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EAN : 9782847207163
588 pages
Gaïa (07/09/2016)
4.39/5   321 notes
Résumé :
1982. Rasmus vient d'avoir son bac et quitte enfin sa campagne, le Värmland, pour Stockholm où il va pouvoir être lui-même et ne plus se faire traiter de pédé mais l'être vraiment.
Benjamin vit selon les préceptes religieux et le prosélytisme inculqués par ses parents, Témoins de Jéhovah. Sa conviction vacille le jour où Paul, qu'il est venu démarcher, l'accueille avec simplicité et bienveillance, et lui lance "Tu le sais, au moins, que tu es homosexuel ?" <... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (77) Voir plus Ajouter une critique
4,39

sur 321 notes
Livre découpé en trois grandes parties : L'amour, La maladie, et La mort.
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Ce n'est pas tout à fait un roman, puisque tout ce qui est raconté dans cette histoire s'est réellement passé, là, à Stockholm et les gens ont existé ou existent encore.
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Ce fut aussi la réalité dans beaucoup d'autres lieux, à la même époque.
Mais surtout, ça se perpétue encore aujourd'hui.
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Le livre s'ouvre sur un lit d'hôpital, dans une chambre du service d'isolement où le soleil ne pénètre jamais; les fenêtres étant condamnées.
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Sur ce lit, un homme décharné, à bout de souffrance, dont les jours sont comptés. Il est seul, toujours seul.
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Par un sas, une infirmière et une aide-soignante affectées aux soins du malade pénètrent dans la pièce. Celui-ci transpire, pleure, mais ne parle pas.
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Il est jeune, à peine un peu plus de vingt ans, mais il va mourir. La plus jeune des soignantes retire ses gants par inadvertance, et avant de sortir, du dos de la main, essuie les larmes du jeune homme.
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L'infirmière la tance vertement : "N'essuie jamais de larmes sans gants !"
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Nous naviguons sans cesse entre passé et présent. le présent des années 80 en Suède, en compagnie de Rasmus et Benjamin.
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Leur enfance, leurs années collège / lycée et leur âge adulte s'entremêlent dans ce récit avec une aisance et une fluidité remarquables.
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Ils sont très différents.
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Rasmus est le fils unique d'un couple vivant dans un petit village, Koppom.
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Ses parents l'adorent, mais ses camarades de classe et copains d'enfance le rejettent. Malmené, frappé, moqué, injurié, il ne rêve que du jour où il pourra enfin rejoindre la capitale.
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Benjamin a une petite soeur, Margareta. Leurs parents, témoins de Jéhovah, ne vivent, ne pensent, ne respirent que pour leur sacerdoce. Ils habitent Stockholm et l'enfant grandit en répandant la bonne parole de foyer en foyer.
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Les deux garçons vont se rencontrer et victimes d'un coup de foudre, ne se quitteront plus.
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C'est leur vie que l'auteur va nous raconter, ainsi que celle de leur entourage, leur famille et leur groupe d'amis : Reine, Paul, Lars-Ake, Bengt et Seppo, que Benjamin et Rasmus ont connus lors d'une soirée de réveillon donnée chez Paul.
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Alors que la Suède, ainsi que beaucoup d'autres pays, vient de dépénaliser l'homosexualité, en 1978, une terrible maladie frappe la communauté de plein fouet. le SIDA.
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Et très vite, c'est l'hécatombe.
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L'auteur ne s'embarrasse pas de fioritures. Alors que l'enfance et l'adolescence des protagonistes est dépeinte avec douceur, leur entrée à l'âge adulte est décrite avec un vocabulaire très cru, dur.
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J'ai découvert son style avec ce livre, et j'ai adoré.
Mais au-delà du style, "l'histoire" est prenante.
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Ce livre se déguste. J'ai mis près d'une semaine à le lire, non par ennui mais parce que chaque mot, chaque phrase, a son importance.
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Et on est frappé de plein fouet, d'uppercut en uppercut. On sourit parfois parce que l'humour perce de temps en temps, on espère... mais la plupart du temps, on souffre avec les protagonistes.
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Personnellement, j'ai aussi éprouvé beaucoup de colère envers les parents, mais ne je vais pas vous narrer toute l'histoire.
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Jonas Gardell parle de ce qu'il connaît, fruit de ses recherches, rien n'est laissé au hasard et le récit est entrecoupé d'explications sur l'évolution des mentalités (si l'on peut dire) et surtout sur les découvertes successives liées à la maladie.
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Bref, je ne vais pas me sortir de ce retour, il y aurait tant à dire.
Un livre que je place tout en haut de mes lectures "coups de coeur".
On ne s'ennuie pas une seconde tout au long de ces 800 pages.
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Le mot de la fin, leitmotiv de l'un des personnages :
"Je veux dans ma vie pouvoir aimer quelqu'un qui m'aime."
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J'avais repéré ce livre par son titre horriblement beau et sa couverture envoûtante. Il m'attirait avec une sorte de fascination mêlée d'angoisse. Et pourtant, sincèrement, j'ai cru que je n'arriverais jamais à la fin de ce roman. Non pas parce qu'il m'a déplu, au contraire – ce roman est une pépite – mais parce que Jonas Gardell écrit avec un art strident et ne nous ménage pas. Parce qu'il nous fait connaître d'étonnants et merveilleux garçons tout en nous jetant à la figure que leurs sourires ne résisteront pas, que l'espoir se fane vite à Stockholm et que la nuit va bientôt s'affaisser sur eux.
Dès la toute première scène, on est plongé dans l'impuissance : un jeune homme est allongé sur un lit d'hôpital, émacié, agonisant, pleurant, lorsqu'une infirmière – dont le geste me bouleverse encore à l'instant où j'écris – essuie ces larmes sans avoir pris le temps de réenfiler ses gants. le ton est posé : cette lecture sera magnifique mais épouvantable, fusion d'horreur et de beauté.
Le livre se découpe en 3 chapitres : l'amour, la maladie et la mort. Et l'on suit Rasmus et Benjamin dans les rues de Stockholm, étudiant pour l'un, Témoin de Jéhovah pour l'autre, qui laissent leur enfance sur le sol pour mieux découvrir qui ils sont. J'ai été bouleversée par ces deux garçons. Je les ai aimés et suivis dans leur lent et beau cheminement, dans leurs doutes, leurs peurs, leur grâce.
Les allers-retours entre passé et présent rythment les pages et mêlent les Benjamin et Rasmus enfants, adolescents, au réel de 1989. Cette alternance vie-mort est perturbante mais n'en est pas moins bouleversante. Et puis dès la deuxième partie on suit également les souffrances des autres garçons du groupe : Paul, Reine, Lars-Ake, Bengt, Seppo. On les voit s'étioler, suppurer, désespérer et prier. Et le pire, c'est qu'on ne peut strictement rien / faire / pour / eux.
La plume de l'auteur m'a séduite, à la fois brute et poétique, crue sans basculer dans la vulgarité, émouvante, délicate et sincère. Comme si elle effleurait les personnages, comme si elle les berçait, tentant de les apaiser et de les soutenir en attendant le moment fatal de la chute. Heureusement que le livre comporte de nombreuses notes d'humour qui nous permettent de respirer un peu à travers tous ces drames. Et on se surprend à sourire, à rire parfois, sans que jamais ces instants plus « légers » n'entachent la beauté dramatique du livre.
Autre particularité du roman : entre les chapitres réservés aux personnages, l'auteur nous plonge dans le Stockholm des premières « années sida » et nous éclaire sur le contexte de l'époque grâce à un travail de recherche d'une précision hallucinante. C'est effrayant à lire, révoltant, écoeurant. Mais comme nous l'avoue l'auteur à plusieurs reprises : « ce qui est raconté dans cette histoire s'est réellement passé. » Tout ce monde qui évolue autour des homosexuels est scruté au peigne fin, que ce soit le Stockholmois lambda ou la famille même du personnage en question. Et on endure leurs réactions, opinions, peurs, colères ou incompréhensions. C'est parfois un véritable procès monté autour de celui qui a eu « le malheur » de se découvrir homosexuel. Et on a le coeur qui se tord. Et on a envie de hurler.
Dans les années 80, on ne donne pas deux ans d'espérance de vie aux malades, et c'est là que je réalise l'avancée considérable que représentent les traitements d'aujourd'hui, même si la partie n'est pas encore gagnée. La maladie (le virus HTLV-3 qui deviendra plus tard le VIH) y est décrite sans concessions et quelle horreur de les voir souffrir à ce point, saigner de partout, corps brisés, squelettes trop jeunes pour ce combat, réduits tout entiers à une gigantesque plaie : « mourir du sida n'est pas une belle mort ; c'est mourir vieilli avant l'heure, c'est une mort longue et laide, dans la solitude et la douleur. » Il y tant de souffrance dans ce livre, tant d'injustice et de chagrin. Chaque page saigne, transpire, inspire puis s'étouffe, rêve puis désespère, crache, gémit, pleure, gueule vers ce ciel impassible et indifférent.
Alors même si cette lecture a été l'une des plus belles et des plus éprouvantes de l'année 2016, il m'est douloureux de quitter ces hommes avec qui j'ai passé autant d'heures, de jours, de lecture. Je m'excuse pour la longueur de cette critique alors que j'aurais encore pu en écrire 7 pages. Qu'est-ce que c'est fort, atroce et beau. Qu'est-ce que c'est puissant et sublime. Je crois que c'est un livre que tout le monde devrait lire parce que c'est une sacrée claque dans la gueule. Parce que personne ne pensera ni ne crachera jamais plus « sale pédé » ou « sale gouine » après avoir lu ça. C'est impossible. Ce livre est au-delà de l'ouverture à la tolérance, c'est un hymne à l'amour vrai. Un très, très grand roman dont on ne ressort pas indemne. Inoubliable. Cruel. Mais tellement rare dans la littérature, tellement précieux sur le chemin d'une vie… Un roman génial composé par un auteur virtuose pour lequel je ne peux que répéter : lisez-le d'urgence, ce roman peut changer votre vie. J'ai tellement pleuré que mes mains tremblent en tapant ces lignes. Me reviennent alors comme un chant les paroles de Benjamin, tellement pures, tellement déchirantes, qui ne demandent rien de plus que ce qu'elles avouent : « je veux dans ma vie pouvoir aimer quelqu'un qui m'aime. »
Merci Monsieur Gardell.
Un grand merci à Babelio et aux éditions Gaïa pour ce roman essentiel.
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Ce livre n'est pas de ceux qu'on dévore, il est de ceux qu'on lit lentement le souffle court, la gorge serrée. Malgré ses 800 pages et des poussières on prend le temps de savourer chaque mot parce qu'il n'y a rien d'inutile dans ce récit. La moindre anecdote, le moindre souvenir a un intérêt pour l'ensemble et si certains passages reviennent comme un refrain, c'est parce que à la lueur de ce qui a été dit entre temps, le sens des mots s'éclaire. C'est comme si l'auteur avait pesé chaque mot et s'était débarrassé de tout le superflu. Mais attention l'écriture est brutale, crue bien que poétique, elle prend aux tripes, coupe le souffle. C'est comme un cri de colère, qui mêle rage et tristesse et ne peut être contenu. En lisant j'ai grimacé, retenu ma respiration senti la colère et l'indignation m'envahir et les larmes me monter aux yeux.
L'auteur étouffe immanquablement dans l'oeuf chaque lueur d'espoir, aucune surprise de ce côté là. Il est implacable il n'y a pas d'issue possible il veut nous obliger à voir la vérité crue, sans fard,sans fioriture. Parce qu'à l'époque dont il nous parle et dans le contexte qu'il évoque il n'y avait aucun échappatoire, pourquoi en serait-il autrement pour le lecteur? Pourtant il y a des moments drôles d'autres touchants, tendres mais impossible d'oublier la mort qui rôde.

L'écriture est totalement maîtrisée malgré la violence des sentiments. Passé, présent et futur s'entremêlent et on navigue ainsi dans la vie des différents personnages sans que jamais le lecteur ne s'y perde. L'auteur n'a pas fait de ses personnages des héros drapés dans leur dignité, ce sont juste des hommes; certains exubérants d'autres introvertis, parfois odieux, parfois magnanimes, en colère... je les ai tous apprécié tant ils paraissent vivants. Il me paraît d'ailleurs probable que l'auteur se soit inspiré de personnes réelles. Impossible de les oublier. La dernière page tournée ils me manquent déjà. L'histoire de chacun des personnage est touchante: Benjamin, Paul, Rasmus, Bergt, Lars Ake, Seppo, ... mais c'est celle de Reine qui m'a le plus ému.

En plus d'être magnifique ce récit est une source d'informations impressionnante. le travail de recherche est titanesque: sur l'épidémie du SIDA bien entendu (traitement, évolution de la maladie, historique de son apparition, soins dans les hôpitaux, comportement du personnel soignant...) mais aussi sur les témoins de Jéhovah, sur la vie quotidienne de l'époque, dans les villes, les campagnes et sur les mentalités. L'auteur a fait un travail remarquable à tel point que son livre en devient presque un documentaire. J'ai appris beaucoup de choses.

C'est choquant de se dire que quand le SIDA ne concernait que les homosexuels et les drogués personne ne s'en est vraiment préoccupé. Il aura fallu que toute une génération de gamins soit sacrifiée et que l'épidémie touche tout le monde y compris «les braves gens» pour qu'il se passe quelque chose. Si les recherches avaient été lancées plus tôt certains seraient encore en vie. Mais ce qui m'a le plus révolté ce sont les humiliations imposées aux malades: si le SIDA leur a volé leur vie, la société leur a volé leur dignité. Ils ont du lutter contre la maladie mais aussi contre l'exclusion, la solitude, le rejet, la honte.
Le livre de Jonas Gardell leur rend un très bel hommage plein de panache et de dignité. Il mérite vraiment d'être lu.
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Plus d'un an maintenant qu'on m'a expliqué que dans cet hôpital suédois des années 80 (un parmi des centaines), on n'essuie jamais de larmes sans gants (à compter qu'on s'inquiète de les essuyer ces larmes amères parce qu'en fait, au mieux on s'en fout, au pire, on est rebuté), plus d'un an donc et j'y repense encore régulièrement, et toujours avec la même émotion. Une histoire, un livre, un auteur qui remuent.

Décor : Stockholm, début 80. La Suède, comme beaucoup d'autres pays, vient de dépénaliser l'homosexualité. En clair, légalement les lesbiennes et les gays ne sont plus considérés comme de dangereux délinquants, des monstruosités à interner au plus vite. Une belle avancée, non ? Sauf que dans les faits, rien ne change vraiment : l'homosexuel.le continue à devoir se cacher, à être harcelé.e, rejeté.e, bref à être un peu moins humain.e que les autres, les normaux, les hétérosexuels (blancs... en option). En plus, faut pas trop en attendre d'une éventuelle protection légiférée, on vient déjà de charitablement dépénaliser leur déviance, qu'est-ce qu'il leur faut de plus ?
Mais revenons au sujet, qui dit années 80 et homosexualité dit aussi tristement : apparition du sida. Et en Suède comme ailleurs, cette maladie qui arrive de nulle part, qui semble ne toucher que la communauté gay et ce, tout de suite après s'être vu octroyer le droit de vivre presque normalement... Ah, ah, même dans un mauvais film de Uwe Boll (pléonasme spotted) un truc pareil, on oserait pas. Et c'est là que les ravages commencent et que d'anormaux qu'on évite de côtoyer, on passe à pestiférés qu'il faut enfermer (et re !), ne pas toucher, pratiquement ne pas soigner... ne pas regarder non plus, on sait jamais, mais surtout, surtout, les isoler de la population saine, conforme et rationnelle.

Voilà ce que Jonas Gardell nous raconte, nous hurle, à travers le microcosme d'un groupe d'amis/amants hétéroclites. Mais sous la fiction c'est bien d'un document dont il s'agit, sérieux, fouillé, détaillé, le témoignage d'une époque sur une société qui d'un côté ne croit pas à la mort imminente venue d'une menace inconnue et de l'autre, la lenteur voire l'absence de mise en place de la moindre urgence sanitaire (quelle urgence ? Un tsunami qui emporte les folles n'est pas une urgence, c'est un miracle... pfff, faut toujours qu'on confonde tout)

C'est cru, c'est dur, ça fait vraiment mal au coeur et ça pique souvent au bout des cils mais quel livre ! Quelle ode aux amis disparus ! La colère légitime souvent palpable de Jonas Gardell nous rappelle celle des Cleews Vellay (une pensée) Christophe Martet, René Paul Leraton (une deuxième pensée) et autres Didier Lestrade, bref tous ces gens qui ont oeuvré du mieux qu'ils pouvaient durant ces heures noires et grâce à qui, encore aujourd'hui, on n'oublie pas.
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N'essuie jamais de larmes sans gants est un roman fort et empreint d'une émotion brute comme on peut en croiser rarement. Inspirée d'une vérité historique que beaucoup ont oubliée. Rien que l'explication du titre fout le frisson.

N'essuie jamais de larmes sans gants se penche sur l'histoire d'amour entre Ramus, jeune adulte qui vient de quitter sa campagne pour Stockholm pour pouvoir enfin s'assumer et vivre pleinement son homosexualité, et Benjamin, issue d'une famille témoin de Jénovah. En plein dans les années 80, le roman nous immerge totalement dans le milieu homosexuel norvégien. On y découvre la difficulté d'être homosexuels pendant cette époque due au regard de la société mais également avec l'arrivée du sida, la peste du XXe siècle. le roman est fort émotionnellement et il est difficile de rester de marbre face à ses personnages. le roman n'est pas que triste. En effet, on découvre des personnages qui s'assument, qui aime, qui vivent leur sexualité comme ils l'entendent et qui, surtout, savent s'entraider. On s'attache rapidement aux personnages, nos deux protagonistes mais également les autres qui ont également une intrigue propre et trouveront facilement leur voix dans ce roman. Difficile d'oublier des personnages aussi complexes que Ramus, Benjamin, Paul ou encore Reine et encore plus quand on les voit dépérir à petit feu. Des personnages pleins de fêlures, de défauts, mais qui n'ont qu'une envie : offrir l'amour dont ils débordent.

En plus de nous bouleverser et de nous marquer à vif par des passages forts et scandaleux, Jonas Gardell nous propose un ouvrage au travail documentaire époustouflant. le travail de recherche est indéniable et l'auteur nous offre un véritable documentaire sur le quotidien des homosexuels dans les années 80 et sur le sida. On y découvre également le quotidien des norvégiens dans sa globalité, la différence de vie entre la campagne et la ville avec le personnage de Rasmus ou encore sur les témoins de Jénovah avec Benjamin. N'essuie jamais de larmes sans gants est une lecture enrichissante en de nombreux points.

N'essuie jamais de larmes sans gants est une excellente surprise pour moi. Roman bouleversant et enrichissant, ma critique est loin de décrire la qualité de ce roman. Donc plus d'excuses, lancez-vous, vous ne serez pas déçus et vous n'oublierez jamais l'histoire de Benjamin et de Ramus et des autres « pédés »!
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critiques presse (4)
Chatelaine
06 août 2018
L’auteur fait se côtoyer la beauté et l’horreur dans un style magnifique. Ce roman est aussi très bien documenté, on y parle entre autres de la lutte pour les droits des gais, de l’épidémie du sida et de l’inertie des gouvernements face à ce fléau, sans que cela nuise au récit. Une œuvre essentielle pour la mémoire collective.
Lire la critique sur le site : Chatelaine
LeJournaldeQuebec
19 juin 2018
Tout ce qu’on peut lire dans N’essuie jamais de larmes sans gants est donc vrai, Jonas Gardell ayant passé près de 10 ans à faire des recherches pour décrire les horreurs vécues par les séropositifs de l’époque.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Actualitte
03 novembre 2016
Incontournable et tellement utile. Exceptionnel, à bien des égards, il livre au lecteur beaucoup plus qu’un plaisir romanesque.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Telerama
19 octobre 2016
Tombeau littéraire dédié aux amis disparus, ce roman bouleversant est d'abord un extraordinaire témoignage de vie.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (103) Voir plus Ajouter une citation
Raconter est une sorte de devoir.
Une manière d'honorer, de pleurer, de se souvenir.
Une manière de mener la lutte de la mémoire contre l'oubli.
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Et le deuil s’impose à eux. Le deuil est une nouvelle réalité qui les oblige à se positionner par rapport à lui, à trouver une manière de l’intégrer dans leur vie. Le deuil n’est pas un rhume ou une infection qu’on affronte et qu’on surmonte pour en être enfin débarrassé.
Benjamin en fait lui-même l’expérience. Un an environ après la mort de Rasmus, il croise une vague connaissance à la pharmacie. Il a du mal à situer l’homme, une grande folle – mais d’où est-ce qu’il le connaît ? Il réussit malgré tout à formuler un « salut », puis à demander : « Ça va ? » Le visage radieux, l’autre répond le plus naturellement du monde, comme s’ils se fréquentaient depuis des lustres : « Tiens, salut ! », puis : « Ça va très bien, merci ! »
Benjamin est sur le point d’ajouter quelques mots sur la pluie qui tombe à verse, quand l’autre paraît soudain hésiter, à croire que quelque chose lui est revenu à l’esprit et qu’il doit apporter une légère rectification : « Non, en fait ça ne va pas si bien que ça. Mon mari est mort samedi dernier. Je l’aimais tellement. »
Les mots tombent, lourds, nets. Un bref instant, tout s’arrête, avant que la pluie ne se remette à ruisseler sur la vitrine. Entre-temps la file d’attente s’est résorbée, c’est au tour de Benjamin de payer, il tend ses achats au pharmacien.
En ce lundi, vers midi, le pharmacien, Benjamin, les autres clients, tout le monde entend les mots de cet homme tout à coup esseulé, transformé en ombre. Le deuil et l’exclusion déferlent sur lui telle une vague de solitude.
« Mon mari est mort samedi dernier. Je l’aimais tellement. »
Un bref. Instant, peut-être à cause de ce saut qu’il a dû faire à la pharmacie (quoi de plus banal ?), cet homme s’est senti complétement normal, pris dans le train-train quotidien. Puis ça lui est revenu, d’un seul coup il s’est souvenu. Qu’en fait, non, ça ne va pas bien du tout. Qu’au contraire c’est épouvantable, que son monde vient de s’écrouler, que tout est brisé, qu’il ne reste qu’une réalité irréelle, un après effroyable où plus rien ne pourra aller bien puisque tout a été brisé.
Parfois, ce n’est pas une question de vie. C’est une question de survie. Il s’agit de survivre à cet instant, puis au suivant, puis à un autre, puis à un autre encore. Il s’agit de passer au travers, de continuer à respirer, une respiration à la fois. Ça ne change peut-être pas grand-chose sur le moment, mais à la longue ça peut s’améliorer.
Benjamin est bien placé pour le savoir. Il s’est trouvé dans la même situation, il s’y trouve encore. Mais ça ne sera pas toujours comme maintenant car maintenant est épouvantable et ça ne doit surtout pas l’être pour toujours ; c’est épouvantable et c’est comme ça, et tant pis s’il est impossible de croire autre chose en ce moment.
Ça ne doit surtout pas l’être pour toujours : épouvantable.
Benjamin passe son après-midi à penser à l’autre. À penser qu’ils sont deux jeunes hommes partageant la même expérience. À penser que votre vie peut se briser et pourtant vous continuez à aller faire des emplettes à la pharmacie, vous mettez un short et un tee-shirt parce que c’est l’été, vous saluez des amis, vous dites « merci », vous dites « ça va », bien que votre monde se soit brisé et qu’il ne puisse jamais être reconstruit.
p.808-809
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Le deuil qui vous marque de son sceau devient une partie intégrante de votre personne. Et puisque le deuil est une marée, il n'est donc pas rare qu'il remonte et vous submerge avec une force époustouflante, alors que vous aviez le sentiment que tant de temps s'est écoulé, que les années ont succédé aux années. Mais puisque le deuil est une marée, il n'est pas rare non plus qu'il se retire, vous découvrez à ce moment-là que vous avez les pieds au sec et que vous devriez peut-être vous étirer les jambes et aller faire une promenade.
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- A ce qu'on m'a raconté, ces élans sont blancs à cause d'une disposition génétique. Ils ne sont pas albinos mais bêtement différents. Dans cette région du Värmland, il en existe toute une lignée. Autrefois on leur attribuait des pouvoirs magiques, paraît-il qu'en tuer un portait malheur.
- Qui voudrait tuer un aussi bel animal ? s'exclame maman incrédule.
- Beaucoup de gens. Des gens qui trouvent qu'il n'a rien à faire chez nous , que son existence est une aberration de la nature. Qu'il est dégénéré si tu vas par là.
- Pourtant il existe proteste Rasmus.
- Certes, mais... Oui, non, enfin si, soupire papa. Il existe, ça on ne peut pas lui enlever.
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La plupart du temps ils l'ont surtout traité de sale pédé.
Ils n'avaient pas tord. Ils le savaient avant lui.
Sale pédé.
C'est exactement ce qu'il est.
Mais un sale pédé qui leur a échappé. Il les a tous plantés là. Ils n'existent plus. Ils ont définitivement cessé d'exister. Comme quelque chose dont on se débarrasse en se secouant et qu'on abandonne.
Avec à la fois un haussement d'épaule et un frisson.
Avec dans la bouche un arrière-goût amer de cendre et de bile.
Avec des santiags en daim rouge aux talons biseautés qui claquent contre le marbre dans le grand hall de la gare centrale, avec un mince gilet arlequin sur son corps chétif.
Avec un coeur qui cogne comme après la dose de nicotine envoyée par la première cigarette du matin.
Et on ne se retourne pas ! On ne se retourne surtout pas.
Parce qu'on leur a échappé. On a échappé à ce Koppom de merde et ce collège de merde et ce lycée de merde et cet Erik de merde et ce Conny de merde et ce Henning de merde et à tout ce Värmland puant et dégoulinant de merde. Ils ne peuvent plus l'atteindre.
Il remodèle la honte. Il va en faire une identité et une fierté.
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Vidéo de Jonas Gardell
Le mouvement #MeToo a érigé le consentement en notion de premier plan. Doit-on pour autant considérer ce concept comme le sésame absolu de l'égalité entre les femmes et les hommes ? C'est ce que nous allons essayer de comprendre dans cet épisode. Pour nous guider dans cette réflexion, nous recevons la philosophe Manon Garcia, dont le deuxième essai La Conversation des sexes vient de paraître chez Flammarion. Nous ferons ensuite la connaissance de la Brestoise Marine Bruneau. Elle a créé un cabinet de conseil et de formation autour des questions d'égalité, Égaluce, dont elle nous parlera plus en détails. Et nous terminerons cet épisode avec la bibliographie de notre libraire Catherine.
Bibliographie : - La Conversation des sexes de Manon Garcia (éd. Flammarion) https://www.librairiedialogues.fr/livre/19792514-la-conversation-ds-sexes-philosophie-du-consen--manon-garcia-climats
- On ne naît pas soumise, on le devient, de Manon Garcia (éd. Flammarion) https://www.librairiedialogues.fr/livre/14416278-on-ne-nait-pas-soumise-on-le-devient--manon-garcia-flammarion
- Julian est une sirène, de Jessica Love (éd. Pastel) https://www.librairiedialogues.fr/livre/16334832-julian-est-une-sirene-jessica-love-ecole-des-loisirs
- le Bleu est une couleur chaude, de Julie Maroh (éd. Glénat) https://www.librairiedialogues.fr/livre/4624393-le-bleu-est-une-couleur-chaude-jul-maroh-glenat-bd
- La Mère d'Eva, de Sylvia Ferreri (éd. Pocket) https://www.librairiedialogues.fr/livre/18781878-la-mere-d-eva-silvia-ferreri-pocket
- N'essuie jamais de larmes sans gants, de Jonas Gardell (éd. Gaïa) https://www.librairiedialogues.fr/livre/13627647-n-essuie-jamais-de-larmes-sans-gants-jonas-gardell-gaia
- Les Corps abstinents, d'Emmanuelle Richard (éd. Flammarion) https://www.librairiedialogues.fr/livre/16170929-les-corps-abstinents-j-ai-discute-avec-celle--emmanuelle-richard-flammarion
- le Coeur sur la table, de Victoire Tuaillon (éd. Binge Audio) https://www.librairiedialogues.fr/livre/19675600-le-cur-sur-la-table-pour-une-revolution-roman--victoire-tuaillon-binge-audio
- La Fille qu'on appelle, de Tanguy Viel (éd. de Minuit) https://www.librairiedialogues.fr/livre/18932927-la-fille-qu-on-appelle-tanguy-viel-les-editions-de-minuit
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