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EAN : 9782290387597
384 pages
J'ai lu (08/03/2023)
4.5/5   14 notes
Résumé :
En août 1940, un jeune journaliste américain, Varian Fry, est envoyé à Marseille. Sa mission : faire évader les artistes, les intellectuels et militants politiques de gauche, souvent juifs, menacés par la Gestapo.

La modeste organisation qu’il met sur pied s’oppose à l’article 19 de la convention d’armistice entre la France et l’Allemagne : « Le gouvernement français est tenu de livrer sur demande tous les ressortissants désignés par le gouvernement ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
À ma connaissance, personne n'a fait plus pour la conservation de la culture européenne - amère ironie - qu'un jeune américain ! Et comment s'y est-il pris ce Varian Fry ? En sauvant, lors de la dernière guerre mondiale, la vie à un nombre invraisemblable d'artistes, dont la lecture des noms ferait tinter les oreilles du plus sceptique. La liste est autant impressionnante qu'elle est longue. Wikipedia énumère 69 noms et cette liste est loin d'être complète. À part la quantité, il y a, bien entendu, la qualité. Je serais même plus modeste que l'encyclopédie de l'internet, en ne citant que quelques célébrités, d'ailleurs dans le desordre : Heinrich Mann, Arthur Koestler, Lion Feuchtwanger, Hannah Arendt, Franz Werfel et Alma Mahler, Max Ernst, Anna Seghers, Victor Serge, André Breton...comme écrivains. le peintre Marc Chagall, le réalisateur Max Ophüls, l'anthropologue Claude Lévi-Strauss etc.... Avouez, un palmarès époustouflant.

Je signale au passage que sur Babelio, le premier qui a pris l'initiative d'introduire une critique est steka, déjà en octobre 2015, critique que je vous recommande vivement de lire.

Vous pensez sûrement que Varian Fry a été couvert de reconnaissances et d'honneurs ? Détrompez-vous ! de son vivant, car il est décédé relativement jeune à l'âge de 60 ans, en 1967, seulement la France lui fit - l'année de sa mort - chevalier de Légion d'honneur. Les autres pays ont été plutôt lents à officiellement honorer ses efforts : les États-Unis lui ont décerné la médaille Eisenhower, à titre posthume, en 1991, et les Israéliens ont même attendu 1995 pour lui attribuer le statut de 'Juste parmi les nations'. Il est vrai qu'il a été le premier américain ainsi reconnu par le Mémorial de la Shoah à Jérusalem, le Yad Vashem. Détail remarquable à ce propos : le consulat général des États-Unis à Marseille, ville à partir de laquelle Fry a lancé ses opérations, se trouve au 12, Place Varian- Fry, ainsi rebaptisé en 2000. Et il n'existe toujours pas un seul timbre postal portant son effigie. Mon petit tuyau à l'Union Postale Universelle (UPU), institution spécialisée de L'ONU : remédier à cela au plus vite.

Ceux qui ont l'impression que je me laisse emporter par mon enthousiasme pour cet héros et que ma critique des réactions officielles est peut être exagérée, j'invite à faire un petit tour sur le site varianfry.org.

Je ne vais pas résumer les exploits de ce personnage hors du commun. Babelio vous offre le choix entre 10 livres en rapport avec ses exploits et je ne tiens pas à nuire le plaisir de votre découverte et lecture.

Je veux ici juste faire deux observations.

Primo, Fry n'a bien sûr pas travaillé tout seul. Il convient de commémorer aussi sa collaboratrice fidèle, Miriam Davenport, artiste-peintre et sculptrice (1915-1999) et le rôle déterminant pour l'obtention difficile de visas, du vice-consul américain de l'époque, Hiram Bingham IV (1903-1988), le diplomate qui a risqué la colère de son ministère des affaires étrangères ('state department') , dont la politique consistait justement à éviter l'immigration des victimes du nazisme. Son humanisme a été puni par un brusque transfert d'abord au Portugal et ensuite en Argentine. Sa carrière mise sur une voie de garage, les filatélistes entre nous peuvent, en revanche, se réjouir de son portrait sur un timbre-poste US de 2006. Bingham est même allé jusqu'à sortir le grand Lion Feuchtwanger d'un camp d'internement et de le loger chez lui. Une troisième personne à ne pas oublier est Marguerite 'Peggy' Guggenheim (1898-1979). Mécène appartenant à l'illustre famille Guggenheim et amie de Jean Cocteau, qui a financé certaines activités de notre ami Varian.

Et là, j'arrive à un deuxième point. La position peu enviable de Fry entre deux feux : d'une part sa dépendance du bien vouloir de ses donateurs, qui, à un certain moment, ont estimé qu'il faisait preuve d'un peu trop d'excès de zèle et d'autre part les autorités collaborationistes en France et en Allemagne, qui voyaient les activités de cet énergumène d'un mauvais oeil. Ces facteurs combinés ont eu comme résultat que Varian Fry n'a pu agir que pendant une période, somme toute, courte : même pas 13 mois, d'août 1940 à septembre 1941. Extrêmement courte, eu égard aux résultats.

Quels livres recommander ? Je suggérerais tout d'abord la dernière version de son propre ouvrage 'Liste noire' et le livre de Bertrand Solet 'Varian Fry : Sauver la culture', ainsi que la biographie de Jacques Grandjonc 'Varian Fry ' et l'ouvrage d'une autre collaboratrice à lui, Mary Jane Gold 'Marseille, années 40'. Sans oublier le livre de Marcel Duchamp 'Varian Fry à Marseille 1940-1941, les Artistes et l'Exil'.

En repassant en revue la liste incomplète d'artistes sauvés par Varian Fry de Wikipedia, j'essaie de m'imaginer une autre liste : celle de toutes les oeuvres d'art produites, après la guerre, par celles et ceux qui ont eu leur vie sauve, et donc la possibilité de créer, justement grâce à Varian Fry.
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Il est fort compliqué de se faire une idée quelque peu conséquente de la nature du héros ; sans doute du fait de la pléthore d'images qui nous en sont offertes. Face à cette confusion entretenue, le plus simple serait de conclure que le héros n'est que pure fiction et que le réalisme exige de nous une aimable médiocrité qu'il est toujours possible d'agrémenter de quelques «Retenez-moi ou je fais un malheur».
Toutefois, à la lecture du présent ouvrage, nous avons la surprise de découvrir au fil des pages ce qui ressemble bien à un héros tout à fait authentique, bien que peu conforme à l'image que l'on nous en donne habituellement. Aux vues des photos de l'époque qui nous en sont présentées, Fry ressemble à un jeune homme ayant atteint une certaine maturité de bon aloi (il a alors 33 ans) mais sans aucun signe laissant présager l'exceptionnel.
Qu'est-ce à dire ? L'héroïsme serait donc à la portée du plus grand nombre qui, malencontreusement, oublierait de faire le choix de cette option …
Venons-en aux circonstances qui, ici comme ailleurs, ne sauraient être négligées.
De mai à juillet 1935, Fry fit un séjour à Berlin et, alors que la plupart des gouvernements mondiaux en étaient à supputer l'intérêt des méthodes directives prônées par Hitler, ce qu'il observa ne lui laissa aucune illusion sur la nature pleinement criminelle du régime.
Aussi quand, en 1939-1940, les nazis et leurs alliés (dont Staline alors) s'emparèrent de la plus grande part de l'Europe, ce petit journaliste américain ressentit l'urgence absolue de s'impliquer et de faire quelque chose ; alors même que les États-Unis demeuraient dans un « Wait and See » froidement pragmatique. Ce fut au sein d'une petite organisation créée alors à New York pour venir en aide aux antinazis, l'Emergency Rescue Committee (ERC), qu'il allait trouver sa voie. Très vite, il s'avéra que c'était à Marseille qu'il fallait aller pour pouvoir être en mesure de faire quelque chose et que Fry était l'homme de la situation.
Varian Fry arriva à Marseille à la mi-aout 1940 et y concentra l'essentiel de son activité jusqu'à la date de son expulsion début septembre 1941. Et cette activité fut prodigieuse puisque, avec de très faibles ressources de départ, au nez et à la barbe de la police collaborationniste et de la Gestapo toujours plus présente, il permit à près de 2500 artistes, intellectuels et opposants de tous les régimes totalitaires européens, de fuir la mort quasi certaine qui les guettait alors. A noter que Fry, dépassant sans hésiter les cadres légaux qui étaient censés lui être impartis, usa pleinement de tout ce que pouvait lui offrir une nécessaire illégalité. On remarquera également comment, en de telles circonstances, un homme sûr de son fait et déterminé, trouve aisément de nombreux individus prêts à apporter leur aide et à prendre de nombreux risques pour cela. Un démenti cinglant au soi-disant égoïsme incurable de l'animal humain.
Beaucoup craindront sans doute de trouver en ce livre un ouvrage de plus sur une époque qui leur semble tout à fait dépassée et qui a donné lieu à une multitude d'assez médiocres témoignages et livres d'histoire. Je les invite à prendre le risque de celui-ci ; ne serait-ce que pour se faire une idée de ce que peut bien être un héros réel. Éventuellement, pour songer à en perpétuer la catégorie en un temps qui va en avoir fort besoin.
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En 1940, la France en débâcle signe un armistice avec l'Allemagne nazie. L'article 19 du texte stipule que "le gouvernement français est tenu de livrer sur demande tous les ressortissants désignés par le gouvernement du Reich". le régime hitlérien vise ainsi les réfugiés antifascistes et antinazis qui avaient fui vers la zone libre de la France: des ennemis politiques vite rejoints sur la liste par d'autres réfugiés, juifs cette fois, puis par nombre d'intellectuels engagés ou considérés comme représentants d'un art dégénéré.
Effarés par cette nouvelle progression de l'emprise nazie sur l'Europe, et alertés par certains informateurs sur le sort infligé aux Juifs depuis l'arrivée de Hitler à la chancellerie allemande, certains mouvements civils américains (comités, syndicats...) tentent d'agir en envoyant des soutiens financiers, voire en organisant l'exfiltration de certains réfugiés.
L'Emergency Rescue Committee charge ainsi le journaliste Varian Fry, témoin en 1935 des premières exactions nazies à Berlin, de constituer à Marseille un véritable pont d'exfiltration vers l'Amérique pour une liste de réfugiés qui lui est fournie.
La belle cagnotte initiale en dollars qui lui est allouée, son statut pour l'instant protégé de citoyen américain (les Etats-Unis ne sont pas encore entrés en guerre) et quelques entrées diplomatiques vont rapidement s'avérer insuffisants pour sauver les membres d'une liste qui s'allonge au fur et à mesure que les exigences nazies se durcissent, que le régime de Vichy ploie et que la guerre avance.
Varian Fry constitue ainsi autour de lui une équipe dont les activités officiellement caritatives flirtent en réalité avec l'illégalité, conférant parfois au jeu du chat et de la souris avec une police française plus ou moins zélée. Alliances d'intérêts, évasions par l'Espagne franquiste, perquisitions, trahisons, rationnement, retournements du sort... ce sont deux années de combat discret qui sont racontées par Fry lui-même dans ce récit absolument passionnant.

Certes, si l'histoire est bien réelle, les faits indiscutables et la narration temporellement très proche des événements qu'elle décrit (l'ouvrage a été publié en 1945), on sent le style accrocheur du journaliste, qui sait manier le sens du suspense, jouer sur l'humour, dresser des portraits vivants, voire truculents... et s'effacer modestement en tant que héros de cette aventure au profit de son rôle de rapporteur d'événements indéniablement incroyables. Fry parvient tout aussi adroitement à dresser un panel de toutes ses actions et péripéties, offrant ainsi au lecteur du XXI° siècle une immersion dans la vie en zone libre mais surveillée, de nombreuses rencontres avec des personnages célèbres (André Breton, Alma Mahler...) et un aperçu de l'évolution des relations internationales durant l'expansion nazie. le texte laisse également apparaître progressivement l'inquiétude, puis l'horreur face au sort qui est réservé à un nombre grandissant de dissidents et de Juifs.

Cette version française par Agone bénéficie en outre d'un remarquable travail éditorial.
Les 330 pages du récit principal sont en effet enrichies de nombreux documents qui permettent de l'éclairer et d'en approfondir la lecture.
Une postface de plus de 40 pages, écrite par Charles Jacquier, replace l'action de Fry dans le contexte social, sociétal et politique américain de l'époque, et présente quelques éléments biographiques du journaliste.
Une série d'annexes regroupe des articles écrits par Fry avant et après la période passée à Marseille. Son témoignage du pogrom de 1935 à Berlin est saisissant. Dans une autre mesure, son plaidoyer pour l'augmentation du quota des réfugiés après l'entrée en guerre des Etats-Unis l'est tout autant car le journaliste est contraint d'apporter des arguments intéressés dans ses lettres ouvertes aux puissants, pourtant bien au courant des avancées effroyables de la Shoah, comme en témoigne le terrible texte sur le massacre des Juifs.
Enfin, l'éditeur gratifie le lecteur non spécialiste d'un long glossaire des personnages et groupes influents cités dans le texte principal, d'un index encore plus détaillé, d'une bibliographie et d'un corpus de photos qui, placé au centre de l'ouvrage, fait "revivre" les membres du Centre Américain de Secours de Marseille, créant ainsi une proximité avec le lecteur.
L'ouvrage est donc augmenté de près de 200 pages de contenu très intéressant.

Ce témoignage historique, écrit comme un roman et présenté dans un véritable écrin éditorial, éclaire ainsi de manière accessible, concrète et passionnante un pan méconnu de l'histoire française de la Seconde Guerre Mondiale.

Je ne peux que remercier chaleureusement Babelio et les Editions Agone de m'avoir fait bénéficier de cette excellente lecture.
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J'ai eu l'occasion de lire ce livre dans le cadre d'un Masse Critique proposé par Babelio et j'avoue que je l'avais mis dans ma liste un peu par hasard au milieu de quelques "romans historiques", mais devant me rendre à Cracovie et Auschwitz, lieux incontournables de la mémoire juive, je m'étais dit, pourquoi pas, le théme était en rapport.

Steka et Keliosa auront des critiques beaucoup plus argumentées et intéressante que la mienne, je n'en doute pas. Je ne suis pas une spécialiste de la période, encore moins des mouvements intellectuels, politiques ou syndicalistes de l'époque. L'auteur, cet "héros", m'était inconnu. Je savais que des américains avaient réussi à faire parti un certain nombre de ressortissants de leur pays et avaient aidé beaucoup de réfugiés, que les pays d'accueil (USa ou Canada) avaient pu se montrer méfiants (pour ne pas dire plus) pour ceux venant d'Allemagne ou de l'Est mais mes connaissances s'arrêtaient là.

C'est donc une page d'histoire que j'ai découverte, avec difficulté je l'avoue. La méconnaissance des noms et des mouvements politiques qui ont précédé la guerre peuvent être un frein à la lecture de ce témoignage. Car il s'agit d'un témoignage, quasi brut, et je pense "adouci" de la part de l'auteur.

Brut sur le contenu car dès le début et tout au long de l'ouvrage on subit une avalanche de noms d'intellectuels, de politiques, de syndicalistes, d'artistes (pour moi méconnus, merci au lexique ajouté en fin d'ouvrage). L'ensemble est livré tel quel comme lors d'une conversation sur laquelle on n'aurait aucune atteinte, il faut suivre le mouvement, digérer le flot d'informations, le rythme des événements, comme si l'auteur se vidait de cette masse de souvenirs avec la même densité j'aurais tendance à dire la même intensité/stress/urgence qu'il les avait vécus.

Brut sur la forme, ce n'est pas un roman, c'est un témoignage qui suit le fil des souvenirs de l'auteur. Si les chapitres sont structurés, chronologiques, j'ai eu parfois l'impression d'avoir sauté une étape ou l'envie d'en savoir plus sur les filières, les passages de frontières. Certains points sont abordés mais pas détaillés, on aimerait avoir encore des informations, poser des questions (comment ? par qui ?). Un manque pour ma curiosité car l'auteur continue sur le fil de ses pensées comme si ces points n'étaient que des détails quotidiens pour lui et me laisse dans le flou sur un événement, une personnalité, une filière ... Cela déclenche une certaine frustration à la lecture mais aussi une certaine envie de creuser le sujet par d'autres lectures pour ma part.

Brut encore sur la forme car cela ressemble plus à un inventaire certes documenté par des noms, des dates, des lieux (et là encore il s'agit d'un ressenti de lecture) mais sans doute faut-il faire des choix sur ce qui doit être ou peut être écrit ...
Heureusement ce récit, car cela reste un récit, est parfois "adouci" par des moments de relative tranquilité, de petits instants de bonheur, parfois de poésie, des échappés dans cette course que livre l'auteur face à la pression de sa mission. On y découvre le quotidien de quelques artistes, la beauté des paysages de la côte ...

Adouci aussi car l'auteur aurait pu légitimement y exprimer sa colère ou ses frustrations face à la politique du gouvernement américain de l'époque qui s'opposa à son action et resta sourd à ses alertes. On devine certes entre les lignes cette condamnation, cette incompréhension par rapport à la réponse que donne son pays face à l'urgence de la situation, cette politique des visas (ou plutôt des non-visas), cette sourde oreille faite aux craintes que Fry émet par rapport à la montée des politiques anti-juives de Vichy et de l'Allemagne .... Il aurait pu critiquer le gouvernement de l'époque notamment quand on sait que c'est après le non-renouvellement de son visa par son gouvernement qu'il fut obligé de rentrer aux USA et que continuant sur le sol américain à tenter de prévenir de ce qui se passait en Europe il ne fut pas écouté, mais il ne le fait pas explicitement dans ce livre écrit après la guerre .. Au lecteur d'être juge et de se faire son opinion sur la politique américaine ... Fry ne fait qu'énoncer des faits ...

Qu'ai-je retenu de cette lecture ?
- la mission d'un homme, qui s'est investi entièrement au risque de sa propre vie pour sauver des milliers de personnes .... une certaine modestie et humilité de sa part car il ne cite que quelques dizaines de noms, ne décrit que quelques "évasions" ou passages, mais ils furent bien plus nombreux à lui devoir la vie
- l'investissement et le soutien des différents membres de son équipe .... la présence et l'activité souterraine de ces réseaux souvent issus des mouvements politiques ou syndicalistes qui dès les débuts de la guerre ont été actifs
- des aspects de la vie quotidienne en zone non encore occupée, les restrictions, le système d'pour subvenir au minimum des besoins
- la politique du régime de Vichy, le soutien de celui-ci aux demandes des allemands, ... mais aussi l'aide que certains fonctionnaires apportèrent à leur manière à l'action de Fry
- la politique américaine par rapport à tous ces réfugiés et les obstacles qu'elle posa à l'encontre de l'action de Fry, de part la neutralité que les USA avaient alors dans le conflit mais aussi face à un antisémitisme (puis anti-communisme) montant dans le pays
- l'absurdité du système des visas
- les filières des faux-papiers et de l'argent pour aider au passage des réfugiés ...


Petit à petit grâce au témoignage de Varian Fry on intègre les méthodes des "réseaux" et des filières de passage à l'étranger ....... mais aussi les obstacles politiques et administratifs, sur le sol français ou par le gouvernement américain, qu'il rencontra.

Un livre d'histoire difficile à lire pour une néophyte comme moi .... mais un ouvrage riche de contenus et d'informations ... Merci à Babelio pour la découverte de cet homme Varian Fry, un Juste parmi les Justes
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Il est fort compliqué de se faire une idée quelque peu conséquente de la nature du héros ; sans doute du fait de la pléthore d'images qui nous en sont offertes. Face à cette confusion entretenue, le plus simple serait de conclure que le héros n'est que pure fiction et que le réalisme exige de nous une aimable médiocrité qu'il est toujours possible d'agrémenter de quelques « Retenez-moi ou je fais un malheur ».
Toutefois, à la lecture du présent ouvrage, nous avons la surprise de découvrir au fil des pages ce qui ressemble bien à un héros tout à fait authentique, bien que peu conforme à l'image que l'on nous en donne habituellement. Aux vues des photos de l'époque qui nous en sont présentées, Fry ressemble à un jeune homme ayant atteint une certaine maturité de bon aloi (il a alors 33 ans) mais sans aucun signe laissant présager l'exceptionnel.
Qu'est-ce à dire ? L'héroïsme serait donc à la portée du plus grand nombre qui, malencontreusement, oublierait de faire le choix de cette option …
Venons-en aux circonstances qui, ici comme ailleurs, ne sauraient être négligées.
De mai à juillet 1935, Fry fit un séjour à Berlin et, alors que la plupart des gouvernements mondiaux en étaient à supputer l'intérêt des méthodes directives prônées par Hitler, ce qu'il observa ne lui laissa aucune illusion sur la nature pleinement criminelle du régime.
Aussi quand, en 1939-1940, les nazis et leurs alliés (dont Staline alors) s'emparèrent de la plus grande part de l'Europe, ce petit journaliste américain ressentit l'urgence absolue de s'impliquer et de faire quelque chose ; alors même que les États-Unis demeuraient dans un « Wait and See » froidement pragmatique. Ce fut au sein d'une petite organisation créée alors à New York pour venir en aide aux antinazis, l'Emergency Rescue Committee (ERC), qu'il allait trouver sa voie. Très vite, il s'avéra que c'était à Marseille qu'il fallait aller pour pouvoir être en mesure de faire quelque chose et que Fry était l'homme de la situation.
Varian Fry arriva à Marseille à la mi-aout 1940 et y concentra l'essentiel de son activité jusqu'à la date de son expulsion début septembre 1941. Et cette activité fut prodigieuse puisque, avec de très faibles ressources de départ, au nez et à la barbe de la police collaborationniste et de la Gestapo toujours plus présente, il permit à près de 2500 artistes, intellectuels et opposants de tous les régimes totalitaires européens, de fuir la mort quasi certaine qui les guettait alors. A noter que Fry, dépassant sans hésiter les cadres légaux qui étaient censés lui être impartis, usa pleinement de tout ce que pouvait lui offrir une nécessaire illégalité. On remarquera également comment en de telles circonstances, un homme sûr de son fait et déterminé trouve aisément de nombreux individus (hommes et femmes) prêts à apporter leur aide et à prendre de nombreux risques pour cela. Un démenti cinglant au soi-disant égoïsme incurable de l'animal humain.
Beaucoup craindront sans doute de trouver en ce livre un ouvrage de plus sur une époque qui leur semble tout à fait dépassée et qui a donné lieu à une multitude d'assez médiocres témoignages et livres d'histoire. Je les invite à prendre le risque de celui-ci ; ne serait-ce que pour se faire une idée de ce que peut bien être un héros réel. Éventuellement, pour songer à en perpétuer la catégorie en un temps qui va en avoir fort besoin.
On notera également que "Les dominants ont deux méthodes éprouvées pour les personnages historiques dérangeants. Soit ils sont purement et simplement ignorés, en toute connaissance de cause : c'est la méthode la plus courante. (...) Si l'on ne peut faire autrement, dans la mesure où leurs voix sont parvenues à trouver un écho, ou bien s'il apparait opportun de s'en servir dans la recomposition du consensus, on les recouvre d'une glose de commentaires qui les statufient dans la pose la plus adéquate au service de la fabrication du consentement."
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Les dominants ont deux méthodes éprouvées pour les personnages historiques dérangeants. Soit ils sont purement et simplement ignorés, en toute connaissance de cause : c'est la méthode la plus courante. (...) Si l'on ne peut faire autrement, dans la mesure où leurs voix sont parvenues à trouver un écho, ou bien s'il apparait opportun de s'en servir dans la recomposition du consensus, on les recouvre d'une glose de commentaires qui les statufient dans la pose la plus adéquate au service de la fabrication du consentement.
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Quand on replace l'histoire dans son contexte, elle paraît totalement improbable. Elle commence en juin 1940, avec l'invasion de la France par la Wehrmacht; dès lors, l'Allemagne nazie tenait sous sa coupe la plus grande partie du continent européen, de la Pologne jusqu'aux Pyrénées. Le gouvernement Pétain nouvellement installé avait signé un armistice abject avec Hitler. Par l'article 19 de ce document, la France s'engageait à livrer aux allemands, à leur demande, tout individu n'ayant pas la nationalité française et résidant sur le territoire. Dès qu'ils furent au pouvoir, et bien avant l'holocauste, les nazis n'eurent de cesse de récupérer et de liquider systématiquement leurs opposants les plus marquants et les plus détestés, qu'ils fussent juifs ou non.
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Au moins un, Hein Behrendt, a donné sa vie pour l'Amérique: il a été tué dans l'attaque sur Biak, dans le Pacifique sud.
Des tas travaillent pour le gouvernement. Parmi eux figurent Franzi, Lena et André Breton. D'autres ont des postes dans des usines d'armement. Certains sont déjà rentrés dans leur pays, pour y reprendre le combat sur la démocratie: Randolfo Pacciardi, du parti républicain italien, Giuseppe Modigliani, du parti socialiste; Emilio Lussu et Albert Ciana, du parti d'Action pour ne citer qu'eux. D''autres ont l'intention de repartir dès qu'ils auront obtenu un visa. Parmi eux se trouve Bedrich Heine. Comme beaucoup d'autres Allemands sociaux-démocrates, il attend impatiemment le jour où il pourra rentrer dans son pays pour y rebâtir la démocratie.
Peut-être que tous n'ont pas mérité les efforts que nous avons fait pour eux. Certains sont morts; d'autres ont été handicapés au vrai sens du terme, et à vie par ce qu'ils ont subi. Mais, comme le dit Beamish, il fallait que nous les ramenions tous. Du moins devrions-nous essayer.
Aucun, ai-je besoin de le dire, ne s'est montré indigne de notre confiance. Tous savent, encore mieux que nous peut-être, la véritable valeur de la démocratie. Car il leur est arrivé de la perdre, et ils ne l'ont retrouvé qu'aux prix de bien des souffrances.
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Aucun, ai-je besoin de le dire, ne s'est montré indigne de notre confiance. Tous savent, encore mieux que nous peut-être, la véritable valeur de la démocratie. Car il leur est arrivé de la perdre, et ils ne l'ont retrouvée qu'au prix de bien des souffrances.
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Bien sûr, Fry n'a pas de secret pour nous, lui a dit l'officier allemand. On sait qu'il cherche à aider nos ennemis politiques à s'évader. Ça ne nous inquiète pas. Nous sommes sûrs qu'il n'y arrivera pas.
Impossible de résister à pareil défi, je suis bien décider à prouver le contraire.
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