Je n'avais jamais rien lu de l'auteur, il semble à la tête de quelques titres classés thrillers, ayant reçu un certain succès d'un lectorat fidèle, édités par une maison connue.
En avant pour la découverte.
La 4 de couverture pose clairement l'intrigue, elle est efficace car précise, concise et prometteuse; au final honnête car centrant au mieux projet et résultat. Elle propose un pitch qui m'a attiré par son côté science-fictif. Je ne m'amuserai pas à en dire plus, la redite avec mes mots serait inutile. le récit grouille d'idées plus ou moins mis en relief, je réserverai la chronique à quelques commentaires sur certains aspects prégnants.
Naija aborde des sujets d'actualité brûlante avec les ingrédients de lendemains déjà scientifiquement presque accessibles pour peu qu'éthiquement et déontologiquement on s'abstienne de certaines précautions indispensables.
Le lecteur rencontrera, entre autres, au fil des pages, le listing étant loin d'être exhaustif:
_ des avancées nano technologiques visant l'éternelle jeunesse, via des bains de jouvence remplis de nano-robots que ne désavoueraient pas les fournisseurs de cosmétiques.
_des transplantations organiques clandestinement organisées utilisant des greffons volés sur des victimes non consentantes. L'éthique et la déontologie ne pèsent guère quand la balance "s'infléchie" vers qui peut payer. L'immortalité offerte à l'élite se profile.
_plus angoissant encore: les hybridations animales entre espèces jusqu'alors incompatibles, celles de l'animal vers l'homme et inversement, celles inter humaines. On est proche ici d'une SF mâtinée de fantastique. "L'ile du dr Moreau" pointe son nez. C'est ce qui m'a le plus effrayé.
_D'autres trouvailles étonnantes sont accessibles et expliquent pourquoi deux autres tomes sont à l'oeuvre derrière celui inaugural: "Jurong Island" et "Cerro Rico".
Le possible politique s'ajoute aux possibles scientifiques. le terrain de jeu du roman est l'Afrique: celle noire et pauvre du Nigéria (Naija) où la clandestinité de certaines dérives peut s'implanter sans risques; celle riche et souvent blanche, claquemurée dans quelques îlots édéniques protecteurs, places fortes de multinationales plus riches que des nations entières.
Le concept de ces dernières, il y a peu conçues comme unités géopolitiques, s'efface pendant que naissent des Cercles d'influence économique omniprésents. le patriotisme sera commercial et prêtera allégeance à des marques. J'avais déjà rencontré l'idée dans "Dragon déchu" de Peter F. Hamilton.
Il y a quelques temps, quelques mois à peine, je me suis plongé avec intérêt et étonnement dans un article Web argumenté orienté science-fiction. Je n'en retrouve plus trace mais basta, l'essentiel me reste en mémoire. Il exploitait un fait étonnant liant les avancées scientifiques en cours aux talents visionnaires des auteurs de science-fiction. Il s'avère en effet, de nos jours, que l'écart de temps entre certaines visions littéraires anticipatrices et la concrétisation parmi elles des idées utilisables tend à se réduire peu à peu. En conséquence certains récits usant de possibles à très court terme se voit rattraper par les faits et retournent dans le réel. En gros la science courre après la SF à court terme, lui colle au train, s'en rapproche de plus en plus, phagocyte ce qu'elle atteint et ne lâche pas sa proie. le territoire imaginaire devient peau de chagrin, perd des lambeaux squattés par des possibles devenus réalités. Certains entrevoient même ainsi la mort du genre, mais c'est une bien autre histoire qui alimente les threads dans les forums spécialisés.
Une des facettes de la SF est d'imaginer ce qui va peupler nos futurs à l'aide de possibles scientifiques, l'aspect anticipatif s'efface quand les avancées du réel abordent les rivages imaginés. C'est ce qui arrive à Naija, c'est de la SF qui ne veut/ne peut pas dire son nom tant ce qui la peuple est presque d'actualité. L'édition, de nos jours, semble favorable à noyer le genre sous l'étiquette généraliste de la littérature blanche au point de rendre neutres ses illustrations de couverture. Perso, j'y perds mes petits... et Naija aurait pu m'échapper si un concours de circonstances...
La SF proposée par l'auteur, à côté de son côté thriller perceptible et justifié, peut plaire à ceux qui pensent la détester car elle est presque déjà réalité. Thierry Berlanda manie des concepts proches du cyber-punk appliqué à la biologie (oserai-je parler de bio-punk si le terme n'est pas déjà utilisé ?).
L'auteur semble fasciné par ce qu'il entrevoie, semble nous dire qu'il va nous falloir nous y faire et qu'après tout ce n'est pas si mal tant il y a de promesses bienfaitrices là-dessous. Il parle de morale inversée et deux phrases tirées de la 4 de couverture pose toute la problématique du sujet: "Confrontés à ce « nouveau monde », à la fois repoussant et plein d'attraits, quel sera leur choix ? le combattront-ils à tout prix ou se laisseront-ils séduire ?"
Il me reste deux tomes, la trilogie prévue est sur les rayonnages des libraires, je possède les trois tomes, les deux derniers m'attendent. Je vais prendre du recul, passer un temps à autre chose, la masse totale pèse son poids de pages et d'idées, il faut du temps et du calme à y consacrer. J'y reviendrai sans crainte de perdre le fil, l'auteur signalant que les tomes sont relativement indépendants et peuvent être lus dans un ordre quelconque.
Merci à qui se reconnaitra. Tu avais raison: çà peut me plaire..!
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