Les gars de la revue du Nouveau Planète ont beau passer pour des énergumènes, ils ne sont pas assez barrés pour arriver à la hauteur d'
Antonin Artaud. Avec ce numéro, ils lui rendent un hommage qui aura peut-être vocation à faire découvrir son oeuvre polymorphe, indomptable.
Après un retour biographique obligatoire qui nous apprend qu'Artaud était mal fichu d'entrée de jeu, les rédacteurs nous promènent du théâtre au cinéma, de la littérature jusqu'au Mexique, dans les fumées vaporigènes du peyotl.
Artaud concevait le théâtre en rebours de la conception occidentale. Ses inspirations s'ancraient plus profondément dans les ressources orientales. « Je propose d'en revenir au théâtre à cette idée élémentaire, reprise par la psychanalyse moderne, qui consiste pour obtenir la guérison d'un malade à lui faire prendre l'attitude extérieure de l'état auquel on voudrait le ramener ». le théâtre devra être cathartique, absolu, cruel et dément. Signe d'une possession totale qui ne méprise ni le corps, ni l'esprit. Rien à voir avec ce théâtre bourgeois fait pour amuser ou rassurer. Un de ses amis et poète,
Henri Thomas, rapportait : « [
Antonin Artaud] refusait tout ce qu'on appelle Théâtre. Il refusait d'y aller. Ou il emportait un saucisson et un litre de rouge pour protester en bouffant au premier rang. le théâtre qui n'imposait pas la vision d'un intermédiaire. Mais comment remplir ce vide, ce hiatus terrible qui est dans la réalité ? »
Une fois que l'on a compris ça, on peut s'avancer plus loin sur le territoire d'Artaud. Une sélection de textes permet de se faire une idée plus précise de son oeuvre et quelques documents inédits (entretien avec
Henri Thomas le poète, entretien avec le docteur Ferdière, son dernier psychiatre, lettres à
Anaïs Nin) permettent de le percevoir dans sa nature vivante d'être social, en relation avec les autres.
Les contributeurs de la revue ont réussi s'ils donnent envie de happer
l'Ombilic des limbes, s'ils font sonner le carillon pour signaler que l'heure est venue.