pas sans rebondissements. de Vincennes à Champigny, on se promène avec les personnages au long des rues et on entre avec eux dans les commerces. La grand-mère a peur de ce qu'elle considère trop moderne, notamment les moyens de transports. Elle préfère se promener à pied. Pour arriver à leur destin, ils doivent marcher au moins 20km. C'en est rien, d'après elle : « Viens, mon fils, on marche ». Au fil de leur promenade, la vieille dame découvre la ville, les métros, les noms de rues, les magasins et les noms français de choses simples comme les poivrons, par exemple. de son Algérie reste la nostalgie et la sensation que les choses étaient mieux et plus simples là-bas. En France tout est saugrenu voire même incompatible avec sa façon de vivre. Qu'est-ce que c'est un clochard, une chapelle, une écluse ? "Comment est-il possible que quelqu'un n'ait pas un endroit pour vivre, un toit au-dessus de sa tête ? ». le monde hors de sa terre natale lui semble inhumain et dangereux.
Le voyage proposé par l'auteur apparaît ainsi comme une grande métaphore. Vers quel endroit les personnages se dirigent-ils ? Est-ce la découverte ou la révélation d'un monde extérieur qui implique d'abord la découverte de soi ? Avec Mémé et Simon, le lecteur marche lui aussi vers l'inconnu. le voyage est long, exténuant et improbable. On entend tout au long du récit parler d'une fête à leur arrivée. Les mots sont tous là et même l'auteur, dans la postface, essaie de donner ses explications. Écrit-il par tendresse pour lui-même, envers son adolescence, ou pour tenter de comprendre ce chemin invisible qui traverse toutes les générations ? Voilà le chemin devant nous, les lecteurs ; il suffit de le suivre.
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Le voyage de Mémé est un roman qui retrace le chemin périlleux de Simon et de sa grand-mère pour rejoindre leur nouveau logement situé à Champigny. C'était sans compter sur l'aide de sa mamie qui ne veut prendre aucun transport. Il est donc contraint de faire le trajet avec elle à pied. Mémé est une femme éblouie par tout ce qu'elle voit. N'ayant jamais voyagé, elle donne l'impression d'être une enfant qui découvre le monde. Les rôles s'inversent et l'enfant devient l'adulte.

" jamais de la vie je change un mot qui sort de ma bouche parce que les Français ils disent pas comme ça!… moi je refuse!… tout de suite je refuse!… tu peux leur dire!… signé sur papier timbré: Mémé elle refuse de dire « poivron » et de parler comme les français ils veulent eux! »

Une mamie bornée et un petit-fils dépassé par les événements. Ce voyage, semé d'embûches, implique le choc interculturel notamment avec les différences de langage, mais aussi les accoutrements qui étonnent Mémé.
« Et ici ils comprennent pas si tu dis « citronnée ». Alors la prochaine fois tu demandes « citron pressé ».
Sans oublier l'écart d'âge qui engendre des questionnements sur la religion, sur l'éducation, les coutumes des Parisiens…

Un roman que j'ai beaucoup apprécié. Par son aspect visuel, j'ai pu imaginer tous les lieux qu'ils ont vus. Connaissant la plupart des endroits, j'ai redécouvert Paris et ses alentours avec un regard neuf.
« On est arrivés en haut de la rue des Dames mais on est passés par La Fourche. C'était un petit carrefour avec une bouche de métro et de nombreuses voitures. »

Son aspect comique, avec une Mémé très têtue et tête en l'air et la facilité de lecture qui m'a permis de lire ce livre rapidement.
« Mais non Mémé! Pas Halité! Hallyday! »
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Le voyage de mémé nous fait voyager de l'Algérie à la France, de Tlemcen à Paris, de Paris à Champigny-sur-Marne. Gil Ben Aych nous réserve même des billets pour un voyage temporel grâce à l'expérience, au vécu, sa culture, son âge, la réflexion d'il y a un certain temps de mémé jusqu'à l'innocence, l'inexpérience, la triple culture, la jeunesse de Simon !
Si vous voulez comprendre comment les parents, grands-parents, des enfants d'immigrés ont fait pour survivre, s'installer, accepter une nouvelle culture qui autrefois leur avait été imposée, c'est le parcours expérimenté et complexe de mémé qu'il faudra suivre.
Si vous êtes des enfants d'immigrés qui ont dû trouver leur juste milieu entre une culture qu'ils ont dû​ abandonner à l'extérieur de la maison comme un doudou honteux et devoir revêtir une culture inconnue comme un nouveau blouson mais revoir ce même doudou tous les soirs à l'intérieur de la maison et ranger le manteau par la même occasion, je vous conseille le petit parcours de Simon.
Simon, qui va devoir apprendre à jongler entre la vision expérimentée et la culture juive algérienne de mémé et sa vision en construction ainsi que sa triple culture judéo-franco-algérienne qu'il est entrain de découvrir et d'assimiler en essayant de trouver le parfait équilibre.
Riche en culture, en débat intergénérationnel et en humour, le livre de Gil Ben Aych nous retrace noir sur blanc son parcours de vie qu'il a souvent amené à marcher des kilomètres !
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
... il est grand et fort !... voilà regarde ! tout l'monde y passe et personne il s'arrête ou même il fait attention à lui !... personne même pour lui dire bonjour !... c'est pas possible il en a pas des parents !... tout le monde il a des parents !... il a un père et une mère comme tout le monde !... c'est pas possible !... un chien !... a kelb !... un chien et il dort chez lui !... alors un homme !... tu vas pas me dire qu'il dort tous les jours dans la rue quand même !... pas possible !... je veux pas croire !... et comment il se change ?... et comment il se lave ?... qu'est-ce qu'il est sale !... les poux sur lui !... la crasse !... c'est honteux !... et personne il lui dit rien !... il a pas des amis ou des voisins !... ou quelqu'un qui peut l'aider ! C'est honteux !... un chien, ici en France, il est mieux traité !... qu'est-ce que c'est que cette France où on fait même pas attention à un homme qui dort dans la rue !... quehsta ?... comment ça peut se faire ça !... personne y lui parle et personne y lui demande c'qu'y veut !... viens on va le voir !... au moins on lui demande si il est pas malade !... ou peut-être il a du chagrin ou quelque chose !...
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Le Voyage de Mémé de Gil Ben Aych raconte l'histoire d'une grand-mère, surnommée Mémé.

Mémé, c'est la grand-mère chérie de Simon. Elle rejoint la famille de son fils en France dans les années soixante. Mémé femme drole et speciale adore marcher des kilomètres malgré son âge. Elle refuse de prendre tout moyen de transport qui peut exister à Paris : ni voiture, ni métro, ni bus…
Lors de leur balade, ils rencontrent des gens de toutes sortes. Mémé transmet à son petit-fils des valeurs importantes telles que la tolérance, la patience et la bienveillance envers autrui.
La grand-mère est un personnage tendre et très sensible ainsi que le montrent plusieurs passages du récit (comme vouloir aider le clochard…). Elle compare le mode français et algérien.
Ce livre est plein de poésie et chargé d'histoire, une rencontre entre deux univers.
Le roman est rythmé par les aventures de Mémé et Sémon , leur complicité touchante et leurs moments de découverte. Le Voyage de Mémé est une belle histoire sur la transmission des valeurs et la découverte de soi .
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C'est l'enfer !... ma parole, c'est l'enfer qu'ils ont inventé ces Français avec ce diable de métro
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Mémé il est déjà dix heures et demi et alors ! un homme il est par terre et toi tu regarde l'heure ! c'est un clochard mémé c'est un clochard ! tu comprend pas ou quoi ?
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c'était un camelot qui vendait des monstres a des prix qu'il disait imbattables. Mémé m'a demander ce que je voulait dire imbattable
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Video de Gil Ben Aych (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Gil Ben Aych
La Bibliothèque francophone de Paris 8 vous propose une rencontre avec Gil Ben Aych, rencontre littéraire organisée par Ferroudja Allouache ainsi que les étudiant.e.s de Master Création critique/Écritures du monde.
Retrouvez cette ressource et sa documentation sur Octaviana (la bibliothèque numérique de l'université Paris 8) : https://octaviana.fr/document/VUN0036_17
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