L'Éveil (2012)
Camille-Laure MARI
Martin, médecin et chercheur en psychologie, se réveille d'un coma. de deux semaines, lui a-t-on dit. Alors qu'il émerge, non seulement sa mémoire est sous le coup d'un réveil difficile et donc très brumeux, mais aussi son environnement s'est modifié. Il est bousculé, perdu, à côté de ses pompes. Plus des détails lui reviennent, plus ses habitudes l'intriguent et plus son inquiétude augmente. Beaucoup trop de faits semblent irréels. Il en va de même pour ses amis proches. Martin angoisse de manière exponentielle. Au fur et à mesure que les explications tombent, il improvise dans une atmosphère de chaos qui le dépasse. Ses sensations, ses sentiments se bousculent au fil de son réveil jusqu'à une apocalypse complète des sens. Un changement nouveau s'opère, il en devient un acteur incontournable.
Le monde dans lequel il ouvre les yeux subit des changements climatiques démesurés. Quelle en est l'origine ? L'homme a-t-il un rôle à jouer dans ce bouleversement ? L'être humain a subi une altération, peut-elle servir à quelque chose ?
Une dystopie qui penche vers l'utopie ou l'inverse. le lecteur rencontre le début de la fin. le début d'un Nouveau Monde qu'il aura le loisir d'imaginer. Une fin préférable, loin du mythique cataclysme tant éructé et promis au jour du 21/12/2012. C'est l'histoire d'un rappel de la notion d'apocalypse. Ce n'est pas la fin du monde, mais celle d'un monde, d'une ère, l'aube d'un nouveau commencement.
Dans ce texte-ci, une approche parapsychologique légère et astucieuse permet de rentrer dans une ambiance partagée ou la frontière entre une démocratie et une dictature est très fine (il y a peu de différence avec notre époque, notre société bien réelle et actuelle où, j'assume mon propos, elle est proche de la dictature autorisée). Une anticipation, une histoire brève qui propose un point de vue simple, sans grande extrapolation, l'insistance sur un changement presque plausible. Il y a un petit ton, une cuillérée du roman « 1985 » de
G Orwell (pour le côté dictatorial). Et aussi en plus imagé, il y transpire une atmosphère du peintre Magritte avec son tableau « Golconde » (une pluie d'hommes vêtus de la même manière). En somme, tout le monde se ressemble ou devrait se ressembler. Les éveillés, les « Anonymes » passent pour les férus de théorie du complot, les révolutionnaires. Je n'oublie pas qu'il existe bien des groupements trop éveillés, voire illuminés, et d'autres, peut-être pas assez éclairés, de vrais moutons…
Au départ, je trouvais le style trop haché sur tout. Des phrases très courtes pour tout. Cela rendait l'ambiance, le décor, les émotions du personnage vide, plat. Puis le dessin, le destin, les couleurs grises et sombres se formèrent, apparurent. L'histoire est le point de vue du personnage et de ce qu'il ressent pendant 21 jours après son coma. Les mots naissent en même temps que son désarroi et sa compréhension des choses. le tout proportionnel à l'éveil progressif de ses sens et de l'évolution active de la situation dans laquelle il se trouve. C'est progressif tel un bébé qui commence à parler, du balbutiement au discours qui ne s'arrête plus, mais qui reste agréable à entendre. Un écrit intelligent et qui se lit très rapidement.