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EAN : 9791095360964
192 pages
L'Antilope (22/08/2019)
3.68/5   34 notes
Résumé :

" Cher Gilles,
Je viens d'apprendre qu'en 1975 vous avez dû quitter votre collège pour une affaire d'antisémitisme concernant un « vieux Juif ». Quelle surprise !
Jacques''

Quarante ans après les faits, le narrateur revient sur un épisode de son enfance : l'exclusion de son collège pour avoir adressé, avec deux camarades, une lettre antisémite à leur professeur d'anglais. Quelques années plus tard, il deviendra spécialiste de cul... >Voir plus
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Au milieu des années 1970, Gilles, le narrateur, jeune élève au collège des Mattons à Vizille, est un brillant élève ; quarante ans plus tard, alors qu'il est devenu spécialiste de culture juive, un message électronique reçu lors d'un colloque va l'obliger à convoquer ses souvenirs pour revenir sur un épisode s'étant déroulé lorsqu'il était en classe de cinquième.
Le roman débute avec une photo de classe "année scolaire 1974-1975" prise au collège de Vizille, sur laquelle se trouve notre narrateur.
J'ai immédiatement embarqué avec lui, en retrouvant avec plaisir ces années-là dans une région très proche de la mienne. Même si c'est souvent un peu teinté de nostalgie, il est toujours très agréable de se voir plongée quarante ans en arrière.
Je crois que tout lecteur peut se retrouver dans cette vie de collégien et je pense que l'auteur a très bien analysé les sentiments de ce jeune ado, encore enfant et donc un peu naïf. Il a su également entretenir le suspense avec maestria avant de nous dévoiler quel avait été ce fameux évènement qui avait marqué cette année scolaire 75. Une fois l'épisode crucial dévoilé, j'ai suivi Gilles, le narrateur, avec grand intérêt dans ses tentatives de décortiquer l'imbrication des conflits politiques des années 70 et des malaises familiaux. Quelle torture mentale pour lui qui ne se souvient que de très peu de choses et qui tente néanmoins de convoquer des souvenirs enfouis et refoulés pour reconstituer ce sombre épisode.
L'auteur creuse alors l'identité juive et nous fait part des différences existant suivant leur origine. N'oublions pas que l'auteur est spécialiste de culture juive !
Cette recherche de souvenirs et de sensations qui forment un tas, comme un empilement d'aiguilles de mikado qu'il faut tenter d'extraire une à une, souvent en se piquant, est menée avec beaucoup de patience et de talent.
Ce court roman autobiographique de 186 pages dont le sujet principal est la quête d'identité m'a séduite par les multiples aspects qu'il aborde : la vie au collège puis au lycée, la mémoire, qui peut se révéler souvent capricieuse, l'histoire de la 2ème guerre mondiale avec ses camps de déportation et l'antisémitisme toujours d'actualité. Ce sont tous, des sujets très sérieux et pourtant, Gilles Rozier a réussi à les développer en les saupoudrant assez souvent d'un humour très fin. Une recette du gâteau au chocolat de la grand-mère de son père qui, sans nul doute, sera ma prochaine expérience culinaire, nous est d'ailleurs offerte. Il a su également créer une forme d'expression à part, en écrivant certaines expressions très importantes pour lui, sans espace et en italique : lusine, mortendéportation, lévènement, endéportation, copinesdedéportation, lesJuifs, lescamps, ce que j'ai trouvé très efficace et original.
Mikado d'enfance de Gilles Rozier : un livre que je recommande chaleureusement !

Livre lu dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2019 de Lecteurs.com.


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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Devenu spécialiste de littérature yiddish, l'auteur et narrateur est soudain rattrapé par « l'événement », qui, après quarante ans de refoulement au fond de sa mémoire, resurgit à l'improviste à l'occasion d'un de ses colloques. Lorsqu'il avait douze ans en 1975, sans réaliser la portée du geste et principalement pour tenter de se concilier les bonnes grâces de ses camarades, il avait participé à l'envoi d'une lettre anonyme antisémite à l'un de ses professeurs. Les conséquences avaient été semblables à la foudre pour cet enfant d'ordinaire discipliné et dans l'ensemble peu sûr de lui, et surtout, une chape de plomb l'avait aussitôt écrasé de son silence, au sein de sa famille, juive du côté maternel.


Cet épisode de son enfance est l'occasion pour le narrateur de revenir sur le malaise ressenti, dans les années 70, par la génération de ses parents quant à la judaïcité : alors que sa mère, juive, n'a de cesse de se couler dans la discrétion et de vouloir disparaître aux yeux du monde, le coupant, lui son fils, de ses racines, de son identité et de l'histoire de ses grands-parents assassinés pendant la guerre, la société française peine à se regarder en face alors qu'elle découvre encore peu à peu l'abominable réalité de la Shoah. Lorsque le gamin, qui ne comprend rien à cette énigme qu'il pressent autour de lui, mettra les pieds dans le plat, posant à sa façon la question qui le taraude, personne ne saura gérer la situation raisonnablement. L'attitude générale sera le refoulement, le silence et le déni, creusant chez l'enfant un traumatisant abîme d'incompréhension, de culpabilité et d'injustice, ainsi qu'un questionnement auquel l'adulte qu'il est devenu n'a toujours pas fini de répondre.


Nombre des détails de ce récit prendront le goût des petites madeleines de Proust chez les lecteurs qui ont été collégiens dans la seconde moitié des années 70. L'émotion du souvenir imprègne chaque page, alors que les peines anciennes de l'auteur resurgissent intactes, juste éclairées par sa compréhension d'adulte encore plein de regrets.


Touchante quête de rédemption d'un homme toujours meurtri par la culpabilité et l'humiliation d'un lointain souvenir d'enfance, ce récit autobiographique aborde les sujets les plus graves avec pudeur et humour, et fait mouche.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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«Vieux Juif, tu seras puni par le IIIe Reich»

Gilles Rozier aurait bien aimé dire qu'il n'y était pour rien, mais aujourd'hui, quarante ans après les faits, il revient sur le courrier antisémite adressé à l'iun de ses professeurs et nous livre avec «Mikado d'enfance» un roman sensible et, sans doute, la clé de sa vocation.

Quatre enfants au milieu des années soixante-dix. De Gaulle est mort, la parenthèse Pompidou vient de s'achever et le nouveau président Valery Giscard d'Estaing entend moderniser sa fonction et la France «qui n'a pas de pétrole, mais des idées».
Nous sommes à Vizille, dans la «grise vallée de la Romanche», où la moitié de la population travaille à l'usine de Jarrie, propriété d'Ugine-Kuhlmann. C'est aussi le cas du père de Gilles, le narrateur, qui est ingénieur dans cette entreprise qui fabrique de la soude et du chlore, dont les émanations empestent l'atmosphère.
La famille s'est installée à sept kilomètres, à Champ-sur-Drac, dans la cité ouvrière. Sur la photo de classe de la cinquième 2 de l'année scolaire 1975-1975 du collège de Vizille, il est au premier rang. Derrière lui, Vincent et Pierre sont les deux seuls garçons «parmi une série de filles longues comme des tiges de marguerites». Il aimerait se rapprocher de ses camarades de classe, parce que son statut social, mais aussi le fait qu'il ait un an d'avance le marginalisent quelque peu. Sans oublier le fait qu'il préfère les poupées au rugby et faire de la pâtisserie avec son amie Pascale. Aussi quand l'occasion se présente d'aider Vincent et Pierre, il ne va pas hésiter. Ayant retrouvé les adresses des professeurs dans l'annuaire, il va transmettre celle de son prof d'anglais auxquels ils destinent ce message: «Vieux Juif, tu seras puni par le IIIe Reich». Bien que Gilles ne l'ait pas vu, il va se retrouver quelques jours plus tard en conseil de discipline et sera exclu du collège. Sanction traumatisante, notamment pour sa mère qui aura ce cri du coeur: «Comment voulez-vous que mon fils soit antisémite alors que mon père est mort à Auschwitz ?»
Gilles ne comprend pas vraiment ce qui lui arrive. Et quarante ans plus tard, il continue à s'interroger: «J'avais cheminé dans la vie, presque toujours avec la sensation que je n'étais pas maître de mon destin, comme si j'avais pris place à l'avant d'une locomotive et qu'à l'approche d'un aiguillage, j'ignorais si la machine emprunterait les rails de droite ou ceux de gauche. Et le chemin de fer n'avait cessé de proposer de nouveaux aiguillages, de sorte que quarante ans plus tard j'étais incapable de reconstituer le trajet, la suite de hasards, de rencontres, de fuites, d'injonctions, de tentatives d'échappement et de décisions qui m'avaient amené à vouer ma vie au yiddish, à l'hébreu, aux langues juives. Etait-ce vraiment lévénement qui avait tout déclenché, comme le coup de sifflet d'un chef de gare, me lançant dans cette course folle, cette vie étourdie?»
On serait tenté de répondre par l'affirmative et d'absoudre le garçon. Mais au-delà de «l'anecdote», ce qui donne la force à ce roman, c'est bien ce questionnement qui n'a jamais cessé et l'idée sous-jacente que celui qui trouve n'a pas vraiment cherché. Gilles Rozier continue donc de chercher et nous avec lui les fondements de cette culture juive et ceux de son identité. C'est à la fois pudique et profond. C'est une belle découverte de cette rentrée.

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Alors qu'il était gamin, Gilles s'est retrouvé (involontairement ?) complice d'une très mauvaise blague de potaches qui lui vaut le conseil de discipline de son collège pour antisémitisme.
Ce bon élève a la sensation d'avoir commis une faute grave mais qu'il ne comprend pas vraiment puisqu'il n'a pas les clés pour en saisir toute la portée. Après l'avoir profondément enfoui en lui pendant des années, cet épisode douloureux ressurgit de façon inopinée, l'obligeant à se replonger dans ses souvenirs d'enfance afin de se libérer de ce qu'il considère encore comme traumatisant mais aussi fondateur de ce qu'il est devenu.

Dans ce mikado où les souvenirs font office de baguettes, Gilles Rozier se livre avec la simplicité de l'enfant de douze ans qu'il était quand "l'événement" fâcheux s'est produit. Une voix fraîche et naïve, légèrement teintée d'humour, pour aborder des sujets graves tels que la mémoire et la transmission.
Né de parents profondément anti-cléricaux, ce n'est que tardivement qu'il découvre sa part de judéité, un héritage dont sa mère veut le protéger car inconsciemment considéré comme dangereux. C'est ce silence maternel sur ses racines, maintenant Gilles dans la méconnaissance de son identité profonde, qui a pu provoquer tout aussi inconsciemment le fameux "événement" . En 40 ans, il s'est bien rattrapé en apprenant le yiddish et l'hébreu et en faisant connaitre la richesse de la culture juive grâce à L'antilope, sa maison d'édition.
Je connaissais Gilles Rozier uniquement en tant qu'éditeur, je suis ravie d'avoir enfin découvert sa jolie plume si sensible !
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La mémoire est parfois sélective..... Certains événements sombrent et se rappellent à vous alors que vous les aviez intégrés, digérés, presque oubliés. En revenant dessus, vous comprenez  que sous des abords anodins, ils sont fondateurs de ce que vous êtes devenu, de l'homme (ou la femme) que vous êtes, de vos choix de vie, d'orientation.

Lorsque un événement de son enfance remonte à la surface suite à un message électronique reçu interrogeant sur la véracité d'une participation à un acte antisémite de sa part, Gilles, l'auteur, se plonge dans ses souvenirs de collégien en classe de 5ème pour retracer l'impact de ce fait sur toute sa vie d'homme mais aussi sur son identité juive dont il n'avait peut-être pas totalement conscience à l'époque, lui qui est devenu par la suite professeur de yiddish et d'hébreu.

A travers cette narration, l'auteur se livre à un devoir de mémoire sur sa propre enfance, ce garçon surnommé "filliste" en raison de sa délicatesse, de ses goûts, de sa douceur et qui, pour s'associer à deux garçons de son âge dont il souhaite devenir l'ami, Vincent et Pierre, va fournir l'adresse d'un professeur Monsieur Guez à qui sera adressé une lettre antisémite.

Cette complicité va lui devoir une exclusion temporaire, une convocation de ses parents et une réaction de sa mère qui va le marquer à jamais et devenir finalement fondatrice de sa vie d'adulte :

"Comment vous-vous que mon fils soit antisémite alors que mon père est mort à Auschwitz ? (p101)"

L'auteur revient sur cet épisode en partant d'une photo de classe de l'année 1974-1975 pour resituer dans son contexte les événements. Peu à peu il tire sur le fil des souvenirs pour arriver à "lévénement" qui va lui permettre de découvrir un pan de son identité qu'il ignorait, le destin de sa famille maternelle, dont on parlait pas ou peu. 

C'est avec simplicité, bienveillance et douceur que Gilles Rozier revient sur cette année finalement décisive, sur un acte provoqué par le désir de ne plus être le fils du directeur de "lusine" mais un enfant comme les autres, faire un coup d'éclat dont il ne connaissait pas la vraie teneur mais qui va lui révéler que sa famille a un passé douloureux intimement lié à l'antisémitisme. 

C'est une lecture agréable, parsemée de références de l'époque, qui revient à la fois sur l'enfance de l'auteur mais aussi sur la deuxième guerre mondiale, les camps de concentration, l'identité juive à travers les décennies, dans un habile mélange d'humour, de tendresse mais aussi de gravité.

Nous sommes ce que nous sommes parfois par des événements de notre enfance, anodins ou pas, des non-dits parfois, des silences qui se révèlent comme des moments charnières et par leur émergence bien des années plus tard, nous réalisons qu'ils ont été finalement annonciateurs de ce que nous deviendrons et c'est ce que Gilles Rozier réussit parfaitement dans ce roman dans lequel il étale les pièces du jeu et en tire une ligne de vie.

"Tous ces souvenirs et les sensations s'y rapportant forment un tas compact, un enchevêtrement d'aiguilles de mikado qui piquent quand on les touche, mais elles ont fini par provoquer la même douleur, quelle que soit leur couleur et le nombre de bagues censées introduire entre elles une hiérarchie. (p53)"
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Mon père avait la République chevillée au corps. C'était sa religion. Hors la République point de Salut. Il n'aurait jamais inscrit ses enfants dans le privé, alors mon frère et moi avons toujours fréquenté l'école publique. Il ne s'agissait pas seulement d'une foi infaillible dans son enseignement institué sous la troisième République en bras armé de la Nation. Il avait la conviction que le brassage était le ferment de la vie en société.
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Je me souviens du slogan clamé sur toutes les ondes après la première crise pétrolière, celle de 1973. La France s’est lancée dans la chasse au « gaspi » et les spots annonçaient : « En France, on n’a pas de pétrole mais on a des idées. »
En 1978, mon père nous promettait l’exil au Québec si l’Union de la gauche remportait les élections législatives. J’ai commencé à m’imaginer sur un traîneau tiré par des chiens, dans des forêts bien plus denses que nos forêts des Alpes et des étendues de neige bien plus immenses que les nôtres.
1979. La gauche n’était pas passée mais nous sommes quand même partis. Dans le Pas-de-Calais. Mon père y était muté. Il a fallu recommencer une vie, se faire des nouveaux amis. C’était peut-être mieux ainsi.
1975, rien. Le rien du journal de Louis XVI en date du 14 juillet 1789. Rien dans l’histoire de France, rien dans ma vie, seulement cette classe de cinquième 2 au collège de Vizille, un bourg traversé l’hiver par les skieurs de l’Europe entière en route vers l’Alpe d’Huez.
Vizille ensommeillée en aval de la grise vallée de la Romanche dont les rares habitants ne voient le soleil que quelques heures par jour en été, jamais en hiver. Vizille, son château édifié par le connétable de Lesdiguières, son collège flambant neuf construit sur le modèle d’Édouard-Pailleron à Paris. En 1973, l’incendie du collège Édouard-Pailleron avait fait vingt morts.
Il s’était passé quelque chose en 1975, mais je l’avais éjecté de ma mémoire, placé dans un recoin de mon cerveau.
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La mémoire est une pelote de laine, un nœud de serpents, des grains de riz dans un bocal, un jeu de mikado. Comment tel souvenir est-il invité à remonter à la surface de cet embrouillamini ?
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Les écrivains peuvent faire mal sans le vouloir. En convoquant le dévoilement de leur existence, ils emportent celle d'autres qui ne demandent qu'à vivre en paix. Ils embarquent dans leur cérémonie des vies qui ne sont pas les leurs.
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INCIPIT
L’ardoise tenue par cette adolescente blonde indique « année scolaire 1974-1975 », mais sans la précision, l’on comprendrait au premier coup d’œil que la photo a été prise dans les années 1970. La professeure de mathématiques exhibe une coiffure à la Mireille Darc dans Le téléphone rose, version brune. Les cols de chemise sont pointus, les pantalons évasés, « pat’ d’éph » comme on disait.
Il est assis au premier rang, le deuxième à partir de la gauche. Il a les cheveux longs mais sans outrance, une coiffure beaucoup moins exubérante que celle de ses camarades, on devine qu’il n’ose pas l’excès de ces années où pourtant presque tout est permis. Il est habillé de bleu, pantalon de toile bleue, chemise ciel, blouson bleu. La couleur dictée par sa mère. « Un enfant aux yeux bleus porte du bleu. » Il est assis au premier rang parce qu’il est petit. Il a un an d’avance. Bon élève, donc. Son corps n’est pas encore passé à la moulinette de l’adolescence alors le photographe ne l’a pas placé à côté de Vincent et de Pierre, le blond et le brun debout au dernier rang, les deux seuls garçons sur la ligne de crête parmi une série de filles longues comme des tiges de marguerites : Pascale, Christine, Ghislaine, Éva, Josiane, Marylène. Peut-être est-il devant, collé à la prof de maths, parce qu’il est bon élève, un peu fayot même, il a toujours aimé l’école, il adorait le maître en primaire, et à présent les professeurs du collège. En classe, il est souvent le premier à répondre. Sur son visage, un sourire à peine esquissé. De la tristesse dans son regard. On me le dit encore : j’ai une tristesse dans la pupille dont je ne parviens pas à me départir. Car lui, c’est moi. Enfin pas tout à fait. Un moi à plus de quarante ans de distance, un collégien dont je ne me souviens guère, un garçon encore niché auquel je n’ai plus vraiment accès. Il s’est perdu dans le lointain pays de l’enfance, dans l’épais brouillard des années passées. Elles se sont agglomérées les unes aux autres et ont laissé une masse de souvenirs et d’oublis, série de flashs aspirés par une matière noire, un flou dans lequel il faut sans cesse poser des balises afin qu’il ne se transforme définitivement en chaos.
J’ai un souvenir très vif de la mort du général de Gaulle en 1970. Je me souviens du visage de mon père quand il a appris la nouvelle à la radio. Il perdait son père spirituel, celui qui accompagnait sa vie depuis l’enfance. Je ne comprenais pas très bien comment la mort d’un chef d’État pouvait tant l’affecter et je me suis tu, me contentant d’observer.
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