Ce dont on peut être certain c'est que ces charmantes héritières ne discuteront jamais cette scène: Mr Burns laisse tomber délibérément son jeton dans le décolleté de sa voisine à la table de jeu. Combien de commentaires interminables, d'exposés approximatifs pour ce plan-là et pas un autre? Ils sont rares les créateurs capables, de manière aussi limpide et somme toute aussi amusante, de mettre en scène la compénétration des coulisses sexuelles et celles de l'argent - la thésaurisation maternelle -, et ce à partir d'une idée pratique. Ah ce plan.. si j'étais cinéaste, je serais désespéré. Je ne suis pas étonné d'apprendre que cette scène valut justement à son réalisateur de nombreux problèmes avec les censeurs américains. Élémentaire. La mère et les menteurs. L'occulte association. Hitchcock, qui savait exactement ce qu'il faisait et la nécessité d'aller trop loin - la vérité est au-delà! -, craignait particulièrement la censure pour ce film. Mais non. Le crime était plus que parfait: l'oeuvre d'un gentleman.
Dans une conversation avec Jacques Rivette autour de La Règle du jeu, il s'est exprimé clairement sur ce sacrifice de l'innocent pour apaiser les dieux afin que la société puisse continuer. Personnellement, c'est cette victoire Renoirienne, sur les dieux, sur le société, et en fin de compte sur le cinéma, qui m'intéresse. Lorsque vous parvenez à faire ressentir ce péché inévitable de l'organisation sociale moins à travers un discours que grâce à une situation romanesque instinctive, vous gagnez, malgré la règle du jeu. Surtout si la chose est imposée par la farce plutôt que par la force, au détriment du spectateur.
Shoot! Shoot! Shoot! C'est l'une des grandes intuitions du film: l'être humain sera à l'avenir de plus en plus séparé techniquement de ses expériences, au profit de ses poses successives, dans une réalité monotone, monotone et pauvrement théâtrale entièrement reconstituée, entièrement falsifiable. Ce que Debord appellera trente-deux ans plus tard: "les conditions d'effacement de la personnalité chez l'individu spectaculaire".
L'homme Hitchcock, paradoxal, placide, opaque, raffiné, ritualiste, libertin, christique, irréligieux, aura été le grand mystère de l'histoire du cinéma. Quoi qu'on en dise, ce mystère est resté intact.
L'art, comme l'a dit un peintre célèbre, s'adresse à très peu d'individus.
On ne saurait lui donner tort de cette discrétion.
D'une autre manière, un roman brûlant comme Pompes funèbres n'explique que trop jusqu'où la fièvre vengeresse de la libération aura été furieusement sexuelle, donc furieusement ressentimentale, contre la féerie française et son "elle fut". Si le personnage du milicien français, Riton, est menacé par ses compatriotes, c'est surtout qu'on veut l'empêcher de rester près de son amant, son colosse blond. Le soldat allemand est une splendide puissance phallique et même le seigneur de la guerre, écrit Genet. Le Français, lui, ne possède plus son corps. D'ou l'attraction qu'exerce sur lui la queue de l'occupant... On comprend que personne ne veuille réellement admettre ce roman, Pompes funèbres, préférant le déclarer politiquement incorrect ou tout simplement abject. C'est tellement plus simple.
Thomas A Ravier : le
scandale de McEnroe
A la Cité Internationale Universitaire de Paris,
Olivier BARROT présente le livre de
Thomas A RAVIER intitulé "Le
scandale de McEnroe", un hommage au tennisman.