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Jean-Yves Masson (Autre)Uta Müller (Traducteur)Denis Denjean (Traducteur)
EAN : 9782957705450
150 pages
Editions Monts Métallifères (03/03/2023)
3.93/5   21 notes
Résumé :
Publié en 1969, "Roman géométrique de terroir" valut à Gert Jonke, alors âgé de 22 ans, d’être aussitôt reconnu comme l’un des principaux rénovateurs de la littérature de langue allemande. C’est que ce livre, jusque-là inédit en français, ne ressemble à aucun autre. Entre la satire, le roman expérimental, la fable politique et le poème, il décrit la vie d’un « village » aux mains d’une bureaucratie obsédée par l’ordre, les règles et les questionnaires.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Ce doit être la première fois que je parle ici d'un écrivain autrichien : Gert Jonke. Pas le plus connu, pas le plus publié, et les Éditions Monts Métallifères ont cette audace-là, de publier ce qui fut un premier roman pour l'auteur, aussi novateur à l'époque comme aujourd'hui. C'est le roman d'un esprit littéraire à part, plein d'humour et de dérision, jusqu'à l'absurde et au-delà, un esprit dont la créativité exacerbée n'a d'égal que son inventivité et son originalité et son envie d'expérimenter, de repousser les limites de l'expression écrite. Au-delà des normes littéraires et éditoriales classiques. Peu de titres de l'auteur ont été traduits en français alors qu'il est l'auteur de poèmes, des pièces de théâtre et des romans. Les Éditions Verdier, ainsi que Gallimard, ont, il y a quelques années, osé traduire quelques-uns de ses romans, mais les dernières datent des années quatre-vingt-dix, ce qui ne nous rajeunit pas, ni les lecteurs de Gert Jonke. Avec Roman géométrique de terroir, on sort de notre zone de confort et c'est tant mieux. 

En sus du synopsis fourni par Les Éditions Métallifères, qui avouons-le est plus que bienvenu, j'ai effectué quelques recherches sur l'auteur autrichien. Les premiers mots qui le définissent, que ce soit par le biais de Wikipedia ou des autres éditeurs de Gert Jonke, ce sont ceux d'une exigence littéraire, particulièrement pointue de l'auteur sur son travail artistique. Le cadre est posé. Roman géométrique de terroir est une parodie : de l'absurde grandiloquent de l'administration censée gérer un village, sans nom, mon village, le vôtre, celui de vos parents, n'importe quel village d'Autriche. Cela va être difficile de passer après les mots de Peter Handke, qui en parle dans un article du Spiegel, en lecture libre pour les germanophones et qui salue la performance littéraire de son homologue. 

C'est un roman assez court, soigneusement découpé en plusieurs parties indépendantes, qui ont tous pour fonction de décrire le fonctionnement dudit village : La place du village, Le village, La maison du forgeron, etc. Les choses commencent en douceur, le premier texte est relativement classique, si on omet une ou deux petites particularités typographiques, des décalages, des espaces. Il a le bon goût de nous immerger dans le ton particulier de la narration, ou aucun individu ne porte de nom puisque leur identité n'a aucune importance, seule leur fonction, celle d'élève, de maître, de forgeron, de maire, en a. À ce niveau-là, on commence à comprendre dans quelle mesure, c'est un roman de terroir, la notion de géométrie va nous apparaître peu à peu plus clairement. C'est ce qu'il y a de plus drôle, ici, c'est précisément cette géométrie du lieu, du village, de sa place, de son pont même, où chaque endroit, chaque maison ou bâtiment, chaque fonction trouve son exact opposé, justement dans un esprit de symétrie obsessionnel. De la forme même du texte même à son fond, de la structure du village. C'est là que le texte demande une attention appliquée pour ne pas passer à côté des effets de manche de l'auteur. Les textes deviennent objets que l'auteur formate et modèle à sa guise, le deuxième texte par exemple m'a fait l'effet d'un manuscrit que l'on déroule puis que l'on enroule : le discours du narrateur se déroulent normalement jusqu'à un certain moment, où l'on pourrait dire qu'elle se rembobine, la suite n'est que le retour en arrière jusqu'au point de départ initial. 

Mais quel est donc le but de la manoeuvre puisqu'il n'y a pas de genèse à proprement dit et que l'on peut prendre la tête comme le mode d'emploi du fonctionnement du village, de n'importe quel village. Peut-être pour se moquer de la bureaucratie extrême, insensée, qui gère le moindre coin, la moindre parcelle de vie publique. Rire de ces hommes qui ont besoin de règles, bêtes à l'extrême, qui complexifient la moindre tâche administrative. Car on rigole, et pas qu'un peu. Même si l'invraisemblance des situations est poussée à l'extrême, elles ne sont pas parfois sans rappeler des situations vécues, des agacements face à l'accumulation de situations burlesques, dont le summum, je crois se trouve dans l'un des derniers chapitres, qui retranscrit le formulaire d'inscription qui prend quelques pages. Sans oublier cet éventail de règlements loufoques à la logique aléatoire, qui ne représentent qu'une suite de contradictions qui donneraient à l'usager en question l'envie de pleurer ou de s'énerver, très fort, c'est selon votre caractère. J'en ai montré un extrait sur une story instagram, l'avant-dernière partie La nouvelle loi est à la fois impayable, si l'on s'arrête au formulaire invraisemblablement farfelu qu'il contient, et dons les questions n'ont pas manqué de déclencher une bonne tranche de rire ("Pourquoi ne voulez-vous pas indiquer ici pourquoi vous n'indiquez pas ici les questions auxquelles vous avez donné des réponses fausses sans l'indiquer" : essayez donc de répondre à cela !). Mais aussi, effrayant et glaçant, puisque l'affichage de nouvelles lois ne manque pas de réveiller des souvenirs qu'on aimerait mieux oublier définitivement. 

Avec le rire qu'il nous provoque, il ne faut pas passer à côté de la poésie de ces textes, dont le motif principal est la géométrie de ce village, faite d'échos, de redondance, de tous ces chapitres différents, mais dont certains sont faits de couplets qui ne cessent de revenir, comme dans La maison du forgeron. À travers le récit, un thème, revient La place du village, de façon lancinante, puisqu'après tout, c'est le centre du village, il joue le même rôle dans le roman, dans une déclinaison différente à chaque fois : la poésie ici est exploitée sous toutes ses formes. Des assonances d'aphorismes sur le temps, des énumérations, accumulations et anaphores jusqu'à l'excès, le vers ou la phrase, La place du village est vide, revient un nombre incalculable de fois, comme pour frapper le rythme, indiquer le tempo. Et le finale éblouissant, une ultime apothéose en une phrase unique et apocalyptique, du soulèvement, non pas des machines, mais de la nature et de ses éléments, de ces forces indéfinissables.

Il y a dans ce roman unique un peu des Exercices de styles de Raymond Queneau, mais Gert Jonke a poussé l'expérience de Queneau un peu plus loin, et autrement, autour de la figure d'un village. De texte en texte, on ne sait jamais à quoi s'attendre de la part de notre exubérant auteur, pas toujours sure de voir où il voulait en venir, pas toujours sure d'avoir saisi ses jeux de langue ou de mot. Mais j'ai rigolé - que faire d'autre - à cet esprit assez taquin et moqueur qui nous met pile-poil en face de toutes les absurdités du système qui nous entoure. J'imagine que lui-même, à l'écriture de ses lignes, a du prendre un certain plaisir à mettre sur pièce ses inventions aussi drôles que burlesques. C'est un roman inclassable, unique en son genre, et qui m'a personnellement la curiosité de découvrir ses autres titres, dont La mort d'Anton Webern, ou l'auteur autrichien s'adresse tour à tour à Anton Webern, compositeur autrichien et victime de meurtre, et son bourreau, l'homme qui l'a assassiné.
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Étonnant, superbe, unique, « Roman géométrique de terroir » est un edelweiss à flanc de rocher. Ce genre de roman qui attise une fierté de lecture. Original, précieux, ce livre est une pépite, un lâcher de crayons de couleur.
Une renaissance éditoriale dont on doit la chance à Monts Métallifères Éditions.
Publié pour la première fois en 1969, et « signé par un auteur de 22 ans  et remarqué par Peter Handke ».
Gert Jonke est un funambule, au sacré côté enfant libre. Un écrivain atypique, son roman le prouve.
La construction même du récit échappe à la normalité. Ici, c'est la géométrie d'un village qui est décrite voire dévoilée. Pierre après pierre, ligne sur ligne, angle et ombre, lumière et mouvement. L'écriture orpheline est un apprentissage pour le lecteur (trice). Ce style est une échappée dans un genre affirmé, original, libre, immensément libre à l'instar de Diogène.
Plusieurs degrés s'entrouvrent comme des tiroirs. Se referment mais laissent des myriades d'étincelles pour le plaisir des yeux. La typographie est une marelle entre ciel et terre. Croyez-moi, ce livre est une gageure.
« La place du village est un carré, elle touche les maisons réunies autour d'elle, rues et chemins y débouchent... »
L'incipit serait comme une image d'Épinal, mais qui prend vie. Une cloche qui annonce la récréation. Les descriptions au scalpel, un village sans nom, judicieusement, comme tous les travers de l'humanité. Gert Jonke bouscule les codes littéraires. Ici, vous avez la géométrie dans une oralité où l'imaginaire même, trace les plans. Une satire politique, dévorante de sous-entendus. La bureaucratie à outrance, les règles de bonne conduite, un village papier calque de nos idiosyncrasies.
On rit, on sourit, on est en transmutation dans cette parodie funambule.
« C'est pourquoi on considère en haut lieu que le meilleur, le plus efficace fonctionnaire est celui qui a chez lui le plus grand nombre de pots de fleurs et à son actif le plus grand nombre de cuites à l'eau de vie. Oui, c'est ça. »
Chapitre après chapitre, le village est transpercé. Rien n'échappe au regard d'aigle d'un auteur qui s'amuse à nous surprendre, nous réjouir, et nous interpeller.
Ce serait comme un manège avec des chevaux en bois qui tourne à vive allure et qui n'a jamais dit son dernier mot. L'énergie pétillante des phrases, les ambiguïtés à peine masquées, les facéties et les avertissements, « Roman géométrique de terroir » est dans un registre d'humour incomparable. Mais derrière l'artiste au nez rouge, c'est l'arbre que cache la forêt. Ce texte de renom sonne comme un avertissement.1969-2023, et pourtant il résonne dans notre contemporanéité.
« Les personnes en tenue de travail, à deux par banc, ont emporté les bancs de la place du village pour les installer bien alignés sur un pré à la sortie du village… Puis, j'ai appris qu'il y avait eu un rapport sur les oiseaux qui risquaient de revenir. Apeurés, les gens chuchotaient dans leurs maisons… Quand le chant strident du nuage des oiseaux nous enveloppe et déchiquette nos pensées. »
« Roman géométrique de terroir » est la caricature de notre monde. « La nouvelle loi » est la traversée de notre propre miroir.
C'est une fable politico-comique. La clef de voûte d'une littérature grandiose, épique et surdouée. Traduit de l'allemand (Autriche) par Uta Muller et Denis Denjean. Les Éditions Monts Métallifères sont remarquables et à suivre des yeux.
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Roman géométrique de terroir est le premier roman écrit en 1969 par un jeune auteur autrichien de 22 ans, Gert Jonke. Il est immédiatement remarqué par Peter Handke qui ne tarit pas d'éloges à son sujet.

Les éditions Monts Métallifères ont eu la merveilleuse idée de nous livrer récemment la traduction française de ce roman pour le moins original.

Deux personnes cachées dans la forge du forgeron souhaitent traverser la place du village sans être vues mais pour cela la place doit être vide et elle ne l'est pas. Alors ils observent.

Chaque chapitre relate le quotidien de ce village rural au nom inconnu et niché au coeur des montagnes par le biais d'un événement, d'un règlement (souvent absurde), de constructions, des arbres, du maire, curé, forgeron ou professeur, … Tout y est scrupuleusement organisé, réglé, contrôlé dans une rigidité presque mathématique. Mais c'est sans compter sur la nature prête à tout chambouler.

Il n'y a pas vraiment d'histoire, c'est un roman expérimental dont les différentes parties n'ont pas toutes de lien entre elles, je l'ai lu plutôt comme une succession des petites scènes. Pourtant, on ne s'ennuie pas car il y a des passages vraiment hilarants. Je retiendrai particulièrement ceux de la traversée du pont ou des chemins forestiers avec le formulaire à rallonge justifiant l'objet de la traversée et allant même jusqu'à demander « avez-vous une maladie sexuellement transmissible ? » ou encore « avez-vous donné des réponses fausses à certaines questions ? ».

Mêlant satire, fantaisie, passages plus techniques et poésie, ce roman décalé aux multiples structures qui n'hésite pas à nous gratifier de retraits, de croquis, de partition, … et qui dénonce notamment la déforestation et la standardisation est une expérience littéraire que j'ai été ravie de découvrir et que je recommande plus particulièrement à celles et ceux qui aiment se laisser surprendre.
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Le titre ne ment pas : la géométrie est effectivement omniprésente dans ce récit étonnant, pour ne pas dire extravagant bien qu'à l'écriture faussement froide et clinique. Tout y passe : la forme de la place du village, celle des briques, la hauteur de la cheminée, l'alignement des arbres le long des allées... Mais cette vision mathématique des choses est en réalité un pied de nez, un parallèle avec la rigueur bête et méchante de la bureaucratie qui gère la bourgade, et qui donne lieu aux passages les plus savoureux du livre. le formulaire décrit pour avoir le droit de traverser la forêt n'est pas sans rappeler une certaine attestation...
Donc de longs passages descriptifs, qui peuvent en rebuter certains, une écriture assez conceptuelle mais à peu près accessible, et beaucoup de drôlerie pince-sans-rire.
Je recommande à qui aime sortir des sentiers battus.
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Si vous aimez les ovnis littéraires, être surpris par vos lectures, celui-ci est très original.
Il n'y a pas de réelle intrigue, pas de personnage nommé. On se trouve dans un village, au milieu de ce village il y a une place avec en son centre un puits. Deux personnes cachées veulent traverser la place mais y renoncent à chaque fois car elles pourraient être vues.
Dans ce village il y a un maire, un forgeron, un curé. Des nouvelles lois sont promulguées par l'Etat. On découvre alors un système avec un règlement absurde. L'auteur se moque de l'administration et c'est assez drôle.
Le roman prend une couleur plus mystérieuse et fantastique lorsque le village est attaqué par des oiseaux qui mangent les murs des maisons et les détruisent.
Entre fable et satire, avec une pointe de géométrie et d'humour, il y a souvent des répétitions, des phrases qui reviennent tout au long du livre. L'auteur joue avec la langue et la typographie. Il y a parfois des schémas pour illustrer le texte et aussi la partition d'une chanson populaire. Vers la fin il y a un formulaire pour contrôler les voyageurs qui est très absurde et surtout à mourir de rire.
Un roman certes exigeant qui ne conviendra pas à tout le monde mais pour ma part je l'ai trouvé très intéressant. Il m'a permis de découvrir le catalogue des éditions Monts Métallifères basées en Saône-et-Loire, que je trouve absolument génial. J'ai envie de tout lire ! Vous pouvez d'ailleurs retrouver la présentation de l'éditeur, Guillaume Mélère, dans le replay du VLEEL de la rentrée littéraire.
A noter que ce premier roman est paru initialement en 1969 en Autriche où il a été très remarqué par Peter Handke. Il est traduit de l'allemand par Uta Muller et Denis Denjean. Gert Jonke est un auteur célèbre en Autriche où Elfriede Jelinek lui a rendu un hommage à sa mort en 2009. Il est peu connu en France mais grâce à des petits éditeurs indépendants comme les Monts Métallifères, ce roman unique arrivera peut-être jusqu'à vous !
Lien : https://joellebooks.fr/2023/..
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Il est heureux que les chemins soient sécurisés par des clôtures, car de ce fait il est plus difficile pour les taureaux, dont la robe sombre parsème la contrée de taches brunes, de barrer la route au voyageur qui veut gagner le village à pied. Aussi les voyageurs ne sont-ils pas obligés de se sauver à tout bout de chemin, au contraire, ils peuvent tranquillement laisser leur pistolet au fond du sac tyrolien et attacher leur sabre dans le dos pour plus de confort.
De temps à autre seulement, un taureau se tient derrière la clôture au bord du chemin et il te beugle dessus alors que tu veux gagner le village. Le taureau aimerait bien passer par-dessus la clôture, mais impossible, la clôture l’empêche de t’importuner et tu peux tranquillement suivre ta route jusqu’au village. Certes, derrière la clôture, le taureau t’accompagnera encore un certain temps, vous ferez un bout de chemin ensemble, séparés l’un de l’autre par la clôture ; le monstre essayera d’écarter la clôture avec ses cornes, mais le plus souvent il ne sera pas assez fort pour la fracasser. Si toutefois il devait dénicher un maillon faible dans la clôture et passer à travers avec fracas, animé par cette méchante idée : attends un peu que je t’attrape, il ne faudra pas que tu perdes ton calme parce que tu viens juste de comprendre les vilaines idée du taureau ; il n’y aura cependant pas d’autre solution que de prendre tes jambes à ton cou, de détaler et zigzaguer comme un lapin, de déjouer par ta ruse les plans du monstre. Le voyageur essayera de détacher dans son dos le sabre, d’enlever de son dos le sac tyrolien, de prendre dans le sac tyrolien le pistolet.
S’il réussit, la partie est gagnée.
Tandis qu’il agite le sabre devant le taureau, il arme le pistolet.
S’il arrive à embrocher le taureau à la manière des toréadors avant même d’avoir recours au pistolet, on pourra dire le soir venu
Tu as bien agi aujourd’hui, car tu as économisé une cartouche.
Mais si le voyageur n’arrive pas à achever le monstre avec son seul sabre, il faut absolument lui conseiller de faire usage de son arme à feu.
S’il touche le taureau au cerveau, il n’aura pas besoin de tirer d’autres coups de feu et pourra donc économiser toutes les cartouches restantes. Bien sûr, le taureau furibond continuera à foncer sur toi, mais quelques secondes après, à bout de forces, il s’écroulera, moribond.
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Feux et fourchettes, couteaux et ciseaux
il est vrai que les enfants ne doivent pas s’en approcher et même plus tard encore ils doivent les honorer pour avoir une vie pleine de bonheur à condition de
se laver les dents et cirer leurs chaussures au moins deux fois par jour,
se laver tous les soirs de la tête aux pieds, ne pas faire les choses à moitié,
respecter la démocratie,
avoir toujours un mouchoir propre dans la poche du pantalon,
ne pas abuser des avantages sociaux,
faire dès aujourd’hui ce qui demain profitera à nous tous, car dans quelques années tu auras toujours le temps pour tout le reste,
saluer toujours gentiment quand on rencontre quelqu’un et surtout quand on ne peut pas sentir ce quelqu’un,
accomplir ses devoirs de citoyen,
ne pas poser de questions inconvenantes,
obtempérer aux injonctions du contrôleur dans les moyens de transport public,
ne pas lire de romans cochons ou autres livres du même genre,
ne pas se pencher par la fenêtre en voyage mais
fermer portes et fenêtres en hiver pour que les WC ne gèlent pas,
ne pas importuner les femmes,
descendre par le sortie de devant, la main gauche obligatoirement sur la barre avant, en aucun cas sur la barre arrière,
ne pas arriver en retard,
ne pas repousser au surlendemain, ce que tu pourrais faire aujourd’hui, commencer donc dès demain midi à t’en préoccuper un peu,
ne pas utiliser les toilettes pendant l’arrêt en gare,
ne pas arriver en retard,
vérifier régulièrement si le levier de sécurité de l’arme à feu qu’on porte sur soi est bien dans la bonne position,
ne pas trainer dans des endroits louches
ne pas se sauver quand on s’entend ou se sent appelé, mais s’arrêter immédiatement et répondre au plus vite aux demandes auxquelles on peut s’attendre,
s’incliner devant les autorités le plus bas possible,
se débarrasser de sa morve en utilisant son mouchoir, ne pas renifler, et après s’être curé le nez, éviter d’essuyer le produit ainsi recueilli sur les rideaux de ses hôtes,
renoncer à toute résistance contre la violence de l’État, mais
remonter le pantalon avant de s’asseoir pour que le pli reste marqué plus longtemps,
prendre en mangeant le plus souvent la fourchette dans la main gauche, le couteau dans la droite,
ne pas pisser simplement dans le lavabo de la chambre d’hôtel, mais sortir dans le couloir et se mettre à la recherche du local généreusement et précautionneusement prévu à cet effet,
voter pour le parti auquel on appartient,
mais se mettre la main devant la bouche si on tousse ou si on baille, s’il vous plait ;
et pour finir :
ne pas trainer, ne pas s’agiter, ne pas tuer, ne fâcher personne, ne rien changer, ne pas jouir, ne pas hurler, ne pas cogner, ne pas aimer, ne pas bouffer, ne pas boire, ne pas dire non, ne pas mentir, ne pas baiser, ne pas voler, ne pas parler, ne pas brailler, ne pas se gonfler,
mais diriger, prier, brosser, confesser, juger, souffrir et chevaucher, chevaucher, chevaucher
(à travers les jours et les nuits jusqu’aux confins du continent jusqu’au bord de l’océan, où on vendra son cheval sur la plage pour disposer des fonds nécessaires pour la location d’une barque à rames apte à la navigation hauturière),
et de surcroit :
on fait, coiffe, sait, prie, voit, hoche, marche, cherche, chante, louche, court, aide, passe, sabre, prête, trie, mouche, trace, froisse, charge, donne, file, sert, mange, pend, teinte, lave, coud, brode, lime, suit, chaque fois que l’on peut.
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[…] il y a longtemps, les gens asseyaient sur les souches, on a arraché les souches, ils ne pouvaient donc plus s’asseoir sur la place du village, ils étaient en colère, plus s’asseoir, la barbe, n’importe quoi, se plaindre, pas mérité, incapables, mauvaise gestion, erreur de planification, la barbe, plus s’asseoir.

Le conseil municipal les a écoutés, a promis une solution de remplacement, décision unanime prise séance tenante, santé publique, amélioration de l’instruction, remédiation urgente, gestion des loisirs, satisfaction, embellissement, santé publique.
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Les arbres

Les arbres sont creux à l'intérieur.

Cet arbre-là, quelqu'un l'a ouvert.

Dans le creux du tronc quelqu'un a fait du feu.

De la cime s'élève maintenant de la fumée.

Mais aussi de la cime, de l'écorce noueuse et blessée de

tous les autres arbres qui par ici poussent dans un style

baroque tarabiscoté,

et dont les racines sous terre sont reliées ensemble

par des tuyaux d'argent.
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