La Terre, celle que les Grecs appelaient Gaïa, m'a toujours séduit. Oserai-je avouer que c'est à Gaïa que je dois ma première expérience amoureuse ? A l'age de douze ans, un jour d’été, je ressentis le besoin impérieux de faire l'amour. Dans la lande bretonne, je creusai un trou dans l'humus, j'y enfouis mon sexe, j'y imprimai de brusques saccades et au moment où j’ensemençai la terre, un éclair de lumière me passa devant les yeux, le sol trembla et je m'effondrai, enivré par les odeurs de bruyère, de joncs et de genets.
Depuis cette union symbolique, je sens que Gaïa m'aime, qu'elle me protège, me prévient. Chaque fois que je dus me rendre en Inde, par exemple, il y régnait une chaleur écrasante, l'air était chargé d'odeurs nauséabondes, la terre tremblait. C’était Gaïa qui soufflait:
__Rebrousse ton chemin, tu n'es pas d'ici. Il y a d'autres pays.
En revanche, lorsque je mis pour la première fois le pied sur le sol égyptien, la terre vibra comme pour me dire:
__tient te revoilà enfin !
La même chose se produisit en Guadeloupe, au Japon, au Mexique.
La Terre est une mère pour moi. C'est elle qui m'a donné vie. Ce lien que beaucoup de gens ont perdu, je l’éprouve dans la moindre fibre de mon corps. Je ressens les forces telluriques, les nœuds où s'exercent les forces du sol, les endroits où le dois me rendre et ceux dont je dois me tenir éloigné. Si je marche avec des amis en foret, et que nous nous perdons, je montre d'instinct la bonne direction. Où que j'aille, Gaïa guide mes pas .
Tout en suivant le match d'un œil distrait, je priais fidèle à mes habitudes.
Brusquement, la pluie s’arrêta. Un immense arc-en-ciel déchira les nuages et enjamba le ciel au-dessus du champ de courses, devant moi, arche d'alliance entre le ciel et la terre.
Comme je contemplais ce spectacle avec ravissement, je me sentis projeté face à une lumière éblouissante, très haute dans le cosmos. Le monde autour de moi avait disparu. Il n'y avait plus de footballeurs sur le terrain. J’étais seul face à cette lumière prodigieuse qui irradiait la Bonté, la Vérité, la Justice et me communiquait cette chose incroyable, impensable, que je ressens encore aujourd'hui jusque dans la moindre de mes fibres; l’éternité. J'ai été éternel dans l’éternité. Je connus cette joie puissante, sublime, ineffable qui abat les barrières, je fus dans tout l'infini de mon être. J'éprouvais en moi l'unité du Cosmos et le déploiement en toutes chose de L'Energie Suprême.