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EAN : 9782918945529
84 pages
Recits (31/10/2017)
4.38/5   4 notes
Résumé :
René est né en 1908. Avant-dernier d’une famille de huit enfants, il a 7 ans quand son père décède. Le petit paysan ne mange pas tous les jours à sa faim et ne dort pas à l’abri du froid. Mais René ne traîne pas sa misère. Durant ses escapades, il est débrouillard et astucieux motivé souvent par la quête de nourriture.

Quand il quitte l’école à 12 ans, l’enfant est « loué » dans une ferme. Il élève aussi des lapins, vend des peaux de taupes... Et quan... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Degemer mat e breizh ! Bienvenue en Bretagne !

Petit format pour ce très joli roman de moins de cent pages que René le Corre nous livre à titre posthume puisqu'il nous a quitté en 2002 et que son récit a été publié en 2017. Un récit tout en pudeur, dans l'amour et dans le respect des traditions bretonnes, qui oscille entre le témoignage et l'autobiographie et qui, je le précise, a été publié tel que l'auteur l'a écrit.

Les souvenirs d'enfance et d'adolescence de René le Corre dont l'écriture spontanée, émouvante, nous immerge avec une facilité étonnante au coeur du Finistère. le Finistère, "la Terre du bout du monde", si chère à son coeur et au mien, à Gourlizon, petit village de trois-cents âmes, situé à onze kilomètres de Douarnenez.

René naît donc en 1908 à Gourlizon, orphelin de père à sept ans, il est l'avant-dernier d'une fratrie de huit enfants. le petit garçon est dégourdi, téméraire, c'est qu'il n'a pas vraiment le choix, sa mère est analphabète et les temps sont durs dans les campagnes bretonnes au lendemain de la "Brezel Vraz", la grande guerre comme disent les anciens, on ne mange pas à sa faim et c'est bien souvent que le petit part à l'école l'estomac vide. L'école, qu'il intègre pour la première fois à l'âge de six ans alors qu'il ne parle pas un mot de français (seulement le breton) et qu'il quitte à douze ans, pour être gagé dans une ferme du voisinage à laquelle sa mère loue ses services, "nourri, logé, blanchi" pour trois-cents francs annuels. Il y restera durant trois ans.

Portrait touchant d'un petit garçon facétieux qui fait les quatre-cents coups avec son frère aîné Étienne, le curé de Gourlizon, paix à son âme, doit s'en souvenir encore. Portrait touchant également de l'adolescent qui s'offre son premier vélo avec ses premiers sous gagnés à la ferme et quel vélo ! Vous souvenez-vous de votre premier vélo ? Moi oui, comment ne pas m'en souvenir... Il n'était pas aussi beau que celui de René : un modèle demi-course, jaune canari, estampillé Louvet, un ovni en 1920 où la plupart des vélos étaient de couleur noire ; acheté à Quimper chez un cordonnier reconverti en vendeur de cycles. On se débrouillait comme on pouvait en ce temps là...

Vous l'aurez compris, j'ai plus qu'apprécié la lecture de ce roman. Je vous laisse donc le soin, à votre tour, de découvrir ce très bel hommage que l'auteur rend à la Bretagne, à la langue bretonne, à ses racines, à sa famille, ainsi que la dizaine de photos en noir et blanc que sa fille a eu la merveilleuse idée d'intégrer au récit dont la postface contient par ailleurs un émouvant message.

Pour conclure, conseil avisé d'une bretonne : soyez bien sages surtout ;) car l'ankou veille toujours, terrifiant, tapi dans l'ombre, et il pourrait bien s'échapper du billet que mon ami le korrigan Cascasimir a eu la gentillesse de nous poster en novembre dernier sur les contes et les légendes bretonnes (si vous ne l'avez pas lu, il est encore temps).

Crrr... crrr...crr... Vous entendez l'ankou ?


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Cent pages formidables et archi-méconnues pour illustrer ce Finistère rural avant la grande guerre dans le pays cornouaillais : il fut dur, très dur, sa jeunesse était cueillie par la mort à la guerre, ou promise à l'exil, et ma foi pour ceux qui restaient, il fallait avoir le coeur bien accroché pour résister aux sempiternelles humiliations, aux mauvais traitements comme des bêtes de somme. On se tenait chaud les jours de fêtes mais le lendemain était plus dur, et ça faisait combien de jours dans l'année pour respirer ce que pourraient être des jours meilleurs, car ce n'est pas au champ qui vous faisait courber l'échine que serait venue une chanson ..

En ce 26 janvier 2024, j'ai une pensée pour Rene le Corre, c'eut été assurément une deuxième mort pour celui ayant été prêté au fermier du coin pour une bouchée de pain par son père qui tirait le diable par la queue. Il se serait retourné dans sa tombe en assistant en direct au suicide collectif de la paysannerie française. À faire terrasser des blocs de granit, je vous dis cette tragédie qui se joue sous l'oeil impuissant de tout un peuple qui prend fait et cause pour l'agriculture française, mais qui n' est même pas capable de concevoir qu'il faut à l'agriculteur une v pour assurer son exploitation et que ça va bien les fins de mois où il ne reste plus rien, même pas une cacahuète. le producteur est la cinquième roue du carrosse alors qu'il devrait être en position de force dans le marché agricole : c'est à lui d'imposer ses prix et non pas aux commissaires de Bruxelles de faire la pluie et le beau temps désormais sur l'agriculture française qu'ils veulent étêter comme des choux de Bruxelles
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Comme vous, je viens de lire, non sans émotion, les moments forts de l'enfance et de l'adolescence de mon bon papa qui vient de quitter ce monde en ce début de nuit, en ce début d'année, le 26 janvier 2002, à 00h13. Ce fut dans sa maison pour laquelle il a tant donné. Tant donné aussi et plus encore pour maman qui fut longtemps malade, partie pour toujours depuis plus de quinze ans déjà.

Après ce grand vide, papa se trouva si désemparé que je dus remuer ciel et terre pour le sortir de cette rude épreuve. Nous avons beaucoup parlé ensemble, mais je l'ai surtout sollicité et écouté. Devant son flot magnifique de paroles au travers desquelles je retrouvais la sensibilité parfois exacerbée d'un être attachant et généreux, toujours prêt à rendre service, ouvert aux autres, à l'esprit vif et créatif où mille pensées se bousculent, je l'ai incité à écrire. Ce qu'il a fait, comme il vient de le dire.

L'existence de ses récits m'apporte un réconfort ineffable, car je sais maintenant que je n'oublierai rien de ce qu'il a lui-même ancré à jamais dans sa mémoire.

Isabelle Paul-Le Corre
Paris, avril 2002.
(Post-face)


* Un roman que j'ai lu en juin 2020 dont j'ai déjà eu le plaisir de vous parler. Les mots d'Isabelle Paul-Le Corre qui s'est battue pour que le roman de son papa puisse voir le jour (à titre posthume) méritent d'être partagés ici.
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Je me blottissais dans l'âtre, assis sur le banc de bois. En face de moi, ma grand-mère sur l'autre banc égrenait son chapelet à voix basse. C'était un des rares moments où elle ne nous parlait pas des lutins. Dès que nous n'étions pas sages, ces lutins étaient partout, envahissants, menaçants. Petits êtres velus de couleur sombre, ils pouvaient, d'après elle, passer au travers d'une serrure et se reconstituer de l'autre côté. C'était là, à mes yeux d'enfant, pour le moins terrifiant. Elle aimait raconter des histoires de revenants. Ainsi, lorsqu'il y avait un décès éloigné du bourg, le carrigue an ankou, char de la mort aux roues grinçantes, passait vers minuit, attelé à deux chevaux blancs efflanqués. Tout le monde l'avait entendu, mais personne n'osait dire qu'il l'avait vu. On retenait son souffle. Avec mon frère Étienne, de deux ans mon aîné, on écoutait les bruits du dehors et j'essayais de reconstituer la vie terrible de tout cet univers étrange et invisible qui m'entourait.
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En Bretagne, c'était la coutume d'inviter à déjeuner un membre de la famille des domestiques de la ferme le jour de Noël et le jour de l'An. Comme nos frères et soeurs étaient placés dans des fermes, ma mère nous répartissait de telle sorte que nous puissions manger de la viande ces jours-là. C'était formidable. La vraie fête ! On savourait d'abord le bouillon de pot-au-feu, puis on se régalait de viande et de lard bouillis accompagnés des légumes On buvait aussi du cidre : c'était encore meilleur que l'eau limpide de notre puits municipal.
Une fois l'an donc, nous mangions de la viande ; à moins que, tout à fait par hasard, nous arrivions à prendre une garenne au collet. Mais c'était si rare...
Dès que nous attrapions nos douze ans, la ferme nous prenait ; c'était la réserve de main-d'oeuvre des domestiques.
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