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EAN : 9782266296786
752 pages
Pocket (14/08/2019)
3.84/5   478 notes
Résumé :
Camille Pascal nous plonge au cœur d’un été inédit dans l’histoire de France : celui où quatre rois se sont succédé sur le trône.

" Il y avait ce matin-là beaucoup de monde à Saint-Cloud, la Cour bien-sûr, mais aussi les ministres, il jurait même que monsieur de Talleyrand avait fait sonner dès la première heure son pied bot cerclé de fer sur les marbres de l'escalier d'honneur. La galerie d'Apollon n'avait jamais été aussi peuplée, et les jardins s'a... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (110) Voir plus Ajouter une critique
3,84

sur 478 notes
Camille Pascal brosse des « trois glorieuses » une chronique qui associe brillamment histoire, littérature et politique.

L'histoire voit les Bourbons céder la place à leur cousin Orléans, dans une comédie où Talleyrand, en coulisses, tire les ficelles de Lafayette, au balcon, les deux septuagénaires rejouant avec plaisir les rôles qu'ils jouaient quarante ans plus tôt et abandonnent progressivement la scène à la génération suivante incarnée par Thiers, pour le plus grand profit de la bourgeoisie conquérante.

La littérature voit Chateaubriand proclamer sa fidélité à la branche légitime dans un discours plein de panache devant la chambre des pairs puis démissionner, Stendhal spectateur impuissant et velléitaire, Hugo observer le pillage de Notre Dame de Paris, Lamartine louper le coche et Dumas jouer une comédie.

L'auteur laisse Vigny croiser le Capitaine Renaud, l'homme à la canne de jonc, évoque le Chevalier des Touches et se laisse étourdir par la comtesse de Boigne, immortalisée par Proust en Madame de Villeparisis …

La politique, que connait bien celui qui conseille présidents et premiers ministre de notre V république, émaille, avec humour, ce récit qui montre les alliances de circonstances, les trahisons, les lâchetés, les désertions, et place dans la bouche de certains héros des trois glorieuses des propos empruntés à nos contemporains.

Savoureux cocktail écrit d'un plume classique, cultivée et ravissante, ces six-cent-soixante pages sont un chef d'oeuvre fort justement distingué par l'Académie Française.
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« L'insurrection avait chassé Charles X sans espoir de retour, la haute banque et le corps diplomatique ne voulaient pas entendre parler d'une république, tout le monde réclamait la liberté, mais personne ne cherchait l'aventure, et seul le duc d'Orléans pouvait réconcilier tout le monde. »

Charles X tente par un coup de force constitutionnel de freiner les ardeurs des députés libéraux — maintenant majoritaires — par ses ordonnances de Saint-Cloud du 25 juillet 1830, qui prévoient une nouvelle dissolution de la Chambre des députés, la modification de la loi électorale, l'organisation de nouvelles élections, et surtout la suspension de la liberté de la presse. En réponse de quoi les 27, 28 et 29 juillet 1830, dites « Les Trois Glorieuses », les Parisiens se soulèvent. Une émeute qui se transforme en insurrection révolutionnaire contraignant Charles X et la famille royale à fuir Paris, pendant qu'entraînés par Adolphe Thiers, les députés libéraux, majoritairement monarchistes, après beaucoup de tergiversations, optent finalement pour une monarchie constitutionnelle avec un changement de dynastie. La maison d'Orléans, branche cadette de la maison de Bourbon, succède ainsi à la branche aînée ; le duc d'Orléans est proclamé « roi des Français » et non plus « roi de France », sous le nom de Louis-Philippe.

Avec moult détails et beaucoup de bagout, Camille Pascal nous immerge dans les folles journées qui ont sonné le glas de la monarchie absolue — que Charles X tentait de restaurer avec les ordonnances de 1830 — et l'avènement de la Monarchie de juillet. Une révolution où l’on découvre l'engagement de tous ceux qui comptent dans la société française notamment des écrivains tels Chateaubriand, Stendhal, Dumas, Hugo, Benjamin Constant, Alfred de Vigny. Bien que trop longue à mon goût (plus de 600 pages) et un peu partiale, l’historien Camille Pascal signe là, sans conteste, une fresque historique d’ampleur vivante et instructive.
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Camille Pascal nous raconte avec un tel enthousiasme ces journées de juillet 1830 qui resteront dans l'Histoire comme « les trois glorieuses » qu'on se laisse porter par le rythme ! j'ai eu souvent l'impression,non seulement suivre les protagonistes mais de faire partie de l'Histoire, du scénario : on devient acteur, l'auteur ne nous laisse pas lecteur assis confortablement dans son fauteuil !

La description des émeutes est minutieuse, l'auteur nous donne tous les détails,presque minute par minute sans jamais devenir soporifique. On voit monter en puissance la colère du peuple, soulevée par les ordonnances, l'atteinte à la liberté de la presse, la réduction du rôle du Parlement.

Après une période où tout se déroulait bien dans son règne, respectant les libertés,le roi s'est senti menacé dans son pouvoir et sous l'influence des ultras,notamment son premier ministre, le duc de Polignac, veut reprendre les choses en mains et faire taire les journalistes, notamment Thiers qui va publier dans son journal un manifeste où tous les noms des signataires seront imprimés.

La violence augmente de plus en plus, on arrache les pavés, on s'attaque aux Tuileries emblème du régime, on détruit tout, (comportement bien français que l'on retrouve régulièrement aux cours de l'Histoire !) et le roi envoie l'armée pour mater la foule…

Les soldats font de leur mieux mais c'est l'été, et surtout la canicule sévit sur Paris,ils ont faim et soif car on ne pense pas à leur distribuer des vivres. Ils tentent de calmer les émeutes le ventre vide parfois depuis plus d'une journée.

On veut la fin des Bourbons, la république, mais très vite, les espoirs se tournent vers la branche des Orléans, cousins du roi, et Louis-Philippe monte en puissance, on le nomme lieutenant général :

« Si la Chambre ne pouvait pas faire Louis-Philippe roi de France, elle pouvait au regard des circonstances exceptionnelles le faire lieutenant général du royaume. Ce titre était une vieillerie gothique héritée de la guerre de Cent Ans qui avait sauvé plusieurs fois la France du chaos et par laquelle un prince, ou à défaut un grand qui n'était pas le roi, se voyait investi de la réalité du pouvoir royal. »

On entre dans l'intimité de Charles X, roi dévot pour ne pas dire bigot, qui prie très souvent, ne rate pas une messe. Il ne voit rien venir, reste accroché à on pouvoir. Dans ces moments graves, il pense à ce qu'a subi son frère, Louis XVI, son fils le duc de Berry, ce fils préféré sur lequel reposait tous ses espoirs,mort brutalement, alors que son second fils, le duc d'Angoulême ne lui apporte que désillusions : il est plein de tics, incapable de se contenir(était-il épileptique ?)

Charles X ne le supporte guère, et ne se gêne pas pour le lui faire savoir. On est frappé de voir la manière dont il réagit ou plutôt ne réagit pas, ne changeant rien à ses rituels quotidiens, même lors de sa fuite. Durant la première journée, il ne pense qu'à la chasse :

« L'émeute pouvait s'emparer de Paris à tout moment, et le roi de France s'amusait avec ses chiens en forêt de Rambouillet. »

Par contre, il est à l'aise dans son rôle de grand-père et sa relation notamment avec son petit-fils est presque touchante, il reporte sur lui les espoirs qu'il avait mis dans le père de l'enfant et le petit duc de Bordeaux est attachant.

En quelques heures le destin de la France va évoluer à grande vitesse : Charles X consent à abdiquer, au profit de son petit-fils, court-circuitant ainsi le duc d'Angoulême qui ne se rebiffe même pas : Louis XIX est roi pendant une demi-journée et le duc de Bordeaux devient Henri V (il restera le représentant des Légitimistes) sous la protection de Louis-Philippe, régent…

Camille Pascal nous offre aussi des portraits sans concession des autres protagonistes : Thiers, journaliste raillé pour son accent méridional et qui sent qu'il peut jouer un rôle politique, Talleyrand qui tire toujours aussi bien les ficelles, Marmont, duc de Raguse maréchal quia trahi Napoléon en 1814 pour rester fidèle à la monarchie et qui traînera cette trahison toute sa vie :

« Lui, élevé par l'Empereur jusqu'à sa propre gloire et qui s'était ruiné et perdu de réputation pour servir les Bourbons. Lui, Marmont, dont le nom était devenu synonyme de trahison aux yeux des demi-soldes à cause de cette triste affaire,à la suite de laquelle les mauvaises langues avaient forgé le méchant mot de« ragusade » pour l'exprimer »…

Les écrivains n'ont pas la part belle, avec Chateaubriand en ultra, Stendhal qui court les jupons, passant à côté de ce qui se joue, Vigny militaire endurci… les protagonistes sont nombreux, donc il est difficile de parler de tous et certains étaient sortis de ma mémoire depuis longtemps, alors au début, je me suis un peu égarée dans les titres de certains…

Le titre est bien choisi : quatre rois vont se succéder, certains pour quelques heures, au cours de cet été caniculaire : Charles X, Louis XIX, Henri V et Louis-Philippe qui remportera la mise.

J'ai beaucoup aimé ce livre, pavé de 672 pages, que j'ai dévoré ! je connaissais mal l'histoire de Charles X et j'avais oublié beaucoup de choses apprises il y a fort longtemps. Il me restait des souvenirs des trois glorieuses et les dates clés, la succession des différents monarques, mais tout le reste était loin. Évidemment, je me suis retrouvée plongée dans les bouquins, surfant sur internet pour atténuer mes lacunes !

Fan d'Histoire ou pas, foncez ! ce livre se lit comme un polar !
et encore merci à NetGalley et aux éditions Plon qui m'ont permis de lire ce livre
#L’étédesQuatreRois #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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Je ne ferai pas un long commentaire et ne rentrerai pas dans le détail de cette lecture historique, ô combien vivante ,qui prend au fil des pages, une allure de roman tellement l'auteur , historien, écrit le récit passionné des secousses d'un pays basculant dans une autre ére.
Mais qui se souvient donc des « Trois glorieuses » ? Réminiscences lointaines du lycée et/ou de l'université ?


C'est un récit imposant et foisonnant , instructif et haletant , où l'on entre dans l'intimité d'un roi bigot, où l'on côtoie la cour, son étiquette rigide, ses courtisans empressés et paresseux: un été caniculaire et enflammé, celui où quatre rois se sont succédé sur un trône , où la colère du peuple gronde : combats de rue, violence populaire ...foule furieuse criant : Mort aux Bourbons , Vive la Charte .....

Ce Charles X , vieillissant , âgé de 73 ans, marqué et influencé instinctivement par le sort réservé à ses ainés, Louis XVI et Louis-XVIII , lui, seul représentant et dernier de toute une lignée...

Pourtant il désirait redonner de l'allant à la monarchie en validant des ordonnances qui mécontenteront le peuple , il semble dépassé et en 1830 , ce peuple ne supporte plus les Bourbon, symbole de la révolution......

Deux mois uniques dans l'histoire avec la succession sur le trône de Charles X , Louis XIX, Henri V et Louis- Philippe.....

Où l'on voit monter en puissance la colère du peuple.

Maints détails imagés, des descriptions minutieuses nous plongent dans ces « journées » particulières où Paris s'enflamma , reposant sur une documentation solide: le lecteur a l'impression fugace et insolite de « participer »....



L'êcriture est ciselée, vivante, dense et alerte .

Où l'on croise FrancoisRené de Chateaubriand et Stendhal,
Alexandre Dumas et Lafayette, la duchesse de Berry, Madame Royale, Thiers et l'immense Victor Hugo, Alfred de Vigny et Talleyrand ...ce survivant à tous les régimes.


Une très belle fresque romanesque , un travail de fond où l'auteur déroule les faits avec exactitude, sans jamais prendre parti.


Un bel ouvrage instructif sans jamais lasser ! Ce n'est que mon avis bien sûr !

«  Nous y étions, nous l'avons vu, nous tous qui en parlons,
Qui en discutons aujourd'hui,
Mais soyons de bonne foi:
Nous n'y avons rien compris ...

Armand de Carrel, à propos de la révolution de 1830....








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Me voilà plus savante, même si l'Histoire de France m'a toujours passionnée.
Cela commence le 31 juillet 1830, cela se termine le 16 août 1830.

Nous dégringolons, marche après marche, les hauteurs du règne de Charles X pour suivre ensuite, pas à pas, lieue après lieue, son départ pour Cherbourg vers l'Angleterre, terre d'exil.
Nous suivons d'heure en heure (et là, c'est long !) le déclin du règne des Bourbons et la mise au pouvoir du duc d'Orléans, de la branche cadette des Bourbons.
Les tracasseries politiques, les rumeurs, les luttes intestines, les jalousies, les retournements de veste, les confusions, les discutailleries d'amour-propre entre ministres, conseillers, officiers, et journalistes dont Thiers (qui n'apparait plus dans la 2e moitié du livre), tout ceci nous attache à cette période caniculaire à tous points de vue.

« Il suffisait désormais de prendre de vitesse les barbons qui, au palais du Luxembourg, tentaient de sauver la couronne de Charles X et les jeunes fous qui, à l'Hôtel de Ville, rêvaient tout éveillés d'une Seconde République. Les premiers avaient un demi-siècle de retard, les autres peut-être un demi-siècle d'avance » : la première partie du livre conte l'agitation extrême et le fossé entre la vie à Saint-Cloud où trône le roi. D'un côté les chasses, les parties de cartes, les soupers fins, les offices religieux chaque matin à Saint-Cloud, de l'autre le bain de sang à Paris, les barricades, les femmes dépoitraillées, les cadavres.
La seconde partie accompagne la fuite forcée du roi qui n'arrive pas à se rendre compte de la situation, et la mise au pouvoir, forcée elle aussi, du nouveau roi très indécis.

Les multiples points de vue, de Charles X à Louis-Philippe, en passant par Victor Hugo jeune papa, Chateaubriand, Stendhal, la Dauphine rescapée du massacre de sa famille lors de la révolution de 1789, Mme du Berry, la belle-fille guillerette et princesse d'opérette, et de nombreux officiers, maréchaux, ducs, princes et consorts, sans oublier le petit-fils du roi… tout ceci nous est conté de façon imagée, mordante et très souvent ironique.

Du roi de France au roi des Français, il n'y a qu'un pas. Camille Pascal l'a franchi en toute majesté.
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critiques presse (1)
LeFigaro
14 septembre 2018
En juillet-août 1830, Louis-Philippe, Louis XIX et Henri V se disputent la succession de Charles X. L'auteur fait le récit d'un pays basculant dans une autre ère.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (118) Voir plus Ajouter une citation
Le dîner fut servi sur une table soigneusement dressée car les concessions de monsieur de Talleyrand aux désordres de l'émeute s'arrêtaient au bas de son escalier. Chez lui, tout restait princier, et le maître d'hôtel portant la grande livrée aux couleurs de la maison de Talleyrand-Périgord annonça très cérémonieusement l'arrivée de monsieur le duc de Broglie avant de refermer la porte derrière lui dans un grand fracas d'étiquette. Le prince joua longtemps au chat et à la souris avec son hôte, s'interdisant la moindre allusion à une révolution qui faisait pourtant trembler les vitres de sa propre salle à manger, mais la canaille ne lui avait jamais coupé l’appétit, et les plats se succédaient dans les règles du grand service à la française, fixé sous le règne de Louis XV. À chaque nouveau plat, Talleyrand invitait cérémonieusement le duc de Broglie à se servir le premier. Au dessert, le maître d'hôtel annonça la visite de l'ambassadeur de Sa Majeste Ie roi d'Angleterre. Son Excellence lord Stuart de Rothesay salua Broglie avec beaucoup d’amabilité puis, sans s'embarrasser de sa présence et comme reprenant une conversation privée interrompue quelques instants plus tot, s'indigna des risques que les sottises politiques du roi Charles X et de son entourage faisaient courir à l’ordre social et a la quiétude de l’Europe, car les révolutions dérangeaient toujours l’architecture savante patiemment dessinée par les diplomates. Talleyrand, qui considérait la carte de I'Europe et ses équilibres subtils comme une sorte d'oeuvre personnelle, opinait d'un air grave quand, sortant enfin de son silence, il assura à ses invités qu'il venait d’écrire au duc d'Orleans pour l'inviter à ne pas entrer dans Paris où il régnait encore une chaleur accablante, mais tout en lui conseillant de ne pas s'approcher non plus de Saint-Cloud où l’air n’était plus très sain depuis quelques jours. Chacun comprit, personne n'objecta et tout le monde s'en alla. La couronne de France venait de se jouer sur l'échiquier de l'Europe entre la poire et le fromage.
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Thiers n'ajouta rien d’autre qu’un sourire de triomphe et s'exécuta. Si le coup qu'ils préparaient à demi-mot réussissait, demain il serait ambassadeur ou député, en attendant mieux encore.

Epuisé d'avoir été tant poudré, le prince de Talleyrand ne prit pas la peine de raccompagner son hôte et s'avança en dandinant sur ses pieds de palmipède vers le salon d'angle où il avait pris l'habitude de dicter ses mémoires. Il s'assit à son bureau. Demanda au secrétaire d'entrouvrir les volets intérieurs pour garder un œil sur la place Louis-XV où les troupes royales stationnaient, quand soudain il entendit des cris et vit, sortant des jardins en courant en tous sens, des gardes Suisses désarmés et les bras levés vers le ciel. Il se retourna lentement car ce mouvement exigeait chez lui de faire pivoter son corps tout entier et découvrit le dome du pavillon de l'Horloge orné du drapeau de la Révolution et de l'Empire comme en 1815.

Puis il observa la superbe pendule au triomphe d'Apollon posée sur la cheminée qui venait de sonner les douze coups et dit à son secrétaire, dont la plume était restée suspendue :

- Mettez en note que, le 29 juillet 1830, à midi cinq minutes, la branche aînée des Bourbons a cessé de régner sur la France.
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Jeudi 29 juillet 1830 à Saint-Cloud : échanges vifs entre le référendaire Sémonville et Charles X

Sa Majesté devait retirer les ordonnances, rétablir les libertés publiques et appeler un nouveau ministère plus conforme aux volontés de la nation. Un ministère dirigé par le duc de Mortemart et dans lequel entreraient le général Gérard et Monsieur Casimir Périer trouverait le soutien des pairs et des députés encore présents à Paris. A l'évocation de ces deux noms, le visage de Charles X se ferma. Il refusa de céder, assurant qu'il préférait encore aller scier du bois au fond de la forêt que de régner sur la France à la façon du roi d'Angleterre, éternel prisonnier de son Parlement. A quoi il ne craignit pas d'ajouter que l'Hôtel de Ville avait été repris par l'armée, que l'émeute défaite refluait en désordre jusqu'à Vincennes et qu'enfin La Fayette, Odilon Barrot et Casimir Périer, tous fauteurs de troubles, étaient désormais aux arrêts militaires. Le grand référendaire, effaré par cette folle assurance, tenta alors de dessiller le roi en lui peignant avec des mots crus le cœur de Paris aux mains des insurgés, les gardes royaux tombant les uns après les autres sous des coups de feu partis du haut des toits, une émeute triomphante, le Louvre assiégé, Marmont acculé, la monarchie dans le plus grand péril.
Charles X continuait pourtant à opposer une résistance farouche. Tout cela était faux et il le savait mais Sémonville ne lâchait rien et continuait à dépeindre la situation avec de tels accents de vérité que le roi finit par s'emporter :

- Eh bien, dans toutes ces suppositions, que voulez-vous à la fin? Le retrait des ordonnances ?
- Oui Sire !
- Jamais!....

Puis le roi, se tournant vers Polignac et les ministres, ajouta en les désignant d'un geste auguste et théâtral :
- Le renvoi de mes ministres ?

Sémonville que plus aucune considération d'étiquette ni même de bienséance n'arrêtait, loin de se démonter, prit le roi au mot :

- Oui, Sire, et s'il n'eût tenu qu'à moi, je serais seul ici avec Marmont qui les eût mis aux arrêts dans son cabinet pour sauver Votre Majesté et son trône.
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Aussi, tout en descendant le grand escalier, elle ne cessait de répéter à propos de Pozzo :

— Il est parfait, madame de Boigne, il est parfait, c'est tout à fait l'un de nous...

La comtesse fut flattée d'être ainsi associée au parti orléaniste mais le « madame de Boigne » lui laissa un petit goût amer. La princesse se refusait obstinément à valider les titres de courtoisie, même au beau milieu d'une révolution. A tout prendre, la comtesse eût préféré «mon amie», «ma très chère», «ma bonne», plutôt que ce terrible « madame de Boigne » qui sentait la bourgeoise comme la caque le hareng. Adèle d'Osmond était issue d’une excellente famille, mais elle n’avait jamais été comtesse par son mariage, pas plus d'ailleurs que son mari ne s'appelait Boigne. Il était bêtement né Benoît Leborgne, ce qui sonnait assez mal. Elle le savait, en souffrait et dissimulait de son mieux cette vilaine cicatrice matrimoniale parmi d'autres plus secrètes encore. Madame Adélaïde venait de raviver la plaie.
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En cherchant bien, on trouvait aussi une hampe de bois autour de laquelle s'enroulait un grand drapeau ficelé dans sa housse jaunie par des cordelettes de chanvre qui cassaient lorsque l'on cherchait à les défaire. Alors chacun comprenait, et un silence presque religieux se faisait dans la pièce. Ceux qui étaient restés couverts au moment d'entrer dans la maison se mettaient tête nue comme à la messe. Une femme appelée à la rescousse s'occupait de déshabiller complètement ce vestige de gloire, puis on allait à la fenêtre pour le dérouler entièrement, et les trois couleurs, portant parfois en lettres d’or le nom d'un regiment dissous, claquaient au vent comme un premier coup de feu.
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