Se réapproprier et rendre solidaire la chaîne de santé
Notre santé est prise en otage, entre autres, par les politiques des grandes firmes pharmaceutiques, dont SANOFI.
Danielle Montel, Daniel Vergnaud, Danielle Sanchez,
Thierry Bodin analysent le monde du médicament, bien essentiel à la vie, les besoins immenses non ou mal couverts, les scandales sanitaires, la recherche en panne, etc.
Elles et ils montrent que le médicament est malade du profit, de la course à la rentabilité, des politiques institutionnelles de brevet, des monopoles de production, de l'entrave à la diffusion mondiale des connaissances… Les auteur-e-s s'attardent aussi sur la distribution des médicaments, la (non)-transparence des prix.
Elles et ils considèrent, à juste titre que « Un médicament jugé et éprouvé comme utile doit être reconnu comme un impératif social de santé publique ».Elles et ils démontent la machinerie de « Big Pharma », suppressions d'emploi, externalisations, fermetures des capacité de recherches et de productions, déréglementation, priorité à la rentabilité, etc.
Une partie est consacrée à l'auto-médication et à la « télésanté » et la « télémédecine », aux patient-e-s devenu-e-s client-e-s, et leurs multiples dangers.
Mais les auteur-e-s n'en reste pas à l'analyse, aux constats. Elles et ils interrogent les possibles, la maîtrise sociale des médicaments, les maillons d'une santé publique affranchie des mécanismes de la rentabilité financière. « La riposte vise à déconstruire concrètement ce discours qui parodie l'intérêt général. Déconstruire, c'est aussi prendre appui sur les valeurs qui aujourd'hui résistent pour faire du commun, comme par exemple l'exigence portée dans les luttes de sortir le médicament de la logique du marché et de redonner sens au travail ».
Elles ils proposent des pistes, entre autres, autour de l'appropriation et l'orientation par la société de la recherche-production-distribution des médicaments, de l'orientation de l'économie « selon les réponses diversifiées à apporter aux exigences humaines et écologiques », de la conquête d'espaces non marchands, de la dé-privatisation des connaissances, du refus de breveter tout ce qui touche à la vie, etc.
Danielle Montel, Daniel Vergnaud, Danielle Sanchez, Thierry Bodinconsidèrent à la fois que « la chaîne de la santé, qui inclut le médicament, doit être considéré comme un service public accessible à tous » et que « les biens communs ne doivent pas être soumis à la loi du profit ». Les auteur-e-ssoulignent les différences entre étatisation, et appropriation sociale ou appropriation par la société.
La préface de Pierre Zarka, « Tout n'a pas été essayé » approfondit les questionnements sur l'appropriation sociale. (Voir aussi la préface à
Karl Marx /
Friedrich Engels : Propriété et expropriations. Des coopératives à l'autogestion généralisée).
A commencer par « Afin de ne pas demeurer fragmentées et réduites à l'impuissance, les colères ont besoin d'affronter la question de la propriété et du pouvoir qui lui est lié, la cascade des comportements de dominations, de discriminations, de harcèlements et de machisme, qui caractérisent ce que l'on appelle pudiquement le management » ou « Aborder la nécessité d'appropriation collective est un levier pour toute prétention à poser en termes immédiats la question du pouvoir ». le préfacier insiste aussi sur la coopération, la capacité des individu-e-s « de produire leur propre devenir commun », la richesse comme valorisation de « l'apport social de chacun à travers son activité ». Il s'agit de maîtriser ensemble/collectivement les processus productifs, d'en faire une « question politique rassembleuse » et de chercher des solutions « au-delà de ce qui est trop vite considéré comme évident et enferme le possible dans un carcan mental ».
Délibérations collectives des citoyen-ne-s, éclairées par les connaissances accumulées, dégagement des intérêts communs aux salarié-e-s et aux usager-e-s, prise en compte des contradictions, des tensions entre intérêts possiblement divergents, choix démocratiques et solidaires…
Par ailleurs, contre la prétention des experts de toutes sortes, à dire le savoir et de confisquer les débats politiques et/ou démocratiques, le préfacier et les auteur-e-s, dont trois salarié-e-s d'entreprises pharmaceutiques, soulignent « nous considérons le savoir comme un puzzle, qu'il n'y a pas de pratique sociale qui ne produise de la connaissance » ou « L'expertise a néanmoins besoin de changer de statut. Elle doit elle-même accepter la confrontation et la critique. Car ce qui le plus souvent fait défaut est la connaissance du travail d'élaboration des salariés et des citoyens organisés comme un élément essentiel à prendre en compte dans cette confrontation ».
Et pour finir deux citations :
« Construire du nouveau, c'est désobéir à l'ordre actuel »
« Il ne s'agit pas seulement de résister mais aussi de commencer à tracer les voies du futur »
Un livre qui n'en reste pas aux luttes ou aux dénonciations, mais qui trace des perspectives. Non vraiment, tout n'a pas été essayé.
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