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Marcelle Sibon (Traducteur)Monique Nathan (Préfacier, etc.)
EAN : 9782020321273
220 pages
Seuil (17/04/1998)
3.23/5   33 notes
Résumé :
Tod est scénariste, peintre, et très oisif. Dans le Los Angeles des années 30, il vivote, traîne beaucoup, rêve un peu. En particulier de Faye, une jeune femme superficielle qui comme beaucoup veut devenir actrice, mais qui n’a que son corps en argument. Celle-ci repousse toujours gentiment ses avances. Sans justification. La frustration gagne Tod, et progresse encore quand à la mort du père de Faye - un comédien VRP, celle-ci s’installe avec Homer, un balourd timid... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
The Day of the Locust
Traduction : Marcelle Sibon

Ce court roman, qui fut pratiquement le dernier de son auteur, doit son titre français à la grande toile que peint son personnage principal. En revanche, la traduction française a respecté le titre du film qu'en tira John Schlesinger en 1975 : "Le Jour du Fléau", avec Donald Sutherland et Burgess Meredith, sur un scénario - étroitement taillé sur le roman, ce qui est assez rare, plus encore dans une production hollywoodienne - de Waldo Salt, scénariste de "Indiscrétion" et de "Macadam Cowboy."

J'ai écrit "son personnage principal" mais est-on en droit d'utiliser cet adjectif pour un personnage qui tient plus du fil rouge que du héros ? La tragédie des personnages de "L'Incendie ...", c'est que, justement, aucun d'eux ne sera jamais le personnage principal de la vie qu'il espère.

Symbole de cet échec, qu'elle pressent sans vouloir l'admettre, Faye Greener, fille d'un artiste de music-hall déchu et d'une chorus-girl disparue dans la nuit peu après sa naissance. Faye est jolie et porte la toilette avec beaucoup d'élégance mais, à Hollywood, toutes les jolies filles en font autant comme toutes rêvent de devenir une star, voire "LA" Star.

Si Faye s'absorbe dans son rêve en parasitant tous les hommes qui le veulent bien - surtout le pauvre Homer Simpson (oui, c'est bien son nom ! Wink), ceux qui l'entourent ne sont guère plus lucides. Et, quand ils le sont, ils se révèlent d'un cynisme et d'une indifférence qui ne sont, en sorte, que les reflets ténébreux de Hollywood lui-même.

Par phrases froides, d'une sobriété calculée, Nathanael West peint par petites touches le tableau d'un monde qui n'est pas seulement en décomposition mais qui est la décomposition incarnée. Si d'aventure un sentiment d'amour ou de simple sympathie tente - bien timidement - de montrer le bout de l'oreille, il est immédiatement pris en chasse, traqué, acculé et mis à mort : les personnages principaux ne peuvent s'autoriser des sentiments nobles que s'ils vivent sur grand écran.

Pour certains lecteurs, "L'Incendie de Los-Angeles" méritera peut-être une seconde lecture. L'ensemble, par sa retenue et son côté glacial - à l'image des personnages représentés - a beaucoup d'une épure et est susceptible de ne pas plaire au premier coup d'oeil - surtout si l'on ignore tout du film. ;o)
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Nous suivons une galerie de personnages venus à Los Angeles, ou plutôt à Hollywood, mais un Hollywood qui se dérobe, même si certains y travaillent de façon ponctuelle (Faye) ou régulière mais dans un emploi subalterne (Tod). Mais c'est le rêve généré par Hollywood qui d'une façon ou une autre les a amenés où ils sont. Personnages hétéroclites, paumés de tout genre, ils se retrouvent agrégés ensemble par l'attirance qu'exerce Faye, une aspirante star, mais dont le seul talent semble être un physique qui magnétise et happe les hommes, qui les attire de manière quasi chimique. Et donc tous ces personnages improbables (peintre, nain, cow-boy…..) font connaissance et passent quelques moments ensemble avant que tout n'explose, comme la ville peut exploser à n'importe quel moment ; la scène de folie collective de la fin du roman est vraiment hallucinante.

Un livre vraiment fort et original, qui fait regretter vraiment la mort si précoce de son auteur.
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Dès 1939, le roman décapant du creux du mythe hollywoodien-américain.

Désormais sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/06/04/note-de-lecture-lincendie-de-los-angeles-nathanael-west/
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mouai... des passages tout en longueur et tout aussi éreintant comme son déambulage dans les décors hollywoodiens ne m'ont pas très séduite. C'est indéniablement bien écrit mais l'histoire ne m'a pas convaincue
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Tod quitta la route et grimpa jusqu’à la crête de la colline pour regarder en bas de l’autre côté. De là, il put voir un champ de quatre à cinq hectares couvert d’une brousse épineuse parsemée de touffes de tournesol et d’eucalyptus sauvage. Au centre du champ s’élevait un amoncellement gigantesque de décors, de panneaux anti-son et d’accessoires. Pendant que Tod regardait, un camion de dix tonnes y ajouta une nouvelle charge. C’était le dépotoir final. Il pensa à la "Mer des Sargasses" de Janvier. De même que cette masse d’eau imaginaire est une histoire de la civilisation sous forme de dépotoir marin, la décharge du studio en est une sous l’aspect d’un dépôt de balayures de rêves. Les Sargasses de l’imagination ! Et ce dépôt s’emplit tous les jours davantage, car il n’existe nulle part de rêve en suspension qui ne finisse tôt ou tard par y échouer, après avoir été rendu photogénique à l’aide de plâtre, de toile, de lattes et de peinture. Bien des navires sombrent et n’atteignent jamais la mer des Sargasses, mais nul rêve ne s’efface entièrement. Il trouble, en quelque endroit, une personne infortunée et quand cette personne a été suffisamment troublée, le rêve est reproduit au studio.
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Il descendit du tram à Vine Street. Tout en marchant, il observait la foule vespérale. Beaucoup de gens portaient des vêtements de sport qui n’étaient pas vraiment des vêtements de sport. Leurs chandails, leurs culottes, leurs slacks, leurs vestes de flanelle bleue à boutons dorés faisaient partie d’un déguisement. La grosse dame coiffée d’une casquette de yachtman partait pour le marché, pas pour une croisière ; l’homme en veston de tweed et chapeau tyrolien ne venait pas de quitter la montagne mais une compagnie d’assurances ; et la jeune fille qui portait un pantalon flottant, des espadrilles et un foulard à pois autour de la tête sortait d’un standard téléphonique, non d’un court de tennis.
Disséminés parmi ces travestis, il voyait des gens d’un type différent. Leurs vêtements sombres et mal coupés avaient été achetés sur catalogue. Tandis que les autres se déplaçaient rapidement, entrant en flèche dans des magasins ou des bars, eux flânaient au coin des rues ou restaient adossés aux vitrines pour dévisager tous les passants. Quand un regard répondait au leur, leurs yeux s’emplissaient de haine. A cette époque, Tod savait peu de chose à leur sujet, sauf qu’ils étaient venus en Californie pour y mourir.
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Ils partirent dans plusieurs voitures. Tod était à côté de Claude qui en conduisait une et qui lui décrivit Mrs. Jenning pendant qu’ils descendaient Sunset Boulevard. Elle avait été une actrice assez célèbre à l’époque du film muet, mais la sonorisation l’avait privée de tout engagement. Au lieu de devenir figurante ou d’accepter des bouts de rôle, à l’instar de tant d’autres anciennes vedettes, elle avait fait preuve d’un excellent sens du commerce et avait ouvert une maison de rendez-vous. Elle n’était pas dépravée. Loin de là. Elle dirigeait son affaire exactement comme d’autres femmes tiennent des bibliothèques de prêt, avec astuce et bon goût.
Aucune des femmes ne résidait chez elle. On téléphonait et elle en envoyait une. Pour une seule nuit de plaisir le tarif était trente dollars et Mrs. Jenning en gardait quinze. Certaines gens penseront peut-être que cinquante pour cent est un courtage très élevé pour un intermédiaire, mais elle le gagnait jusqu’au dernier cent. Sa mise de fonds était considérable. Elle entretenait, en plus d’une ravissante maison où les filles attendaient, une voiture et un chauffeur pour les livrer aux clients.
Au surplus, elle était forcée de fréquenter le genre de milieu où elle rencontrait les gens qui lui étaient utiles. Après tout, les hommes qui peuvent se permettre de payer trente dollars ne courent pas les rues. Elle interdisait à ses filles d’accorder leurs faveurs à des hommes qui n’étaient pas riches et haut placés, pour ne rien dire de leur goût et de leur délicatesse. Elle était si difficile dans son choix qu’elle exigeait de faire la connaissance du client éventuel avant de le servir. Elle disait souvent, et sincèrement, qu’elle ne laisserait jamais une de ses filles travailler pour un homme avec qui elle ne serait pas elle-même disposée à coucher.
Et elle était vraiment cultivée. Tous les visiteurs de marque cherchaient à la voir, histoire de rigoler. Ils étaient toutefois bien déçus quand ils découvraient à quel point elle était raffinée. Ils auraient voulu parler de certaines choses croustillantes, d’un intérêt universel, mais elle s’obstinait à discuter Gertrude Stein et Juan Gris. Malgré tous leurs efforts, et l’on savait que certains étaient allés vraiment très loin, les visiteurs de marque n’avaient jamais pu trouver de faille dans son raffinement ou battre en brèche sa culture.
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Aucun de ses compagnons ne l'entendait vraiment. Ils étaient tous trop occupés à la regarder sourire, rire, frissonner, chuchoter, s'indigner, croiser et décroiser ses jambes, tirer la langue, écarquiller ou rétrécir les yeux, secouer la tête pour que ses cheveux platinés éclaboussent la peluche rouge du dossier du fauteuil. La chose étrange dans ses gestes et ses expressions, c'est qu'ils n'illustraient pas réellement ce qu'elle disait. Ils étaient presque purs. On eût dit que son corps, sensible à la stupidité de ses paroles, excitait ses auditeurs afin de détruire leur esprit critique. Cela agissait ce soir-là : il ne venait à la pensée de personne de se moquer d'elle. Ils ne bougeaient que pour resserrer leur cercle autour d'elle.
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Il s'assit et tenta de dégager le sens de ce que lui avait dit Homer. C'était du charabia pour une bonne portion. Mais parfois ce n'en était pas. Il tint le mot de l'énigme lorsqu'il arrive à la conclusion que la majeure partie de son discours était moins pêle-mêle que mal ordonnée dans le temps. Au lieu de venir les uns après les autres, les mots venaient l'un derrière l'autre. Ce qu'il avait pris pour une vraie tirade était en réalité un seul mot épais et non une phrase. De la même manière, plusieurs phrases étaient simultanées au lieu de former un paragraphe. En se servant de cette clef, il parvient à ordonner une partie de ce qu'il avait entendu, de façon à ce que cela rimât à quelque chose.
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