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EAN : 9782848761442
602 pages
Philippe Rey (20/08/2009)
3.33/5   43 notes
Résumé :
A la mort en 1946 du vieux marquis d'Argentières, ses héritiers se voient contraints de renoncer au train de vie qui fut le leur durant des siècles. Ils vont désormais s'appliquer à en conserver l'essentiel - un château en Anjou et un hôtel particulier à Paris - alors que, pendant plus d'un demi-siècle, la France connaît des bouleversements : guerres d'Indochine et d'Algérie, Mai 68, loi IVG, années Sida, crises économiques, etc. Ces événements, les Argentières les ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Ce roman, qui traverse plusieurs générations de nobles, débute au lendemain de la deuxième guerre mondiale pour s'achever à l'orée du XXI ème siècle. le lecteur découvre la famille d'Argentières lors des funérailles du marquis du même nom, mort des suites d'une chute de cheval. le château familial servira de toile de fond à cette saga foisonnante qui se terminera au même endroit, cinquante ans plus tard quand Antoinette d'Argentières, l'artiste reniée par la famille, est exposée par son neveu dans le château devenu propriété de la Région.
Entre ces deux épisodes, la romancière tisse son récit des amours heureux ou contrariés, des naissances, des mariages et des fêtes mais aussi des destins tragiques, des trahisons, des mensonges et de la folie. Ignorant les bouleversements de l'histoire et l'évolution du monde, cette famille d'aristocrates poursuit son destin, figée dans ses valeurs désuètes. Mais leur fortune, leurs certitudes et leur arrogance ne les mettent pas à l'abri des vicissitudes de la vie. Alors que certains d'entre eux, sûrs de leurs prérogatives, avancent dans le siècle avec le poids des traditions, d'autres tentent de secouer le joug, pesant, de l'héritage familial. Derrière un détachement hautain qui nie la réalité, on cache l'artiste aux moeurs trop libres, l'officier sombrant dans l'alcoolisme et la violence, la fille communiste, la cousine tombée sous l'influence de moines dissidents et celle qui cache son homosexualité. La folie fait irruption, niée jusqu'à l'absurde. Leur condition ne les a pas préparés au changement. Certains y parviendront, comme Tancrède, l'héritier au nom de héros qui réhabilitera la mémoire de sa tante artiste. D'autres, comme Odile, sombreront dans l'aigreur et la médiocrité.

Camille de Villeneuve nous brosse un tableau de cette aristocratie sur le déclin à petites touches. L'air de rien, elle sait acérer son trait pour décrire tel personnage ou évoquer telle anecdote. Mais elle sait aussi nous attendrir sans nous apitoyer avec le destin tragique de l'un ou l'autre des d'Argentières. Jamais elle ne prend parti, laissant le lecteur libre face à sa narration empreinte d'humanisme et de distanciation.
Ce pavé de 600 pages traitant d'une multitude de destins aurait pu être indigeste. Il n'en est rien, tant la romancière, par son talent, a su capter l'intérêt du lecteur pour des vies traversées par les tragédies de l'histoire, l'évolution des moeurs et les prises de position de l'église. Et, à travers une écriture littéraire et maîtrisée, elle nous conduit avec finesse jusqu'au dénouement.

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Enfant, j'avais beaucoup aimé le feuilleton «Au plaisir de Dieu», adapté de la «saga familiale aristocratique» de Jean d'Ormesson.
C'est un peu le même plaisir que l'on prend ici et, dès les premières pages du roman, je n'ai pu m'empêcher de faire le rapprochement.
Certes, la période couverte n'est pas tout à fait la même car «les insomniaques» débute en 1946 pour s'achever en fin des années 90 mais la construction et les ambitions me paraissent se rejoindre: A travers la vie de différents personnages d'une même famille et sur plusieurs générations, il s'agit de comprendre ce qui constitue l'essence même et l'évolution d'un milieu social, en l'occurrence une certaine noblesse française.
On traverse la deuxième moitié du XXeme siècle à travers une vingtaine de personnages et différents événements de la période y sont évoqués: la Shoah, la guerre d'Indochine, puis d'Algérie, l'avortement, l'émancipation des femmes...Il y des «personnages» secondaires à part entière comme le château d'Argentières et ses terres, l'Eglise et la religion, éléments indissociables de cette «caste sociale».
Comme dans toutes les familles, certains vont s'adapter à leur époque voire seront précurseurs (tel le personnage de l'artiste Antoinette trop tôt disparue) et d'autres, ancrés dans leur certitude de supériorité innée et de condescendance vont connaitre la déchéance.
L'écriture de Camille de Villeneuve est très maitrisée, classique et me fait penser à celle d'Anne-Marie Garat que j'ai beaucoup de plaisir à lire également.
Le parti pris de Camille de Villeneuve a été de ne pas avoir véritablement de héros (même si il apparait que ce sont plutôt les femmes qui s'en sortent le mieux). C'est la seule chose qui m'a un peu gênée: l'auteur reste parfois un peu trop en surface de certains personnages qu'on aurait voulu mieux connaitre.
Reste que «Les insomniaques» est un premier roman brillant à l'écriture résolument acérée sur la déliquescence d'une certaine «vieille France».
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(octobre 2014)

Ainsi démarre cette fresque familiale "Maurice était piqué au milieu du vestibule. Un rayon de lumière pâle traversait une fenêtre et dessinait des flaques tachetées sur les carreaux de marbre. Seul le battement monotone du bras de Félicité qui frappait les tapis sur la terrasse troublait le silence de l'hiver."

J'ai dévoré cette fresque familiale. C'est un premier roman magistral, impressionnant, abouti. La plume de l'auteure est élégante et féroce, sublime.

A travers le destin d'une famille aristocratique, la jeune auteure nous fait traverser minutieusement la France de la Libération à l'aube du XXIé siècle. Trois générations suffiront pour acter le déclin, de la gloire du château à sa triste métamorphose en chambre d'hôtes puis en musée. Les habitudes ancestrales sont devenues des vestiges, la richesse culturelle une sclérose, la bonne éducation des apparences pesantes, pour franchir le cap du nouveau paradigme en marche.

Dans cet inexorable déclin de la France aristocratique, les personnages vont devoir prendre parti … ralentir ou accélérer, se fermer ou s'ouvrir, s'offusquer ou provoquer … et rien n'y fera vraiment, la course vers la "modernité" est en marche :

-> la guerre de 39-40 et l'antisémitisme, la libération,
-> les aristocrates visite-malades et les pleureuses dans les villages,
-> l'Indochine puis l'Algérie,
-> la radio puis la télévision prennent le pouvoir dans les foyers, elles répandent d'autres vérités
-> des soupçons d'ouverture ou de scandale lors de Vatican II en 1965 ("nous sommes ouverts, nous avons autorisé la lecture De Voltaire pour le baccalauréat"),
-> les conciles et la prêtrise : affirmer encore que "rien de bon en ce monde" et améliorer le confort des monastères, "leur perte "!
-> la femme aristocrate qui veut rester à la maison et les autres femmes qui se battent pour leur liberté,
-> Mai 68, la libération des moeurs, l'homosexualité n'est plus une maladie, la protection des femmes (le planning familial et la contraception après les faiseuses d'anges),
-> les nouveaux riches et les parvenus,
-> la crise de 1974 et l'embargo arabe,
-> les Rallye, l'institution des mariages arrangés, issue de la paupérisation des classes aristocratiques
-> l'accession de Mitterrand en 1981 et le "chacun son tour" et le début des valses,
-> 1984 la famine en Ethiopie et le chômage dans les banlieues dortoirs,
-> 1985 le sida et la culpabilité du plaisir et de l'amour
-> 1989 la chute du mur de Berlin …

Et tout s'enchaîne. La culpabilité, pitié d'hier, s'appelle maintenant solidarité. Les colonisateurs sont contraints d'adopter une autre conscience du Tiers Monde. Et les parvenus des classes moyennes commencent déjà à souffrir de leur paupérisation. Chaque loyauté à la grandeur passée est jugée rétrograde, "il faut vivre avec son temps", et l'évolution des moeurs a le dos large, comme le goût du pain et des jeux du peuple de Rome.

De ce tourbillon que reste-t-il aujourd'hui ? L'Histoire, familiale, sociale, culturelle, semble structurellement être un poids dont il faudrait s'affranchir en la reniant. Nous sommes en 2016, dans une France déchirée et meurtrie, en plein coeur d'un Monde qui, à nouveau, construit l'avenir des uns en détruisant les héritages passés d'autres.

Pendant ces Quarante ans d'histoire de France, qu'avons-nous oublié ? qu'avons-nous omis de préserver ?
Ce qui nous manque cruellement aujourd'hui : la tolérance de la diversité dans une Europe enfin pacifique.

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C'est une grande fresque familiale qui nous est racontée dans ce premier roman très abouti à l'écriture parfaitement maîtrisée…qui pourrait aussi faire l'objet d'une adaptation télévisée. La présence de l'arbre généalogique en début d'ouvrage permet de toujours s'y retrouver parmi les liens de parenté de cette famille que l'on suit.
On traverse la seconde partie du vingtième siècle à travers l'évolution des relations d'une famille bourgeoise qui a du mal à s'adapter aux changements de la société française. le roman se concentre sur les relations familiales, les ruptures entre les différentes générations, opposant sans cesse le côté « avant-gardiste » de certains personnages au côté « vieille France guindée » des autres membres de la famille. Les événements historiques et les grands changements de la société française sont évoqués sans être détaillés ou expliqués : le propos se concentre sur les relations familiales et leur évolution dans le temps.
L'auteur nous emmène au coeur d'une famille provinciale bourgeoise qui essaie de maintenir son influence, son train de vie, sa prestance en dépit de revers de fortune : comment évoluer sans renier ses origines, les traditions familiales ? L'évolution, l'adaptation à la société moderne et à ses changements radicaux passent-elles forcément par une rupture radicale avec le passé ?
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Lu en 2009 (à la sortie du livre). J'avais beaucoup apprécié cette fresque familiale, dont l'intrigue se déroule de 1945 au milieu des années 80.
"Famille, je vous aime" ! Trois générations d'une noble lignée tenteront de sauver tant bien que mal leur patrimoine immobilier et de préserver l'héritage moral de leurs ancêtres... Un récit fluide et bien construit, sociologiquement et psychologiquement très intéressants.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
"Il n'est même pas sûr que tout s'achève à cause de nos difficultés matérielles. Non... Notre décadence économique n'est qu'une apparence dont notre pudeur, ou notre fierté, habille notre décadence morale. Nous mourons, vois-tu, de la haute idée que nous avons de nous-même, de notre supériorité intellectuelle que rien ne saurait entamer. Pourtant, nous ne sommes ni cultivés ni curieux, nous ne sommes capables ni d'un sentiment spontané ni de réelle affection. Notre politesse nous pousse à des ridicules dont nous ne sommes même pas conscients. Nous pensons faire croire à l'autre que nous l'exhaussons par notre humble déférence, et nous nous flattons de nos stratégèmes. Nous sommes seulement incapables de sincérité et de justesse. Nous sonnons faux."
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« Notre décadence économique n’est qu’une apparence dont notre pudeur, ou notre fierté, habille notre décadence morale. Nous mourons de la très haute idée que nous avons de nous-même…Nous voulons nous répandre comme un principe généreux, sans nous demander si nous avons quelque chose à recevoir. Nous nous croyons les conservateurs de valeurs dont, disons-nous, le monde a besoin, sans même nous interroger sur leur pertinence… Nous voulons transformer le monde, sans penser que c’est nous qui avons besoin d’être transformés… Nous nous asseyons sur les fantasmes de la gloire familiale … nous ne sommes que sur un tas de ruines. »
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« Notre décadence économique n’est qu’une apparence dont notre pudeur, ou notre fierté, habille notre décadence morale. Nous mourons de la très haute idée que nous avons de nous-même…Nous voulons nous répandre comme un principe généreux, sans nous demander si nous avons quelque chose à recevoir. Nous nous croyons les conservateurs de valeurs dont, disons-nous, le monde a besoin, sans même nous interroger sur leur pertinence… Nous voulons transformer le monde, sans penser que c’est nous qui avons besoin d’être transformés… Nous nous asseyons sur les fantasmes de la gloire familiale … nous ne sommes que sur un tas de ruines. »
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La douleur de l'amour n'est rien au regard de celle de la vérité. L'une aliène, l'autre libère.
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très interessant pour connaître ce milieu de la noblesse d'après guerre , style parfois un peu lourd mais on ne peut le quitter avant la toute fin .
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Video de Camille de Villeneuve (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Camille de Villeneuve
Camille de Villeneuve - Ce sera ma vie parfaite .Philippe Rey présente l'ouvrage de Camille de Villeneuve "Ce sera ma vie parfaite". Rentrée littéraire 2013. http://www.mollat.com/livres/villeneuve-camille-sera-vie-parfaite-9782848763392.html Notes de Musique : Arvo Pa?rt - Adam's Lament - 6 L'Abbe? Agathon (2004/2008)
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