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EAN : 9782021499490
352 pages
Seuil (03/03/2023)
4.08/5   38 notes
Résumé :
En Irlande, huit Bouchers parcourent le pays pour abattre le bétail conformément à une tradition ancestrale selon laquelle la famine s'abattrait sur le pays si le rituel n'est pas respecté chaque année. Mais à la fin des années 1990, face à la modernisation de l’Irlande et à la crise de la vache folle, ces compagnons sont voués à disparaître.
Una, douze ans, fille de l'un des Bouchers, est prête à tout pour devenir l’une des leurs. Sa mère tente de lui faire ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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Le prologue titille immédiatement l'attention du lecteur. Une exposition dans une galerie new-yorkaise en 2018 célèbre un artiste photographe, Ronan Monks. Une mystérieuse photographie d'une force indéniable est présentée pour la première fois alors qu'elle a été prise en 1996 en Irlande, dans le comté frontalier de Monaghan. Pour seul décor une chambre froide et un portrait de la Vierge Marie. Un homme mort, pendu au plafond par les pieds, des crochets enfoncés dans la chair. de l'art ou une pièce à conviction ?

Evidemment, on a envie de connaître l'histoire de cet homme et de cette photographie. Ruth Gilligan nous convie à ces révélations mais par des chemins détournés et fort inattendus, entre thriller psychologique qui s'accélère dans le dernier quart, chronique sociale d'une Irlande et saga familiale poignante.

L'autrice fait le choix du roman choral. Quatre personnages principaux qui incarnent le conflit entre modernité et tradition. Quatre voix qui alternent, chacun avec sa lutte personnelle pour se comprendre et comprendre sa place dans une Irlande en pleine mutation.

Une mère et une fille. Gra est l'épouse délaissée d'un boucher itinérant qui parcourt l'Irlande avec sept autres comparses pour abattre le bétail selon un rituel ancestral né d'une légende ( la malédiction de la veuve du fermier, totalement fictive mais tellement crédible ), à l'appel d'éleveurs « croyants » de moins en moins nombreux. Onze mois sur douze, Gra dépérit, sa frustration face à l'absence de ce mari, la ronge. Sa fille Una, douze ans, veut prendre la relève de son père et perpétuer les traditions malgré son sexe. En attendant, elle doit affronter l'hostilité de ses camarades qui la rejette et la harcèle à des rumeurs qui courent sur le métier de son père.

Un père et un fils. Fionn est éleveur laitier. C'est un non-croyant qui considère comme ridicule les superstitions liées aux huit bouchers itinérants. La seule chose qui le préoccupe est de compléter ses revenus pour offrir des soins dans une clinique luxueuse à son épouse atteinte d'une tumeur au cerveau. Leur fils Davey, intelligent et cérébral, passionné par la mythologie grecque, est en quête d'identité et rêve de poursuivre ses études à Dublin.

Le récit avance dans une tension de plus en plus forte, une menace sourde plane sur les parcours des quatre personnages, sensation renforcée par la description puissamment atmosphérique d'une Irlande à la croisée des chemins, s'éloignant des anciennes traditions pour se diriger vers les promesses d'une modernité en marche. Les contrastes piquants nés de ce choc saisissent d'autant le lecteur que l'année 1996, c'est l'année de la crise de la vache folle, importée du Royaume-Uni à Irlande par l'activité de contrebande de part et d'autre de l'Ulster, qui va accélérer les changements et la tragédie qui court et va cogner les personnages les uns aux autres.

Je n'aurais jamais pensé qu'un roman avec une telle toile de fond ( élevage bovin, vache folle and co ) pourrait autant m'accrocher. Même si Ruth Gilligan tire beaucoup de fils sans forcément leur apporter à tous une résolution complète et satisfaisante, j'ai été happée par cette histoire étrange, surtout par le formidable personnage de la jeune Una, adolescente secrète, solitaire et déterminée, dont les motivations explosent à la face du lecteur dans les ultimes pages.

Lu dans le cadre d'une Masse critique privilégiée Babelio.
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Si le roman s'ouvre à New-York en 2018 et en prologue sur la photographie inquiétante décrite par son auteur – un boucher suspendu mort par les pieds dans une chambre froide, c'est surtout dans un univers irlandais empli de tradition et de rituels que l'on basculera aussitôt après, en 1996. Tradition irlandaise de 8 Bouchers qui parcourent la lande pour poser leurs mains sur le bétail avant de l'abattre, rituel familier de la fille de l'un d'eux, Una, qui balance sa chaussure gauche le matin du départ de son père pour sa tournée de onze mois, rituel de sa mère Gra dans la matinée du départ morose partie rendre visite à sa voisine Mme P. elle aussi mariée à un de ses Bouchers, rituel d'Una se glissant sous les draps de sa mère pour unir leur désormais solitude de onze mois. Ils sont encore 500 Bouchers de la sorte à perpétuer la tradition dans tout le pays, quand d'autres irlandais s'en gaussent et accueillent le Mcdo avec fierté. En tout cas Una l'a bien décidé de son côté, du haut de ses douze ans, elle sera Boucher comme son père et qu'importe le genre exclusif de la tradition ou les brimades de souffre-douleur qu'elle subit au collège, elle compte même inaugurer son courage par l'exécution d'une souris, avec pour compagnons sept bonhommes Légo indispensables à la tradition.
Le roman s'invite ainsi dans la vie de quatre protagonistes dans une fausse polyphonie, sans les voix singulières du « je » mais avec une caméra factuelle à intra-sentiments embarquée, dévoile des intrigues autour de la crise de la vache folle, le boom du boeuf celtique et la contrebande de steak à la frontière de l'Ulster. En plus du mystérieux boucher pendu par les pieds bien entendu.
On s'en doute, les éléments vont s'emboîter peu à peu, ce dont on peut ne pas se douter par contre, c'est l'irrépressible envie de continuer la lecture, la romancière est habile pour nous triturer gentiment les méninges tout en nous faisant avancer dans sa narration à la prose efficace et fluide, parsemée de petits trous à combler, dans un univers oscillant entre tradition et modernité, flirtant en permanence avec une inquiétude macabre. Un bon roman en mode page-turner qui m'a pris, surpris, intrigué, lu en deux ou trois traites de vache irlandaise.

Merci à Babélio et aux Éditions du Seuil pour cette découverte dans le cadre d'une masse critique privée.
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Quand Babelio m'a proposé ce livre en Masse Critique Privilégiée, j'ai craqué sur la couverture. Originale, jolie, verte.... Aux couleurs de l'Irlande où se passe le roman.
Quand j'ai lu le résumé accompagnant le livre, j'ai été moins emballée sans trop savoir pourquoi. Mais bon la couverture était si jolie, que j'ai dit oui.
.
Bien m'en a pris, j'ai beaucoup aimé ce roman, très surprenant, très déroutant.
Tout tourne autour d'Unà, une toute jeune fille, vivant dans l'Irlande des années 90. Son père exerce une profession surprenante entourée du mystère d'une foi ancestrale. Une Foi en lien avec la Grande Famine irlandaise. Une profession en lien avec le bétail.
Autour d'Unà, son père donc, et sa mère. Et puis en avançant dans le livre, sa tante, son oncle (éleveur de bétail) et son cousin. 6 personnages, des vaches, et la maladie de la vache folle qui s'implante en Irlande. Et un mort.... une mort sordide....
Et une jeune fille qui s'affirme de plus en plus, consciente qu'elle devra se battre deux fois plus car elle est femme.
.
Franchement j'ai rapidement été déstabilisée par ce récit. J'ai aimée être bousculée dans mes habitudes. Je n'aurais sans doute pas lu ce livre sans cette Masse Critique. C'aurait été dommage ! Merci donc à Babelio et aux éditions du Seuil.
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Vert emballage roman d'Irlande
J'étais fort emballée déjà !
Mais qu'elles soient folles ou pas
Vaches à abattre viande
Une malédiction huit bouchers
Je refrénais mon enthousiasme
J'avais peu à peu mal au coeur
Je n'aime pas manger du boeuf
Encore moins l'équarrissage...

Et pourtant, j'ai aimé ce livre choral , en grande partie pour ses personnages si attachants, dont l'auteure irlandaise rend fort bien la complexité, la fragilité mais aussi la détermination. J'ai particulièrement été touchée par les deux plus jeunes protagonistes, qui se sentent si différents des autres, et vont cependant réussir à s'affirmer comme tels, malgré le rejet ou l'obligation de se cacher. La fin m'a surprise. Violente et vengeresse...

Par contre, j'ai été quand même abasourdie par cette coutume ( inventée par l'auteure, sans doute, car je n'ai pas retrouvé l'histoire des huit bouchers dans mes recherches...) consistant à ce que ce groupe aille chez les éleveurs dits " croyants" pour, selon un rituel, tuer une vache, cela protégerait des maladies le reste du bétail. A l'origine , il y aurait la malédiction de la femme du fermier( légende qui existe, elle). le récit se déroule en 1996, ce n'est pas si loin! Comment peut-on être encore attaché à de telles pratiques ? Justement, elles commencent à prendre fin, on montre bien dans ce roman le passage difficile de l'Irlande à la modernité.

Un livre atypique, prenant, en dépit de mes réticences du début. Merci à Babelio et aux éditions du Seuil de me l'avoir proposé.
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Je tiens à remercier La Masse critique privilégiée ainsi que les éditions du Seuil qui m'ont permis de découvrir le roman "Les Champs Brisés" de Ruth Gilligan. Un roman que je n'aurais sans doute pas eu l'occasion de connaître autrement.
Initialement dénommé "The butchers", autrement dit "Les bouchers", la version française a préféré rebaptiser ce roman en "Les champs brisés" ...

En dehors du quatrième de couverture qui décrit comme il se doit le scénario de l'histoire, la couverture en elle-même reprenant un boeuf en quartiers résume les différents thèmes abordés dans le roman : Irlande, tradition, ferme, veuve, vache folle, famille, renarde, malédiction, Taureau, photographe, féminisme, moutons pour les principaux.

Il y est en effet question d'un groupe de 8 hommes dénommé "Les bouchers" parcourant le pays afin d'abattre selon un rituel précis le bétail dans les fermes, et ce, de manière à conjurer une malédiction ancestrale. Mais avec l'apparition au cours des années 1990 de la maladie de la vache folle, c'est tout un secteur agricole et une tradition qui se trouvent dans une mauvaise passe et doit penser à sa reconversion.

A travers ce roman, l'auteur nous dépeint une Irlande avec ses traditions dans le monde rural, le monde agricole avec ses exploitations de bétail face à un monde en pleine mutation.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Fionn regarda le bœuf; le bœuf nord-irlandais. Le bœuf britannique qui avait été officiellement interdit. Il le passa un peu maladroitement, à Mossy qui sorti de son sac Umbro un tampon en caoutchouc. Ensuite, Mossy plongea le tampon dans l'encre et l'apposa sur chacune des étiquettes, en quatrième vitesse, comme s'il avait fait ça toute sa vie. Fionn observait les taches d'encre qui commençaient à s'accumuler sur le bout de ses doigts, tout ce fichu bleu autour des ongles qu'il allait se casser le cul à retirer. Et pour la première fois de la nuit, Fionn sourit, tandis que la palette suivante atterrissait dans ses bras, prête à changer de provenance. 100 % disait l'étiquette. Pas l'ombre d'un doute; de la marchandise qui avait cheminé, sans la moindre question ni la moindre inquiétude, vers les entrepôts du Sud et les étalages des supermarchés étrangers. Boeuf 100 irlandais, point barre.
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Le soleil, toujours plein d'à-propos, avait fini par émerger des nuages. Grá pencha son visage sur le côté comme si elle pouvait l'avaler à petites gorgées dorées.
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Dehors, le froid de janvier - le genre de froid qui pénètre les os et jusque sous les gencives - avait aplati les champs en friche.
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Parce qu'elle savait que parfois les femmes se servaient aussi des hommes ; qu'en fin de compte c'était à cela que servaient véritablement les corps.
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Ils étaient à peu près cinq cents dans tout le pays a continuer de suivre les traditions ; à continuer de respecter la malédiction de la Veuve du Fermier. Quant aux autres apparemment, il leur était plus facile de laisser les choses s'éteindre à petit feu _ l'Irlande abandonnait son passé et rattrapait enfin son retard sur le reste du monde.
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