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EAN : 9783764384531
95 pages
Birkhäuser (02/11/2007)
4.62/5   4 notes
Résumé :
Si l'on attend de l'architecture qu'elle soit en relation sensuelle avec la vie, il faut que la réflexion aille bien au-delà de la forme et de la construction. Cet ouvrage, dont la première édition est épuisée depuis des années, a ete enrichi de trois nouveaux essais: "La beauté a-t-elle une forme ?," "La magie du reel" et "La lumière dans le paysage." Dans ses textes, Peter Zumthor dévoile les ressorts de cette architecture qui s'adresse, sur des modes très diversi... >Voir plus
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
P 30 – le noyau dur de la beauté.
Le noyau dur de la beauté, c’est de la substance concentrée. Mais où se trouvent les champs de force de l’architecture qui font justement sa substance, par-delà la superficialité et l’arbitraire du quelconque ?
Dans ses « leçons américaines »,, Italo Calvino parle du poète italien Giacomo Leopardi, qui situait la beauté d’une œuvre d’art (littéraire en l’occurrence) dans ce qui est vague, ouvert, indéfini, et fait de la forme le réceptacle possible d’une multiplicité de sens.
L’idée de Leopardi nous parait d’abord évidente. Les choses, les œuvres d’art qui nous touchent ont des strates multiples, des niveaux de signification en nombre peut-être infini, qui se superposent, se croisent et se transforment. Mais comment l’œuvre que l’architecte doit créer peut-elle atteindre cette profondeur et cette épaisseur ? Peut-on projeter le vague, l’ouvert ? N’y a-t-il pas là une contradiction avec l’exigence de précision que parait impliquer la conception de Williams ?
Se fondant sur un texte de Leopardi invitant à une quête du vague, Calvino arrive à une réponse surprenante. Il constate que dans ses textes, cet amateur d’indéfini s’attache avec exactitude et fidélité aux choses qu’il décrit et qu’il veut faire surgir par la description et conclut : « vola donc ce qu’exige de nous Leopardi pour nous faire gouter la beauté de l’indéterminé et du vague ! Pour accéder à ce désir de vague, il faut une attention extrêmement soutenue, une précision tatillonne dans la composition de chaque image, dans la minutieuse définition des détails, dans le choix des objets, de l’éclairage, de l’atmosphère. » Calvino conclut par ce paradoxe apparent : « le poète du vague ne peut être qu’un poète de la précision. » Les propos de Calvino m’intéressent non pas parce qu’ils m’invitent au patient travail du détail et à la précision, ce que nous connaissons tous, mais parce qu’ils nous rappellent que la diversité et la richesse s’expriment à partir des choses elle-même si nous savons précisément les reconnaitre et leur rendre justice.
Rapporté à l’architecture, cela signifie pour moi : puiser la force et la diversité dans l’exercice constructif lui-même, dans les choses qui le constituent et le conditionnent.
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Il semble que nous nous habituons à vivre dans des contradictions et nous pouvons même donner à cela plusieurs raisons : les traditions se perdent, il n’y a plus d’identités culturelles fortes. L’économie et la politique développent une dynamique que personne ne paraît vraiment comprendre ni maîtriser. Tout se mélange et la communication de masse produit un monde artificiel de signes. C’est l’arbitraire qui règne. (…)
Je suis convaincu pourtant qu’il existe encore des choses authentiques, aussi menacées soient-elles.
Il y a la terre et l’eau, la lumière du soleil, le paysage et la végétation. (…)
L’objet que nous percevons ne cherche pas à s’imposer par un message, il est simplement là. Notre perception se fait tranquille, libre de toute prévention et de toute volonté d’accaparement. Elle se situe au-delà des signes et symboles. Elle est ouverte et vide. (…)
Les tableaux d’Edward Hopper semblent nous dire que les choses ordinaires de la vie quotidienne sont habitées par une force particulière. Il faut seulement, les regarder assez longtemps pour les voir.
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P 86 – j’aime disposer les structures internes de mes bâtiments en séquences spatiales qui nous conduisent et nous emmènent, mais nous laissent aussi aller et nous séduisent. L’architecture comme art de l’espace et du temps entre sérénité et séduction.
Je m’efforce de montrer avec soin la tension entre intérieur et extérieur, espace public et intimité, j’accorde une attention particulière aux seuils, aux passages, aux limites.
En jouant avec l’échelle et la taille des choses, je désire créer des paliers d’intimité, des degrés de proximité et de distance, et j’aime placer les matériaux, leurs surfaces et leurs arêtes, brillantes ou mates, à la lumière du soleil, faire naitre mystérieusement des masses profondes et des dégradés d’ombre et d’obscurité afin de faire ressortir la magie de la lumière que les choses. Jusqu’à une harmonie parfaite.
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P 10 – une vision des choses.
Dans mon travail, j’essaie de faire un usage similaire des matériaux. Je crois que, dans le contexte de l’objet architectural, les matériaux peuvent revêtir des qualités poétiques. Mais il faut pour cela créer, au sein de l’objet lui-même, un certain rapport de forme et de signification, parce que les matériaux ne sont pas intrinsèquement poétiques.
Le sens qu’il s’agit d’instituer au cœur de la matérialité se situe au-delà des règles de composition, et de même la tactilité, l’odeur et l’expression acoustique des matériaux ne sont que des éléments de la langue dans laquelle nous devons parler. Le sens apparait lorsqu’on réussit à produire dans l’objet architectural de significations propres pour certains matériaux de construction qui ne deviennent perceptibles de cette manière que dans cet objet.
Lorsque nous tendons à ce but, nous devons constamment nous demander ce que peut signifier un matériau donné dans un contexte architectural donné. Des réponses justes à cette question peuvent laisser apparaitre sous un jour nouveau aussi bien la manière dont ce matériau est utilisé habituellement que ses qualités sensuelles et sa capacité à produire du sens. Parvenu au but, nous pouvons donner résonance et rayonnement aux matériaux.
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P 33 – pourquoi les architectures récentes montrent-elles si peu de confiance dans les choses essentielles propres à l’architecture : le matériau, a construction, les charges et les appuis, la terre et le ciel ; et aussi dans des espaces qui puissent être de véritables espaces où tout soit objet de soins : l’enveloppe qui les délimite et la matérialité qui les constituent en tant qu’espaces, leur forme en creux, le vide, la lumière, l’air, l’odeur, l’aptitude à l’accueil et à la résonance ?
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Vidéo de Peter Zumthor
Conférence de Peter Zumthor le 19 mai 2011 au Centre Pompidou.
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