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EAN : 9782918597384
140 pages
Les liens qui libèrent (04/01/2012)
2/5   1 notes
Résumé :
J’ai aimé la France le jour où ma préceptrice arménienne a commencé à m’apprendre les premiers mots d’une langue, le français, dont la musicalité allait me marquer à jamais. La France, hélas, n’est plus le pays de l’art et de la musique, ni celui de la liberté, de l’égalité, de la fraternité et des droits de l’homme. Quelle tristesse que ces valeurs ne soient plus bonnes qu’à être gravées sur le fronton des mairies et à être martelées dans les ouvrages d’histoire !<... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Étrange et paradoxale régression à une époque d'identités multiples

Le prologue de l'ouvrage est autobiographique, l'auteure nous parle de son inscription dans le passé, dans les sujets qu'elle va développer. Puissent tou-te-s les auteur-e-s en faire autant. « Mes rêves nocturnes eux-mêmes ressemblent à ces dîners avec mes amis d'enfance, à ces soirées en famille où chacun s'exprime dans sa langue, entrecoupée de mots des langues des autres convives, et où l'on répond rarement à une question dans la langue où elle a été posée » ou « Je n'aime ni les frontières ni les barrières : elle me font peur. J'ai toujours l'impression qu'on me demandera de présenter un passeport et qu'il ne sera pas valide. Une peur typique d'immigrée. Dès que j'entrevois un policier, j'ai par avance l'impression d'avoir commis une faute qui me vaudra d'être renvoyée du pays où je séjourne… »

Le livre est divisé en trois grandes parties :

« Identité nationale, mythe ancien, nouvelle marotte »

« L'immigré, nouvel ennemi de l'intérieur »

« Des barbares à domicile ». Je ne peux m'empêcher de penser à un vrai « barbare » DSK, cet immigré, que personne n'a reconnu comme tel, à New-York et au moins à son réel « mépris des femmes » ; mais il était riche, puissant et blanc et directeur d'un organisme imposant les plans d'ajustement structurel (PAS), l'endettement, la privatisation des biens communs, la faim et la souffrance dans le monde…

Mythe de l'identité nationale, construction moderne, mais irriguée de mille fantasmes et aux effets très réels, « La terre, le sang et les morts sont ce trio mythique qui hante encre les nationalistes de tous poils ». Être né-e par hasard, en un endroit, donnerait des droits extra-ordinaires par rapport à celles/ceux né-e-s ailleurs !

Mieux encore, être né-e sur le « sol national » mais de parents né-e-s ailleurs, conférerait un manteau de doute permanent sur son « être national » !

Il y aurait donc des français-e-s et des « français-e-s exogènes » !

La nationalité se mériterait par assimilation, non pas une fois par acte, mais assimilation en permanence, à renouveler, à prouver, à justifier. D'ailleurs assimilation à quoi, à qui ?

L'État français n'aime pas la binationalité, source de « loyauté » multiple, et plus exactement de « déloyauté » permanente. Dans la pochette surprise de l'assimilation, de la nationalité, une seule « loyauté », sauf bien entendu pour les possédants et leurs paradis fiscaux, les ex-nobles et leur sang bleu inassimilable à celui des communs, etc.

Une identité, un pays, un drapeau et une armée. Ah oui, j'oubliais : des conquêtes territoriales et coloniales, et le regret éternel dans avoir été chassé par d'autres, à la nationalité moins mythique, moins historique, secondaire, voire inventée !

Un pays, un drapeau, une famille, une couleur sans couleur, un sexe, un couple forcément hétérosexuel, une église forcément catholique, à la limite protestante, etc…

Donc la nation, mise en frontières et celles et ceux qui viennent d'ailleurs : les immigré-e-s. Leurs enfants, né-e-s sur le sol français, seront aussi des immigré-e-s, par la magie d'une force « essentielle » (francité d'origine contrôlée, souche tricolore, destinée non partageable, marqueurs exclusifs, identité homogène). Mais à l'intérieur des frontières, elles et ils deviennent des ennemi-e-s de l'intérieur, une menace permanente pour la sécurité ! Les voleurs en col blanc, les patrons voyous, les exploiteurs en toute légalité, les évadés fiscaux, les vendeurs d'armes, les soutiens aux dictateurs, les armées envahissantes, les capitaux transfrontaliers, les délocalisateurs, les proxénètes des traites humaines, les voyageurs sexuels, les négationistes des crimes coloniaux, les violeurs, les violents quotidiens dans la famille, (chacun-e pourra ajouter une pierre à cette liste toujours incomplète), etc…, ne sont pas une menace pour la sécurité intérieure !

Je m'éloigne de la lettre, mais non des analyses, de l'auteure, peut-être pas, l'errance aussi comme pensée !

J'en reviens à son texte : « tant qu'une politique claire ne sera pas conduite, visant à ce que la société dans son ensemble intègre sans réserve et sans conditions les descendants des immigrés, qu'elle les considère et les traites simplement comme des égaux… » Oui, sans réserve et sans conditions.

Être intégré-e permet de garder son intégrité, s'assimiler c'est perdre un peu/beaucoup de soi, de son histoire, de ses liens, des ses cultures, de ses identités plurielles.

Et puis, est-ce une avancée (vers où ?) de s'assimiler à une « Nation qui s'habitue à son mal de vivre à coup d'anxiolytiques, d'antidépresseurs, de somnifères, battant tous les records en la matière » !

Ah, j'allais oublier l'universalisme, cette drogue dure de la mythologie française. « L'universalisme comme le mérite d'ailleurs, ne sert qu'à ceux qui en ont les moyens d'en profiter, pas autres ».

Et pour finir, sans avoir abordé tous les sujets traités par l'auteure, mécréant, né par hasard sur ce territoire, je pense comme Esther Benbassa, qu'a minima l'Aîd el-Kebir et Kippour devraient être jours fériés dans toutes les écoles, et tant pis si cela ne plaît pas aux grenouilles de bénitiers et aux laicards.

Par ailleurs, malgré une approche plus que sympathique, je pense que l'auteure sous-estime le caractère systémique de la racialisation. Lorsque des groupes sont racialisés, cela induit une universalisation du « neutre » des autres. Ainsi, des femmes et des hommes sont déclaré-e-s de couleur, universalisant le « neutre » de la couleur blanche, acceptée de fait comme la référence non questionnée. Comme le dis si bien, Rokhaya Diallo : « La plupart des Blancs ne se perçoivent pas comme blancs » et « La plupart du temps, être blanc, c'est se payer le luxe de ne pas avoir à y penser ». Je pourrais élargir le propos aux croyant-e-s et/ou pratiquant-e-s jugé-e-s à l'aune d'un athéisme, nullement neutre ni naturel, mais socialement construit comme les croyances ; la plupart des catho-laicaird-e-s ne se perçoivent pas comme catholiques et trouvent « naturelles » l'omniprésence des églises, vides la plupart du temps, alors que les musulmans ne disposent pas de lieux de culte suffisamment nombreux, ou les fêtes chrétiennes fériées marquant le calendrier de la soit-disant laïque république. L'auteure nous rappelle, à juste titre, l'affiche électorale de Mitterrand en 1981 « Belle affiche incarnant la France sédentaire, masculine, blanche et catholique, avec son ciel tricolore symbolisant la nation ». Sans oublier, la curieuse asymétrie dans le vocabulaire, les français-e-s séjournant dans un autre pays, sont nommés expatrié-e-s et non immigré-e-s.

Certains points traités me semblent discutables, un mot comme « patriotisme » incongru, la notion d'élite détestable, mais cela n'enlève rien à ce livre. Et si je me suis très éloigné de la forme des propos de l'auteure, j'espère cependant ne pas en avoir trahi le fonds. Aller y regarder de plus près !
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Je n’aime ni les frontières ni les barrières : elle me font peur. J’ai toujours l’impression qu’on me demandera de présenter un passeport et qu’il ne sera pas valide. Une peur typique d’immigrée. Dès que j’entrevois un policier, j’ai par avance l’impression d’avoir commis une faute qui me vaudra d’être renvoyée du pays où je séjourne…
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Mes rêves nocturnes eux-mêmes ressemblent à ces dîners avec mes amis d’enfance, à ces soirées en famille où chacun s’exprime dans sa langue, entrecoupée de mots des langues des autres convives, et où l’on répond rarement à une question dans la langue où elle a été posée
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L’universalisme comme le mérite d’ailleurs, ne sert qu’à ceux qui en ont les moyens d’en profiter, pas autres
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Videos de Esther Benbassa (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Esther Benbassa
Pour que le débat démocratique puisse avoir lieu, le désembuage idéologique semble devoir passer par une clarification sémantique. Dans un contexte de résurgence de l'antisémitisme et alors qu'il est question de pénaliser l'antisionisme, nous recevons Alain Dieckhoff, directeur du CERI-Sciences Po, et Esther Benbassa, sénatrice EELV.
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