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EAN : 9782841720255
190 pages
L’Atalante (28/02/1996)
3.92/5   6 notes
Résumé :
Histoire brève et terrible de Mercedes et de Mingo. Elle a 15 ans, lui 18, ils sont frère et soeur. Elle plutôt moche, mastoc, empotée, mais tellement brave... Lui « feignant de naissance et voyou par vocation ».
Dans leur bidonville de Buenos Aires, la mère vient de mourir. Mingo tâte du vol à l'arraché, puis il met sa soeur au tapin. De bar en boîte de nuit minable, l'engrenage des douleurs et de la déchéance les a saisis.
Comme tous les grands auteu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
« Le ciel noir a brillé intensément puis s'est éteint discrètement. » C'est ainsi que je referme ce livre bouleversant.

Il y est question de la misère sociale à Buenos Aires. Enrique Medina parle bien de ce sujet et son résumé de la situation est juste et sans appel : « Personne ne dit : ''A celui qui travaille de ses mains, qui se lève à quatre heures du matin pour pointer à l'usine à sept, qui se casse le cul pour nourrir sa famille, il faut lui donner davantage parce que c'est lui qui fait tourner le monde''... Personne ne dit ça, tout le monde pense qu'il n'a qu'à se faire foutre et c'est marre... »

Mingo, 18 ans et sa soeur Mercedes, 15 ans se retrouvent orphelins, sans argent, ils cherchent à s'en sortir. Leur mère vient de décéder. « Quel sens donner à la vie ? Maman. » le père est parti peu avant la naissance de Mercedes et n'est jamais reparu.

« Naître c'est déjà courir un risque, non...? »

Mingo a toujours été pouponné par sa mère, habitué à être traité en pacha, il ne sait rien faire et surtout ne veut rien faire. Sa soeur aimante prendra la suite de la mère décédée et s'occupera de lui. L'argent manque, il ne fait rien et le maigre salaire de Mercedes provenant de l'usine ne suffit plus. D'autant que Mingo cherche les embrouilles et se retrouve en prison pour vol. Elle en vient à perdre son travail.

Il a alors l'idée de la prostituer. Elle, qui n'est pas la plus belle du quartier, qu'aucun garçon ne regarde, tombe de l'arbre. Histoire de lui faire bien comprendre qu'elle va devoir obéir, Mingo emploie la méthode forte. Elle pliera, parce qu'au fond elle pensera ainsi expier. « On est nos propres esclaves les uns des autres. »

On entre dans la spirale infernale. Des chapitres sont vraiment très durs. Mais on espère un rayon de soleil. Idiote, naïve que je suis !! « Tu me dégoûtes et je me dégoûte, moi, je sais, parce que je le sais, la vie est une saloperie puante, ce qui me fout en rogne c'est que les gens soient si naïfs et cons et qu'ils passent leur temps à répéter des phrases toutes faites que les grands enfants de putains ont créées pour que les tarés les répètent comme des perroquets. »

Ils vont aller de cabarets en cabarets, elle fera son numéro de stripteaseuse, aguichera les clients et prendra le pèze. C'est son métier. Mais Mingo « son sauveur » est toujours dans les embrouilles, il boit, joue.. et doit de l'argent. Elle sera l'une des mises lors d'une partie de cartes. Mingo perdra. Comme toujours. Et comme toujours, elle perdra avec lui. Enrique Medina constate que Mingo est un fainéant, un maquereau mais ne le juge pas. Qu'aurions-nous fait dans une telle situation, quand la vie se résume à cette réalité : « c'est tous contre tous, un contre tous, tous contre un. »

J'aime l'écriture de Enrique Medina. Ses mots tragiques sont enlevés. L'écriture est percutante et profonde, entre deux il arrive à avoir une pointe d'ironie plaisante. « Mercedes, alias ma fille, a levé un regard interrogateur sans capter la question de l'ours noir qui la fixait de ses yeux de statue maculée de chiures d'oiseaux en été. »

La prostitution vue par Médina, c'est le système qui est dénoncé. Il les connait les putes, les seules personnes qui ont son estime : « J'aime les putes. Je leur dois le meilleur de moi-même. »

« ... l'être humain, l'être le plus infect et pourri qu'il y ait sur terre, excepté les putes, hein ? »
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Je connais assez peu la littérature sud-américaine, mais au fil de mes découvertes sporadiques et jamais décevantes dans ce domaine, j'ai pu constater que les oeuvres des auteurs issus de ce vaste territoire qu'est l'Amérique latine, ont souvent une dimension tragique. Constat que la lecture du roman d'Enrique Medina, "Les chiens de la nuit", a contribué à conforter.

Mingo a dix-huit ans. Déscolarisé depuis longtemps, il a jusqu'à présent vécu aux crochets de sa mère, qui peinait à entretenir leur minuscule taudis et à faire bouillir la marmite en exerçant d'éreintants et précaires boulots mal rémunérés. La mort de sa mère, brutale, représente par conséquent un cataclysme dans son existence. Il se retrouve seul pour assumer sa subsistance et celle de sa soeur Mercedes, âgée de quinze ans. Sa paresse le pousse à chercher le gain facile, mais après quelques larcins, il se retrouve en prison, expérience traumatisante qu'il n'oubliera jamais...
A sa sortie, il trouve une nouvelle solution à ses problèmes d'argent : il commence par céder le pucelage de sa soeur contre un prêt de mobylette, puis l'amène, peu à peu, à se prostituer de manière régulière.

L'humanité que dépeint Enrique Medina est laide et barbare. La relation entre Mingo et Mercedes est elle-même, par moments, bestiale, la sollicitude de la jeune fille étant souvent récompensée par des coups. Baignés dans un environnement sordide de misère et de violence, ils sont finalement deux enfants grandis trop vite, perdus dans un monde abject, dont ils sont obligés, pour survivre, d'adopter les codes, même si cela implique de se vautrer dans la fange.

Les chapitres, courts, se succèdent à un rythme vertigineux, la sécheresse de l'ensemble du texte étant parfois entrecoupée de phrases plus longues, dont la poésie soudaine sert une réalité brutale et glauque. Une réalité qui laisse très peu de place à toute tentative d'introspection, d'analyse, par les héros d'Enrique Medina. Ces derniers brûlent leur existence en préférant occulter toute réflexion de nature à leur faire prendre conscience de sa maigre valeur.
Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Ils ne se lassent pas, c'est chouette de cogner sur un homme sans défense, il faut reconnaître que ça fait plaisir, on en jouit, comme au lit avec une femme. Il y en a qui éprouvent plus de plaisir que d'autres, ceux qui ne font pas long feu au lit, ce sont les premiers à cogner, il faut les sortir pour qu'ils arrêtent. Ma foi, c'est jouissif, très jouissif de frapper un homme sans défense, c'est chouette, très chouette, l'assurance que l'autre ne va pas répliquer. Il existe peu de satisfactions supérieures à celle de tabasser le plus faible, il faut bien le dire. Par ailleurs, on ne doit pas renier la nature réprimer les pulsions humaines, ce sont bien des pulsions humaines, non ? Pas question de tomber dans la banalité en répétant comme un idiot « instinct animal » quand il s'agit de l'un d'entre nous. Parfaitement.
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Rien de plus triste en amour que de devoir se laver après. Se laver souille l'amour. Elle aurait aimé nettoyer Ferreyra. Son travail habituel l'obligeait à nettoyer l'homme après le combat. Il y a peut-être de l'amour dans cet acte. Quand la femme prend entre ses mains la flèche languissante et maculée et qu'avec une ineffable délicatesse, étirant la peau soigneusement et faisant effleurer la tête rougie, épuisée, elle glisse ses doigts humides et procède à la toilette. Oui, elle aurait aimé nettoyer le membre de Ferreyra, le regarder se reposer, heureux. Rien n'est plus triste qu'un homme et une femme se lavant chacun de son côté, comme regrettant leur étreinte. Rien n'est plus triste aussi que de vivre dans un cloaque quand le reste du monde respire la joie...
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C'était un bras cassé, un bon à nib. Il était né comme ça, pauvre et feignant. Commode ! La mère avait toujours pris soin du garçon car elle le sentait bon à rien. Il n'avait rien à faire. Puisqu'il y a des femmes pour ça, il ne faisait pas la cuisine, ne lavait pas, ne repassait pas. Se gratter les couilles, c'est tout ce qu'il faisait, même pas son lit...
Mingo était feignant de naissance et voyou par vocation.
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L'homme meurt dépouillé, solitaire, dans la seule compagnie de ses ambitions frustrées.
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