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EAN : 9782757891308
360 pages
Points (14/10/2021)
4.05/5   88 notes
Résumé :
C’est l’été 1938 en Europe centrale. Et comme chaque année ils sont là, sur la rive, en villégiature.

Il y a Rosa Klein, qui lit dans les lignes de la main. Mais peut-on se fier à ses prédictions ? Et Karl Koenig, l’écrivain. Pourquoi fréquente-t-il les autres vacanciers au lieu de consacrer toute son énergie au roman qu’il est en train d’écrire ? Qui sont vraiment « l’homme à la jambe coupée » et la jeune femme amoureuse que tous les Juifs appellent ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Dans ma critique de l'ouvrage d'Aharon Appelfeld "Katerina" du 24 octobre 2019. j'ai qualifié l'auteur, ensemble avec quelques autres écrivains tel Amos Oz, comme une "conscience". Malheureusement, l'année 2018 aura été marqué par le décès d'Aharon Appelfeld en janvier et d'Amos Oz en décembre.

Deux consciences donc que le maître actuel de l'endroit, Benyamin Netanyahou, n'a manifestement pas lues, à en juger par sa politique agressive dans les territoires occupés. Pas plus d'ailleurs que ce petit rigolo de Jared Kushner, l'expert du Moyen-Orient autoproclamé, et beau-fils de Trump, qui lui, faute de temps, n'arrive qu'à lire ses propres tweets d'un niveau évidemment incomparable avec l'oeuvre d'Appelfeld et Oz.
Chaque fois que j'ai vu ce Jared déambuler à Jérusalem à côté de son pote l'immuable Benyamin, mon sang n'a fait qu'un tour... de dégoût !

L'ouvrage a été traduit de l'Hébreu en Français par Valérie Zenatti, la talentueuse auteure d'entre autres "Jacob, Jacob".

Chaque été jusqu'à ses 10 ans et le début des troubles, le petit Aharon qui se prénommait encore Ervin, passait un mois avec ses parents dans une isba (chalet en bois) située sur la rive de la rivière Prout dans les Carpates. le Prout ou Pruth trouve son origine dans l'actuelle Ukraine, forme la frontière avec la Moldavie pour se jeter en Roumanie dans le Danube.

L'auteur est né en 1932 à Tchernivtsi, à l'époque de sa naissance dans la Bucovine roumaine, où environ la moitié de la population était juive.
Avec sa mère Bounia, aimée de tous, et son père homme de raison et de rigueur, Aharon Appelfeld a passé un temps merveilleux, fait de nage dans la rivière et de promenades à cheval (pour le petit un poulain) dans la montagne environnante.
Cet épisode idyllique fera vers la fin des années 1930 progressivement place à une ambiance antisémite de plus en plus menaçante. On entend déjà des : "Les Juifs n'ont rien à faire au bord de la rivière."

À travers quelques personnages-types qui fréquentent cet endroit, comme l'éternelle amoureuse P. ("qui n'est pas en paix avec ma judéité"), le cynique homme à la jambe coupée et l'écrivain Karl Koenig les propos d'inquiétude parmi les Juifs se manifestent dès l'été 1938. le père de l'auteur estime aussi que "le bon sens voudrait qu'on déguerpisse sans plus attendre ". Et l'homme à la jambe coupée va même jusqu'à consulter Rosa Klein, la liseuse locale des lignes de la main.

Puis un jour, une meute de paysans s'attaque avec des bâtons aux vacanciers juifs. Bien que le père Appelfeld qualifié cet incident de "pogrom de petite envergure", il est indéniable que les Juifs sont devenus anxieux et nerveux.

Bientôt, ce sera la guerre qui va se terminer tragiquement pour les 3 membres du ménage Appelfeld et pour Aharon, après un long et dangereux périple, son départ définitif pour la Palestine, en 1946.

J'ai été émerveillé par l'exposé de l'auteur tout au début de son ouvrage sur la qualité unique d'observation par les enfants. Pour lui " un regard d'enfant est indispensable à tout acte créateur". C'est guidé par cette constatation fondamentale qu'il a conçu le souvenir de ses parents et de ses propres jeunes années, en 2013, trois quarts de siècle plus tard.

Le duo Appelfeld-Zenatti vous garantit une littérature d'une qualité rare.
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J'aimais beaucoup cet auteur , je me souviens de mes émotions à la lecture du récit autobiographique : «  Histoire d'une vie » à sa sortie.

Nous sommes en1938 en Europe centrale , un temps où des rumeurs sourdes de guerre s'annoncent , et l'inquiétude diffuse des juifs ,——-déjà confrontés aux moqueries ——-sarcasmes et racisme .

On entend déjà hélas «  Les juifs n'ont rien à faire au bord de la rivière » .

Le narrateur, âgé de dix ans , prénommé Ervin, conte ses vacances d'été., les dernières avant la guerre .
Il passait chaque année , environ un mois avec ses parents dans une isba, sorte de chalet en bois sur la rive du Pruth , dans les Carpates .

Semblable à une scène de théâtre se prélassent sur la rive la classe moyenne juive avec ses doutes, ses incertitudes , ses joies toutes simples : nager alors que ces hommes et ces femmes respectables dissimulaient d'ordinaire , leurs faiblesses corporelles , cet éventail humain à travers son maillot de bain , se découvre certains traits ridicules ou obtus au bord de l'eau , dans des attitudes de vacanciers…

C'est une page unique d'histoire qui traverse cet ouvrage , à mon avis, les réflexions , les images au niveau d'un enfant juif , son goût précoce de l'écriture , son ouverture aux autres , l'émerveillement , la capacité à accepter la réalité sans se plaindre, l'importance de l'enfance dans la construction d'une personnalité , de l'art et le travail surtout , de la mémoire …
La mère , Bounia , aimée de tous est sensible, généreuse , lumineuse, protectrice .
Le père rationnel, légèrement misanthrope , est une personne de raison , de rigueur , anxieux , désabusé , il doute, il cadenasse …

Ses parents si différents et si proches , l'un ironique , l'autre , toute en bienveillance .
Aharon dit Ervin passe un temps béni à se baigner, observe ses parents , libres dans l'eau , réalise des promenades dans la campagne ou la montagne environnante avec ses parents sur le dos de chevaux , lui , sur un poulain .
Quelques personnages traversent ce roman éblouissant , unique , le cynique homme à la jambe coupée, l'écrivain Karl Koenig , Rosa Klein, la liseuse des lignes de la main, le docteur Zeiger.

L'auteur se dévoile à travers ces lignes , j'en ai été extrêmement émue en pensant au destin de ce vieil' homme très éprouvé par la vie, orphelin à dix ans, livré à lui- même dans les forêts d'Ukraine , emmené en Palestine en 1946 , pour y revivre et reconstruire sa vie …
Quel destin !
Un livre que chacun devrait lire , tout en nuances , pétri d'humanité.de souvenirs, de délicatesse , d'intelligence ,de lumière , à l'extrême sensibilité qui fait réfléchir !
Éblouissant !
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Dans ce petit roman, Aharon Appelfeld nous entraîne sur les rives du Pruth, une rivière au pied des Carpates, où la bourgeoisie juive aimait s'y rendre l'été.
Nous sommes à l'été 1938, L' Anschluss s'est produite quelques mois plus tôt en mars. Nous sommes dans une ambiance de fin du monde. Tous présentent la guerre imminente et le désarroi de ces familles juives qui ne savent que faire ?
Profiter de dernières vacances, fuir, préparer une émigration ?
Ce roman relate toute cette atmosphère, les paysans uhkrainiens commetront même aux yeux de tous un pogrom sur la rive, frappant sauvagement des vacanciers juifs.
Pour Appelfeld, ce sera les dernières vacances avec ses parents, observant attentivement les différences et assonances entre son père et sa mère.
Ses observations, ses impressions le suivront toute sa vie et serviront de matière première à son écriture.
Elles lui feront dire que "le voyage de l'écriture ressemble, par bien des aspects, au voyage que je faisais en été avec les parents"
Réellement, l'écriture est le centre de ce roman, ses questionnements, son devenir, tout est en germe depuis l'enfance, elle deviendra pour Aharon Appelfeld sa survie, sa destinée.

" Déjà, alors, je craignais l'écriture. Au fond de moi, je savais qu'elle était liée à une observation douloureuse, mais je n'imaginais pas qu'avec le temps elle serait un abri, un refuge où non seulement je me retrouverais, mais où je retrouverais aussi ceux que j'avais connu et dont les visages avaient été conservés en moi. "

Bouleversante déclaration aux accents très proustienne, un temps" retrouvé " dans les souvenirs qui l'a aidé à vivre.

Incontestablement, un roman à découvrir.
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C'est par Philip Roth dans "Opération Shylock" que j'ai pour la première fois entendu parler d'Aaron Appelfeld : il y avait tant de profondeur dans le personnage pseudo fictif qui y était présenté, homme sage et vieillissant ayant reconstruit par l'écriture sa vie brisée par la guerre alors qu'il n'était encore qu'un enfant de dix ans, que son évocation m'avait donné envie de découvrir le véritable auteur.

"Mon père et ma mère" le permet, mais en partie seulement et c'est ce qui rend ce livre si bouleversant : il est en effet difficile de démêler dans ce récit ce qui relève du souvenir ou de la fiction. Or, quand l'auteur lui-même nous éclaire en introduisant son propos par des considérations sur l'importance de l'enfance dans l'exercice de l'art et sur le travail de la mémoire, on sent littéralement apparaître à travers les lignes le visage de ce vieil homme éprouvé par la vie, orphelin à dix ans, livré à lui-même pendant la guerre dans les forêts d'Ukraine et emmené en 1946 en Palestine reconstruire sa jeune vie dans un environnement violemment nouveau; on 'voit' ce vieil homme plisser le front, faire un effort de mémoire pour faire reparaître quelques bribes des dernières vacances de son enfance disparue, peut-être l'odeur de la tourte au fromage préparée par sa mère, peut-être le bras de son père battant l'eau dans la rivière Prouth, et à partir de ces bribes reconstruire ces moments, ce récit qui devient réalité avec ses lumières, sa nature, ses personnages, ses atmosphères tantôt languissantes tantôt inquiétantes de bruit de bottes à venir, son regard d'enfant sensible qui, fort de l'expérience douloureuse de sa vie, sent qu'il vit là ses derniers moments de chaleur.

Sans aucune trace d'actualité ni autre repère que celle de la date, été 1938, c'est toute une page d'histoire qui traverse ce livre, condensée au niveau d'un jeune enfant juif, et cela m'a profondément émue.
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Un coup de coeur attendu, j'aimais beaucoup Appelfeld et je remercie sa traductrice et amie, écrivaine, Valérie Zenatti de poursuivre son travail: je ne lis pas l'hébreu! Appelfeld l'a appris laborieusement mais avec succès puisque c'est en cette langue qu'il a écrit ses livres. Germanophone, il ne pouvait pas cependant écrire dans la langue de l'ennemi.
Il n'est pas l'écrivain de la Shoa et s'en défendait.
La preuve dans Mon père et ma mère, cela se passe au temps où il n'y a encore que des rumeurs de guerre et l'inquiétude des juifs: ils étaient déjà confrontés au racisme dans les pays de l'Est . Dans ce livre, ce sont les vacances d'été et les juifs se retrouvent sur une plage de la rive d'une rivière. Erwin, dix ans et 7 mois s'y retrouve comme tous les ans avec sa mère et son père (qui préfère la montagne).
Quelques personnages y sont comme l'écrivain, le médecin ,l'homme à la jambe coupée, P; la femme gémissante, celle qui lit dans les lignes de la main etc. Ils s'y regroupent pour ne pas avoir à se confronter à l'hostilité des non-juifs.
La mère est sensible, généreuse, émotive; l'enfant lui ressemble; le père est assez misanthrope et rationnel d'où des petits conflits fréquents.
C'est écrit au "je" et donne l'impression d'être au moins en partie autobiographique (il mentionne ses propres livres) mais l'âge et le prénom ne collent pas. J'aime l'écriture, le style simples de ce grand écrivain qui figure dans mon Panthéon.
nb: je recommande vivement ses livres jeunesse parus à l'Ecole des loisirs.
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critiques presse (3)
Actualitte
02 mars 2021
Le roman est l’expression de cette idée ancestrale que la mère et le père sont l’origine, le terreau biologique, culturel et émotionnel de l’enfant : ils couvent et ils couvrent de leurs ailes l’être en évolution. L’hommage que leur rend, dans Mon père et ma mère, Aharon Appelfeld, est ici d’une beauté cristalline.
Lire la critique sur le site : Actualitte
LesInrocks
13 octobre 2020
Avant de disparaître, le grand Aharon Appelfeld ressuscitait le dernier été de son enfance à l’aube de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste, et revisitait une Mitteleuropa engloutie.
Lire la critique sur le site : LesInrocks
Telerama
25 septembre 2020
Un roman éblouissant, d’une sensibilité immense.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (49) Voir plus Ajouter une citation
Un regard d'enfant est indispensable à tout acte créateur. Lorsque vous perdez l'enfant qui est en vous, la pensée s'encroûte, effaçant insidieusement la surprise du premier regard ; la capacité créatrice diminue. Plus grave encore : sans l'émerveillement de l'enfant, la pensée s'encombre de doutes, l'innocence bat en retraite, tout est examiné à la loupe, tout devient contestable, et l'on se sent contrarié d'avoir simplement aligné des mots.

La maison originelle, le retour vers elle, le séjour en elle, ont nourri chacun de mes livres. Je n'écris pas de livres de souvenirs. La conservation du souvenir et sa congélation sont des actes antiartistiques. Mes écrits ont poussé sur la terre constituée par ce qui m'est arrivé durant mon enfance et ma prime adolescence, et si je les ornais uniquement d'expériences plus tardives, sans la maison originelle - des fondations au toit -, je me noierais dans un océan de réflexions contradictoires. Je ne serais plus accaparé par la littérature mais par des réflexions et des tentatives vaines. La création est toujours liée au mystérieux regard de l'enfant en soi, dont l'empreinte ne peut transformée par aucune ruse littéraire.

Dès l'instant où le regard de l'enfant émerge de l'obscurité des années, vous êtes assuré que des visions nouvelles, des mots choisis et des tournures éclairantes vont se révéler à vous. L'ébahissement attentif de l'enfant ôte immédiatement la poussière recouvrant les années, les visions et les êtres, qui se tiennent alors devant vous comme si vous les découvriez pour la première fois, et vous implorez de tout votre cœur que cette grâce ne s'achève jamais.

pp. 7-8
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Je retourne cette fois vers l’isba que mes parents louaient sur la rive du Pruth durant les vacances d’été. À force d’y retourner chaque année, la modeste bâtisse n’avait plus rien de provisoire pour nous. Nous y demeurions un mois, au milieu de tableaux naturels simples et intenses : un champ de tournesols jaune, des grillons argentés qui stridulaient jour et nuit, des plantes d’eaux hautes et touffues ratissées par des oiseaux de proie dont les cris perçants me réveillaient la nuit.
L’isba est exiguë : deux chambrettes, une cuisine qui fait également office de salle à manger. Elle donne sur une cour, un potager, deux cerisiers et des buissons de roses.
Tôt le matin, le propriétaire nous livre une miche de pain paysan, des œufs et des produits laitiers. Le potager est à notre disposition, Maman nous sert gaiement des concombres, des tomates, des radis et des ciboules tout juste cueillis. De nombreux parfums et saveurs ont accompagné mon enfance, mais le goût des légumes de ce potager reste gravé en moi jusqu’à ce jour.
Nous passons la matinée à nager et bronzer sur les rives de la rivière. Les vacanciers sont rares mais reconnaissables à leur style flamboyant. Seule la bourgeoisie juive peut s’autoriser un mois de vacances dans ce paysage pastoral au pied des Carpates.
Le soir, nous buvons du café devant l’isba, accompagnant le crépuscule qui, en cette saison, entraîne dans son sillage les lueurs du jour jusqu’à la nuit profonde. La lumière voilée dans l’obscurité grise et clairsemée ne s’éteint jamais totalement.
Nous n’allons pas rendre visite à la rivière à cette heure, nous la contemplons de loin en écoutant son murmure, absorbant encore tout ce que le jour nous a révélé.
Peu avant minuit, Maman coupe une pastèque dont le rouge excite le regard et dont le goût est un délicieux nectar.
La journée se passe donc sur la rive du Pruth. Ni large, ni bouillonnant, il ne faut pas pour autant se fier à cette apparence paisible : il a plus d’une fois emporté un enfant.
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L'aventure de l'écriture n'est pas une expérience des plus faciles. Elle contient le face-à- face avec vous-même tout au long d'une vie, et toutes les épreuves affrontées : les erreurs, les échecs, les rencontres glaciales, celles qui vous ont vidé, les, amours violentes dont les blessures ne cicatrisent pas, et plus que tout, la mort, dans son expression la plus accablante, telle que nous l'avons éprouvée, mes parents et moi, enfant_ c'est tout cela que vous êtes amené à regarder en face.
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Un regard d'enfant est indispensable à tout acte créateur. Lorsque vous perdez l'enfant qui est en vous, la pensée s'encroûte, effaçant insidieusement la surprise du premier regard, la capacité créatrice diminue.
Plus grave encore : sans l'émerveillement de l'enfant, la pensée s'encombre de doute, l'innocence bat en retraite, tout est examiné à la loupe, tout devient contestable, et l'on se sent contrarié d'avoir simplement aligné des mots.
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Notre maison me manqua soudain terriblement, ainsi que le jardin sur lequel donnait ma chambre. J’aime les soirées d’été qui durent des heures en revêtant différentes couleurs. Assis dehors, nous buvons du thé dans des verres oblongs, enserrés dans des porte-verres en argent qui m’apparaissent comme des objets de culte, vestiges de temps anciens.
Ces verres étincelants sont inséparables pour moi des mains de ma mère. Lorsqu’elle les saisit et se penche vers eux, j’ai l’impression qu’elle prie en silence. Je sais que c’est un mirage : maman ne prie pas en dehors de la maison de grand-père. Mais l’on n’y peut rien si, lors des longs soirs d’été, quand le jour pénètre profondément dans la nuit, mes parents sont plongés dans une contemplation attentive qui ressemble à une prière.
Autrefois, je dérangeais maman en lui posant des questions. J’ai appris l’an dernier à ne rien demander pendant ces heures sensibles. J’ai remarqué que lorsque mes parents tiennent l’anse en argent de ces verres à thé, ils perdent leur visage habituel.
Je pense : En ces heures où la lumière du jour et celle de la nuit se confondent, mes parents laissent derrière eux leurs habitudes, leurs gestes inquiets, et ils se relient non pas à leurs propres parents mais à leurs ancêtres, aidés dans cette prière muette par les verres à thé qu’ils tiennent dans leurs mains.
Passé minuit, ils les posent sur la table basse et reprennent leur visage habituel.
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Vidéo de Aharon Appelfeld
Dans Qui-vive, la narratrice, Mathilde, semble perdre pied dans un monde toujours plus violent et indéchiffrable. Perdant le sommeil, puis le sens du toucher, elle s'arrime à des bribes de lumière des feuillets retrouvés à la mort de son grand-père, une vidéo de Leonard Cohen à Jérusalem, les réflexions douces-amères de sa fille adolescente et décide subitement de partir en Israël pour tenter de rencontrer ce qui la hante. de Tel-Aviv à Capharnaüm puis à Jérusalem, ses rencontres avec des inconnus ne font qu'approfondir le mystère. Trajectoire d'une femme qui cherche à retrouver la foi, ce roman initiatique interroge avec délicatesse le sens d'une vie au sein d'un monde plongé dans le chaos.
À l'occasion de ce grand entretien, l'autrice reviendra sur son oeuvre d'écrivaine où l'enfance et la guerre tiennent une place particulière, ainsi que sur son travail de traductrice.
Valérie Zenatti est l'autrice d'une oeuvre adulte et jeunesse prolifique. Elle reçoit en 2015 le prix du Livre Inter pour son quatrième roman, Jacob, Jacob (L'Olivier, 2014), et le prix France Télévisions pour son essai Dans le faisceau des vivants (L'Olivier, 2019). Son premier roman adulte, En retard pour la guerre (L'Olivier, 2006) est adapté au cinéma par Alain Tasma et réédité en 2021. Elle est également la traductrice en France d'Aharon Appelfeld, décédé en 2018, dont elle a traduit plus d'une dizaine de livres.
Retrouvez notre dossier "Effractions le podcast" sur notre webmagazine Balises : https://balises.bpi.fr/dossier/effractions-le-podcast/ Retrouvez toute la programmation du festival sur le site d'Effractions : https://effractions.bpi.fr/
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