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Porcherie tome 3 sur 4
32 pages
les crocs électriques (20/11/2018)
4/5   3 notes
Résumé :
Je n'avais pas envie de mourir, longue nouvelle racontant dans un style très sec l'histoire de Cynthia, que son père aime beaucoup, un peu trop, fort mal, et qui tente de lui échapper. C'est noir, sordide, et ça oscille entre espoir et désespoir. Je me garderai bien de vous dire quelle émotion prévaut à la fin, d'autant que même moi je n'en sais rien, au bout du compte.

Dresde, assez long texte aussi, raconte les aventures d'un type qui vient de sépar... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique

Attention, cette critique peut heurter les plus jeunes.
Et les plus vieux aussi.
Les plus sensibles, les plus prudes, les plus puritains.
Probablement un peu tout le monde, en fait.

Ce n'est pas avec un playboy ou une autre revue érotique que j'ai eu mes premiers émois sexuels en tournant des pages.
C'était avec un roman d'horreur.
Le repaire des rats de James Herbert.
Je devais avoir quatorze ans quand j'ai lu ( et relu d'ailleurs de nombreuses fois ) un passage plutôt excitant où un couple s'embrassait, se caressait, se déshabillait, faisait l'amour avec bon nombre de détails croustillants.
Après ils se faisaient dévorer par des rats géants.
Rien de bien anormal donc.
Horreur et sexe ont souvent fait bon ménage, et ce ne sont pas Graham Masterton ou Clive Barker qui vont prétendre le contraire.
Ni les auteurs des courts romans de feu la collection gore où les passages à caractère pornographique étaient une composante presque aussi essentielle que les tripes et les cervelles qui explosent.

Alors bien sûr, avec l'âge et l'effet de répétition, ce genre de passages devient nettement moins émoustillant et même très dispensable, presque agaçant.
Jusqu'à ce que je lise Christophe Siébert.
Et que le sexe, récurrent dans ses romans comme dans ses nouvelles, devienne un composant renforçant l'horreur et non un inutile artifice.
J'en reviens une nouvelle fois à Nuit noire, le livre qui a poussé le genre horrifique plus loin qu'aucun autre auteur n'avait jamais osé le faire.
"Je me suis livré à des jeux avec les restes de ma grand-mère et elle. ( ... ) Je lui ai violé la chatte et l'anus à l'aide des pieds et des poings du cadavre, eux aussi infestés d'une vermine qui s'est installé ensuite dans ses orifices et a provoqué douleurs et infections. Je me régalais jour après jour d'observer l'évolution de la septicémie."
Cet extrait, probablement le plus dégueulasse qu'il m'ait été donné de lire, me hante encore aujourd'hui. Loin de stimuler, il a de quoi endormir profondément votre libido à chaque fois que vous visualiserez cette scène mêlant torture, viol, inceste et nécrophilie.

Le troisième volume de Porcherie contient quatre nouvelles, dont le trait d'union est le sexe.
Vous l'aurez compris, elles ne mettront pas vos ardeurs en ébullition.
L'horreur n'y est pas aussi atroce que dans Nuit noire. Mais elle a quelque chose de beaucoup plus réel, ce qui confère un malaise différent. Aussi choquant mais pour d'autres raisons.

"Dresde", nom de la commune située à l'Est de l'Allemagne, est peut-être la nouvelle la plus innocente des quatre.
A moins que vous ne soyez dérangé par une description assez crue de relation homosexuelle.
"Je n'avais jamais touché d'autre bite que la mienne. J'ai trouvé la sienne épaisse, la peau douce. Je l'ai branlé comme j'ai pu, en prenant de l'assurance au fur et à mesure."
Le narrateur est un homme dont toutes les relations hétérosexuelles finissent mal. Ses conquêtes sont des femmes toujours magnifiques qui quelques mois plus tard deviennent invariablement des folles furieuses qui lui laissent le coeur en miettes.
"J'étais ce gars qui, lorsqu'il se penche dans un champ pour cueillir un trèfle à quatre feuilles, se fait piétiner par un taureau, écraser pas un tracteur ou tout bêtement foudroyer."
Désormais sans attaches, il sera pris en stop par un dénommé Mathieu, qui se rend jusqu'en Russie.
Ils feront escale dans un hôtel à Dresde, et continueront à se découvrir une attirance réciproque aussi surprenante qu'intense et irrépressible. Ils ne chercheront d'ailleurs pas à résister.
Malgré un langage sans détour, j'ai trouvé qu'il y avait énormément de douceur dans l'étreinte de ces deux hommes qui se découvrent l'un l'autre, qui ne refusent pas cette alchimie qu'ils ignoraient possible.
Par contre, j'ignore ce que cherchait Christophe Siébert au travers de ce texte. A montrer que des sentiments peuvent surgir au moment où on s'y attend le moins ? A montrer aux homophobes qu'une relation entre hommes n'a rien de si différent ou de choquant ?
A moins qu'il ne faille comprendre que les convictions seront toujours plus fortes que des sentiments, aussi sincères soient-ils.
Parce que cette attirance sera finalement rejetée.

Déjà beaucoup plus dérangeant, le texte "Une lenteur de momie ou alors de gargouille" nous conte un bien étrange passe-temps.
Je pensais que l'auteur avait déjà brodé autour de toutes les déviances : Zoophilie, scatophilie, nécrophilie...
Grosse erreur !
J'avais oublié la gérontophilie.
"Je soulève la couverture, observe le ventre ridé, les seins fripés, m'approche de la chatte rêche et parsemée de quelques poils gris. Si c'est un homme, je soulève la queue plissée pour observer les couilles flétries."
La narratrice, cinquante-cinq ans, vit seule. Son mari l'a quitté, ses enfants sont partis du foyer.
Le sexe ne l'intéresse plus à titre personnel, mais regarder d'autres corps nus demeure un plaisir. Il y a ceux qu'elle peut regarder à la télévision, sur Youporn, qu'il s'agisse de très jeunes femmes à la plastique parfaite ou d'hommes aux membres démesurés.
Et il y a aussi ceux qu'elle peut contempler à son travail.
Chaque nuit, elle doit s'assurer que tous les résidents de la maison de retraite qui l'emploie dorment confortablement. Mais elle ne se contente pas de jeter un oeil à la chambre, elle regarde aussi sous les couvertures, sous les pyjamas et les chemises de nuit, sans réveiller les pensionnaires abrutis par les médicaments la majorité du temps.
Parfois elle touche et lèche, elle hume, éveillant ses cinq sens à l'affût d'une réaction même infime de ces organes génitaux abîmés par le temps.
"Des fois je goûte à une bite, ou alors je passe la langue sur une chatte, ça n'est pas bon, ne sent pas bon, ça n'a pas le goût agréable de la peau lisse et élastique comme dans mes souvenirs, non, il y a quelque chose d'avarié, de crevé, on s'en rend compte tout de suite que ces peaux-là ne sont pas faîtes pour être léchées ni sucées."
Un court texte qui met profondément mal à l'aise pour des raisons évidentes de voyeurisme, et qui non seulement lève le voile sur une forme méconnue de déviance, mais montre aussi à la sauce Siébert la peur de la vieillesse et de la mort.
"Pendant la journée, il y avait des activités, comme pour leur faire croire qu'ils étaient encore vivants, qu'ils faisaient encore partie de la réalité."

Et j'en arrive au pire.
Deux nouvelles étroitement liées, qui se terminent toutes les deux dans la Garonne, et qui montrent sans non dit l'horreur vécue par deux jeunes femmes.
"Exemple d'utilisation des forces productives dans une économie mondialisée" est un long titre pour parler de la prostitution en France.
Une activité très lucrative dévoilée en quelques pages dans toute son ignominie.
Elle s'appelle Claudia, elle est Roumaine. Agée d'à peine vingt ans, elle ne peut pas s'en sortir financièrement malgré les difficiles petits boulots qu'elle enchaîne.
Une opportunité unique s'ouvre à elle : Partir en France quelques années devrait lui permettre d'économiser suffisamment d'argent pour pouvoir élever son jeune fils et aider sa mère financièrement.
"Ils lui expliquent qu'en France, les filles comme elle bossent dans les restaurants et les hôtels pour des salaires bien plus élevés qu'en Roumanie."
S'ensuit alors le calendrier de Claudia, pire encore que celui des héroïnes meurtries de Karine Giébel, mais dans un esprit un peu similaire.
"Entre le 6 et le 30 mai, Claudia est quotidiennement humiliée, torturée, battue, violée. Ce traitement a pour but de la briser physiquement et psychologiquement."
Et c'est là que le titre prend toute sa signification. Cette fille commence à peine sa dégringolade dans l'enfer de la prostitution, de laquelle elle est désormais prisonnière.
La moindre rébellion signifie coups et menaces envers sa famille.
Rapidement, elle sera déshumanisée.
Mais au fond, elle n'est pas considérée comme une personne. Juste comme un chiffre. Enfin, un chiffre avec pas mal de zéro derrière vu ce qu'elle rapporte aux proxénètes.
"Entre juin et septembre, au rythme de dix à vingt passes par nuit à trente euros chacune, elle rapporte environ trente mille euros au clan à qui elle appartient."
Une simple marchandise, interchangeable avec une autre fille quand elle sera trop cassée pour continuer à rapporter...
Multipliez ces revenus par le nombre de femmes vivant dans ces atroces conditions dans notre beau pays de libertés, évalué ici à cinq mille. Et faîtes la conversion sur une année.
Que de richesses à partager par l'intermédiaire de ce rouage économique.
Siébert a fait très fort avec cette nouvelle qui explique très bien l'engrenage dans lequel les filles de l'Est mettent le doigt, se retrouvant broyées en guise d'espoir de meilleur avenir.
Des vies d'esclaves sexuelles converties en euros, réfléchies en terme de coût et surtout de bénéfices.
Rien ne nous est épargné et l'horreur est d'autant plus ressentie intensément qu'elle n'a rien d'imaginaire.

Plus abjecte encore à mon sens, "Je ne voulais pas mourir" traite d'inceste.
Mère et fils, frère et soeur : le sujet a déjà été exploité à maintes reprises par l'auteur, que ce soit dans Nuit noire, La place du mort ou l'excellente nouvelle Tête morte.
Et il remet le couvert.
En pire.
Sont concernés cette fois un père et une petite fille. Qui n'a rien demandé.
A l'inceste vient donc se greffer une pédophilie encore bien plus insupportable.
Comment peut-on abuser de son propre enfant ?
A huit ans, premiers attouchements sous forme de chatouilles déplacés.
A onze ans, des baisers sur la bouche. Sans la langue d'abord.
A treize ans, un doigt.
Et c'est l'escalade. Glauque, écoeurante. Aurore Pelletier a peur chaque soir que son père s'introduise dans sa chambre, et en même temps elle l'attend.
Il lui demande ensuite une participation plus active. le toucher, le caresser, le sucer. le laisser venir sur ses seins naissants.
"Après avoir éjaculé, il est resté un long moment à me serrer dans ses bras, à me couvrir de bisous, à m'appeler sa princesse, son ange, son amour."
Comme une monstrueuse complicité.
Absolument insupportable.
Parce qu'aucun détail ne nous est épargné et qu'on est obligé de regarder ce que subit cette enfant violée.
Mais aussi parce que la mère reste totalement passive, préférant faire semblant d'ignorer ce qui se produit régulièrement sous son toit.
Elle est quasiment aussi coupable que son pervers d'époux.
"Ma mère, dans sa chambre à elle, elle fait quoi, elle pense à quoi ? Elle fait quoi ?"
Et parce que dès la première page, on sait que l'issue sera fatale pour Aurore dont le cadavre sera retrouvé plus tard dans la Garonne.
Elle qui n'avait jamais rien demandé et qui n'a jamais pu confier son honteux secret.
"Je ne peux en parler à personne c'est trop horrible. Pourtant je ne pense qu'à ça."

Christophe Siébert ne s'impose aucune limite morale lorsqu'il écrit. Et ça se ressent plus que jamais.
Les mots sont crus, provocants, mais le style n'a pourtant rien de vulgaire.
Nul besoin d'inventer des histoires de rats géants pour faire peur. La réalité est bien suffisante.
Et elle laisse davantage de traces.
Oui, sexe et horreur font bon ménage.
Et cette violence, cette souffrance tant physique que psychologique, existe bel et bien. Juste à côté de chez nous.
L'auteur nous la montre simplement sans prendre de gants, sans l'enrober de sucreries, maintenant notre visage enfoui dans les excréments.
Alors oui, bien sûr, c'est tordu, c'est malsain, c'est on ne peut plus dérangeant.
On en ressort marqué, triste et nauséeux.
Et on se procure le volume 4 en se demandant quelles nouvelles limites Siébert aura transgressé cette fois.

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