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EAN : 9782370490308
460 pages
La Volte (15/09/2016)
3.73/5   22 notes
Résumé :
Ceci est l’histoire d’un monde qui pourrait être le nôtre. Depuis l’instant où apparaît la vie sur cette planète bleue, dans la moiteur des mares et des étangs, jusqu’au moment où le feu nucléaire menace d’emporter la civilisation qui a fini par se développer, voici contée l’histoire de Shikasta, jadis riche et florissante, désormais stérile, inhospitalière, « blessée à mort » – mais qui ne demande qu’à renaître.
Shikasta ? Un monde sur le berceau duquel se s... >Voir plus
Que lire après Canopus dans Argo 01 - Archives : ShikastaVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Mon Avis : J'avoue, je me suis laissé tenter par ce roman il y a un an environ, c'était lors des Utopiales 2017. En effet le roman était mis en avant dans la librairie du festival et il avait attiré mon regard. Je me suis rapidement retrouvé intriguer par l'idée de voir ce que pouvait proposer une autrice, Prix Nobel nobel de littérature en 2007, en offrant ici un roman annoncé comme de Science-Fiction. Surtout que Wikipédia l'annonçait comme une « conteuse épique qui scrute une civilisation divisée » si avec cela il n'y a pas de quoi faire quelque-chose en SF. Par curiosité j'ai donc décidé de le faire entrer dans ma PAL et, il y a peu, de lui laisser enfin sa chance pour me faire mon avis. Concernant la couverture, elle est très sobre, loin de ce qui se fait généralement dans l'Imaginaire.

Ce roman est en fait, d'une certaine façon, l'ancien testament écrit et imaginé par Doris Lessing. On découvre ainsi qu'il existe plusieurs civilisations dans l'espace, certaines qui sont vouées au bien tandis que d'autres sont vouées au mal. Canopus et Sirius se sont ainsi lancés dans le projet scientifique de suivre, aider et influer sur l'évolution d'une planète aux ressources exceptionnelles : Shikasta. Bien entendu Shikasta est la représentation fictive notre planète Terre et rapidement on va se rendre compte que tout ne va pas se passer comme prévu, qu'une influence néfaste va obliger à modifier les plans mis en place. En effet un désalignement des planètes a permis à Shammat, le Mal, d'accroitre son ascendance sur la Planète Shikasta. Ainsi, l'Humanité se retrouve chassé de l'Eden mis en place et va devoir apprendre à se débrouiller. Franchement il y avait un certain potentiel dans l'idée de départ, de vouloir construire quelque-chose de vaste, mélangeant les différents genres de l'Imaginaire pour y apporter une réflexion sur notre monde, notre évolution, notre société. Certes le genre qui sert comme base les textes religieux pour y amener un background plus SF a déjà été vu plusieurs fois, mais il y avait du potentiel.

Pour autant, et ceux qui me suivent sur les réseaux sociaux le savent déjà, j'ai finalement abandonné ce livre à un peu plus de la moitié, ce qui ne m'était pas arrivé depuis des années. Je n'ai tout simplement jamais pu franchement entrer dans le récit. Alors, je vais tenter de vous expliquer pourquoi, mais tout d'abord je voulais aussi rajouter un point. Avant je poussais jusqu'au bout ma lecture, je lisais tout car de rares fois la fin pouvait rattraper un début qui ne m'a pas accroché. J'ai même lu dans dans nombreuses chroniques US, après avoir abandonné, que le dernier tiers de Shikasta était meilleur, mais voilà je pense ne plus avoir la patience pour terminer un livre qui ne m'accroche pas. Ici, clairement, au bout de la moitié je n'y arrivais pas, c'était trop laborieux et je m'ennuyais. Je ne noterai pas non plus ma chronique, n'ayant pas terminé ma lecture je ne me vois pas de mettre une note. Même si c'est vrai la note est un ressenti, plus une valeur de plaisir de lecture que de chiffrer la valeur d'un livre, je ne me vois pas pour autant de noter ce roman non terminé.

Surtout que, je ne le nie pas il y a de bonnes idées dans ce roman, principalement dans les nombreuses réflexions que soulève Doris Lessing. Il est dur de parler des point que cherchent à soulever l'autrice tant ils sont nombreux, mais d'une certaine façon elle cherche à soulever un miroir sur nous-même, sur note histoire pour nous rappeler, nous dévoiler le meilleur de nous mais aussi, surtout le pire. Ainsi que ce soit dans la haine, le colonialisme, la capacité que l'on a à s'entredéchirer, se détruire, à vouloir nous trouver des différences pour nous attaquer, faire la guerre, elle brasse de nombreux sujets. J'y ait ainsi retrouvé le côté qui scrute une civilisation divisée. Alors après, on pourrait lui reprocher un côté très moralisateur, principalement dans la vision donné, mais franchement dans la façon dont est construit le récit il y a une certaine logique à ce que ce soit présenté d'une telle façon. Cela amène aussi, d'une certaine façon un sentiment de coup de poing qui peut marcher. Ainsi il y a certains passages qui sont vraiment prenants et marquants et qui se dégagent tout de même de ce livre. Pour autant ces passages sont rares et surtout l'idée du regard extérieur neutre a très vite ses limites, je trouve, et entrave certaines réflexions, pire donne l'impression d'être l'inverse de ce que cherche l'autrice.

Ainsi, en reprenant la bible comme base de son roman, on se retrouve avec certains passages ou « tuer » pour le bien en devient limite nécessaire. Attention on ne parait pas être dans des situations ou il n'y a pas d'autres choix possible ou autres explications qui pourraient tenter d'amener une justification. Simplement les fameuses forces extra-terrestres, vu qu'elles sont supérieures et savent ce qui doit être fait, ont le droit d'anéantir à coup de vaisseaux des gens. Je doute que Doris Lessing voulait laisser transparaitre une telle idée, ou peut-être que par la suite il y avait une tentative d'explication, mais voilà le manque de développement à ce moment-là du récit rend l'ensemble dérangeant. Ensuite, il parait se dégager une sorte de binarité dans le récit et les idées développées, comme si tout devait obligatoirement être manichéen ce qui est quand même dommage. J'avais ainsi par moment clairement l'impression de relire justement la bible, ou Dieu est simplement remplacé par des puissances extra-terrestres, avec son manque de complexité, son besoin par cela de vouloir accentuer la morale du récit, nous rappeler que nous sommes jugés par une force supérieure ce qui, désolé de le dire, de mon côté me bloque. Je ne dis pas que le bien est le mal sont des concepts inintéressants, mais tout réduire à de tels concepts devient vite perturbant, car comment classer des meurtres au nom du bien.

Surtout, ce qui m'a le plus bloqué avec ce livre c'est tout simplement la plume ainsi que sa construction. Doris Lessing sait manier les mots, je n'en doute pas, comme je l'ai dit il y a parfois de très bons passages, mais j'ai trouvé qu'ici elle en faisait trop. Franchement je me suis clairement ennuyé durant plus des trois quarts de ce que j'ai lu. Elle parait ainsi aligner les mots les uns derrières les autres sans jamais arriver, tout du moins pour moins, à créer une image, un ressenti. J'avais l'impression d'avancer de façon laborieuse, ennuyeuse dans un univers qui peinait à se dévoiler. À l'inverse d'autres auteurs qui oublient le précepte « montre, ne le dit pas », ici l'autrice cherche tellement à montrer, sans que personne ne lui dise à un moment STOP, qu'elle étouffe le lecteur d'informations pas toujours utiles et le perd. Car oui, j'ai aussi eu l'impression que de nombreux passages n'apportaient rien et donnaient l'impression d'être présents que pour montrer qu'elle sait écrire. Ensuite je me suis senti perdu dans une construction qui donne l'impression d'une certaine incohérence, présenté comme des chroniques qui n'en sont pas et mélangeant différentes constructions. Enfin autre point, vous devez le savoir, je suis un lecteur de SF qui aime une certaine cohérence, ainsi ici on parle de fluide, de voyages spatiaux, de zones et autres sauf que tout ce background de SF n'a d'autres intérêts que de soutenir le récit. Alors, comme je l'ai dit avec Chroniques Martiennes de Bradbury, parfois ça fonctionne, mais ici ce ne fut pas le cas, maintenant cela peut venir aussi du fait que le reste m'ait laissé de marbre.

Voilà les différentes raisons qui ont fait que j'ai préféré abandonné ce roman à un peu plus de la moitié. Je me doute qu'il doit exister un lectorat pour ce genre de récit, je n'en faisait tout simplement pas parti. Maintenant à vous de voir si vous vous laissez tenter ou pas.
Lien : http://www.blog-o-livre.com/..
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J'ai connu Doris Lessing avec son roman Les grand-mères, un livre que j'avais apprécié. J'ai découvert qu'elle avait également écrit de la science-fiction à l'occasion de la réédition de ce premier tome de Canopus dans Argo : archives. Ce qu'il faut savoir de cette saga, c'est que les tomes peuvent tout à fait être lus indépendamment les uns des autres.
Shikasta est un roman présenté comme des archives : Johor, le personnage principal, enseigne à ses étudiant·es l'histoire de la planète Shikasta, comment Canopus l'a prise sous son aile, a fait en sorte que les créatures shikastiennes évoluent dans le bon sens, etc. En ouvrant ce livre, j'ai eu un doute : n'allait-ce pas être un peu lourd à lire ? Finalement, au bout de quelques pages, j'étais déjà convaincue que ça allait me plaire, à commencer parce que le récit est à la première personne et parce que l'histoire fait sacrément écho à ce que nous vivons. Alors oui, Shikasta c'est la Terre, mais le livre a été publié à la fin des années 1970 et j'ai été surprise de constater à quel point, aujourd'hui encore, tout ce qui y est racont continue de faire écho. Pour être brève, ce que nous conte Johor, c'est l'histoire de la Terre/Shikasta. Il explique comment la planète s'est retrouvée en train de s'éteindre, comment Canopus et Sirius ont fortifié les Shikastiens, etc. C'est une histoire passionnante, qui se déroule sur des millions d'années, que l'on découvre alors. Puis, à peu près au milieu du roman, la narration se pose – tout en gardant un assez bon rythme – : Johor arrive au vingtième siècle, la planète va de mal en pis. Ce n'est alors plus l'émissaire qui nous parle des événements : ce sont les témoignages d'individus vraisemblablement shikastiens. Mais je m'arrête là concernant le récit pour vous laisser le plaisir de le découvrir par vous-mêmes.
Ce qui m'a surprise, c'est la grande présence de l'eugénisme dans ce roman. Tout en restant neutre, Doris Lessing évoque cette pratique tout au long du roman car c'est ce que fait Canopus sur Shikasta : renforcer les habitants de la planète, les améliorer afin que la planète survive selon leur idéal. Mais voilà, c'est bien de l'idéal de Canopus dont il est question et, comme c'est souvent le cas, ce sont les vainqueurs qui jugent de ce qui est bien…
Lire Shikasta, c'est lire une oeuvre dense, c'est voyager à travers le temps, découvrir l'Histoire de la Terre sous le prisme de la science-fiction, mais c'est aussi s'interroger sur beaucoup de choses. La narration est bien trouvée, mêlant le monologue à des rapports, des témoignages, des lettres… Je ne me suis pas ennuyée durant cette lecture malgré un intérêt s'effilochant légèrement sur la fin (si peu, avant que qu'un regain ne surgisse!).
Shikasta n'est pas un roman de SF facilement abordable, il faut être dans de bonnes dispositions pour le lire. En effet, le texte est riche et il faut s'immerger dans ce monde qui est le nôtre sans être le nôtre. J'ai tâtonné les premières pages pour ensuite plonger entièrement dans cette histoire. Et si c'est une bonne découverte, je sais que je ne m'attaquerai toutefois pas aux autres livres dans l'immédiat ; j'en lirai, peut-être pas tous, pas tout de suite, mais j'en lirai.

Finalement, je terminerai en disant que, si ce livre vous tente, ne serait-ce qu'un petit peu, et même si vous avez quelques doutes comme j'ai pu en avoir, allez-y, je vous le recommande ! En revanche, si de prime aborde il ne vous attire vraiment pas, alors ce roman n'est pas fait pour vous et je vous invite à passer votre chemin.
Lien : https://malecturotheque.word..
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Comment parler d'une telle traversée ? D'une telle immensité.
"Shikasta est à la fois une brève histoire du
monde, un brûlot contre les instincts mortifères de
l'humanité, une ode aux beautés qu'on trouve sur
cette Terre et un hymne à la musique des sphères." (Time)
Shikasta de Doris Lessing ouvre le cycle de Canopus dans Argo, qu'elle considérait comme son grand oeuvre. le sous-titre de Shikasta est "Documents personnels psychologiques et historiques relatifs à la visite de Johor (George Sherban) émissaire de rang 9 le 87e de la période des derniers jours". Elle écrit Shikasta ("brisé" en persan) au moment de sa conversion au soufisme en 1979 et le dédie à son père. Il s'agit d'un récit sous forme des rapports d'un émissaire de Canopus, autrefois Terrien, de toute notre histoire biologique de la Genèse à la 3ème Destruction (guerre mondiale). Un livre de portraits et de trajectoires biographiques complexes, tragiques, passionnantes, courageuses aux prises avec un monde toujours en tension avec le mal. Il culmine par un procès mondial (dans une Grèce ravagée et à la demande des représentants du continent asiatique) à l'encontre du colonialisme et de l'écocide menés par des modèles de civilisation viciés en leur coeur même. C'est aussi un livre ancré dans le sol et tourné vers les étoiles. On en sort ébranlé en son for intérieur, et aussi réconforté dans la puissance de renouvellement de la littérature. C'est immense. Doris Lessing a inventé là une SF hors champs balisés, proche des grands récits eschatologiques.
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J'ai tout donné, j'ai largement dépassé les 200 pages, presque la moitié du livre.
Je vais continuer de lire, par-ci par-là, une chronique à la volée mais il est clairement impossible de le lire comme un roman d'une traite !

Ce n'est pas ennuyeux en soit, c'est juste d'une platitude extrême. J'ai tant aimé la plume de Lessing dans "The fifth child" que je voulais découvrir sa version SF de la conquête de la terre. J'ai même acheté une des suites, le t3, c'est dire. Je serai pugnace, mais dans le temps.

Que dire sur l'histoire, il y a Sirius et Canopus les gentils ? Et le méchant dont j'ai lamentablement oublié le nom. Bref du manichéen de base.

J'ai trouvé fort intéressant les descriptions des deux peuples autochtones qui vivent en harmonie et évoluent d'ailleurs ensemble en se mêlant : les grands géants et les petits insulaires "noires".
Canopus envoie ses émissaires pour étudier et éduquer clairement les peuples et leur prêcher la bonne parole divine, une belle évangélisation du monde, comme dans la bible.
Ce livre est le nouveau testament vu par Lessing donc.

L'autre partie du bouquin se concentre sur les rapports individus dit terroriste qui se suicident tous à la chaîne. D'où viennent-ils, pourquoi se sont-ils tués, comment étaient leurs parents. C'était très constructif à lire, comme un profiler étudierait ses meurtriers en série !

Voilà tout pour moi, passez votre chemin donc si la hard SF sociologique ne vous charme pas ;)
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SHIKASTA de DORIS LESSING
C'est par l'intermédiaire du récit de différents émissaires à différentes époques que l'on découvre l'histoire de SHIKASTA (ex Rohanda). Elle a été ensemencée il y a longtemps par les habitants de la planète Canopus qui vit en paix dans le système stellaire avec Sirius mais en lutte avec une autre planète, Putteria. de cette dernière des fuyards ont migré sur Shammat qu'ils ont colonisé. Sur ce fond relationnel, LESSING développe les méthodes d'ensemencement des planètes conquises avec des géants de plusieurs mètres de haut qui vont assister des indigènes dans leur évolution, mais pour une raison inconnue, alors que tout a fonctionné durant des siècles, les indigènes vont tomber malades, devenir fous.
Une série de livres surprenants de la part de cette auteure prix Nobel, de la pure SF bien qu'on parle peu de technologie mais beaucoup de psychologie dont on peut voir par le biais de SHIKASTA, une histoire de la Terre.
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critiques presse (1)
Telerama
28 septembre 2016
Si le livre, constitué souvent de rapports des émissaires de l'empire de Canopus envoyés sur Shikasta, peine parfois à laisser vivre ses personnages, il n'en est pas moins d'une intelligence et d'un souffle rares.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
JOHOR communique :
J’ai été envoyé en mission sur de nombreuses planètes colonisées par nous. Je suis habitué aux crises de toutes sortes. Je me suis trouvé au coeur de situations critiques menaçant l’existence d’espèces entières ou de programmes spécifiques soigneusement mis au point. J’ai su plus d’une fois ce que c’était que d’accepter l’échec, final et irréversible, d’une tentative ou d’une expérience portant sur des créatures possédant le potentiel de développement rêvé, attendu. Et puis plus rien, point final, les roulements de tambour s’espacent et se taisent. Silence…
Mais l’aptitude à faire la part du feu exige une détermination bien différente de la patience têtue nécessaire pour résister à l’usure, à la perte insidieuse de substance sur des siècles et des millénaires, avec, au bout du tunnel, une pauvre petite lumière d’espoir.
Le désarroi présente différents degrés et qualités. À mon humble avis, tous ne sont pas inutiles, et il me semble que la disposition d’esprit d’un simple employé mérite d’être consignée.
Je ne suis qu’un membre subalterne de l’Armée des Travailleurs et, en tant que tel, suis tenu de faire ce que l’on m’ordonne. Ce qui ne signifie pas que je n’aie pas le droit, comme tous les autres, de crier : « assez ! » mais des règles invisibles, non écrites, tacites l’interdisent. Ce que ces règles symbolisent, en fait, c’est l’Amour. Du moins, c’est ainsi que je le ressens et beaucoup d’autres avec moi. Il y en a, dans notre Service Colonial, qui, personne ne l’ignore, pensent autrement. L’un de mes objectifs, en rédigeant des pensées qui sortent peut-être du cadre de la stricte nécessité, c’est de justifier ce qui représente encore, après tout, à Canopus, l’opinion générale concernant Shikasta. À savoir que celle-ci mérite bien le temps et les efforts que nous lui consacrons.
Dans ces notes, j’essaierai de rendre les choses aussi claires que possible. Car il en viendra d’autres, après moi, qui étudieront ce rapport, comme j’ai moi-même si souvent étudié les rapports de ceux qui m’ont précédé. Il n’est pas toujours possible de connaître, au moment où l’on consigne un événement ou un état d’esprit, l’effet que celui-ci produira sur un individu, disons dix mille ans plus tard.
Tout change. C’est la seule certitude que nous ayons.
De toutes mes ambassades, ma première, celle qui me conduisit sur Shikasta, fut la pire. Je peux dire, en tout honnêteté, que je n’y ai pas repensé jusqu’à aujourd’hui. Je n’en avais pas le coeur. S’attarder sur un malheur inévitable, non, vraiment, cela ne sert à rien.
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Par exemple : Adaptez-vous aux différents niveaux de vie qui forment, autour de la planète, des enveloppes concentriques – six en tout – dont aucune n’exige de vous un effort particulier car vous ne ferez que les traverser – aucune, sauf la dernière Enveloppe, ou Cercle, ou encore Zone : la Zone Six, qu’il vous faut étudier en détail puisque vous devez y demeurer aussi longtemps qu’il le faudra pour accomplir les tâches qui vous ont été confiées, celles qui ne peuvent être entreprises qu’en passant par la Zone Six. C’est un endroit terrible, plein de dangers, auxquels l’on peut cependant faire face, comme le prouve le fait que, pas une fois, nous n’avons perdu un seul de nos émissaires parmi les centaines et les centaines que nous y avons envoyés, même parmi les plus inexpérimentés. La Zone Six peut soumettre ceux qui n’y sont pas préparés à toutes sortes d’mbûches, d’entraves, de fatigues. Ceci vient de ce qu’une forte émotion caractérise la nature de ces lieux, une « nostalgie » comme on l’appelle là-bas, c’est-à-dire un désir de ce qui n’a jamais existé, tout au moins sous l’aspect ou la forme imaginée. C’est le royaume des chimères, des fantômes et des esprits, de l’ébauche et de l’inachevé ; mais si vous êtes sur vos gardes et restez vigilant, rien ne vous résistera.
Par exemple : Il est recommandé de prendre le temps de sa familiariser avec les diverses perspectives permettant d’observer les créatures de Shikasta. Vous trouverez toutes les dimensions possibles à Shikasta dans les pièces 1 à 100 de la Section 31, de l’électron jusqu’à l’Animal Dominant. La fascination qu’exercent ces différentes perspectives constitue de réels dangers. À l’échelle de l’électron, Shikasta apparaît comme un espace vide où vibrent imperceptiblement des formes floues : infimes traces de substance, minuscules impulsions isolées les unes des autres par de vastes espaces. (Le plus grand bâtiment de Shikasta s’effondrerait si l’on enlevait les espaces qui maintiennent ses électrons séparés et l’on ne trouverait plus à sa place qu’un fragment de substance gros comme un ongle de Shikastien.) La gamme des sons est telle sur Shikasta qu’il vaut mieux ne pas s’y exposer sans avoir subi un entraînement préalable. Quant à ses couleurs, elles vous tueront si vous n’y êtes pas préparé.
Bref, aucune des planètes que nous connaissons ne présente un degré de vibrations aussi intense et aussi agressif que Shikasta, et une trop longue exposition à ces vibrations peut fausser et corrompre le jugement.
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Ce qu’il nous fallait, très précisément, c’était hisser Rohanda au niveau voulu en vingt mille au lieu de cinquante mille ans.
Comme de coutume, nous fîmes des appels de volontaires dans toutes nos colonies, et notre choix se porta sur une espèce issue de la Colonie 10, qui s’est, depuis, révélée remarquablement apte au développement symbiotique.
Bien sûr, une espèce doit posséder des structures mentales particulières pour pouvoir ne serait-ce qu’envisager de telles propositions : disons qu’il ne peut s’agir que d’une race d’aventuriers ! S’il est possible de déterminer les grandes lignes d’une évolution prévisible, il est, par contre, toujours impossible de prédire exactement ce qu’il arrivera lorsque deux espèces seront mises en symbiose, car il y a trop d’inconnues. On ne cacha pas aux volontaires que Rohanda était, par nature, imprévisible, particulièrement soumise au hasard et au changement. Surtout, on ne savait pas comment s’harmoniseraient leurs espérances de vie respectives. En cas d’échec, si les normes actuelles de Rohanda l’emportaient, cette entreprise bénévole pourrait bien être considérée comme très proche d’un suicide ethnique.
Contentons-nous de dire pour l’instant qu’à ce stade et à cette époque, l’espèce était robuste et saine, vive et intellectuellement adaptable ; elle avait gardé le souvenir génétique de sa participation à des expériences de ce type.
De petits groupes de volontaires de la Colonie 10 furent implantés avec succès sur Rohanda, en divers points de l’hémisphère Nord. Ils étaient un millier en tout, mâles et femelles, et presque tout de suite, c’est-à-dire en moins de cinq cents ans, il fut évident que cette expérience serait un remarquable succès.
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[Pendant les transmissions correspondant à ce stade de son ambassade Johor, croyant (non sans raison) que notre Service Colonial ne se fait pas toujours une idée exacte de certaines difficultés locales, nous a fourni des informations factuelles que nous n’avions pas réclamées. La vision à long terme de l’entretien et du développement d’une planète ne nécessite ni ne réclame la sympathie ou l’empathie de visions immédiates et partiales. Cependant, on ne réside pas sur Shikasta (deux des Archivistes responsables de cette note ont eux-mêmes subi l’expérience shikastienne) sans éprouver de puissantes émotions dont il faut se défaire en partant. Nous soumettons aux étudiants ce document, ainsi qu’un autre, persuadés qu’ils les trouveront utiles à plus d’un titre. Les Archivistes.]
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Vidéo de Doris Lessing
Chaque mois, un grand nom de la littérature française contemporaine est invité par la Bibliothèque nationale de France, le Centre national du livre et France Culture à parler de sa pratique de l'écriture. Javier Cercas, auteur de Terra Alta qui lui valut en 2019 le 68e prix Planeta, est à l'honneur de cette nouvelle séance du cycle « En lisant, en écrivant ».
QUI EST JAVIER CERCAS ? Né en 1962 à Ibahernando, dans la province de Cáceres, Javier Cercas est un écrivain et traducteur espagnol. Après des études de philologie, il enseigne la littérature à l'université de Gérone, pendant plusieurs années. En 2001, son roman Les Soldats de Salamine – sur fond de Guerre civile espagnole – remporte un succès international et reçoit les éloges, entre autres, de Mario Vargas Llosa, Doris Lessing ou Susan Sontag. Ses livres suivants, qui s'inspirent souvent d'événements historiques et de personnages ayant réellement existé, rencontrent le même accueil critique et sont couronnés de nombreux prix : Prix du livre européen (2016), Prix André Malraux (2018), Prix Planeta (2019), Prix Dialogo (2019). Son oeuvre est traduite en une vingtaine de langues. Il est également chroniqueur pour le quotidien El País.
De Javier Cercas, Actes Sud a publié : Les Soldats de Salamine (2002), À petites foulées (2004), À la vitesse de la lumière (2006), Anatomie d'un instant (2010), Les Lois de la frontière (2014, prix Méditerranée étranger 2014), L'Imposteur (2015), le Mobile (2016), le Point aveugle (2016), et le Monarque des ombres (2018). Son nouveau roman, Terra Alta, paraîtra en mai 2021.
En savoir plus sur les Masterclasses – En lisant, en écrivant : https://www.bnf.fr/fr/master-classes-litteraires
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