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EAN : 9782226435163
300 pages
Albin Michel (28/03/2018)
4.14/5   341 notes
Résumé :
Amandine Moulin a disparu. Son mari évoque un possible suicide, ses parents affirment qu’elle a été tuée, ses collègues pensent qu’elle s’est enfuie avec un amant, et autant de témoignages contradictoires qui ne collent pas avec la description qui est faite de cette mère de trois petites filles. Et puis il y a sa voix, que le lecteur découvre, en filigrane du roman, qui nous raconte une indicible vérité...

Un roman qui dépeint subtilement les affres d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (97) Voir plus Ajouter une critique
4,14

sur 341 notes
Les blessures du silence - Natacha Calestrémé - Roman policier psychologique - Éditions le Livre de Poche - Lu en juillet 2022.

Tout d'abord un petit mot sur l'autrice, parce que le thème abordé dans ce livre demande quand même quelques connaissances du problème.

Après le décès d'une de ses proches et deux ans de recherche sur le mécanisme de l'emprise et de la perversion, la journaliste Natacha Calestrémé dépeint les effets du harcèlement conjugal, les silences qui accompagnent cette violence invisible, les pièges dans lesquels tombent l'entourage... et donne au coeur de ce roman des clés pour s'en libérer.
L'autrice est aussi réalisatrice, membre des journalistes écrivains pour la nature et l'environnement, réalisatrice de documentaires sur Fr3 et une vingtaine de chaînes étrangères, autrice du livre le Testament des abeilles.
Les blessures du silence a reçu le prix du polar du Grand Saint-Emilionnais en 2019.

J'en viens à ma lecture. Amandine, maman de trois petites filles, mère sans reproche, ayant un emploi à la Mairie disparaît un jour. Henry son mari, professeur de lettres dans un lycée proche de chez lui, encensé par ses élèves et le corps professoral semble être le mari et le père parfait.

Mais ... Pourquoi met-il 5 jours pour déclarer la disparition de sa femme ? Pourquoi est-il si persuadé qu'elle s'est suicidée ?

Une enquête est ouverte, la famille est questionnée ainsi que les voisins, l'entourage (très restreint) d'Amandine, un chien pisteur est requis, mais rien, la police pense qu'elle est partie avec un amant, ses parents qu'elle a été assassinée, sa soeur ne sait pas et culpabilise. Et le mari soutient mordicus qu'elle s'est suicidée.

Amandine est-elle morte ?

On suit en parallèle les derniers mois d'Amandine avant sa disparition et l'enquête policière.

Amandine veut encore croire à la viabilité de son couple malgré tout, elle pense "et si j'étais folle".
Elle vit dans la peur, elle s'accroche désespérément à l'espoir que son mari va changer quand il est gentil avec elle. Il ne la frappe pas, non, ça laisse des traces les coups.
"Les mots sont beaucoup plus violents. Ils ne marquent pas la peau mais ils laissent des traces monstrueuses dans le coeur, pour l'estime de soi et, malheureusement, ils sont invisibles devant la justice" page 62.

Amandine s'oublie, Amandine n'est plus rien, Amandine n'est plus qu'une ombre.

- L'emprise est utilisée pour déposséder l'autre de sa confiance, de sa force et de son estime de soi.
- La victime n'est plus capable de penser normalement.
- le pervers puise l'énergie de son entourage.
- La victime a le sentiment de perdre sa vitalité.
- Pour ne pas perdre la raison, la victime entre dans une forme de dissociation. Ses pensées sont séparées du reste de sa personnalité et elle devient l'observatrice extérieure du harcèlement qu'elle endure.
- ... la fuite mentale se révèle être la seule protection possible face à l'inconcevable, ce qui est souvent considéré comme de la passivité par l'entourage. (Encore faut-il que l'entourage se rende compte que quelque chose ne va pas, et que l'on croit ce que la victime dit si toutefois elle en parle. Ce n'est pas dans le texte, je l'ajoute parce que c'est important) Page 373.

"Il est temps que les tribunaux reconnaissent ce fléau invisible de notre société et qu'il punissent le harcèlement familial que ce soit auprès d'un conjoint ou des enfants, ainsi que les meurtres psychiques qui en découlent parfois". Page 388

Je termine en disant que ce livre est bouleversant et
est un message qu'on peut s'en sortir, mais pas seule. Par contre, je reste mitigée quant à la méthode prescrite par l'autrice pour en guérir, mais ce n'est que mon avis.

"Oui, c'est faire preuve d'un courage extraordinaire que d'oser sortir des blessures du silence". Page 389

J'ajouterai qu'il faut parfois des années pour s'en remettre et qu'on n'oublie jamais.


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Je viens juste de tourner la dernière page de ce roman et ...Je suis bien embarrassé . D'abord , et le nombre d'étoiles l'indique , je l'ai beaucoup aimé. Bon , ça c'est fait , la base est posée mais le plus dur est à venir . Je continue : ce livre , c'est un polar . Deuxième révélation tonitruante , vous allez lire un polar .Ben , oui , tiens , il y a une femme , Amandine , mariée, mère de trois enfants , qui disparaît : enlèvement, crime , suicide ?. Les hommes du taulier Filipo vont se charger de l'enquête , d'autant plus rapidement que Filipo et Amandine , avant , ben oui , mais plus maintenant , non. Vous suivez ? Bon alors continuons , ou retournez à la case départ, vous savez , comme quand on joue au " jeu de l'oie " ...Les trois flics sont : Yoann , Christian et Marc , des bons flics , des bons mecs , qui traînent , les uns et les autres , leurs petites " gamelles " , comme tout le monde ou ...presque . Parce que parfois , les "gamelles" , elles sont bien lourdes . Autre personnage intéressant , si l'on peut dire , Henry Martin , le mari d'Amandine , prof de lycée unanimement apprécié pour ses compétences, sa gentillesse , son attention portée aux autres , un vrai dieu du quartier ....
Et l'enquête démarre, bien menée , jamais ennuyeuse , pleine de mystères et de sous - entendus ....En alternance , le propre récit d' Amandine avant sa disparition , une sorte de compte à rebours particulièrement judicieux qui permet aux éléments de s'emboîter, au plus grand plaisir du lecteur , conquis , en ce qui me concerne , même si , au fur et à mesure de l'avancée du récit, on a un peu l'impression de progresser vers le fond d' une nasse dont on se demande bien comment l'auteure , embarquée avec nous , va pouvoir se dépêtrer .." Mais que diable allait - elle faire dans cette galère ? " Non , mince , je confonds , c'est pas là , ça...Oui , mais c'est compter sans le talent de Natacha -Scapin -Calestrémé , qui , avec habileté va changer de registre , prendre son " public " à contre- pieds et se lancer dans une partie , comment dire , plus "documentaire et didactique " et aborder alors un sujet d'une grande actualité, un sujet terriblement difficile dont vous me permettrez de ....ne pas vous parler. C'est bien fait , très intéressant, à mon avis , mais je comprends aussi les réticences de certains lecteurs , puisque , vers la fin ,on sort un peu de notre " zone de confort " pour aborder un terrain un peu plus ...comment dire ? Oh , je ne trouve plus le mot , débrouillez- vous , j'en ai déjà trop dit ....Personnellement , cette partie ne m'a pas lassé , bien au contraire, mais comme le dit le dicton " tous les égouts sont dans la nature "
À propos de dicton , notez celui - là, " la parole est d'argent , le silence est d'or " . Pas toujours vrai si j'en crois le titre du roman , " les blessures du silence " . Quel serait votre avis ?
Allez , vous avez quatre heures , au boulot , et vous avez le droit de lire ce qu'a écrit Natacha Calestrémé , quatre heures , c'est ce qu'il faut , après, je ramasse les copies ....
Moi , j'ai aimé, vous , vous me direz , j'adore vous lire , c'est tellement bien d'échanger.
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«  ——Ce que tu dis à propos d'Henry est atroce.
——-Henry a la mâchoire d'un pitbull .
——Il ne lâchera rien. » Court extrait de ce polar fascinant .

Une femme , Amandine Moulin, Épouse d'Henry, professeur de lettres , individu apparemment bien sous tous rapports ,maman de trois petites filles , Jade, Zoé et Lola, disparaît un certain 5 septembre.

Fugue? Départ organisé ? Meurtre ? Suicide? Conflit familial ? Enlèvement ?

Trois policiers , le major Yoann Clivel, au 3° district de police Judiciaire de Paris, célibataire, pétri d'empathie et de bon sens , ses collègues Christian chef enquêteur, binôme de Clivel et le jeune Marc Honfleur mènent l'enquête, jamais ennuyeuse au demeurant..

Les parents d'Amandine pensent qu'elle a été assassinée , Henry qu'elle s'est suicidée, ses collègues qu'elle s'est enfuie avec un amant .
Qui croire?
Qui manipule qui?
L'auteure nous conte entre deux avancées de l'enquête la vie d'Amandine au quotidien, les mois et les semaines avant ce fameux 5 septembre ....

Elle dépeint et dénonce avec force les mécanismes précis du harcèlement conjugal, insidieux , lent , pervers , certaines violences psychologiques pouvant être plus terribles que la violence physique, une emprise malsaine, dévastatrice, destructrice , sapement subtil de la confiance en soi, , sentiment de n'être plus rien ——non palpable mais effroyable ——qui lamine , broie, une sorte de spirale qui peut vous avaler—- si vous ne faites pas le geste qui peut vous sauver.——
Sans rien révéler je peux dire que la mise en abîme est réussie, les personnages attachants, l'intrigue prenante , nous tenant en haleine jusqu'au bout encore que l'allusion à la parapsychologie à la fin m'est apparue un peu nébuleuse .

Un polar psychologique d'une grande utilité ,bien documenté.
Il donne des clefs essentielles pour se libérer de manipulations insidieuses , hideuses où le pervers manipule , calcule et maitrise tout .

La manipulation de l'autre est jouissive et jubilatoire pour lui.
Comment survivre quand on partage la vie d'un pervers narcissique?
Comment s'en sortir ? Se reconstruire ?

Le harcèlement psychologique dans le milieu amical , professionnel ou familial gagnerait à être mieux traité du point de vue juridique en France.

Un sujet contemporain trop souvent méconnu !

L'auteure, journaliste de profession a le mérite de décrypter le processus de ce fléau.
Cela m'a fait penser à un ouvrage de Marie- France HIrigoyen , médecin, dont j'avais lu «  Femmes sous emprise. »
Une lecture intéressante, forte et poignante.


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Vous devez la choisir charmante, instruite, forte, sociable.
Si vous optez pour une femme faible et solitaire, vous n'aurez aucun mérite à la briser, et vous n'en retirerez par conséquent aucun plaisir.
"C'est tellement plus jouissif de faire tomber quelqu'un de cultivé, intelligent, sensible, altruiste."
Pendant les six premiers mois, faîtes preuve de la plus grande gentillesse envers elle. Soyez à l'écoute, soyez compréhensif, indulgent, et bien sûr aimant.
Soyez généreux, tendre et attentionné. Ne jurez que par le partage et le dialogue. Devenez l'homme idéal, celui qui saura se rendre indispensable.
Son bien-être et son équilibre seront alors entre vos mains, et dépendront bientôt entièrement de vous.
Une fois ce long travail d'emprise effectué, vous pourrez alors passer à la seconde étape : la détruire psychologiquement.
Je m'appelle Henry Moulin, et je suis un pervers narcissique.

Mon épouse Amandine et moi somme en couple depuis dix-huit ans. Nous avons trois petites filles de six, sept et huit ans.
Rien de tel que des enfants : Ils sont un premier outil de contrôle qui limite les choix de votre partenaire.
Qui pourrait penser que sous ma respectable façade de professeur adulé tant par ses élèves que par leurs parents se cache quelqu'un d'aussi manipulateur ?
Absolument personne. A peine ma femme, ce qui est probablement le plus amusant. Je prends tellement soin des apparences !
"Il a un besoin viscéral de maîtriser son image et de contrôler ceux qui l'entourent."
Comment faire pour broyer un être humain et se sentir grandi par son désespoir ? Se nourrir de toute l'énergie dont votre épouse se videra inexorablement ?
Je vais répondre succinctement à cette question qui vous brûle les lèvres et vous donner quelques petits conseils.
Mais attention, il s'agit d'un travail de longue haleine, saper son moral vous demandera un certain investissement et ne se fera pas du jour au lendemain.
Mais le jeu n'en vaut-il pas la chandelle ?

D'abord vous devez l'isoler. Insistez sur sa famille et ses amis qui n'ont aucun intérêt, jusqu'à ce que ce soit bien clair pour elle. Entre eux et vous, son choix sera vite fait vu à quel point elle est amoureuse.
Dans le même ordre d'idée, vous devez insister sur la pression qu'elle subit professionnellement. le travail sera souvent son dernier rempart social et la rabaisser à ce sujet, en lui démontrant à quel point elle n'est pas considérée, la fera douter d'elle-même un peu plus.
Tout en suggestion, vous allez la priver de tous ses repères sociaux et il ne restera plus que vous, l'ultime protection dont elle dépendra entièrement.

Cette dépendance doit également être financière. Surtout pas de compte-joint ! Et si comme moi vous gagnez plutôt bien votre vie, laissez là se débrouiller avec son maigre pécule pour tous les achats courants, les factures, la nourriture, les vêtements des enfants. Elle sera coincée. Jamais elle ne pourra économiser le moindre centime si l'idée absurde de vous quitter lui traversait un jour l'esprit. Et vous pourrez lui reprocher occasionnellement d'être incapable de tenir un budget, lui donnant quelques billets pour que vos enfants puissent s'habiller quand même en lui faisant bien comprendre à quel point votre générosité est exceptionnelle.
"Tu as un boulot où on t'exploite, t'as pas d'amis, pas d'argent, sans moi t'es rien."

A partir de là, votre toile est déjà bien tissée et votre compagne commence à ressembler à un insecte englué. Mais il faut enfoncer le clou et pour cela, idéalement, faîtes lui constamment des reproches contradictoires. Si vous rentrez tard et qu'elle vous a attendu pour dîner, haussez le ton en lui expliquant qu'il ne fallait pas patienter puisque vous mangiez ailleurs. Et si le lendemain elle soupe avec ses enfants sans même vous avoir attendu, alors à nouveau vous l'engueulez : Elle ne va plus rien y comprendre ! Elle va toujours craindre de mal faire et se persuader qu'elle est en tort. Quoiqu'elle fasse ça ne vous conviendra pas ! Et souvenez-vous également que votre meilleure arme en cas d'interrogations, c'est le silence.
"Il ne lui adresse la parole que pour lui asséner des reproches sans queue ni tête ou lui dire qu'elle fait tout mal."

Si elle exige des explications, taisez-vous pour lui montrer à quel point c'est elle qui ne comprend rien à rien. Changez d'humeur constamment, pas parce que vous êtes lunatique mais pour montrer que vous n'en pouvez plus de sa bêtise. Râlez quand elle a fait des dépenses inconsidérées, engueulez-la si elle n'a pas osé acheter une simple bouteille de ketchup, soyez exécrable si elle n'a pas su gérer son argent et que ce sont vos enfants qui doivent en souffrir. Et vous la regarderez se débattre avec votre sourire vicieux à toujours compter le moindre centime.
A toujours se remettre en question.
"Il est plus cyclothymique que jamais, la fréquence de ses sautes d'humeur augmente."

Ne couchez plus avec elle ! Il ne faudrait pas non plus qu'elle se croie attirante. Non, elle est invisible : vous ne la regardez pas, vous ne lui parlez pas, et si vous avez des pulsions à assouvir alors utilisez vos capacités de séduction qui n'ont plus à faire leurs preuves et prenez une maîtresse.

Un dernier conseil encore, ne la frappez pas. Sauf vraiment en toute dernière extrémité, si elle vous pousse à bout et que vous perdez le contrôle. Mais les marques de coups restent, et pourraient à terme causer des torts à l'image de marque que vous tentez de préserver. Prenez sur vous dans la mesure du possible même si elle vous énerve profondément, et faîtes toujours preuve de davantage de subtilité dans votre acharnement.
"Les mots sont beaucoup plus violents. Ils ne marquent pas la peau mais ils laissent des traces monstrueuses dans le coeur, pour l'estime de soi et, malheureusement, ils sont invisibles devant la justice."

Et si vous vous rendez compte que vous avez été trop loin, que vous n'avez plus autant d'emprise, alors il faut savoir lâcher un peu de lest.
Redevenez le mari parfait et prévenant qu'elle aimait tant au début de votre relation, n'hésitez pas à vous excuser si vous y avez été un peu fort et constatez qu'elle commence à moins vous faire confiance ou à prendre ses distances. Offrez lui des fleurs, invitez la au restaurant ! Elle pensera que vous pouvez encore changer et redevenir l'homme dont elle est tombée follement amoureuse. Tout vous sera pardonné et quelques jours plus tard vous pourrez recommencer à vous amuser avec votre proie.

Après tout, vous aussi on vous a abîmé quand vous étiez enfant, alors c'est bien votre tour d'affirmer votre force en poussant votre partenaire dans ses derniers retranchements, là où plus aucune solution n'est envisageable, là où elle se sentira écrasée, piégée, sans aucun moyen de s'en sortir puisqu'elle aura depuis longtemps perdu toute estime d'elle-même et donc toute velléité de rébellion.

* * *

Amandine a disparu.
A-t-elle fui, l'ai-je tué ou laissée pour morte ? A-t-elle simulé un suicide ?
Bien entendu, pour le chef de la police, Hervé Filipo, je fais figure de suspect idéal. Quelle objectivité, vu que c'est l'ex de ma femme et qu'il n'aspire sans doute qu'à la reconquérir !
Encore faut-il qu'elle soit toujours en vie.
Et il a mis son meilleur flic sur l'enquête, Yoann Clivel. Si son nom vous dit quelque chose, c'est probablement parce que ses précédentes enquêtes ont été fortement médiatisées : le testament des abeilles, le voile des apparences ou encore les racines du sang.
Vous pensez vous aussi que j'ai un lien avec son évaporation ou que celle-ci n'a au contraire aucun lien avec ce que je lui faisais subir au quotidien ?
En tout cas je me sens harcelé d'être considéré ainsi comme le meurtrier tout désigné. C'est un peu facile non ? Faut pas pousser mémé dans les orties non plus.
Si tout cela vous intéresse, si vous voulez connaître le fin mot de l'histoire, je vous invite à lire le nouveau roman de Natacha Calestrémé, Les blessures du silence.
Mais bon, je n'y joue qu'un rôle secondaire, présenté comme un type profondément antipathique, et il n'y en a que pour les points de vue d'Amandine quelques mois avant qu'elle ne quitte les écrans radar, ou pour ces satanés flics qui mènent leur soit-disant enquête.

* * *

- Euh, monsieur Henry Moulin ?
- Oui, quoi ?
- Vous êtes connecté sur mon compte Babelio, normalement c'est un espace personnel.
- Et alors, j'ai bien le droit de donner des conseils aux lecteurs et d'exprimer mon ressentiment !
- Si vous pouviez créer votre propre pseudo ça serait mieux quand même. Ca éviterait à mes amis et à tous les membres de croire que je suis devenu un dangereux sociopathe.
- Là je suis plutôt énervé alors c'est pas trop le moment de me chercher Anty.
- C'est moi qui ai reçu le livre lors d'une masse critique privilégiée, et donc normalement c'est à moi d'écrire ce que j'en ai pensé. Je le dois aux éditions Albin Michel qui ont eu la générosité de m'envoyer les épreuves non corrigées avant que ne paraisse le livre.
- Eh ben vas-y, si ça peut te faire plaisir ! Mais j'espère que tu ne vas pas encenser ce roman qui me dévoile ainsi sans mon masque quotidien.

* * *

Même si ça n'est pas pour les raisons invoquées par l'époux d'Amandine, je ne vais effectivement pas essayer de vous vendre Les blessures du silence comme étant l'incontournable thriller de ce mois.
Suite à ma lecture, mon avis est vraiment très mitigé.
A sa décharge, je l'ai lu après la bombe Toutes blessent, la dernière tue de Karine Giébel et forcément, après une telle claque, la majorité des livres m'aurait de toute façon parue bien fade.
Natacha Calestrémé dénonce donc l'emprise conjugale et la perversité narcissique pour que les victimes puissent réaliser qu'elles n'ont rien à se reprocher et qu'elles ne sont pas des bonnes à rien pour autant.

Elle en présente d'ailleurs très bien le fonctionnement : la perte progressive de repères, le manque de confiance en soi, la culpabilité, jusqu'à l'emprise totale dont il est extrêmement difficile de se défaire.
"Dénigrement, méchancetés, silences culpabilisants, isolement, messages contradictoires, colère, violences verbales, faute exclusive."
Mais cette description est beaucoup trop scolaire. A la façon d'un exposé, elle reste beaucoup trop dans la description, dans le déroulé des faits, dans le processus.
J'ai eu parfois l'impression de lire un cours - très instructif il est vrai - sur le harcèlement moral.
Et un autre sur les chiens renifleurs.
Ces dissertations ont beau être fort intéressantes, elles nous éloignent de ce qu'on attend d'un roman policier .
Avec cette façon très académique de raconter les faits, il est impossible de s'attacher à qui que ce soit. le compte-rendu est froid, impersonnel.
L'analyse se fait hélas au détriment des protagonistes. Leur psychologie est pourtant travaillée mais on ne s'y attache pas. L'empathie ne fonctionne pas.
Ils ont autant de charisme et de naturel qu'une porte de prison.
On est tellement dans la démonstration quasi-algébrique des faits que même le sort d'Amandine nous indiffère. Qu'elle soit en train de se putréfier dans la Seine ou qu'elle soit désormais heureuse d'avoir pu dénouer les liens qui la rattachaient à son tortionnaire nous importe peu au final.

Tout l'intérêt d'un thriller psychologique axé sur la manipulation est selon moi de partager la détresse et l'incompréhension d'une héroïne malmenée par son mari. Ici, c'est particulièrement difficile.
Je ne suis pas non plus parvenu à m'attacher aux flics et à leurs histoires sentimentales dignes des feux de l'amour. Leur enquête m'a semblé incroyablement hésitante et assez peu réaliste en dépit de quelques bonnes idées originales et inédites.
Je n'ai pas non plus apprécié cette légère touche de paranormal : Amandine qui visite les rêves de Yoann sans qu'ils ne se soient jamais rencontrés, l'âme comparée à une boule d'énergie apte à réintégrer le corps dont elle s'est échappée.
Yoann Cliven est doté d'une sensibilité et d'une intuition qui sont comme un don inexplicable.
"Le jour où tu acceptes tes intuitions comme des messages venant de l'invisible, ce jour-là, tes perceptions seront multipliées par cent."
Même si ces faits ont été étudiés par l'auteure, qui a également travaillé pour son livre avec un médium, ces petites touches d'irrationnel cassent un peu le rythme et nous empêchent d'y croire tout à fait. Ou alors c'est moi qui ait l'esprit trop cartésien.

Reste que dans son roman, et c'était sans doute son but premier, le lecteur comprend bien ce mécanisme de manipulation mentale et toute la difficulté des victimes à sortir d'un tel schéma, un carcan devenu leur mode de vie.
Reste également une écriture très fluide et des pages qui se tournent rapidement, on ne s'ennuie pas, on apprend et malgré tout on veut savoir comment tout cela va se terminer, si les enquêteurs étaient ou non sur la bonne piste.

Mais en fin de compte, ce qui aurait pu être un bon polar psychologique en exploitant autrement le thème récurrent de la manipulation aboutit à un résultat assez bancal et peu convaincant, tout en restant agréable à lire.

* * *

Je profite qu'Antyryia se soit absenté pour écrire de dernières lignes.
J'ai oublié de vous dire : Si vous êtes amené à jouer au trivial pursuit ou à n'importe quel autre jeu de culture générale, que ce soit en famille ou en société, apprenez auparavant toutes les réponses par coeur afin de toujours briller davantage. Votre suprématie ne pourra que s'en trouver renforcée. Et par conséquent votre crédibilité, si un jour ça tournait au vinaigre.
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Très didactique. le manuel de petit pervers illustré (enfin, du gros pervers)
L'histoire démarre comme un roman policier : Amandine Moulin, épouse d'Henry Moulin, professeur de lettres agrégé, bien sous tout rapport, a disparu en laissant en plan son mari et ses deux filles. On comprend vite que la recherche du coupable n'est pas l'essentiel. Ce qui compte, c'est le calvaire que vivait Amandine avec son époux.
L'intention de Natacha Calestrémé est très louable : mettre en scène un pervers narcissique et ses manipulations autour de sa victime, pour la déprécier, l'isoler, la rendre dépendante et la détruire. Elle dénonce aussi le fait que la violence conjugale verbale, le harcèlement moral parfois fatal (suicide, attaques cérébrales ou cardiaques) n'est pas recevable par la justice, car il ne repose que sur des impressions, des témoignages, rien de matériel. C'est le crime parfait.
Cependant, quoique ce sujet soit très intéressant et que le texte se lise relativement bien j'ai eu du mal à cause de beaucoup de maladresses de l'auteure. Style parfois épouvantable : "j'ai rendez-vous avec Alisha (oh là là ce nom) à l'auberge du Boulevard, porte d'Auteuil...Elle apparaît dans un chemisier qui met parfaitement en valeur sa poitrine généreuse. Des talons hauts, un jean qui moule son cul de déesse...Pas de doute, elle cherche à me plaire." Aïe aïe aïe la description, et en plus ce présent de narration insupportable...Ensuite, sur le fond, il y a des facilités. Par exemple, un pervers brouille les pistes, présente bien, surtout au public, alors avec la police...Il devrait être charmant, coopératif, atterré...Le nôtre est agressif, parle de sa femme au passé, méprise ouvertement les policiers, se fiche de sa disparition : ça ne va pas, il attire la suspicion immédiatement. Je songe au livre que j'ai lu "La Maladroite", de Seurat, récit tiré de l'histoire vraie de la petite Marina Sabatier. le père, grand pervers, a réussi à embobiner presque tous les services publics par son charisme et ses talents oratoires. Ensuite, les exposés de la psychiatre sont vraiment trop plaqués. Cela manque un peu d'habileté, il me semble. Et puis l'intervention des médiums, bizarre, bizarre, ça ne m'a pas de tout convaincue, cette communication entre Amandine et le policier par rêve interposé...D'ailleurs le policier, Yoann, on pourrait se passer très bien de ses mésaventures avec Alisha (oh ce nom !) et son "cul de déesse" ...
Bon, je pense néanmoins que ce livre pourra séduire et plaire, car il traite d'un sujet à la mode et nécessaire, auquel nous devons être plus que sensibilisés, que ce soit à l'école, au travail, dans la vie privée. Nous devons savoir reconnaître les victimes et les bourreaux, et ne pas mélanger. Je pense néanmoins que c'est un peu plus compliqué dans la réalité que dans le livre, les bourreaux maniant souvent le mensonge avec une telle dextérité, une telle mauvaise foi...D'ailleurs, d'après l'actualité récente, je suis très étonnée aussi de la scène de la garde à vue du mari, où celui-ci, s'il est le pervers décrit, devrait être d'une coriacité de granit devant des enquêteurs aguerris à des jeux de pouvoir...Et j'ai plutôt vu Oui-Oui interrogé par Potiron. Mais bon.
Je remercie en tout cas Babelio et les éditions Albin-Michel pour ce livre, à la fois intéressant et, à mon humble petit avis, un peu en-dessous de la violence réelle qu'il cherche à décrire.
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Citations et extraits (54) Voir plus Ajouter une citation
- Et donc votre épouse ne serait jamais partie parce qu'elle n'arrivait à rien sans vous...
- Il est indéniable que nous ne sommes pas faits du même bois. Les hommes et les femmes, je veux dire. Il leur faut un pilier auquel se raccrocher. Quelqu'un qui leur amène de la stabilité. Et, en même temps, elles veulent s'émanciper. Les femmes sont très complexes, insiste-t-il, il leur en faut toujours plus et ça ne va jamais. Mais Amandine pouvait compter sur moi pour la driver dans la bonne direction. Alors pour répondre à votre question, vous faites fausse route. C'est probablement ses parents qui vous ont dit des horreurs sur moi mais c'est du pur fantasme. La mère s'est toujours inquiétée, il lui faut un os à ronger. Elle veut un coupable, c'est tout.
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Un pervers garde le même objectif, quoi qu'il arrive. Il manipule la vie de l'ensemble de son entourage. Il est fier de ce qu'il est et de ce qu'il fait subir aux autres. Il ne ressent pas de culpabilité et quand il prétend s'en vouloir, c'est pour qu'on s'apitoie sur son sort. Tout est calculé. Il maîtrise tout, c'est ça qui compte pour lui. La manipulation de l'autre est jubilatoire pour lui. Il est capable de faire croire tout et son inverse, c'est sa manière de tester son pouvoir sur autrui. Et ça marche si bien que l'autre peut avoir l'impression qu'il est affectueux à son égard. C'est faux. Il en est incapable.
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« ——— Ce que vous dites est étrange ....
Elle était victime des silences de son mari et maintenue prisonnière de ses propres silences , mais elle a trouvé le moyen de communiquer avec vous sans parler.
——Oui, c’est faire preuve d’un courage extraordinaire que d’oser sortir des blessures du silence. »
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- L'emprise est utilisée pour déposséder l'autre de sa confiance, de sa force et de son estime de soi.

- La victime n'est plus capable de penser normalement.

- Le pervers puise l'énergie de son entourage.

- La victime a le sentiment de perdre sa vitalité.

- Pour ne pas perdre la raison, la victime entre dans une forme de dissociation. Ses pensées sont séparées du reste de sa personnalité et elle devient l'observatrice extérieure du harcèlement qu'elle endure.

- Suite aux traumatismes générés par cette violence physique ou psychique, la fuite mentale se révèle être la seule protection possible face à l'inconcevable, ce qui est souvent considéré comme de la passivité par l'entourage.
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Le pervers narcissique a une image désastreuse de lui-même, il projette cette image négative sur l’autre pour se délester d’un passé humiliant. Plus il se sent vulnérable, plus il est violent. Il se prétend plus fort que tout le monde, a raison en toutes circonstances et s’interdît la moindre remise en question. J’ai remarqué que l’homme qui harcèle présente en général une importante blessure d’abandon. Chercher l’enfance. Son attitude psychotique est la seule manière que son inconscient a trouvé pour camoufler sa propre détresse. Au fond, cet homme doit être malheureux.
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Videos de Natacha Calestrémé (42) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Natacha Calestrémé
Extrait du livre audio « Se donner toutes les chances » de Natacha Calestrémé lu par l'autrice, Mathieu Buscatto et Caroline Victoria. Parution numérique le 21 juin 2023.
https://www.audiolib.fr/livre/se-donner-toutes-les-chances-9791035414627/
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LES BLESSURES DU SILENCE

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Natacha Calestrémé
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