Les délices des coeurs, d'Ahmad al Tifachi, parle peu des coeurs, car il n'est pas du tout question d'amour dans ce livre écrit au XIII siècle, par un tunisien ayant voyagé dans les terres almohades allant de Séville à Bagdad. Il n'est pas non plus question de sexe, au sens du Kama sutra. L'introduction nous prévient que jamais livre n'a été aussi loin dans l'audace et que tous les grands sujets sont abordés : libertinage, homosexualité, rôle des agents de débauche.
En clair, cela veut dire que, en ce temps où nous pensions le monde arabe comme nous pensons le Moyen Age d'Occident, pétri de religion et de pruderie, une grande liberté des moeurs régnait, le vin coulait, les hommes surtout faisaient l'amour entre eux, car les femmes ont leur règles, suprême désagrément et on pourrait croire que tout le monde baise tout le monde.
En clair, pourtant, il est en fait uniquement question de rapports consentis ou non, mais toujours vénaux. Toujours. le bonheur et le plaisir d'être deux n'est pas du tout abordé, car l'auteur veut sans doute choquer, et dans ce cas il en a eu le droit, bravo, on apprécie, ou plutôt reflète il l'idéologie de son époque : homosexualité régnante, rapports payants, souvent suite à une trahison, ou à l'obscurité trompeuse, ou à n'importe lequel des leurres et de la cupidité.
Crudité mais pas liberté, et surtout pas liberté des coeurs, et encore moins délices de ceux ci.