Olivier Truc propose sous la forme d'une enquête journalistique de reprendre les éléments de l'attentat de Karachi au Pakistan de 2002 pour tenter de trouver les responsables.
Une affaire irrésolue !
En mai 2002, un bus militaire transportant des techniciens de la Direction des Constructions navales a explosé devant l'hôtel Sheraton dans la capitale du Pakistan. L'attentat a provoqué quatorze morts dont onze employés français, des blessés et des traumatisés à vie. Rapidement, Al-Quaïda l'a revendiqué et l'enquête s'est arrêtée. En 2009, un nouveau juge oriente l'enquête vers des représailles
Mais si l'affaire Karachi est encore dans nos mémoires, c'est par le scandale politique qui découla de la vente de frégates à l'Arabie Saoudite et de trois sous-marins au Pakistan Elles auraient permis le versement de rétrocommissions illicites vers la campagne électorale d'Édouard Balladur.
Le volet financier a été jugé en 2019 avec la relaxe d'Édouard Balladur et François Léautard, condamné avec sursis.
Alors, pourquoi reparler d'une affaire déjà surmédiatisée ?
Olivier Truc choisit l'angle qu'il connaît le mieux, celui d'un journaliste, mais reporter débutant. Jef, 27 ans, pigiste à La Presse de la Manche, a été bercé par les récits sur l'attentat de Karachi par Marc et les silences de son père, Claude, son ex-ami.
Les commémorations des vingt ans se profilent et Jef ne résiste pas au plaisir de reprendre l'enquête. Il convainc son rédacteur en chef qui lui prendra son papier, s'il est intéressant, mais pas ses frais.
N'empêche il s'embarque pour Karachi, avec un nom en tête, Shaleen Ghazali, ami pakistanais de Marc, resté intègre, venu quelques mois à Cherbourg dans l'entreprise de la Direction des constructions navales,où travaillait Marc et Claude.
Le contact de Jef sera la belle Sarah Zafar, officier à la Cité navale de la Marine pakistanaise.
La mission Agostina consistait en la livraison de trois sous-marins au Pakistan, leur permettant de résister à l'Inde d'à côté trop puissante. Marc était venu au Pakistan pour construire le dernier Agosta 90 B réalisé entièrement au Pakistan.
Une rencontre particulière
Le roman, Les sentiers obscurs de,est pour
Olivier Truc, une belle histoire d'amitié : une rencontre entre deux hommes, consciencieux dans leur travail, persuadés du pouvoir de la technique pour le bien-être des hommes, honnêtes et curieux de partager leur savoir qui devait pour le Pakistanais apporter le renouveau de son pays. Cet attentat a bousculé cette rencontre et Jef part à la recherche de leurs souvenirs.
Olivier Truc se place à hauteur de ces hommes, si différents par leur culture mais si semblables par les valeurs auxquels ils croient. Alors, pourquoi, après les attentats, chacun s'est muré dans un silence qui les détruit de l'intérieur. Que cache la même attitude chez deux personnes vivant aux antipodes. Jef réussira-t-il à trouver les mystères que renferment encore cette affaire ?
Cette affaire, les Pakistanais l'appellent " le scandale des sous-marins", pour les pots-de-vin versés sur les malversations, les défauts de matériel, etc. Les services français et pakistanais ont à voir avec cette histoire.
Les sentiers obscurs de Karachi se lisent comme un polar, en suivant Jef qui remonte le fil de l'affaire. Karachi, la capitale ourdou-phone la plus ouverte au monde, est décrite tournoyante de bruits et de secrets. On plonge au coeur de l'urdu bazar, la grande librairie de Karachi, sorte d'havre de paix au coeur d'une ville à la circulation débridée et affolée. La poésie ourdoue vient éclaircir les zones d'ombres. Les oreilles espionnes et conservatrices sont partout, y compris dans les rickshaws. Mais, la poésie ourdoue permet de s'octroyer des espaces de liberté, car l'emprise religieuse est omniprésente, même au coeur de cette armée mixte.
Pour conclure,
On ne présente plus le talent littéraire d'
Olivier Truc.
Les sentiers obscurs de Karachi sont nés au cours d'une résidence d'écriture sur place en 2016 en marge du Festival de littérature de la ville.
Tous les ingrédients du roman noir sont là ! le suspens et la résolution d'une intrigue. Mais en plus, c'est les dessous du journalisme que
Olivier Truc nous décrit aussi. L'écrivain suggère que ce qu'un article de presse ne peut pas dire, la littérature peut s'en emparer. Et,
Les sentiers obscurs de Karachi le réussissent parfaitement !
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