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EAN : 9782070128877
112 pages
Gallimard (04/03/2010)
3.93/5   95 notes
Résumé :
À Yves Saint Laurent
5 juin 2008
Comme le matin de Paris était jeune et beau la fois où nous nous sommes rencontrés! Tu menais ton premier combat. Ce jour-là, tu as rencontré la gloire et depuis, elle et toi, ne vous êtes plus quittés. Comment aurais-je pu imaginer que cinquante années plus tard nous serions là, face à face, et que je m'adresserais à toi pour un dernier adieu? C'est la dernière fois que je te parle, la dernière fois que je le peux. Bie... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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« J'ai perdu le témoin de ma vie, je crains désormais de vivre plus négligemment ».
C'est par cette phrase en exergue de Pline le Jeune que s'ouvre cette correspondance posthume d'un homme à un autre, dernière manifestation d'amour par delà la mort qu'entreprend celui qui a partagé durant 50 ans, les hauts et les bas, la gloire et les défaites, du grand couturier Yves Saint-Laurent.
Au lendemain de la mort d'YSL, le 1er Juin 2008, son compagnon de toujours, Pierre Bergé, ami et confident, amant et protecteur, figure tutélaire et soutien moral, a le désir de s'adresser une dernière fois à l'homme avec qui il a entretenu une relation intense et exclusive pendant 1/2 siècle. « C'est à toi que je m'adresse, à toi qui ne m'entends pas, qui ne me réponds pas.»
Les lettres de Pierre Bergé à YSL courent du 5 Juin 2008 au 14 Août 2009 et prennent fin sur l'émouvante allocution prononcée lors de la messe commémorative du premier anniversaire de la mort du grand couturier français.
Une façon pour Pierre Bergé de dire adieu à l'amour d'une vie, de revenir sur certains souvenirs, bons ou moins bons, de ressusciter les années fastes comme les années sombres, de parler des joies, des douleurs, des tourments que tous deux ont traversés au fil du temps.

Comme une étoffe de soie ondoyant dans le vent, la mémoire, fugitive, mouvante, sinueuse, ondule et s'anime au gré des anecdotes et des souvenirs : la première rencontre à Paris, en 1958 ; les honneurs et les combats du créateur, les lieux, de Paris à Marrakech et de la rue Babylone au jardin de Majorelle, les musiques aimées, l'opéra adoré, la maison de couture, l'homosexualité…
Et puis les amis, intimes, proches ou connaissances, et cette tristesse qui étreint le coeur de constater que beaucoup, à l'aube de la vieillesse, s'en sont déjà allés, morts de maladies, de cancers, d'accidents…
Puis encore la passion des oeuvres d'art et la vaste collection entretenue par les deux hommes durant 50 ans et dont Pierre Bergé a décidé de se séparer comme on abandonne les objets qui vous font trop souffrir lorsqu'ils vous rappellent avec trop d'insistance l'être aimé : des tableaux, des meubles, des bibelots, de Brancusi, de Picasso, de Matisse…plus de 700 pièces exposées pour une vente aux enchères au Grand Palais en Février 2008.

Au détour de cette correspondance, Pierre Bergé s'adresse aussi bien à Yves Saint-Laurent qu'à lui-même.
Ecrire, c'est aussi une façon de se trouver soi-même, de faire le bilan d'une vie entre joies et douleurs, entre éclats de rire et éclats de colère, une vie faite de nuances et de contrastes.
L'épistolier ne fait pas l'impasse sur les aspects négatifs de la personnalité d'YSL. On reproche souvent certaines choses à l'être aimé, ne pas être suffisamment présent, d'être trop égoïste, ne pas nous comprendre…
Comme beaucoup d'artistes, Yves Saint-Laurent était difficile à vivre. Un créateur talentueux à l'âme torturée. Grand nerveux, solitaire, caractériel, la drogue et l'alcool avaient longtemps alimenté son esprit créatif mais considérablement dégradé son rapport aux autres.
Une autre image d'Yves Saint-Laurent se dessine alors, loin des flashs et des podiums, celle d'un homme déprimé, tourmenté, se drapant dans le malheur avec autant d'obstination qu'il en mettait à parer les femmes des plus belles étoffes.
S'il lui réitère son amour, Pierre Bergé confesse aussi avec franchise de la difficulté de vivre au quotidien avec un génie créatif tel que lui.
Parler de ce qu'était Yves c'est aussi bien sûr parler de tout ce que le grand couturier a apporté au monde de la mode et aux femmes, qu'il adorait. "Si Chanel a donné la liberté aux femmes, tu leur as donné le pouvoir."
L'intransigeance, la recherche de l'excellence, la quête perpétuelle du Beau qui caractérisaient l'artiste dont Chanel avait fait son successeur, lui ont permis de remporter d'éclatantes victoires, de fonder avec son compagnon une maison de couture devenue célèbre et d'accéder aux plus hautes distinctions dans le domaine de la mode.

Comme un coffret caché au fond d'une armoire familiale et qui, dans l'odeur des vieux papiers et des photos jaunies, recèle les souvenirs de toute une vie, les « Lettres à Yves » offrent au lecteur ce moment mélancolique et doux des choses révolues.
Un sentiment de pénétration et de partage que la construction épistolière restitue d'autant plus en nous plongeant dans l'intimité de deux hommes épris d'Art et de Beauté et que le temps n'a pas réussi à désunir malgré les heurts, les coups durs, les désillusions et les tentations.
Grand amateur de littérature, écrivain, ami de Giono et de Cocteau, l'ancien président de l'Opéra de Paris Pierre Bergé sait manier la plume et parer ses lignes de sensibilité, d'émotion et de délicatesse.
Amour, mort, création, homosexualité, bonheurs et douleurs…au gré de sujets variés, d'anecdotes et de sentiments, l'auteur tisse les fils du temps pour réaliser une délicate broderie de ce que fut cette vie partagée avec le couturier.
Il y exprime avec sincérité et franchise, ce qu'il n'a pas toujours su ou pas voulu dire.
« Aujourd'hui, le spectacle est fini, les lumières se sont éteintes, la tente du cirque est démontée et je reste seul, avec mes souvenirs pour tout bagage. La nuit est tombée, au loin on entend de la musique, je n'ai pas la force d'y aller. »
Un ultime hommage et un bel adieu à celui que, tendrement, il surnommait Kikou…
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95 pages, 56 lettres, certaines très courtes, écrites entre le 5 juin 2008 et le 14 août 2009 – au lendemain du décès de son compagnon et pour la dernière, quelque temps après la messe célébrée commémorant le premier anniversaire de sa mort.

Pierre Bergé dévoile ici ses 50 ans d'amour pour Yves. Il raconte sans fioriture ce que fut sa vie avec cet être génial, tourmenté, malade, accro aux drogues. Un demi-siècle à veiller sur lui, à aimer « Kikou », malgré la douleur engendrée par les infidélités, sa maladie.
Un récit sans compromission, écrit avec générosité.
Une écriture intelligente, (nombreuses références littéraires, musicales, picturales qui témoignent de sa grande culture éclectique) des descriptions généreuses, somptueuses telles les couleurs flamboyantes du Maroc qui ont inspiré avec tant de force, de volupté, de générosité, les collections du grand couturier :

« A Marrakech comment ne pas penser à toi ? Ton souvenir s'accroche partout, ne veut pas quitter la ville qui eut tant d'importance sur ta vie et sur ton métier. C'est là, disais-tu, que tu as découvert la couleur, ton chromatisme. Tu étais ébloui par la tenue des femmes dans la rue, par les caftans verts qui laissaient apparaître des doublures safran, par les foulards bordés de franges de jais mais aussi par les jacarandas (Le Jacaranda est un genre d'arbres, les jacarandas, de la famille des Bignoniaceae, originaire du Paraguay, Uruguay, sud du Brésil et de l'Argentine. L'espèce la plus commune est le flamboyant bleu (Jacaranda mimosifolia). Il fleurit en début d'été puis en début d'automne en formant des fleurs bleues violacé. Sa taille peut atteindre 15 mètres). et les mélias (Melia est un genre d'arbres de la famille des Meliaceae.

« Tes idiosyncrasies t'ont empêché d'être heureux. (…) Tu avais construit un système où chacun exerçait un rôle, tu tenais celui du martyr (…) Pourtant derrière ce personnage que tu jouais, il y en avait un autre que j'ai connu et qui en aurait surpris plus d'un. Les proches des dernières années qui ont de toi l'image d'un râleur, d'un bougon qui se plaignait de tout, ceux-là, je veux qu'ils sachent que tu n'as pas été toujours ainsi. Tu l'es devenu après que l'alcool et la drogue t'ont terrassé, après les cures de désintoxication d'où tu n'es jamais revenu. (…)
Au fond, ces lettres n'avaient qu'un but : faire un bilan, celui de notre vie. Dire à ceux qui les liront qui tu étais, qui nous étions. Mettre à jour mes souvenirs, te dire combien, au bout du compte, j'ai été heureux avec toi, grâce à toi, montrer, et j'espère l'avoir fait, ton talent, ton goût, ton intelligence, ta gentillesse, ta tendresse, ta force, ton courage, ta naïveté, ta beauté, ton regard, ton intégrité, ton honnêteté, ton intransigeance, ton exigence. Ces « ailes de géant » qui t'ont empêché de marcher. »
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Après avoir vu le film sur Yves Saint Laurent, il m'apparaissait juste de m'attaquer à la lecture de ces lettres qui est venue compléter fort agréablement le film que j'avais fortement apprécié. C'est comme si l'histoire d'amour se prolongeait, encore, lorsque la mort sépare ceux dont l'attachement a embrassé des décennies. Avec le recul et les années, les souvenirs des premiers mois de passion reprennent toutes leurs couleurs .Chacun peut y retrouver les élans amoureux et la beauté de sa jeunesse.Très agréable à lire, car on y présente l'amour, sur fond de culture et de délicatesse.
Belle écriture pour un livre émouvant qui donne une vision parfois inconnue de ce que fut vraiment ce génie de la mode, Pierre Bergé y tient le beau rôle bien sûr ...
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Je viens de lire ce petit livre, ces lettres écrites par Pierre Bergé à Yves saint Laurent après le décès de ce dernier.Je le conseille a tous. C'est un très beau livre d'amour et, au moment où tout et n'importe quoi s'écrit a propos du mariage homosexuel, ce livre permet de s'élever au dessus des basses polémiques.
Pierre Berger et Yves saint Laurent ont vécu cinquante ans ensemble jusqu'à la mort du couturier, une vie extraordinaire entre un artiste et un homme d'affaires qui est, lui aussi ,un artiste à sa manière: une vie à créer et a collectionner les oeuvres d'art les plus belles, à vivre entre Paris Marrakech et Tanger, une vie quelques fois difficile avec Yves Saint Laurent , fragile, abîmé dans l'alcool , la drogue puis la maladie .
Dans ces lettres Pierre Bergé se souvient et essaye de laisser la trace de son compagnon qui a connu la gloire ce "deuil éclatant du bonheur" comme le dit Madame de Staël et comme le rappelle ici Pierre Bergé dans une phrase qui, pour moi, fait écho a André Labarrére qui la citait souvent.
Dans une cérémonie ,un an , après sa mort fut lu ce poème du grand poète Walt Whitman:

"Si tu ne me trouves pas du premier coup,
Garde courage,
Si je t'échappe à un endroit
Cherche ailleurs.
Je suis arrêté quelque part
Et n'attends que toi."
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Ces lettres à Yves débutent du 5 juin 2008 à la mi-août 2009 et finissent sur l'allocution prononcée à la messe commémorative du premier anniversaire de la mort du grand couturier parisien. Que mon père a bien connu, car il venait souvent prendre des livres chez nous dans les années 70.
Ce livre est assez émouvant, parce que Pierre Bergé dit adieu à son compagnon de vie. Et sa façon de revivre certains souvenirs, sont très réussis. On revit avec lui les années fastes comme les années de déclin. Il parle sans fard de ses joies, de ses douleurs. Puis de la turpitude du temps qui passe. Sans laisser indemne les personnes.
Il aborde aussi leur première rencontre dans la capitale, en 1958. le parcours du combattant d'Yves St-Laurent. Puis, ses lieux d'inspirations : de Paris à Marrakech, ou verra le jour sa fameuse collection "Safari". On se balade de la rue Babylone au jardin de Marjorelle. Pierre nous livre aussi leurs musiques aimées. Et qu'il adorait l'opéra. Son rapport quasi charnel avec sa maison de couture. Son errement dans l'univers gay.
Puis, le temps qui file, les amis, intimes, et connaissances, en outre la perte d'un entourage à l'aube de la vieillesse, morts de maladies, de cancers, d'accidents. Un bel hommage, hélas un peu triste. Mais très bien écrit.
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critiques presse (1)
LeFigaro
09 novembre 2011
Ce sont des lettres écrites par-delà la mort, celles qui sont sans doute les plus fortes et les plus émouvantes. Celles qui établissent une sorte de bilan, l'inventaire d'une existence, où les objets, même si ce sont des œuvres d'art, occupent moins l'esprit que les sentiments. Entre les lignes, le destinataire semble toujours vivant, n'est-ce pas le plus bel hommage ?
Lire la critique sur le site : LeFigaro
Citations et extraits (18) Voir plus Ajouter une citation
Chaque fois je suis heureux, même, tu le sais, si je suis opposé à tout communautarisme, à tous ces ghettos comme le quartier du Marais où tout le monde est pédé, le boucher, le teinturier, le boulanger. Je regarde avec stupeur ces rues sans femmes. C'est pour moi aussi étrange que les Juifs qui ne veulent vivre qu'avec les Juifs et les Arabes qu'avec les Arabes. Ce n'est sûrement pas cela que ceux qui ont lutté contre le racisme, l'homophobie, l'antisémitisme ont voulu. En tout cas pas moi. Notre sexualité, nous ne l'avons jamais cachée ni exhibée. Il n'y a pas de honte à avoir, ni de fierté à en tirer même s'il existe la Marche des fiertés. Cela dit, je comprends de quoi il s'agit : la fierté d'avoir gagné le droit d'être homosexuel. Mais n'en faisons pas tout un plat.
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Chaque fois je suis heureux, même, tu le sais, si je suis opposé à tout communautarisme, à tous ces ghettos comme le quartier du Marais où tout le monde est pédé, le boucher, le teinturier, le boulanger. Je regarde avec stupeur ces rues sans femmes. C'est pour moi aussi étrange que les Juifs qui ne veulent vivre qu'avec les Juifs et les Arabes qu'avec les Arabes. Ce n'est sûrement pas cela que ceux qui ont lutté contre le racisme, l'homophobie, l'antisémitisme ont voulu. En tout cas pas moi. Notre sexualité, nous ne l'avons jamais cachée ni exhibée. Il n'y a pas de honte à avoir, ni de fierté à en tirer même s'il existe la Marche des fiertés. Cela dit, je comprends de quoi il s'agit : la fierté d'avoir gagné le droit d'être homosexuel. Mais n'en faisons pas tout un plat.
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Celui à qui je disais que rien n'était impossible, qu'il fallait croire aux miracles et ne pas écouter ceux qui voyaient d'abord les écueils. C'est parce que nous avons ignoré les écueils que nous avons pu les réaliser, ces rêves les plus fous.
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Cette idée de séparer le corps de l'éros me plaît, comme me plaît cette phrase de Deleuze citée dans ce livre : "Quelle triste idée de l'amour, qu'en faire un rapport entre deux personnes." Si je te raconte cela c'est parce que je crois que parfois nous avons atteint, toi et moi, ce moment qui nous a conduits à la délivrance. C'est pour cela, et pour rien d'autre, que j'aime l'homosexualité et pourtant, tu le sais, j'ai le prosélytisme en horreur. Je l'aime parce qu'à mes yeux l'homosexuel se cherche dans l'autre, s'affronte lui-même, et parfois se trouve.
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La vérité n'appartient qu'à ceux qui la savent, les autres ont le droit d'avoir celle qu'ils se sont inventée.
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