À la fin de 1910, le Parti social-démocrate était divisé, comme on l'a vu, en de nombreux groupes et fractions entre lesquels la session du comité central de janvier n'avait pas réussi à rétablir l'unité : la tendance officielle bolcheviste qui détenait l'organe central du parti, le Social-Démocrate ; le groupe des bolcheviks-conciliateurs, qui trouvait inopportune l'intransigeance de Lénine ; les «mencheviks de parti», avec Plékhanov ; le groupe du Vpériod ; le groupe de Trotsky, qui publiait la Pravda de Vienne ; les social-démocrates polonais et lettons et le Bund, qui s'isolaient de plus en plus dans leurs nations propres ; enfin les mencheviks liquidateurs. Les organisations de base étaient soit détruites par les répressions gouvernementales, soit ramenées à leur plus simple expression. Les syndicats eux-mêmes étaient persécutés, souvent dissous. Tout mouvement ouvrier semblait éteint.
Cependant, dès 1911, on remarque un premier réveil, coïncidant avec l'essor de quelques branches d'industrie. Les grèves économiques et les grèves politiques se multiplient. En 1912, la vague de renaissance atteint jusqu'aux ouvriers des mines d'or de la Léna, au fond de la Sibérie : ils soutiennent une grève de plusieurs mois, contre la compagnie étrangère qui les exploite, et l'écho d'une répression policière qui fit 500 victimes (4 avril) met subitement sur pied tous les centres industriels de l'Empire. Désormais, tout est occasion de grève politique : le 1er mai, la condamnation à mort de marins mutinés, les élections à la quatrième Douma, l'ouverture de la session parlementaire, l'anniversaire du 9 janvier. Du 1er mai 1912 au 1er mai 1913, l'inspection des fabriques compte 1290 000 participants aux grèves politiques. L'atmosphère devient quasi révolutionnaire en juillet 1914, quand les ouvriers de Saint-Pétersbourg élèvent des barricades et résistent à la troupe.
Dominique Noguez Lénine dada .L?extraordinaire coïncidence qui fit se côtoyer à Zurich en 1916, plusieurs mois durant, Lénine et les premiers dadaïstes, est longtemps passée inaperçue. L?étude patiente et méticuleuse de cet épisode trop mal connu conduit Dominique Noguez à une découverte stupéfiante, qui remet radicalement en cause la vision qu?on avait jusqu?ici du leader bolchévique, de sa politique et, d?une façon générale, de l?histoire contemporaine. Traduit en plusieurs langues dont le japonais (mais pas le russe), ce livre où tout est vrai passe depuis près de vingt ans pour un classique du canular. À tort ou à raison ?
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