Devenant Nadir au fil des pages, un jeune homme transgenre mal dans sa peau se débat au quotidien dans l'appartement étriqué qu'il partage avec sa grand-mère au sein de la communauté pauvre que recouvre Little Syria, à New York. Décédée quelques années plutôt dans un incendie, sa mère, ornithologue, lui a légué cette curiosité des différentes et milliers d'espèces d'oiseaux existants à travers le monde et, à la nuit tombée, Nadir déambule dans son quartier pour les incarner en fresques sur les murs de bâtiments oubliés. Un soir, alors qu'il pénètre dans un immeuble abandonné, Nadir tombe, en examinant le salon, sur le journal intime d'une certaine Laïla Z., une peintresse elle aussi syro-états-unienne et qui semble – ou a semblé – bénéficier d'une certaine notoriété. Au fil des pages, Nadir découvre que Laïla et sa mère se connaissaient.
Après le très beau La carte du souvenir et du territoire, nous retrouvons dans ce nouveau récit de
Zeyn Joukhadar cet attachement particulier à la culture et à l'histoire syriennes, aux migrations comme à la place des femmes et des personnes queer dans nos sociétés androcentrées. A travers la quête de soi de son personnage principal, l'auteur sait rendre subtilement compte des bouleversements physiques et psychologiques que provoquent le fait de se découvrir une identité de genre non-conforme à celle assignée à la naissance et à l'inscrire, par le biais de la thématique du corps, de manière plus globale parmi les enjeux liés aux groupes opprimés, notamment celui des femmes cisgenres, tout en développant, en parallèle, une intrigue proche de l'enquête policière dans le milieu de l'art, de la zoologie et des secrets de famille.
Un roman original dans ses thématiques, non exempt de délicatesse dans sa narration comme dans la réelle tendresse qui le lie à ses personnages.