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La trilogie Tedj Benlazar tome 2 sur 3
EAN : 9782072912641
352 pages
Gallimard (11/02/2021)
4.12/5   287 notes
Résumé :
Janvier 1996. Dans la banlieue de Roubaix, deux malfrats tirent sur des policiers lors d’un contrôle routier. Qui sont ces types qui arrosent les flics à la Kalachnikov ? Un journaliste local, Réif Arno, affirme qu’ils ont fait leurs armes en ex-Yougoslavie dans la brigade El Moudjahidin. À la DST, le commandant Laureline Fell s’intéresse de près à ces Ch’tis qui se réclament du djihad et elle a un atout secret : Tedj Benlazar est à Sarajevo pour la DGSE... >Voir plus
Que lire après Prémices de la chuteVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (50) Voir plus Ajouter une critique
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Voici le deuxième volet de l'ambitieux triptyque de Frédéric Paulin, sur la matrice du terrorisme islamiste qui sévit actuellement. Arguant du fait qu'on ne peut comprendre le présent qu'en se référant au passé, La Guerre est une ruse était formidable dans sa façon de présenter la décennie noire algérienne des années 1990 comme préfigurant une nouvelle ère. Prémices de la chute l'est tout autant.

Cette fois, si l'Algérie est toujours au menu avec l'épisode de l'assassinat des moines de Tibhirine, la focale se déplace vers d'autres territoires pour couvrir la période 1996 – 2001 avec en point d'orgue final, les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis. Cette plongée au coeur de la naissance d'al-Qaida comme franchise du djihadisme mondialisé s'ouvre par la porte d'entrée de l'ex-Yougoslavie, en pleine guerre de Bosnie et du siège de Sarajevo où combattent les brigades el-Moudjahidim, composées d'étrangers djihadistes. C'est là que la nébuleuse al-Qaida apparait pour la première fois. Al-Qaida met le feu à différents foyers. Direction le Pakistan et les grottes de Tora Bora en Afghanistan.

Une nouvelle fois, Frédéric Paulin maitrise avec brio et rigueur un matériau documentaire d'une rare densité et complexité. Et pourtant, jamais le lecteur ne se perd dans ce compte à rebours captivant dont on connait l'issue. Il entremêle personnages réels ( par exemple, Zacarias Moussaoui, Français lié aux attentats du 11 septembre, condamné à perpétuité après son arrestation en août 2001, dont on suit le parcours ) et fictifs parfaitement crédibles. Ce sont ces derniers qui nous guident dans les méandres tortueux de l'Histoire. On retrouve l'agent de la DGSE Tedj Salazar mais c'est le journaliste Réif Arnotovic, tuyauté par Tedj, qui nous entraîne dans ses investigations de terrain, notamment au Pakistan et d'Afghanistan lorsqu'il parvient à infiltrer un camp d'entrainement djihadiste dans l'espoir d'interviewer Oussama Ben Laden .

L'auteur fait le choix de plus aérer son récit, notamment avec le personnage de Vanessa, fille de Tedj et compagne de Réif. Pas forcément nécessaire, j'ai tendance à préférer le récit pur et dur centré sur les faits d'actualité, mais ce procédé est très malin pour injecter du romanesque aux côtés de ses deux anti-héros masculins, victimes des circonstances mais têtus pour témoigner de la violence et de l'absurdité des hommes qui font la guerre. le récit est brillant du début à la fin, mettant en lumière, sans complotisme, la cécité des gouvernements occidentaux et l'arrogance de leurs services secrets, CIA en tête, les empêchant de saisir la portée de ce qui est en train de se tramer.

Prémices de la chute peut se lire indépendamment de la Guerre est une ruse, mais il me semble préférable de lire dans l'ordre chronologique pour avoir une idée complète de la période décrite. N'importe comment, c'est tellement passionnant que ce serait dommage de se priver d'une lecture aussi intelligente et puissante, surtout qui permet d'appréhender les enjeux géopolitiques actuels. Je compte bien poursuivre avec le dernier volet du triptyque, La Fabrique de la terreur qui couvre la période 2010-2015

Lu dans le cadre du jury Prix Bureau des lecteurs Folio policier RTL 2021 #6
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Seconde lecture de Frédéric Paulin .
J'avais beaucoup aimé La guerre est une ruse
Je reste aussi enthousiaste avec Prémices de la chute
Pour faire simple, le livre raconte la montée en puissance d' al Qaida entre 1996 et 2001
Vous croyez avoir tout vu ou tout lu sur le sujet
Détrompez vous.Avec Frédéric Paulin, vous allez parcourir le monde pour découvrir une tentaculaire organisation
J' ai repensé à l'extraordinaire enquête, en 4 gros tomes , de Yves Courrière sur La guerre d'Algérie et sur la structure, l'organisation et le financement du FLN lors de la lutte pour l' indépendance
Frédéric Paulin a fait un travail de recherche colossal et complexe
Ce travail impressionnant aurait pu aboutir à un livre assez indigeste pour ceux qui ne maîtrisent la géopolitique
Mais Frédéric Paulin considère que son lectorat est intelligent et qu'il lui doit un livre de qualité tout en étant facile et fluide
Le pari est parfaitement tenu
Il a l'intelligence d' aérer son texte au point d'en faire un véritable thriller
Immersion totale dans ce monde pourtant opaque
Tout le livre est basé sur une documentation sans faille ( on pense à DOA ,Cédric Bannel ou Olivier Norek)
Il y'a de beaux moments de suspens et de tension notamment quand nous nous retrouvons dans les grottes de Tora Bora, l'antre de Ben Laden
C'est aussi un livre qui met en perpective la réalité du terrorisme islamique qui a sa propre structure très éloignée des univers maffieux ou militaires
Ce qui peut donner froid dans le dos , c'est la minutie dans la préparation d' un attentat et l'intelligence stratégique des leaders
Vous avez compris .C'est formidable,intelligent , irréprochable dans les détails historiques
Malgré la complexité du propos , le lecture s'est fait avec une grande aisance
Il me reste à lire la suite , 3° tome d' une trilogie ambitieuse mais ce livre, Prémices de la chute peut se lire sans connaître le premier tome
Un livre que je vous conseille vivement
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J'avais lu le 1er tome de cette trilogie : La guerre est une ruse que j'avais bien aimé mais sans plus.
J'ai eu raison de poursuivre cette trilogie avec le tome 2 que j'ai préféré. J'ai trouvé ce récit prenant et addictif.
Le personnage récurrent de cette trilogie Tedj Benlazar est rentré d'Algérie, il est maintenant en ex-Yougoslavie. Ce roman se situe dans les années 1996 à 2001, la guerre dans ce pays a laissé beaucoup de traces et devient un terreau pour le développement d'un islamisme radical.
D'un autre côté, dans le nord de la France, a lieu une série de braquage à main armé particulièrement violent. Braquages qui pourraient servir à financer le terrorisme islamique.
On va être également être transporté dans la zone tribale qui se situe dans les hautes montagnes entre l'Afghanistan et le Pakistan, un no man's land où les camps d'entraînement des islamistes radicaux ont pu prendre place sans être inquiété.
Vous l'aurez compris, la trame de ce récit est l'islamisme radical. L'auteur s'évertue a décortiqué les rouages qui ont amené les islamistes radicaux à entrer en guerre contre l'occident, à la naissance et au développement du mouvement d'Al-Quaïda, de conduire aux pires évènements de ce siècle. le lien avec le titre du roman est assez évident.
L'auteur veut aussi dénoncer le manque de communication entre les différents services de renseignements à l'intérieur d'un même pays mais également entre pays qui ont permis à de tels drames de se produire. Ce récit est une pure fiction qui se base sur des évènements et certains personnages bien réels, ce qui accroît d'autant plus sa crédibilité et le rend d'autant plus intéressant et particulièrement prenant.

Les personnages sont multiples. L'auteur arrive a bien retranscrire leurs états d'esprit voire leurs états d'âmes. Ce qui leur donne beaucoup d'humanité, on s'attache à eux. Même si Tedj Benlazar est présent dans ce tome, ce n'est pas le personnage principal. Il laisse ce rôle à Réif Arno, journaliste à la Voix du Nord maladroit et à la dérive qui veut se faire un nom à tout prix. Mais, il va surtout se faire manipuler ... L'auteur en fait, malgré tout, un personnage attachant qui prend beaucoup d'épaisseur tout au long du récit.

J'ai vraiment passé un bon moment avec ce roman. Ce n'est pas forcément dans mes habitudes de lecture. Pourtant, j'ai trouvé ce récit très vivant, très dynamique et j'avoue m'être laissé prendre au jeu. Je lirais le 3ème tome : "La fabrique de la terreur" sans la moindre réserve.
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Franchement, je crois qu'il y aura chez moi un avant et un après Prémices de la chute. En effet, ce livre m'a vraiment ouvert les yeux sur les rouages des réseaux djihadistes, leurs origines, leurs modes opératoires, l'itinéraire des hommes qui les composent.
Il permet aussi de mieux comprendre le rôle des différents services comme ceux de la DST ou de la DGSE, la façon dont ils fonctionnent, leurs prérogatives, leurs dissensions.
Frédéric Paulin se sert donc de l'histoire récente pour nous plonger dans ce qu'on peut imaginer de pire et vraiment, ÇA-FOUT-LES-JETONS !!!
1996. Réif Arnotovic, dit Arno, journaliste à La Voix du Nord, a bien du mal à percer dans le métier et rêve d'un article dans Libé ou le Nouvel Obs. Une nuit, son patron le réveille et lui demande de filer à Roubaix où des policiers se font descendre à la Kalachnikov. A priori, ce sont les mêmes malfrats qui ont braqué une supérette la semaine d'avant à Wattrelos. Arno se rend sur place, prend quelques photos, mais en termes d'infos, la récolte reste maigre. Alors, il tente une visite à un petit truand qu'il connaît un peu, un certain Saïd Ben Arfa qui est en lien avec certains milieux de la banlieue lilloise. Après la fermeture du Macumba où il travaille, ledit Saïd invite Arno à faire un petit tour dans sa BM. Ce qu'Arno va apprendre est pour le moins incroyable : les gars qui s'attaquent aux supérettes de la région reviennent d'ex-Yougoslavie. Ce sont des petits Français, convertis à l'Islam, qui ont appartenu à la brigade El Moudjahidin constituée d'étrangers musulmans en provenance de différents pays. Ils ont en effet aidé l'armée bosniaque à combattre les Serbes puis, après les accords de Dayton, sont rentrés chez eux, avec leurs armes de guerre. Maintenant, ils amassent de l'argent en braquant des commerces. Leur but ? Faire leur djihad. Des noms ? Oui, Saïd en connaît : Lionel Dumont, Christophe Caze et d'autres encore.
Soudain, notre petit journaleux prend peur : et si Saïd avait trop parlé ? Et s'il allait maintenant, en pleine nuit, le zigouiller et le laisser mort sur l'autoroute ? Soudain, Saïd arrête sa BM, fait descendre Arno et l'assomme...
Si notre journaliste local a de toute évidence de quoi faire un très bel article sur ce gang de Roubaix qu'on va vite surnommer les Ch'tis d'Allah, il a le sentiment qu'il doit aussi prévenir le commandant Laureline Fell qui bosse à la DST et s'intéresse de près à ce qui se trame dans le milieu islamiste lillois. Elle-même est en contact avec un certain Tedj Benlazar qui, de Sarajevo, lui transmet des infos sur les liens entre ces gars et Al-Qaïda.
Réif Arno ne sait pas qu'il vient de mettre le doigt dans un terrible engrenage qui va le mener aux portes de l'enfer, de la Bosnie aux grottes de Tora Bora, dans les montagnes d'Afghanistan où se cache un certain Ben Laden, et ce qu'il va découvrir alors est à peine croyable, oui, à peine croyable…
Et c'est peut-être ça, au fond, le problème : qui va accepter d'accorder un peu de crédit à ce petit journaleux qui commence à avoir de très très inquiétants pressentiments ?
Comme je le disais au début de l'article, ce roman m'a fait prendre conscience de la façon dont ont émergé les réseaux islamistes. J'avoue que ma lecture des premières pages s'est accompagnée de quelques recherches complémentaires qui m'ont permis de faire des mises au points historiques et de réaliser - à ma grande stupeur parfois !- que tel fait évoqué par l'auteur N'ÉTAIT PAS de la fiction!!! Sachez aussi que le lecteur dispose d'un glossaire à la fin du roman. C'est précisé au début mais je ne l'avais pas vu !
En tout cas, ce qui m'a frappée, c'est l'immense naïveté ou l'inquiétant aveuglement des gouvernements qui - et malgré les informations abondantes dont ils disposaient - semblent n'avoir pas vu ( ou voulu voir) le pire qui se profilait à l'horizon tandis que, d'après l'auteur en tout cas, certains avaient parfaitement tout prévu. Vous me direz : comment peut-on imaginer l'impensable ? Oui, bien sûr… Néanmoins, je m'étonne de cette cécité générale, les États-Unis (la CIA) en tête d'ailleurs, certainement à cause de stupides rivalités entre services secrets (rivalités qui apparaissent bien dérisoires quand on en connaît les terribles conséquences, à savoir les attentats du 11 septembre !) La citation placée en épigraphe : « Seuls les gens normaux ne savent pas que tout est possible » de David Rousset laisse penser qu'au fond, malgré leurs agences de renseignement et leurs armées suréquipées, les grandes puissances occidentales peinent à empêcher le pire.
Et c'est bien là tout l'enjeu du roman : comment, avec les informations dont ils disposent, les états peuvent-ils agir efficacement face à un mal protéiforme, complexe et du coup presque insaisissable ?
Un roman d'actualité extrêmement documenté qui mêle habilement fiction et faits réels : une lecture passionnante, terrible, qui fait froid dans le dos...

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Dans ce roman qui couvre la période allant de 1996 à 2001 – c'est à dire la période pendant laquelle se met en place la machine de guerre qui aboutira aux attentats du 11 septembre 2001, autrement dit les prémices, littéralement, de la chute de cinq avions -, celles et ceux qui ont vécu cette période redécouvrent tout ce qu'ils n'ont pas compris alors. Et le sinistre aveuglement de ceux qui étaient censés éviter que l'on en arrive là… Dans le premier tome, on avait déjà découvert – ou redécouvert – la coupable naïveté de ceux qui ne voulaient pas croire aux liens étroits entre les services secrets algériens et les islamistes ; ici c'est toute la montée d'Al-Qaïda qui nous est décrite. Côté américain, la CIA ne transmet pas ses informations au FBI, alors qu'ils savent que des terroristes sont arrivés dans le pays. En France, la DGSE ne prête pas foi aux informations que Tedj Benlazar envoie depuis Sarajevo ; la DST n'autorise pas le commissaire Fell à pousser l'enquête…

C'est une faillite en millefeuille qui nous est présentée, alors que Réif, Tedj et quelques rares autres essayent de faire entendre leur voix. Mais les Pasqua, Marchiani et consorts occupent le devant de la scène et préfèrent faire de la petite politique dans leur coin.

Pour ceux qui étaient déjà nés à cette période et en âge de suivre l'actualité, tout cela vous rappellera des souvenirs : la guerre en ex-Yougoslavie, les moines de Tibhirine, et, pour terminer le roman, le tragique décompte de cinq avions qui s'écrasent un certain 11 septembre. Vous ne pourrez pas ne pas être saisis par ce moment quasi-unique dont chacun se souvient : impossible d'oublier où et quand vous avez appris ces attentats…

Le premier tome était déjà très réussi. Mais celui-ci m'a semblé encore plus abouti, au point que je l'ai dévoré en à peine 48h. La tension est permanente, on sent bien que l'on avance progressivement vers l'inévitable, ce qui contribue à renforcer le sentiment d'urgence que l'on ressent en lisant.

Les personnages qui étaient déjà présents dans le premier tome sont encore creusés ; ceux qui apparaissent prennent leur place. Dans le rôle du journaliste aigri, Réif Arno est tout à fait crédible ; la façon dont il accepte d'être « manipulé » en échange d'un scoop dont il espère qu'il relancera sa carrière l'est tout autant…

Bref, ces Prémices de la chute constituent vraiment un excellent livre, pour toutes celles et ceux qui veulent mieux comprendre comment on en est arrivés à la situation qui prévaut aujourd'hui…
Lien : https://ogrimoire.com/2020/0..
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critiques presse (1)
Liberation
20 août 2019
Ce roman noir passionnant est le deuxième tome d’une trilogie qui ambitionne de remonter aux sources du jihadisme.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
En France, les médias parlent des bons Bosniaques et des mauvais Serbes. Des journalistes occidentaux font de rapides passages sur place et en tirent des papiers manichéens. Et puis, que donnent à voir de ce conflit les véritables « voyages organisés » pour personnalités politiques et intellectuelles ? Les Danièle Mitterrand, Barbara Hendricks, Bernard-Henri Lévy et tous les autres avaient-ils seulement le désir de comprendre ce qu’il se passait ici ? Benlazar a appris à Sarajevo que tout n’est pas si simple.
La guerre civile a immédiatement infiltré le centre-ville, comme une vague de boue qui pénètre partout. D’abord les balles des snipers et les obus serbes qui frappaient au hasard. Puis les mafias. Celles-ci sont toujours à l’œuvre. Un conseiller de ce qui reste du consulat français a expliqué à Benlazar que sur le kilo de nourriture distribué par jour et par habitant, seuls 160 grammes parviennent effectivement à l’habitant, le reste est revendu à l’extérieur de la ville. Lorsqu’il parle avec les locaux, le Français comprend aussi que les tensions communautaires ne se sont pas tues : une haine féroce oppose les Sarajéviens, urbains, aux paysans des alentours. Pour ces derniers, la ville était le lieu de l’invasion arabe – l’est toujours.
Cette invasion arabe n’est pas seulement un fantasme de paysans arriérés.
Pour sortir de Sarajevo, Benlazar n’emprunte plus le tunnel qui passe sous les pistes de l’aéroport. Il prend un 4 x 4 du consulat. Il a pour mission de surveiller le bataillon des volontaires islamistes internationaux, basé dans la ville de Zenica.
Des habitants lui ont assuré que des Français appartenaient à la brigade El Moudjahidin. Un ancien de la brigade, moyennant quelques dollars, a balancé des noms. Benlazar a établi et transmis à la Boîte des « fiches blanches ». Ces fiches de signalisation sont au nom de Lionel Dumont, Mouloud Bouguelane et Christophe Caze. Dans ses rapports, Benlazar note aussi les effectifs de la brigade – un millier de fondamentalistes, pour la plupart bosniaques, afghans ou arabes, et quelques Européens – et leurs déplacements. À Zenica, il a appris que ces hommes étaient sous la coupe d’émirs venus du Maghreb, d’Iran, d’Egypte et d’Afghanistan. Il a tenté d’alerter la direction de la DGSE. En vain. Paris est confiante : les accords de paix avancent et, après la guerre, ces moudjahidine retourneront chez eux, à leur vie d’avant. Benlazar n’en revient pas : toujours cette même vue à court terme des renseignements français. Lui, il sent les choses, il flaire cette odeur de djihad. Et Zenica, Sarajevo, c’est déjà l’Europe.
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Il s'efforce de prendre des notes, mais rien ne le touche comme il l'aurait voulu. Il essaye d'imaginer les avenues que traversaient en courant les habitants à la merci d'un tireur embusqué là-haut dans les étages d'un immeuble. Bien sûr, devant la bibliothèque de Sarajevo entièrement détruite, il éprouve un instant d'horreur. Il est capable de comprendre la monstruosité qui a présidé à ce gigantesque autodafé; même lui sait que quand les livres brûlent, les hommes meurent.
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On ne se prépare pas à la guerre.
Parfois on s'est entraîné, parfois on s'est armé, parfois on a dressé des plans d'attaque ou de défense, mais rien ne prépare à la guerre. À l'absence d'issue, à la violence totalisante, à la peur qui vous paralyse, à l'avenir qui n'est plus que hasard. Il n'y a pas de préparation à la guerre, il n'y a que des mensonges qui poussent les hommes à y partir.
On ne se prépare pas à la guerre.
On fait face, au dernier moment.
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On ne se prépare pas à la guerre.
Parfois on s’est entraîné, parfois on s’est armé, parfois on a dressé des plans d’attaque ou de défense, mais rien ne prépare à la guerre. À l’absence d’issue, à la violence totalisante, à la peur qui vous paralyse, à l’avenir qui n’est plus que hasard. Il n’y a pas de préparation à la guerre, il n’y a que des mensonges qui poussent les hommes à y partir.
On ne se prépare pas à la guerre.
On fait face, au dernier moment.
« Stop priorité. On nous a tiré dessus, un collègue est touché. Ils sont plusieurs… » Des coups de feu claquent. Gros calibre, pas de celui que les flics ont déjà pu croiser dans les rues.
« Attention ! Ça tire encore ! Il est derrière, il est pas loin, là ! Il nous a tiré dessus encore une fois ! »
La guerre a commencé.
Des véhicules de police foncent vers le point névralgique de la guerre, là où la bataille s’est engagée. Il en vient de Lille, de Roubaix, de partout. Leurs sirènes rompent le silence nocturne dans un vacarme ahurissant.
« Il y en a un qui a un fusil à pompe ! Il nous a fait feu. Ils sont en face, je sais pas. C’est la panique, là… »
Dans la 405 de la PJ qui fonce à tombeau ouvert, le capitaine Joël Attia et le lieutenant Riva Hocq sont muets. Les yeux écarquillés, ils sont hypnotisés par la voix de leur collègue, le major Cardon, sur la bande passante. Ils sont entraînés, ils sont armés, mais ils n’ont jamais imaginé partir à la guerre. Jusqu’à cette minute.
Autour d’eux, les rues de Croix sont désertes. Les petites maisons cossues ou les grandes demeures à colombages qui défilent sont plongées dans le sommeil, contrastant avec la fureur qui se déchaîne tout près. Les façades sont seulement zébrées par la lumière du gyrophare posé sur le tableau de bord.
Attia est pied au plancher. Dans l’habitacle, la tension coupe le souffle des flics.
– Bordel ! Mais qu’est-ce qui se passe ? demande Hocq en dégainant son pistolet.
– Ils sont en train de se faire fumer, grogne Attia. Putain ! Mais ils ont quoi, comme flingue ?
Les minutes sont pareilles à des heures et les kilomètres, interminables. Le compteur indique 127 km/h. En ville, c’est suicidaire. Mais dans la confusion, Attia a désormais compris que des flics qui s’apprêtaient à contrôler une Audi se font arroser à l’arme de guerre. Philippe Gouget et Didier Cardon sont ses collègues, ses amis, il travaille avec eux depuis longtemps/
Hocq ne parle pas, elle voudrait lui dire d’aller plus vite encore. C’est étrange : la peur n’empêche pas de se précipiter vers la guerre. Les mensonges que l’on vous a répétés avant sont plus forts que la peur : la justesse de votre cause, la supériorité de la justice… Des mensonges.
Commenter  J’apprécie          10
C'est de ça que crève la presse française : recopier les communiqués de presse des institutions, des préfectures, des politicards, rappliquer le petit doigt sur la couture du pantalon chaque fois qu'un conseiller régional a une déclaration de la plus haute importance à faire. De la merde et rien d'autre.
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Vidéo de Frédéric Paulin
Après l'Algérie des années 90 dans la trilogie Benlazar, Frédéric Paulin revient dans La Nuit tombée sur nos âmes sur les événements qui ont accompagné le sommet du G8 à Gênes en 2001. Plus de 500 000 manifestants s'étaient réunis contre la mondialisation sauvage. Malheureusement, les violences policières firent aussi un mort, blessant et torturant de nombreux participants. Frédéric Paulin nous offre un roman noir, comme une leçon d'Histoire, au coeur d'un événement fondateur.
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