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Viviane Forrester (Traducteur)
EAN : 9782234024564
319 pages
Stock (30/11/-1)
3.69/5   18 notes
Résumé :
Résumé de "Portrait d'un mariage"

Voici l'histoire vraie d'un homme et d'une femme qui se sont mariés par amour et dont l'affection n'a cessé de croître en profondeur et en compréhension réciproque à travers les années, "bien que chacun d'eux ait été infidèle à l'autre". "Tous deux aimèrent des personnes de leur sexe".

Elle était la célèbre romancière Vita Sackville-West et lui Harold Nicolson, un homme politique connu. Leur mariage fu... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Portrait d'un mariage fait partie d'un puzzle qui se constitue depuis bien longtemps et peu à peu sous mes yeux. Cette recomposition d'une période d'intense bouillonnement intellectuel et de modernité avait sans aucun doute commencé avec les Instants de mémoires de Violet Trefusis. Quelques années plus tard, je découvrais Instants de vie de Virginia Woolf qui me toucha profondément. Aujourd'hui s'y ajoutent les voix croisées de Vita Sackville-West et de son fils Nigel Nicholson. Dans cette peinture de la micro-société aristocratique et intellectuelle du début du 20ème siècle en Angleterre, il ne faut pas oublier les films de James Ivory, dont Maurice, mais aussi Carrington de Christopher Hampton.
On peut s'intéresser à ces documents pour deux sortes de raison. La première me paraît ethnologique : quels regards ont porté sur leur société quelques figures de l'Angleterre édouardienne ? La seconde me semble tout aussi intéressante : quelle est la singularité de ces vies qui nous apparaissent aujourd'hui pour le moins excentriques ?
D'un côté, il y a donc le recours aux journaux intimes pour dessiner un portrait des moeurs de cette époque et, de l'autre, il y a l'approche psychologique de personnalités dont l'audace, l'originalité, la force et les faiblesses exercent une certaine fascination au regard du contexte social dans lequel elles évoluaient.
Si j'accorde une qualité littéraire indéniable à Instants de vie de Virginia Woolf, les deux autres témoignages, ceux de Violet Trefusis et de Vita Sackville-West n'ont pas pour moi cette qualité. Vita Sackville-West explique son récit par un besoin d'absolue sincérité sur une liaison amoureuse qui se termine ( 1920 ) tandis que Violet Trefusis rédige ses mémoires dans les années 50 ( Don't look round - 1952 ) en laissant « la vérité de côté lorsqu'elle était désagréable ». On voit donc que les deux entreprises, celle de Vita et celle de Violet, ne se situent pas dans le même registre.
Une question, lancinante, ne m'a pas quittée pendant la lecture de Portrait d'un mariage, une question qui n'a de sens que dans notre société contemporaine : qu'est-ce qu'un mariage réussi ?
À l'évidence, pour la société édouardienne, le mariage va de soi. La femme, après une éducation confiée à des institutions sélectionnées, passe du statut de débutante à celui de fiancée, puis de femme mariée. Certains voudraient ajouter le statut de mère, mais à regarder Victoria Sackville-West, Alice Keppel ou d'autres grandes figures aristocratiques de l'époque, si la procréation est nécessaire pour des raisons de lignée et d'héritage, elle n'implique pas de devenir une mère à temps complet. Cette tâche est confiée aux « nannies » et gouvernantes. le mariage est donc un passage obligé dans l'existence, certaines relations sexuelles légitimes en découlent, mais de l'avis même d'Harold Nicolson, la relation amoureuse entre conjoints est de courte durée.
Donc un mariage réussi n'est pas un mariage où les conjoints mèneraient une vie sexuelle satisfaisante et durable. de l'avis de Vita, il y a des unions qui commencent bien et finissent mal, et des unions qui commencent mal et finissent bien, mais il semble que cela n'ait rien à voir avec l'appétence sexuelle.
Une autre idée largement partagée par mes contemporains est qu'un mariage réussi est un mariage où l'homme et la femme s'intéressent mutuellement à leurs activités, notamment professionnelles. Vita n'a jamais éprouvé le moindre intérêt pour la carrière diplomatique et politique de son mari. Hormis au début de leur mariage où elle le rejoint à Constantinople, elle ne le suit pas dans ses pérégrinations professionnelles, tout au plus va-t-elle lui rendre visite de temps en temps. La première guerre mondiale guerre et la conférence de la paix, puis la mise en place de la SDN ne trouvent aucun écho dans la confession de Vita ! Quant à Harold, s'il ne trouve rien à redire quand Vita prétend partir en voyage pour collecter de la matière pour ses romans, il semble considérer les choses avec la bienfaisante indulgence d'un homme qui a d'autres choses à faire.
Les enfants, me direz-vous ? Si Harold parlent des « babies » dans certaines de ses lettres, Vita n'hésite pas à disparaître plusieurs mois en les confiant à sa mère ou au personnel du château de Knole. Les époux sont d'accord sur un point : il ne peut y avoir de chantage aux enfants pour recoller les morceaux d'un couple. D'ailleurs, dans l'aristocratie, bon nombre de couples mènent une vie sinon séparée, du moins indépendante.
Il reste alors une chose : l'attachement indéfectible que se portent deux êtres, l'assurance d'une confiance et d'un respect réciproque, ce qu'ils baptisent amour. Nous sommes déconcertés, car c'est une idée de l'amour qui nous est assez étrangère. L'amour ici n'est pas la passion physique ni la fidélité (comprise comme la fidélité dans les relations sexuelles) ni le partage de la vie commune et quotidienne. Finalement, l'amour est ce qui reste lorsque l'on a dépouillé le mariage de toutes ses contingences habituelles : la vie domestique, la vie sexuelle et les contraintes matérielles.
Comment ont-ils fait ? Il faudrait plus exactement dire : comment n'ont-ils pas défait ? Nous oublions une chose essentielle, à cette époque, un divorce était une chose bien plus désastreuse qu'un mariage où chacun pouvait trouver son confort avec un peu de bonne volonté. Ne sous-estimons pas l'égocentrisme de Vita, la placidité d'Harold et l'habitude de l'époque de tenir davantage aux convenances qu'aux démonstrations d'indépendance. Après tout Vita et Harold s'accordaient mutuelle liberté à partir du moment où chacun reconnaissait le pacte initial : le maintien du mariage.
Une autre question est sous-jacente à cette société aristocratique et mondaine, celle de l'argent. On ne parle pas directement d'argent parce que le nerf de la guerre est là. Chacun fait son testament – même Vita enfant – les procès qui ont touché la famille Sackville-West ont été retentissants et le train de vie de ces existences nomades engloutit des sommes colossales. Une Vita Sackville-West seule aurait-elle pu assumer ses dépenses ?
Enfin, il n'est pas possible de s'intéresser aux moeurs de l'Angleterre édouardienne sans poser la question de l'homosexualité, ou du moins de la bisexualité. Les aventures homosexuelles de Vita ne doivent pas occulter celles d'Harold. Si nous savons assez bien le processus qui amène Vita à se confier à Harold sur ce point, nous ne savons rien de ce qu'il en était pour Harold. Ses aventures étaient assez connues pour que sa belle-mère s'en offusquât devant son petit-fils, Benedict. Au plus fort de la crise parisienne qui fait planer la menace d'une rupture définitive entre les époux et le départ de Vita et de Violet, Harold aurait eu une aventure avec le couturier Edward Molyneux. Tout nous échappe, car il ne semble y avoir aucune gradation dans les événements qui se déroulent alors : Harold mène des négociations épuisantes pour le compte de la Grande-Bretagne, son épouse est prise dans une tempête passionnelle, il a des problèmes de santé et entretient une liaison avec une personnalité mondaine.
Plus je réfléchis à l'histoire mouvementée de Vita, de Harold, de Violet et de Denys Trefusis, de Virginia Woolf, mais aussi de John Maynard Keynes ou de Lytton Stachey, plus je me persuade que la profonde originalité de leur vie tient à une alchimie étonnante entre une époque de transition et des aspirations nouvelles. Ils ne jouent plus tout à fait les règles du jeu de la société édouardienne – le roi lui-même le montrera en abdiquant pour épouser Mrs Simpson – tout en voulant sauvegarder une position sociale qu'on leur avait présentée dès l'enfance comme supérieure. Ils devaient réussir, mais en transgressant leur héritage originel. D'où leur originalité et leur créativité pour s'affirmer dans une société qu'ils voulaient autre.
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Le récit, par Nigel Nicholson, un des deux fils de Harold Nicholson et de Vita Sackville West, d'une partie - non conventionnelle- de la vie de ses parents.

Peu avant la guerre 14-18, la fille des Sackville West, qui habitent Knole, dans le Sussex, épouse le jeune Harold Nicholson, promis à un bel avenir dans la diplomatie. Ils habiteront Long Barn, près de Knole, voyageront, auront deux enfants, des amis... et Vita deviendra la châtelaine et jardinière émérite de Sissinghurst.

Comment ce couple va-t-il se débrouiller pour vivre harmonieusement ? Chacun est homosexuel ou bisexuel, bref, l'un a des aventures de son côté, et elle a deux grandes amours féminines, Violet Trefusis (née Keppel, elle est la fille d'Alice Keppel, une des "amies" du roi Édouard VIII)... et plus tard. Virginia Woolf, à qui elle inspirera l'extraordinaire "Orlando. Une biographie. " et peut-être aussi un peu l'essai "Une chambre à soi." (A Room of one's own).

En 14-18, Violet Keppel, que traumatise la menace de guerre, se refugie chez son amie, à Long Barn et elles deviennent amantes. C'est une liaison orageuse, elles n'ont pas un caractère facile... connaissant de multiples rebondissements. Violet Keppel se marie avec Denis Trefusis, sous la pression familiale, mais elles continuent à voyager, au grand dam de leurs maris dont elles sont entièrement dépendantes. Larmes, scènes, supplications, brouilles, réconciliations, rebrouille... puis la séparation définitive. Vita écrira un jour " tu es une bombe qui n'a pas encore explosé. Je me refuse à exploser. "

Violet, elle, sera broyée mais vivra à Fiesole. En écrivant quelques romans.

Vita Sackville West aura désormais une vie avec son mari. Une "bonne" vie, selon des témoignages radiodiffusés, non conforme. Ils iront en Iran, notamment. Dans Orlando, Sahsha, la princesse russe, est l'amour d'Orlando, jeune noble à la Cour d'Élisabeth Ire. C'est le portrait déguisé de Violet Trefusis.

Voilà un couple, celui des parents de Ben et Nigel Nicholson, qui semble avoir trouvé une solution à leur mesure, dans une Angleterre où l'homosexualité masculine était réprimée et punie (la prison et ou la castration chimique...) et où rien n'était vraiment prévu pour les femmes...

Vita Sackville West a tout de même accompli une carrière d'écrivain, alternant romans et poèmes. (Au bon temps du roi Édouard, roman). Et des poèmes qu'elle estime bons, contrairement à ses romans.

C'est un livre très intéressant, d'autant plus qu'il est écrit par le fils des protagonistes. La B.B.C. en a tiré un téléfilm, dans les années 90? 80? À ma connaissance jamais diffusé sur les chaînes de télévision francophones. Dommage.

C'est aussi dans les années 90 que j'ai lu les premiers articles et fictions, sur l'histoire de Vita Sackville West et de Virginia Woolf. Cette histoire, "Orlando" cette fois, a inspiré un film à Sally Potter, également dans les années 90. Avec Tilda Swinton. Depuis, on a beaucoup écrit et publié sur les écrivains et les artistes de Bloomsbury, mais peut on ranger Vita Sackville West parmi eux ?

Un livre utile et passionnant sur une époque difficile... et touchant témoignage filial.
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Nigel Nicolson, fils de Vita Sackville-West et Harry Nicolson, fait exactement ce qui est annoncé dans le titre, le portrait du mariage de ses parents, en publiant une partie de la correspondance de sa mère et en la commentant.
On découvre que ce mariage atypique fut l'union réelle de deux âmes, avec tout le respect, la confiance, l'attachement et l'amour que cela suppose, chacun ayant besoin de l'autre et confiance en l'autre, chacun respectant donc les amours extraconjugales ou errements de l'autre. Ce qui peut être vécu comme des trahisons ne l'étaient pas pour eux car leur amour profond est indéfectible.
Les lettres ainsi que le récit de leur fils en rendent compte parfaitement et ce de manière émouvante. on n'échappe pas à quelques redondances entre les récits et la partie épistolaire mais j'ai malgré cela pris beaucoup de plaisir à lire ces belles lettres, qui racontent aussi une époque, celle des années trente. On y croise des artistes, et surtout Virginia Woolf, un temps amante de Vita.
J'ai donc aimé ce récit, plus que je ne l'imaginais.
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Je lis ce livre pour la deuxième fois car en lisant la correspondance de Virginia Woolf et Vita Sackvill-West je me suis rendu compte qu'il ne restait rien de la première lecture.
En tout cas, cette fois ci sera la bonne car je l'ai pleinement apprécié. Ce livre permet de mieux comprendre cette relation particulière dans ce couple athypique qui n'a pas eu peur du regard des autres.
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Publié par le fils du couple qui sont les personnages principaux de ce livre ,des intellectuels anglais du début du 20 éme siécle
Petites histoires de couple,évolution de la société anglaise,femme libérée et indépendante....brf cette plongée historique aurait pu me fasciner mais non je me suis passablement ennuyée et j'ai fermé mon livre sans regret aucun.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
...parce que j'ai la conviction qu'avec le temps, au cours des siécles, comme les sexes se confondront plus ou moins en raison de leur ressemblance croissante, de telles liaisons cesseront dans une très large mesure d'être considérées comme simplement anormales ; et qu'elles seront bien mieux comprises, sinon dans leur aspect physique, du moins dans leur aspect intellectuel (c'est déjà le cas en Russie). Je crois que la psycologie de gens tels que moi sera dès lors d'un grand intérêt : on reconnaitra, je crois, qu'il existe bien plus de gens dans mon cas qu'on le veut admettre aujourd'hui, avec notre système hypocrite. Je ne prétends pas que de telles personnalités, et les liaisons qu'elles entraînent, ne seront pas déplorées comme à présent, mais, plus fréquentes, grâce à l'esprit de franchise qui se propagera, espérons-le, dans un monde en progrès, elles seront reconnues - ne serait-ce que comme un mal inévitable. Il faudra d'abord, et ce sera un premier pas, admettre les relations normales mais illicites, et la libéralisation du divorce, ou même, peut-être faudra-t-il modifier le système du mariage... (page 146/147)
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Même les Sackville ne pouvaient tenir les Nicolson pour bedints, car, s'ils descendaient d'une longue lignée d'avocats d'Edimbourg et de quelques contre-amiraux, il y avait dans leur plus lointaine ascendance quelques barons voleurs de grands chemins, ce qui était un peu mieux, et Sir Arthur était le détenteur d'une baronnie qui remontait à Charles Ier. (page 118)
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Le jardin et ses collines en terrasses
s'élevaient au-dessus du port,
Et les petites maisons à moitié cachées
Que révélait la présence d'une lumière,
Là s'achevait mon voyage
Car j'avais atteint la demeure tant cherchée.
(page 133)
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Elle luttait pour le droit d'aimer, des hommes et des femmes, rejetant ces conventions du mariage, qui réclament un amour exclusif, qui exigent que les femmes aiment seulement des hommes, et les hommes des femmes seulement. Pour cela, elle était prête à renoncer à tout. Oui, elle était peut-être folle, comme elle l'a dit plus tard, mais c'était d'une folie magnifique. Elle a pu être cruelle, mais d'une cruauté portée à un degré héroïque.
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L'essentiel était pour chacun de faire confiance à l'autre et absolument. La "confiance" dans la plupart des mariages, signifie la fidélité. Dans le leur, cela signifiait qu'ils se diraient tout de leurs infidélités mutuelles, se préviendraient l'un l'autre de toute crise émotionnelle, et qu'ils retourneraient quoi qu'il arrive, à leur noyau commun.
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